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L’Ego, porté disparu des entreprises conformistes

L’Ego, porté disparu des entreprises conformistes
L’Ego, porté disparu des entreprises conformistes

/Interroger sa posture managériale

Une des conséquences des dynamiques actuelles, où l’individualisme est combattu férocement et où l’absence de process et de méthode est vu comme une anomalie, c’est la disparition des Ego. Pourtant, l’Ego est utile pour lutter contre le conformisme et le mimétisme, les deux vrais maux du siècle en entreprise.


Le conformisme et le mimétisme galopants

La crise de CoronaVirus, mais aussi les autres crises macroéconomiques récentes ou tout simplement la constatation des décisions prises en entreprise, tout cela montre une chose implacable : nous sommes des moutons ! Tous sur le Lean, tous sur la Chine, tous sur l’Industrie 4.0, tous sur l’Agilité, tous Digital, tous écolos mais pas trop, tous confinés, etc.

Rien d’étonnant à cela, nous regardons les mêmes choses, avec les mêmes yeux, et nous en tirons tous les mêmes déductions. 

Tout le monde regarde les mêmes indicateurs, les mêmes événements, les mêmes influenceurs.

Nous regardons les mêmes choses, parce que nous avons presque tous suivi les mêmes études qui nous ont dit à quoi il fallait faire attention. Autrefois, vous rencontriez des leaders avec des cursus bien différents et/ou des convictions différentes sur le modèle économique de référence (keynésianisme contre monétarisme ou théorie des cycles réels). Tout cela a été remplacé par un modèle hybride, universel, professé dans toutes les grandes écoles (Qui imaginerait un débat passionné sur le modèle économique entre grands patrons aujourd’hui ?). Tout le monde regarde les mêmes indicateurs, les mêmes événements, les mêmes influenceurs.

Et nous les regardons avec les mêmes yeux, car toutes les entreprises suivent les mêmes méthodologies. Franchement, qui ne se passionne pas pour la méthode Agile (ou l’un de ses avatars) aujourd’hui ? Et pour le Lean hier ? Ce sont des méthodes qui sont évidemment très séduisantes mais qui donnent à tous les mêmes réflexes et les mêmes priorités. 

Et est-ce un problème ?

Et bien oui, bien sûr ! Pas d’autorégulation, pas d’autocritique, le conformisme et le mimétisme actuels nous plombent, créent des bulles énormes dont les éclatements déstabilisent le monde entier ou décrédibilisent, a minima, les équipes qui voient leurs leaders changer de « religion » comme on change de chemise. 

 

La traque aux Ego

En trame de fond, le conformisme a pris son envol grâce à la chasse aux sorcières des Ego en entreprise. Confondu avec l’Ambition mégalomaniaque ou vu comme une absence d’écoute par narcissisme ou par névrose, l’Ego a été cloué au pilori. Et puis, l’Ego, amenant parfois à des échecs monumentaux (Serge Tchuruk, Bernard Tapie, Jean-Marie Messier), a été vu comme un frein à la performance de l’entreprise.

Pour le traquer, l’entreprise a donc cadré de plus en plus l’action de ses leaders par des organigrammes de plus en plus « découpés » pour donner des responsabilités toujours plus limitées et croisées (de directeur des ventes… à directeur du parcours clients avec un lien fonctionnel par zones géographiques). Puis une deuxième couche avec les process, les outils et les systèmes qui ont considérablement encadré les pratiques des leaders. Enfin, la cerise sur le gâteau avec des prescrits de plus en plus détaillés sur les postures et les comportements (chartes en tout genre).   

Pour s’en convaincre, il suffit de taper « Ego en entreprise » sur Google, vous ne trouverez pas un article positif. C’est même d’un extrémisme qui montre le dogmatisme actuel sur le sujet.


Quel est le bon Ego et comment le retrouver ?

L’Ego, c’est le moi. Dans le dictionnaire, c’est la représentation et la conscience que tout individu a de lui-même. Dans l’acception populaire, c’est l’affirmation d’une personnalité avec une certaine confiance en soi, parfois abusive ou exagérée, qui permet d’exister singulièrement.

Cet Ego-là est essentiel en entreprise : pour challenger l’avis des autres, pour convaincre en temps de doute, pour avancer en temps de crise, pour faire des pas de côté versus le courant majoritaire, etc.

On souffre bien davantage aujourd’hui du nombre de managers insipides et sans idée que de l’excès d’Ego.

Difficile de distinguer de façon binaire le bon et le mauvais Ego sans faire un remake du chasseur des Inconnus. Disons plus simplement que l’Ego débridé a deux effets indésirables : d’abord il génère un entêtement aveugle pouvant amener à l’échec (Tapie ou Messier sont des exemples de cela avant tout), ensuite il entrave le développement personnel des autres membres de l’équipe car il prend trop de place et ne supporte pas l’expression des autres Ego de l’équipe.  

Mais justement, dans l’entreprise d’aujourd’hui et ses valeurs, ses process, ses contre-pouvoirs, les effets indésirables de l’Ego sont largement maîtrisés. Il sera toujours possible de trouver des exceptions qui confirment la règle. Mais on souffre bien davantage aujourd’hui du nombre de managers insipides et sans idée que de l’excès d’Ego.

Alors comment regonfler l’Ego de nos managers conformistes ? Cela tient en trois idées qu’il convient d’adapter à chaque contexte.

D’abord desserrer l’étau, notamment sur les comportements prescrits et sur la rigidité des processus de prise de décision. Si les audits et les systèmes fauchent toute expression singulière, ça ne peut pas marcher. Souvent, il est possible d’élargir le cadre sans se mette en zone de risque. Encore faut-il se le fixer comme objectif. 

Ensuite, il faut donner des terrains de jeu aux Ego : livrer un sujet à l’expression des stratégies plus personnelles. Comment s’ouvrir à l’international pour une PME ? Comment reconstruire une marque moribonde dans un grand Groupe ? Commencez par choisir des terrains de jeu annexes, que vous agrandirez au fur et à mesure si cela fonctionne.

Et puis cherchez à éviter ou limiter les processus de décision « moyennisant » qui recherchent le consensus, la majorité. Il faut que l’on puisse tenter des choses sans accord de tous. Cela peut passer par accepter ceux qui agissent sans avoir demander la permission et qui se plantent parfois.

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