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Ignorer la courbe de deuil : une attitude kamikaze !

Ignorer la courbe de deuil : une attitude kamikaze !
Ignorer la courbe de deuil : une attitude kamikaze !

/Manager le changement

Mais pourquoi ? Pourquoi alors qu’on connaît tous la courbe de deuil, on l’évite en tant que manager ? Par peur ? Peut-être… Parce qu’elle est compliquée ? Sûrement pas ! Par pression du résultat ? C’est possible… En tous cas, ce qui est sûr c’est que l’évincer nuit fortement à la santé de vos équipes.

Alors comment faire pour prendre en compte et animer efficacement la courbe deuil ?

Pour voir une explication de la courbe de deuil appliquée au management, cliquez ici.


Pourquoi est-ce difficile de respecter la courbe de deuil de ses collaborateurs ?

D’abord, en tant que manager, on est souvent pressé par le temps et par l'urgence du résultat. Il faut aller vite et on aimerait aller droit au but, prendre des raccourcis.

Par ailleurs, il y a souvent un décalage de maturité par rapport au projet : si le manager a pu donner son avis sur le projet en amont, cela aide. Et même si on n’a pas du tout eu la main sur le projet, on en a été informé plus tôt que ses collaborateurs donc on a eu davantage de temps pour faire son propre deuil. Du coup quand le projet est annoncé officiellement aux équipes, on leur demande de s’engager tout de suite en oubliant parfois le temps de deuil qui nous a été nécessaire.

De plus, le sujet de l’acceptation du changement étant fortement émotionnel, on a peur de s’y aventurer. Ce n’est pas une solution mathématique à appliquer, il n’y a pas de recette miracle car chaque cas est différent, bref on navigue à vue.

Enfin il y a le côté : « Non mais moi je n’ai pas envie de me faire reprocher par mes équipes que je me prends pour leur psy ».


Mais au fait, la courbe de deuil késako ?

En une phrase, c’est une représentation des différentes phases émotionnelles d’un individu face à un changement.

C’est un outil souvent utilisé par les consultants mais aussi les DRH, les managers, et même les salariés dans l’entreprise. N’avez-vous jamais entendu quelqu’un dire : « Jean est assez ronchon en ce moment mais c’est à cause de la mise en place du nouvel ERP, il n’a pas encore fait son deuil » ou « Ah oui par contre Flavie, elle, a rapidement fait son deuil : elle s’est inscrite directement aux formations ! »

À l’origine, c’est un modèle issu de la psychologie. Il indique les différents stades par lesquels une personne passe lorsqu'on lui annonce sa mort prochaine ou quand quelqu'un perd un être cher. Il a été ensuite repris dans le monde de l’entreprise car il correspond aussi parfaitement aux réactions humaines observées lors de l’annonce d’un changement.


Et du coup pourquoi est-ce dangereux d'occulter ce phénomène ?

On trouve deux grandes situations :

  • Quand on essaye de faire « passer la pilule » à ses collaborateurs

C’est, par exemple, annoncer des primes en même temps que le lancement d’un projet pour amadouer ses équipes, et se permettre d’annoncer le changement sous forme de grand-messe, sans laisser de place à l’expression des réactions individuelles.

Malheureusement cela entraîne généralement des conséquences contre-productives pour le projet. Les équipes peuvent donner l’impression qu’elles acceptent le raccourci alors qu'en réalité, elles sont encore dans le déni. Du coup, le manager est persuadé de l'acceptation de ses troupes et se fait surprendre par l'apparition des phases de peur ou de colère de son équipe. Et il a l’impression très déroutante de revenir en arrière, comme si ses collaborateurs n’avaient rien compris.

Cette tentative de raccourci, à l’inverse de l’effet recherché, augmente les résistances : « le fait qu’on veuille nous faire accepter tout de suite le projet, on trouve ça louche ! »

  • Quand on préfère minimiser les choses 

Un grand classique ! Le manager essaye de se convaincre que ce changement n’est pas « une révolution », que s’ouvrir à l’international en intégrant telle équipe et en créant tel bureau à l’étranger, c’est le sens de l’histoire et que de toutes façons très peu de personnes sont directement impactées. Ainsi, on se contente d’une annonce factuelle et on renvoie tout le monde à ses dossiers.

Malheureusement cette « solution » peut avoir de graves conséquences. Certains collaborateurs peuvent se sentir exclus par l'entreprise, ou nourrir des fantasmes sur les suites du projet : délocalisation, suppression de postes en doublon… Et là encore, on a obtenu la réaction inverse : le projet minimisé résonne chez eux comme « le début de la fin » !

Donc ces « tactiques », au mieux ralentissent le projet, au pire le torpillent.


Alors, comment respecter la courbe de deuil de ses équipes ?

 Bien sûr former les équipes à la courbe de deuil ne sera pas suffisant. Vous avez déjà vu quelqu'un à qui on annonce un projet avec de gros impacts sur son poste en lui disant « Ne t'inquiètes pas Léon, ton attitude est normale car tu es dans la phase de colère de ton deuil, mais bientôt cela ira mieux car tu passeras à la phase d'acceptation » et qui vous répond « Ah d'accord merci, ça va déjà beaucoup mieux ! » ?

Donc comment l’utiliser efficacement ? Deux axes possibles et complémentaires.

  • Accompagner les personnes en fonction de leur état

En identifiant le stade où en est chaque membre de votre équipe, vous pouvez adapter votre manière de les manager.

- Par exemple si une personne est dans le déni cela ne sert à rien de lui rabâcher « je t’assure c’est un projet génial ! Et franchement ça ne change pas grand chose pour toi » ; en revanche faites-la parler, écoutez-la pour comprendre sans forcément chercher à répondre. Et puis si nécessaire, recentrez le sujet pour éviter qu’elle associe ce projet à d’autres changements en cours qui n’auraient rien à voir.

- Au contraire, si par exemple quelqu’un a peur, le mot d’ordre c’est « explication » : lui dire ce qui va changer précisément, pourquoi cela change, lui expliquer le dispositif d’accompagnement qui est mis en place pour les collaborateurs.

- Et puis, si le collaborateur est déjà dans l’acceptation, inutile de survendre le projet ; il faut plutôt encourager ses initiatives et ses actions et parler ouvertement des défis à relever.

  • Créer les conditions d’un système de mobilisation qui laisse libre

Le but n’est pas de faire un système égalitariste où tout le monde doit avancer en même temps mais plutôt que chacun puisse s’engager en fonction de là où il en est.

La clé pour ça, c’est la liberté et l’envie. Ça paraît simple mais c’est un travail d’équilibriste pour un manager qui doit accepter que certains ne s’engagent pas tout de suite tout en stimulant ceux qui veulent avancer.

Mais si vous arrivez à ne pas imposer le même niveau d’engagement à tout le monde, vous serez gagnants : ceux qui ont déjà commencé à faire leur deuil s’engageront rapidement et fortement. Derrière, ils raconteront leurs actions, cela se propagera et accélérera l’envie des autres d’aller de l’avant.

En conclusion, ne prenez pas le risque d’ignorer ou de minimiser la courbe de deuil, servez-vous d’elle pour y voir plus clair et pour accompagner plus efficacement vos équipes !

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