Albus Conseil
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En management, tout est question de questions !

En management, tout est question de questions !
En management, tout est question de questions !

/Repenser les organisations

Chaque jour sur les réseaux sociaux, ou dans les revues spécialisées, on nous dit les qualités essentielles pour devenir ou reconnaître un bon manager. Je ne sais pas vous, mais ces articles ne m’ont jamais permis d’avancer réellement sur le sujet. Si nous devions aujourd’hui, donner une astuce à celui qui veut progresser dans sa dimension managériale, ce serait celle-ci : faites que les gens posent plus de questions !

 

Les réponses ne font pas ou peu grandir

L’erreur que nous avons tous faite, et que nous faisons encore souvent, c’est de construire sa légitimité de manager en livrant à son équipe les meilleures réponses aux questions qu’elle se pose, voire qu’elle ne se pose même pas. 

C’est le poids de l’histoire. On promeut plus souvent en tant que manager celui qui a des qualités d’expert technique plutôt que celui qui montre des facultés de management (animation, écoute, capacité à formuler une vision, etc.) qui sont d’ailleurs peu et mal identifiées. 

Et du coup, c’est logique : puisque nous avons souvent été placés en position de manager car nous avions fait nos preuves sur le métier. Donner les meilleures réponses est donc une façon naturelle de prouver à nouveau notre crédibilité.

Donner des réponses, c’est comme donner du poisson à ceux qui ont faim : c’est utile et gratifiant, mais cela n’est pas pérenne.

Donner des réponses est utile bien sûr et ne jamais en donner est une position intenable pour un manager qui ne saurait faire adhérer son équipe sans cela. Mais donner des réponses est une façon de terminer une réflexion. « Le chef a dit que… » est une phrase qui arrête la mobilisation de l’intelligence et place l’équipe en position d’exécution mécanique. 

C’est pour cela que les entrepreneurs font souvent de mauvais managers (nous en faisons partie et parlons donc en connaissance de cause…). Ils sont des garants de l’idée créatrice de l’entreprise et sont donc souvent en position de fournir la réponse ou de corriger celles de leurs collaborateurs. En conséquence, les équipes de l’entrepreneur ne progressent pas et ils exécutent (s’ils sont prêts à se soumettre) ou s’en vont.

Nous pouvons faire un parallèle avec le développement durable. Donner des réponses, c’est comme donner du poisson à ceux qui ont faim : c’est utile et gratifiant, mais cela n’est pas pérenne. Faire se poser des questions, c’est comme apprendre à pêcher : c’est plus difficile et moins satisfaisant à court terme, mais c’est beaucoup utile dans la durée.


La question, c’est une promesse d’apprentissage 

Tous les managers expérimentés le savent : quand vous présentez un sujet important pour vous et que le public concerné reste muet au moment du « avez-vous des questions ? », c’est mauvais signe.

La question est d’abord un signe d’intérêt.

Car la question est d’abord un signe d’intérêt. Générer des questions, c’est donc générer de l’énergie, de la motivation autour d’un sujet. C’est aussi, parfois, le début d’une remise en question : les questions, quand elles sont posées de bonne foi, nécessite d’admettre que l’on a pas la réponse, et qu’on en a besoin pour avancer. Dans certains public le questionnement est banal, mais dans d’autres (un codir par exemple, ou dans certaines entreprises) l’ego est tellement fort que les questions sont vues comme des aveux de faiblesses. Obtenir des questions dans ces cadres-là ouvre la porte à l’écoute, à l’humilité, et donc à de nouvelles perspectives.

Pour ces raisons, Luna est probablement le personnage qui nous plait le plus dans la saga Harry Potter. Sa force n'est pas dans une capacité à répondre à tout, mais une capacité à écouter, à faire confiance à questionner.

Dans le management les questions sont ainsi indispensables pour :

  • animer : une réunion d’équipe, une formation, le quotidien. La question est la base de l’échange, sans elle chacun expose éventuellement ses positions et ses arguments, mais personne ne peut faire un pas vers l’autre sans lui poser une question.
  • apaiser : un climat social, une frustration, une incompréhension. Dites-vous que quand un groupe ne pose aucune question, c’est soit que vous n’avez intéressé personne, soit que les questions sont dans les têtes mais ne s’expriment pas. Dans les deux cas, vous générez un risque.
  • faire s’approprier : un projet, une vision managériale. La question est l’acte fondateur de l’appropriation. Questionner, c’est vouloir faire sien le sujet de l’autre. 

 Les managers se désolent parfois que leurs équipes posent trop peu de questions, quel que soit le sujet présenté. Pourtant, si le manque de questionnement n’est pas qu’un cas isolé dans une équipe, c’est que le manager ne fait pas ce qu’il faut pour y remédier.

 

Générer des questions : innover et persévérer

Le principal poison du questionnement, c’est la routine managériale. On ne pose plus de questions quand on sait à l’avance ce qui va être dit ou répondu et comment. Pour générer des questions il faut donc innover.

Innover sur le fond, en proposant à votre équipe un nouveau sujet de réflexion ou en leur demandant plus sur un sujet qu’ils connaissent déjà. 

Par exemple : vous avez l’habitude (souvent en avril-mai d’ailleurs) de travailler chaque année votre plan à 3 ans avec votre comité de direction puis (pour certains) de restituer vos travaux à votre collège managérial qui écoute religieusement et parfois un peu hébété vos réflexions stratégiques. Essayez de partager avec eux à mi-parcours de votre réflexion, quand plusieurs options sont encore sur la table, et demandez leurs avis. Il est probable que vous génériez alors de nombreuses questions et, in fine, de l’intérêt et une meilleure appropriation.

Innover sur la forme aussi, en mettant votre équipe dans un cadre dont elle n’a pas l’habitude. Vous avez l’habitude de présenter 30 slides PowerPoint avant de demander des questions ? Faites l’inverse en leur demandant ce qu’ils attendent de la présentation, cela peut marcher ou faites réagir au milieu. Vous présentez à 20 personnes et personne ne réagit en collectif, faites 5 groupes de 4 où chacun doit vous présenter 2 questions, nul doute qu’elles émergeront assez vite.

Ensuite, tout est question de persévérance. Les gens poseront des questions si :

  • Vous montrez que vous en avez besoin : en n’ayant pas des présentations 100% ficelées à l’avance, qui laissent de la place aux compléments, aux modifications. Qui a envie de réagir à un projet 100% non négociable ? Personne.
  • Vous donnez du temps pour les questions : les réunions d’une heure dont 55 minutes de présentation envoient un message très clair à l’audience, leurs questions ne vous intéressent pas. Mettez au moins 50% du temps pour recueillir les questions et évitez d’avoir des réponses qui prennent toutes la place. Nous conseillons souvent aux managers, plutôt que de chercher une réponse absolument, de répondre à une question par une autre question. Vous allez voir, le résultat est incroyablement plus intéressant.
  • Vous n’acceptez pas le « non » comme réponse à « avez-vous des questions ? ». Posez une question, comme nous l’avons dit plus haut, est une prise de risque surtout quand elle est posée de bonne foi. Donc certains l’éviteront s’ils s’aperçoivent que c’est une posture acceptable. Vous devez être exigeant et ne pas admettre qu’un acteur puisse ne pas avoir de question à poser sur un sujet-clé.  

Comme toute chasse au trésor, la chasse aux questions se mérite. Alors que ferez-vous dans la prochaine réunion pour obtenir plus de questions ?

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