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Lucifer : derrière les bonnes intentions …

Lucifer, c’est une série dans laquelle on suit le diable, le vrai, celui qui gérait l’enfer, qui a décidé de tout lâcher et de prendre sa retraite pour venir vivre parmi les humains. Rapidement, il se retrouve à collaborer avec la police pour résoudre des enquêtes. Et à chacune d’entre elles, il utilise son plus utile des pouvoirs sur tous les potentiels suspects d’une affaire : faire avouer à n’importe qui sa plus grande ambition. 

Ce qui est intéressant, c’est que, dès lors qu’un personnage a avoué son but le plus profond, il paraît alors évident pour le spectateur, avec son œil extérieur, pourquoi cette personne peut être le meurtrier, et la logique se déroule immédiatement. Parfois de manière évidente « je veux être le premier » amène à penser qu’un personnage a voulu se débarrasser d’un concurrent. Mais, et c’est là que c’est intéressant, ça fonctionne aussi et surtout lorsque l’intention est louable ! Ainsi un coach sportif qui « veut devenir un coach indispensable pour son poulain » embauche une équipe pour le faire chanter, afin de lui rester utile en l’aidant dans cette épreuve. 

En management, c’est aussi souvent derrière les intentions les plus louables que s’expliquent les pires travers : le manager qui veut à tout prix « être bienveillant » et qui n’ose pas faire des feedbacks, ne permet pas à ses équipes d’évoluer. Celui qui veux « sauver son équipe en lui évitant les erreurs » les empêche souvent de se responsabiliser en prenant des risques.  

Ainsi, sans tomber dans la psychologie de comptoir en cherchant les causes fondamentales et profondément personnelles qui peuvent nous amener à prendre telle ou telle décision, on peut bien s’autoriser parfois à jouer la transparence avec soi-même : osons mettre notre motivation sur la table, et surtout comparer les résultats que l’on espérait à ceux que l’on obtient ! Après tout, l’enfer est pavé de bonnes intentions.

L’opposition ce n’est pas la guerre

Dans les entreprises, l’opposition fait peur. On la combat… Dans la société, l’opposition est devenu un sport clanique, une confrontation de haine et de préjugés réciproque. A-t-on perdu l’art de s’opposer sans se faire la guerre ? 
Et si demain on s’opposait à nouveau sans se détester ?

 

On déteste la pluralité

Dans une entreprise de quelques milliers ou même de quelques dizaines de milliers d’employés, ou dans un pays de 60 millions voire de 300 millions d’habitants, le consensus est impossible, pas souhaitable, suspect. Parce que nous avons des éducations, des sensibilités, des expériences, des sentiments, des objectifs différents, nous avons des opinions différentes et des façons différentes de les défendre.

Pourtant, tout se passe comme si on détestait cette pluralité ; comme si on détestait tous ceux qui ne pensent pas comme nous.

L’opposition à Sarkozy a coulé le Grenelle de l’environnement avant même son démarrage. Celle d’Obama n’a pas voté son plan suite à la crise des subprimes pour ne pas lui donner cette victoire. Aujourd’hui les opposants à Macron comme hier ceux de Hollande ne sont pas capables de sauver ne serait-ce qu’une idée, qu’une action. 
Tous ces opposants se discréditent en refusant la nuance. Ils se rendent repoussant pour ceux dont ils voudraient conquérir les coeurs et se retrouvent à travailler presque exclusivement cet électorat conquis qui vote pour eux sans même les écouter.

Aujourd’hui on ne peut plus critiquer un élu vert sans être un affreux productiviste irresponsable, on ne peut pas accorder le bénéfice du doute à l’action d’une multi-nationale sans être un agent pervers du capitalisme sauvage. Dans l’entreprise, les opposants, les élus des syndicats veulent la mort de l’entreprise dès qu’ils émettent une objection… Et inversement, les patrons serait systématiquement en train de nous la faire à l’envers à chaque prise de parole….. Des dogmes s’opposent, des intérêts contraires, et de moins en moins des idées, des arguments.

Pourquoi déteste-ton autant la pluralité ?

 

Le problème c’est que tout le monde y perd

Cette société s’organisent en factions rivales. Les cadres font face aux non-cadres ! Les « gens de gauche » sûrs qu’ils sont les seuls à avoir une morale, prêtent aux autres la seule volonté de s’en mettre plein les fouilles. Les écologistes détestent ceux qui défendent l’industrie (forcément des affreux), les « manif pour tous » accusent les autres de vouloir tuer la famille… On cherche à opposer les choses : la culture et l’économie, la qualité et la productivité, l’industrie et l’écologie… C’est plus simple, plus vendeur… Ça ressemble aux mauvais films américains de Marvel.

Et donc coup, on n’avance pas, on attend que l’autre se plante, on le désire même. On le rejette en bloc, de la première à la dernière phrase, on ne sauve rien… En réduisant l’autre à des intentions maléfiques, on envoie le message qu’on ne sera jamais convaincu, jamais embarqué… C’est en jugeant sans nuance et sans analyse que l’on fait le lit des Trump qui ne cherchent même plus à parler au peuple et se contentent de draguer son électorat pour l’électriser… Trump est ce que je crains le plus au monde mais il n’est selon moi que le symptôme d’une vie politique où l’opposition est si caricaturale, dans un sens ou dans l’autre, que la meilleure tactique est finalement de ne parler qu’à ses partisans.

On n’avance pas, on se chamaille. On n’avance pas, on fait et on défait. On freine et on dénonce. On n’avance pas. Mais s’agissant du Grenelles de l’environnement, n’aurait-il pas fallu tout faire pour réussir en 2007, et gagner 15 ans ?

Dans l’entreprise on continue d’avancer malgré tout parce qu’on est un peu plus à l’abri du n’importe quoi médiatique dans lequel on déchaine les passions plutôt que de chercher à faire réfléchir. Dans l’entreprise, on avance toujours parce qu’avec le vrai immobilisme on est vite tous perdants : point de salut si les produits ne se vendent plus. Mais le danger rôde, et l’aversion au risque se développe, probablement chez nous plus qu’ailleurs… On peine de plus en plus à avancer vite parce qu’on se craint, parce qu’on ne sait plus s’engueuler franchement.

Mais n’ayez pas peur de ne pas être d’accord ! C’est impossible d’être tous d’accord !  Impossible.  C’est même l’intérêt de l’humanité d’avoir ses différences. Moi je suis content qu’il y ait des militants de toutes les couleurs politiques, même d’extrême droite. Cela fait partie de la vie. Mais je suis navré qu’ils ne sachent plus se parler.

 

Alors revenons à un monde qui s’oppose GAIEMENT !!

La vie c’est le débat et la confrontation, la palabre comme dirait Edouard Baer. Ne rêvez pas de consensus, c’est impossible et chiant. 
Désirez l’opposition et la confrontation, mais n’oubliez pas les 3 règles d’or de l’opposition :

Votre opposant n’est pas le diable

Il est évidemment facile de dire que le patron veut du fric à tout prix, et exploite les ouvriers sans vergogne. Il est confortable de taxer le leader de la CGT de dogmatisme et de vouloir faire mourir l’entreprise pour prouver qu’il a raison. Il est évidemment tentant de prêter à la droite une absence totale de morale et à la gauche une absence de réalisme et de se taxer mutuellement de tentation autoritaire. Il est galvanisant de dire qu’un ministre de l’éducation veut la mort de l’école ou qu’un maire de Poitiers veut régir les rêves des enfants et les uniformiser.

Mais tout ceci est aussi faux que bête. Votre opposant a 99 fois sur 100 l’ambition d’améliorer les choses, mais son passé, son expériences et sa sensibilité l’amène à voir des solutions différentes des autres.

Nier qu’il puisse avoir une éthique, une intention louable c’est non seulement envenimer le débat mais en plus s’aliéner ses partisans en plus. 

Accepter l’idée que l’immense majorité des gens veulent le bien du plus grand nombre, c’est la première pierre du dialogue. Chercher à se comprendre plutôt que chercher à avoir raison. Si je devais débattre avec Marine Le Pen, je partirais du principe qu’elle veut le bien du pays… Parce qu’en lui prêtant des intentions diaboliques, non seulement le dialogue est impossible, mais en plus j’insulte ceux qui sont tentés par elle, et je les pousse vers elle.

 

Il y a bien plus de complexité que de complots

Dans la même veine et sans faire de ce court article un pamphlet anti-complotitiste, il est généralement absurde de lier une cause et sa conséquence directement : celui qui augmente les allocations chômage ne désire pas la mort du travail. Celui qui les baisse ne désire pas la mort des travailleurs. Ils expriment tous les deux les conclusions de modèles sociologiques anciens, qui visent l’un et l’autre au bien collectif. Adam Smith et Karl Marx sont des humanistes, ne l’oublions pas.
Mais surtout les décisions sont complexes et doivent prendre en compte de multiples facteurs. La décision de fermer les cinéma pendant le covid (que je regrette) doit néanmoins être comprise dans un système complet. De même on ne devrait pas privilégier les voitures électriques sans débat sur la production d’énergie ; on ne devrait pas passer au tout télétravail sans se soucier des retombées psychologiques et même relationnelles.

Quand vous vous opposez, quand vous ne comprenez pas la position de votre interlocuteur, c’est souvent qu’il prend en compte un autre facteur, une autre conséquence. Par exemple oser parler du coût de la santé publique est vécu comme une attaque du service public par certaines personnes d’extrême gauche… Mais ne pas en parler est vécu comme une attaque contre le service public par les électeurs de droite. Chez nous, ce débat n’est pas sur le but (en France, personne ne remet en cause la nécessité d’un hôpital public) mais sur les moyens d’y arriver. Et ce débat est passionnant. Mais il ne peut aboutir à une solution intelligente que dans la pluralité, pas dans le dogmatisme.

Donc cherchez à comprendre les conséquences que voit votre contradicteur, même si parfois il les exprime mal à vos yeux.
Le monde est trop complexe pour qu’un seul Homme le comprenne seul.

 

L’analyse et l’écoute sont les transgressions du monde moderne, adoptez les

Pour finir, soyons clairs : l’analyse et la réflexion ont perdu beaucoup de terrain ces dernières années. La colère et l’émotion en ont beaucoup gagné. On caricature les autres à l’extrême et on se replie dans le confort d’un cercle de gens qui pensent comme nous contre tous les autres.

La faute aux médias, fan des idées basiques ? Aux partis politiques qui draguent plus qu’ils ne réfléchissent ? A ceux qui ont eu le pouvoir qui n’ont pas eu le courage d’expliquer ? Aux réseaux sociaux qui donnent la prime aux pensées les plus extrêmes ? A nous tous qui préférons l’analyse séduisante qui cochent les cases de notre éducation ? Au monde plus complexe, si difficile à comprendre ? Probablement un peu de tout ça, et bien d’autres choses encore.

Mais du coup, la transgression suprême en entreprise comme dans la société, c’est de tenir compte des voix discordantes, d’envisager le débat avec les opposants, de reconnaitre à l’autre dont les idées sont si éloignées des miennes des intentions aussi nobles que les miennes.

J’ai eu la chance en 15 ans de conseil, de rencontrer des centaines de managers, des dizaines de dirigeants, de travailler indirectement pour des milliers de salariés, et je peux tenir le compte des situations auxquelles j’ai assistée dans lesquelles la seule explication possible est la malhonnêteté : 10 personnes, 20 max. Sur des milliers.
Le reste du temps, il y a de la paresse, des erreurs, de la peur, de la résignation, des préjugés, des généralisations, et puis parfois du génie, de la générosité, de l’écoute, du courage.

La transgression du monde moderne, c’est d’écouter les opposants, pour sortir de la paresse intellectuelle et réhabiliter l’écoute.
La transgression du monde moderne, c’est de recommencer à palabrer.

Quand on fait un PSE, on perd les meilleurs, et c’est mieux pour tout le monde

Souvent quand un patron prépare un PSE (Plan de Sauvegarde de l’Emploi), il me demande : comment garder les meilleurs (et donc faire partir les moins bons) ? En cette période où les PSE risquent de se multiplier malheureusement, je veux répondre clairement et publiquement : vous allez perdre les meilleurs, et c’est très bien comme ça, et même pour vous. Vous voulez savoir pourquoi ? Lisez cet article.

 

Vous n’aurez pas le beurre et l’argent du beurre

Un PSE est parfois nécessaire, COVID ou non. C’est un moment de la vie des entreprises, ne le diabolisons pas. Bien fait, il permet de préserver une activité pour un collectif et accompagne ceux qui partent jusqu’à ce qu’ils retrouvent un emploi. Bien fait, il porte parfaitement son nom. Il sauvegarde l’emploi.

Mais un PSE c’est quand même un moment où l’entreprise va se séparer de collaborateurs pour se réorganiser et adapter sa production à ses besoins d’avenir. Des collaborateurs vont partir, et vous y gagnerez des marges de manoeuvre pour travailler autrement. Alors il faut assumer. Parce que si vous êtes sincèrement préoccupés par les enjeux de reclassement, par l’avenir individuel des collaborateurs, alors ce sont les meilleurs qui vont vous quitter. Ceux qui sont les plus demandés sur le marché du travail vont trouver un autre projet où exercer leurs talents. Si vous voulez les garder, ne faites pas de PSE.

Ceux que l’on considère comme talents, le sont pour beaucoup d’autres. Et d’ailleurs, ils sont conscients de leurs possibilités sur le marché de l’emploi et vont immanquablement plus regarder ailleurs que ceux qui se sentent en danger, qui vont avoir tendance à serrer les fesses pour ne pas faire partie du plan.

Bref, il est logique que dans un PSE, les meilleurs partent :

  • Parce qu’ils sont les plus facilement reclassables.
  • Parce qu’ils seront les plus enclins à regarder ailleurs.

Autrement dit, vous n’aurez pas le beurre et l’argent du beurre. 

 

En plus souhaiter garder les bons, c’est vouloir se séparer des plus fragiles.

En voulant garder les meilleurs vous poussez mécaniquement ceux qui sont plus fragiles dehors. Vous vous donnerez bonne conscience avec vos mesures chères et spectaculaires, mais franchement, si vous êtes humanistes comme vous le dites, plutôt que de dépenser des fortunes pour compenser le fait d’avoir viré les faibles, gardez-les.

Clairement c’est cette attitude très répandue qui rend certains PSE totalement détestables. On cherche à multiplier les catégories professionnelles par exemple, pour cibler au maximum celui dont on ne veut plus, pendant que les élus veulent les agrandir pour protéger les plus faibles. C’est eux qui ont raison. Bien sûr, les catégories ne sont pas à proscrire mais acceptez qu’elles soient plutôt larges. Que vous sépariez les comptables des techniciens d’accord, mais trouver toutes les subtilités à l’intérieur de vos techniciens pour pouvoir enlever pile celui qui n’en peut plus, non.

 

Vous aussi, vous avez tout à gagner à perdre les meilleurs

Je le comprends le raisonnement de prime abord : comment vais-je garder mon niveau de performance si, en plus de réduire les effectifs, je perds les meilleurs éléments ? Logique.

Mais c’est en fait un mauvais calcul pour 3 raisons :

  • Ça va tendre les relations sociales puisque c’est le point d’attention majeur de la plupart des élus (à juste titre selon moi).
  • Ça va renvoyer de vous une image très utilitariste, et casser durablement la confiance. Vous êtes celui qui tire sur les ambulances.
  • Enfin ça montre que la transformation va rebattre les cartes et qu’elle est l’occasion pour ceux qui étaient à la peine de se relancer

Aussi, je vous encourage vivement à faire votre PSE sans chercher à garder ceux que vous estimez être les bons.

Votre réorganisation doit être motivée par le passage d’une époque à une autre. Vos efforts ne doivent pas être orientés vers le passé (comment je garde ceux qui ont réussi jusque là ?) mais vers l’avenir (comment je crée les meilleures conditions pour réussir demain ?).

Cet effort, nécessaire pour le projet globalement, vous conduira également à revoir votre jugement sur vos équipes. Ou plutôt, il vous conduira à éteindre le jugement pendant cette période : puisque beaucoup de choses vont changer, il vous faudra accepter que les gens aient des moments de doute, voire de colère, mais aussi qu’après la tourmente de nouveaux héros émergeront. Parfois les mêmes, souvent des nouveaux.

Concrètement, le discours forcément pessimiste du PSE (il faut justifier d’une difficulté actuelle ou à venir pour que les autorités valident votre plan) va être doublé d’un projet optimiste sur les Hommes, collectivement et surtout individuellement. En montrant à ceux qui sont en difficulté que vous comptez sur eux et que vous ne cherchez pas à vous en débarrasser, vous aurez énormément de bonnes surprises. Ces bonnes surprises seront plus nombreuses encore avec le départ de plusieurs de vos « stars » : ils libèreront des places importantes, mais surtout, ils libéreront de la lumière, du temps de parole, de la reconnaissance. Ne raisonnez donc pas de manière statique alors que tout change. 

Le beau PSE est donc possible à partir du moment où il n’est pas cynique, où il comprend que la sauvegarde de l’emploi n’est pas une vaine expression.

Bien sûr, les élus ne vont pas vous tomber dans les bras. Mais si vous êtes honnêtes dans votre démarche et que vous demandez à vos conseils de travailler dans cet esprit, vous verrez qu’ils seront moins agressifs.

Si les PSE sont si delétaires, ce n’est pas génétiquement lié à leur objet. C’est parce qu’on fait des PSE cyniques qui disent l’élitisme dont vous faites preuve, qui montrent clairement les chouchous et cantonnent ceux que vous considérez comme cancres dans une position de parias.

Un PSE c’est une nouvelle étape de vie pour l’organisation. Il est le début d’une aventure différente dont les héros seront différents de ceux des aventures précédentes. Les anciens héros vogueront souvent ailleurs vers d’autres horizons, et vous trouverez chez vous les talents cachés jusque là dans l’ombre de ceux qui étaient vus comme des stars.

Alors assumez de faire un PSE, n’ayez pas peur. Et faites le bien.

 

Mobiliser dans un PSE

Une fois n’est pas coutume, je vous propose 7 nouvelles règles à respecter pour que les PSE soient positifs :   

  1. Ne pas avoir peur du conflit dans un PSE. Ils sont souvent durs parce qu’ils sont souvent cyniques.
  2. Parlez ouvertement de la transformation comme d’un changement d’époque et assumez que les cartes seront rebattues.
  3. Misez sur la maturité des équipes et leur capacité à comprendre plutôt que de tout cacher et de vous réfugier derrière un dossier béton.
  4. Acceptez d’emblée que de très bons éléments profiteront du plan, et tant mieux.
  5. Donnez le défi à vos managers de dénicher de nouveaux talents chez ceux auxquels on ne croyait plus.
  6. Demandez à vos conseils de modérer leurs ardeurs pour les catégories ou autres : on ne veut pas garder les forts à tous prix nous.
  7. Rédigez un projet qui s’appuie sur ceux qui restent, sur ceux qui peinent et faites leur confiance. Parce qu’il ne veulent pas partir eux. Ils n’ont rien demandé.
     

 

Et si la crise nous offrait l’occasion de nous échapper du conformisme ?

Comme vous l’avez tous remarqué, le « monde d’après » n’existe pas. Les idéaux n’ont pas spécialement avancé pendant la crise et le monde n’est ni moins bon, ni meilleur qu’avant. Une crise pour rien alors ? Pas vraiment, car les indicateurs ayant tous explosés, il y a une place nouvelle pour les projets singuliers. Et si vous profitiez du monde d’aujourd’hui pour faire un projet qui vous ressemble ?

 

Nous sommes passés d’une course en ligne à une course d’orientation

Comme souvent dans les crises, ce qui se passe n’est jamais ce que les oracles économico-influenceurs avaient prévu. Les chiffres sont tous faux, les projections caduques, les prédictions à l’ouest. Pour autant, la crise a quand même rebattu les cartes et cela crée non seulement des opportunités business, mais aussi des opportunités managériales.

Avant la crise, bien que nous parlions du monde VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity), la réalité était tout autre. Sur un même marché, les entreprises avaient la même info, suivaient les mêmes indicateurs et étaient conseillées par les mêmes personnes. Donc, les projets des concurrents étaient du pur copier-coller : digitalisation, priorité à la croissance chinoise, économie de moyens en Europe et aux US, l’agilité en intraveineuse.

Aujourd’hui, tout a changé. La crise a eu un effet centrifuge qui a projeté les entreprises d’un même marché dans des situations opposées. Hormis les grands perdants (aéronautique, événementiel, culture) et les grands gagnants (GMS, alimentaire, santé), les donnes sont bien plus diverses qu’auparavant : PSA et Renault, L’Oréal et Coty, etc. Bien sûr, certaines tendances dataient d’avant la crise mais l’écart s’est creusé incroyablement.

Et on le voit que les solutions divergent également : entre ceux qui rentrent dans une logique detox, PSE ou rigueur, qui ne sont finalement pas tout le monde ; ceux qui investissent sur un marché où les bonnes affaires sont légions ; ceux qui maintiennent le cap fixé et ceux qui changent tout.

 

En management aussi, il y a de nouveaux espaces

Ce n’est peut-être pas flagrant partout, mais ce qui est vrai pour les affaires se retrouve pour le management. Le budget 2020 est un lointain souvenir, celui de 2021 ressemblent plus à des scénarii qu’à un objectif clair. Les indicateurs sont perdus et les grandes démarches Corporate ont desserré leurs étaux provisoirement.

C’est vrai pour 2020, ça le sera en 2021 et peut-être même en 2022. Vous avez donc une fenêtre de tir idéale pour faire, enfin, un projet singulier, plus intuitif ou plus personnel, un projet qui ne doit pas (autant que d’habitude) cocher les cases. Profitez-en !

Nous le voyons chez nos clients : ils font ce qu’ils n’auraient pas imaginé faire il y a un an. Certains réinventent leurs relations sociales dans de grands groupes très frileux sur ces sujets, certains échangent avec des concurrents alors que cette pratique était taboue il y a peu, d’autres changent leurs programmes d’incentives ou de formation auparavant bridés par le Corporate. Un vent de fraîcheur et de liberté souffle sur certains managers et c’est un plaisir à voir.

 

Le risque : passer à côté d’une occasion unique

Nous sommes depuis tellement longtemps dans une prison des outils et des systèmes que nous respectons des barrières qui sont (momentanément) disparues.

Essayez, pour voir ! Lancez une idée iconoclaste sur la communication et regardez si la communication interne, la police de la pensée, intervient. Lancez une initiative avec votre concurrent sur la RSE et voyons ce qui se passe… Tentez votre chance tant que les systèmes sont désorientés, vous verrez que des espaces existent pour faire ce qui était impossible hier.

Vos équipes, vos collègues, vous-même, ne se souviendront pas du manager qui a déployé l’Agilité et le Pilotage de la performance selon les prescrits de leurs entreprises. C’est aussi pour laisser une trace, un impact positif et singulier que cette période est une opportunité à saisir !

A-t-on le droit de rêver en travaillant ?

On a tous une part de rêve en nous ! Le fameux syndrome de Peter Pan, est plus ou moins important, plus ou moins fertile selon les individus mais il existe bel et bien ! Cette caractéristique fondamentale de l’homme est celle qui permet d’aller plus loin, de se dépasser et d’être créatif. Alors pourquoi, quand il s’agit du travail, le rêve est-il synonyme de paresse, de bien-pensance, d’inefficacité ? 

Où se cache le rêve ? 

Le rêve est souvent mis de côté dans notre monde actuel car pas assez « réaliste », pas suffisamment « pragmatique » contrairement au court terme où la réalité est omniprésente. 

Les rêveurs ou utopistes sont souvent mal vus, voire moqués. Dès l’école, on fustige les songeurs : « Alors Pierre, vous rêvez ? » 

Pourtant, les neurosciences ont démontré que les émotions des individus sont un des principaux moteurs du mouvement, et permettent un changement plus profond et plus pérenne.

En management aussi, le rêve et l’émotion sont des composantes essentielles qui donnent envie de bouger, autant les organisations que les personnes. 

Rêver permet, par exemple à un Codir, d’imaginer d’autres visions que celle uniquement dirigée par « l’augmentation du chiffre d’affaires de 15% » qui n’est pas forcément audible et enviable par tous. 

Tout le monde est conscient que le chiffre d’affaire est ce qui permet à chacun de toucher son salaire et que c’est un élément important. En revanche, il ne permet pas de gagner l’adhésion de toutes les équipes : comment remobiliser une assistante RH, un idéaliste, un jeune, quand on lui parle d’EBITDA, EBE ou ROI ? 

Si ça parait évident, pourquoi encore trop peu de managers le font ? 

Vous êtes-vous déjà demandé ce que chaque personne de votre équipe pense réellement de son propre travail ? Quelles sont ses envies et ce qui la motive (ou pas) le matin en se levant ? 

Bien évidemment, chaque manager se pose ce genre de question… mais uniquement à lui-même ! Ils ne la posent pas aux équipes, parce qu’ils ne voient pas l’intérêt de le faire ou parce qu’ils ont peur de ne pas pouvoir satisfaire les aspirations de leurs équipes… Une sorte de syndrome de l’autruche en somme.

De la même manière, les managers ont de multiples raisons, objectives et légitimes, de ne pas se poser la question « comment je fais rêver mes équipes » :

  • La direction et les objectifs venus « du siège » 
  • Les équipes et leurs contraintes quotidiennes 
  • Le manque de temps et le manque d’intérêt pour des sujets managériaux parfois pas assez concrets

Mais aussi quelques peurs plus subjectives : 

  • Ne pas savoir comment ou quand en parler aux équipes 
  • Avoir peur des faux espoirs que ça pourrait créer 
  • Avoir l’impression que les équipes manquent de la créativité nécessaire, ou de la hauteur de vue et sont trop focus sur le quotidien
  • Avoir peur de passer pour un Bisounours, déconnecté du réel… 

Si tout cela se comprend, ne pas oser parler de rêve avec ses équipes reste une erreur managériale, c’est la base même du métier de manager. On peut même aller plus loin, le rêve doit être au cœur de chaque projet managérial. Alors autorisez-vous à le faire même si ce n’est pas simple !

Les managers qui nous inspirent ont, en plus de leur talent business, réussi à susciter le rêve autour d’eux-mêmes ou de leur entreprise (Apple, Leclerc, Free, ou encore Tesla…).

Alors comment faire exister le rêve au quotidien ? 

On ne vous propose pas de vous changer en Xavier Niel ou en Steve Jobs, rassurez-vous. Et comme souvent, nous n’avons pas de recette tout faite mais quelques idées que nous partageons avec vous.

Changer votre posture : Pour aider vos équipes à se remettre en question en profondeur, il faut que vous fassiez le premier pas, parce que vous tenez les rênes et pouvez donner l’impulsion.

Alors :

  • Assumez une posture différente (ouverture, écoute…), 
  • Prenez du temps pour réfléchir à votre ambition, votre message, vos propres envies… 
  • Lâchez la bride sur certaines choses.

Créez un cadre partagé par tous : Définissez un cadre avec votre ambition, et partagez-le avec les équipes. Faites confiance à vos équipes et faites-les participer à sa traduction concrète. C’est un moment où on peut enfin poser carte sur table, éclaircir des zones d’ombre et construire un rêve commun.

Laissez de l’autonomie aux équipes : Faites appel à leur créativité, donnez-leur la liberté de s’exprimer, faites confiance à leurs initiatives… Tout cela va permettre à vos équipes de changer leur état d’esprit. 

Par exemple, pourquoi ne pas imaginer de faire réfléchir, en toute liberté, une équipe à ses propres solutions pour remédier à ses nombreux irritants quotidiens (des appels incessants, des tâches ingrates, peu de considération…) ou pourquoi ne pas les faire réfléchir à une question type : « Quelles seraient votre semaine idéale dans deux ans ? ».

Cet exercice permet d’allier utopie et réalité : avoir une feuille de route opérationnelle pour traiter les sujets court terme et rêver sur un sujet plus long terme qu’on peut idéaliser ! 

Le pragmatisme des chiffres et des objectifs sont les rails de votre management mais la locomotive est un mélange d’envie et d’enthousiasme ! Alors rêvez, idéalisez, inventez parce que c’est ce qui fera avancer votre aventure collective.

Alabama Monroe : de la country, des tatouages et un drame… – … pour un exemple de gestion de crise très instructive !

C’est ce que nous donne à entendre et à voir Felix Van Groeningen dans son film Alabama Monroe, où la musique joue un rôle prépondérant, et vient sublimer les moments les plus noirs comme les plus joyeux.

Au début, une histoire d’amour incroyable, une relation fusionnelle entre Elise qui tient un salon de tatouage, et Didier fan de bluegrass et joueur de banjo. Quelques temps plus tard, un drame. Leur fille, Maybelle tombe gravement malade, et finit par succomber à son cancer.

Il s’agit ici d’un drame personnel, une situation particulièrement extrême, alors quel lien avec le management me direz-vous ? Eh bien, ce film peut nous apprendre comment éviter le pire quand un drame arrive au travail.

Des coups durs, des drames, une entreprise peut en subir sous différentes formes : évolution négative du marché, nouvelle réglementation pénalisant le business, scandale concernant pratiques immorales… Et même quand les difficultés ne sont pas directement attribuables à des services ou des personnes de l’entreprise, le risque est que le climat dégénère et mène à remettre la faute sur ses collègues.

Comment on peut faire pour éviter que ça dérape ?

D’abord, réaliser ce qui est en train de se passer. A ce moment-là, c’est votre équipe qui doit faire le deuil de quelque chose. Le deuil d’une croissance garantie du business sur tel marché, le deuil d’une image positive de la boîte à l’extérieur, le deuil d’un process de fabrication remis en cause par la réglementation… Bref, on revient à la courbe du changement

Et si en tant que manager on n’a pas conscience de ça, difficile de prévoir un accompagnement collectif pour dépasser cette épreuve, et surtout très facile de se laisser polluer par toutes les conséquences négatives du changement. 

La première étape c’est de prendre les devants en communiquant sur le changement de manière adéquate. Ça veut dire quoi, de manière adéquate ? Être juste c’est dire la vérité et ne pas minimiser les impacts négatifs, choisir le bon moment et la bonne manière : s’assurer que tout le monde est dispo et aura le même niveau d’information et, qu’en tant que manager, vous serez assez serein à ce moment-là pour gérer la plupart des réactions.

C’est l’occasion de présenter une ambition forte et mobilisatrice pour les équipes qui va canaliser l’énergie et permettre la gestion du changement.

Ce qui manque à Elise et Didier dans Alabama Monroe pour surmonter cette épreuve, c’est un projet à deux sur lequel se concentrer pour avancer ensemble. Décider de ne plus subir malgré les événements…

Le cirque des Romanès, ou comment réussir sans tomber – dans le culte de la perfection et de la performance

Ce mois-ci, nous voyageons dans les Balkans avec le dernier spectacle de cirque de la famille Romanès « Les nomades tracent les chemins du ciel ». Imaginez, samedi après-midi, Porte Maillot à Paris. Vous entrez sous le chapiteau du dernier cirque tzigane d’Europe. Les derniers spectateurs s’installent. Noir. La grande tribu Romanès (du grand-père Alexandre à ses petites-filles) salue le public et hop, ça commence. 

Les numéros alternent entre disciplines purement circassiennes (acrobaties et jonglages) et danses folkloriques sur le rythme effréné des musiques tziganes balkaniques.

Amateurs d’animaux exotiques, d’acrobates perchés à 10 mètres ou autres numéros grandioses, passez votre chemin…

Les Romanès offrent un spectacle qui leur ressemble. L’idée n’est pas d’impressionner par des prouesses à couper le souffle mais d’offrir un moment hors du temps, de la poésie et surtout de la joie. Personne ne recherche la performance comme but unique. Un acrobate rate un cerceau, un autre fait tomber un chapeau et enfin le chien n’obéit pas. Peu importe. Ca fait partie de la vie. Et le public apprécie. Un pur moment d’humanité.   

Et si nous remettions cette fraicheur dans le monde du travail où les non-réussites sont souvent très mal vécues? Soit on les passe sous silence soit on en parle trop jusqu’à ce que quelqu’un endosse la faute personnellement. Pourtant, si on est sincère, personne ne peut sérieusement envisager le sans faute. L’échec faisant partie de la vie des entreprises, ce qui compte, c’est d’accepter ses plantages d’en tirer les enseignements et de continuer simplement le spectacle, comme les Romanès. 

 

Samson et Dalila

Qui ne connaît pas Samson et Dalila ? Récit biblique tiré de l’ancien testament et repris en opéra, en film… Cette histoire nous invite à repenser le rapport à nos ennemis, non pas en termes de morale ou par amour du prochain, mais par pure stratégie et pragmatisme

Samson a pour mission de libérer Israël de l’esclavage des Philistins. Au cours de sa quête, il tombe amoureux de Dalila qui le trahit et le livre à ses ennemis. Samson est alors enfermé, ses yeux sont crevés et il devient l’objet des railleries de ses geôliers. Jusqu’au moment où, poussé à bout, il retrouve un instant sa force d’antan, s’appuie aux colonnes du temple et le détruit d’un coup : Samson meurt mais les Philistins aussi et les Hébreux sont vengés.

En entreprise, c’est pareil ; même si la concurrence, interne ou externe, n’est (heureusement) pas toujours aussi violente, le mécanisme est identique. 

C’est une leçon originale de management que nous inspire cette histoire autour du manque de stratégie des Philistins. Oui, ils ont réussi à réduire à néant la force de leur ennemi par la ruse mais, ils ruinent leurs efforts en l’accablant. C’est parce qu’ils poussent Samson au désespoir que ce dernier, retrouve sa force et accepte de mourir pour venger son peuple.

En entreprise, c’est pareil ; même si la concurrence, interne ou externe, n’est (heureusement) pas toujours aussi violente, le mécanisme est identique. Accabler son adversaire, c’est le mettre en position de force : le pouvoir du désespoir.  Il n’a plus rien à perdre tandis que nous si. A l’inverse, en le ménageant, on atténue sa résistance.

Mais ménager son adversaire, ça veut dire quoi ? 

On s’oppose à votre projet de manager ? Ecoutez vos opposants (récalcitrants) pour réduire l’énergie qu’ils vont mettre à saper vos efforts.

Le dialogue social est compliqué ? Accordez-leur des victoires pour éviter que la tension ne monte.

Vous voulez défendre les intérêts de votre service vente vs ceux du marketing ? Commencez par vous demander ce dont le marketing a besoin.

Bref… climat social, compétition, influence, et j’en passe : comme au jeu de Go, ceux qui gagnent sont ceux qui ont un projet évidemment, mais surtout ceux qui laissent un espace de vie à leurs adversaires et leurs projets.

Enquêteur et manager, au fond c’est la même chose.

Avez-vous vu le film de Frédéric Tellier, «L’Affaire SK1»  s’inspirant de la traque du tueur en série Guy Georges ? Il nous rappelle d’autres polars qu’on a vu et lu et, en y repensant, le lien entre les métiers de manager et d’enquêteur saute aux yeux.
 
Un enquêteur est méticuleux, n’écarte aucune piste… Il collecte les indices les plus insignifiants ! Sherlock est le maître de cette technique. Il observe, traque les détails, confond les accusés avec leurs minuscules erreurs… Et c’est logique, parce que ce qui saute aux yeux est souvent trompeur. Le diable est dans les détails !
En management, pareil ! C’est en traquant les signaux faibles, les petits indices que l’on trouve de nouvelles pistes pour aider, challenger, faire grandir et du coup améliorer les performances.
 
L’enquêteur connecte tout à tout ; il ne croit pas aux coïncidences. Il suit sa proie sans relâche, fait feu de tout bois et met en relation tout ce qu’il trouve.
Le manager, pareil ! il a souvent le tort de faire des actions isolées. Mais quand il cherche à tout connecter : les gens entre eux ; une action de la semaine dernière avec une action de cette semaine ; un axe de progrès avec une tâche nouvelle. Alors, l’efficacité de chacune des actions se multiplie parce qu’elles deviennent cohérentes. 
 
Le bon enquêteur enfin n’est pas juste un cerveau logique qui veut résoudre un problème mathématique ; regardez Rust dans True Detectives, Serpico de Sydney Lumet, Bosch des  romans de Connelly ou encore l’inspecteur Harry. Ils se battent pour une cause plus grande : une idée de la justice, une réparation d’une culpabilité enfantine, une idée de la morale. Pourquoi ? Parce que sans but, leur métier n’est pas supportable et trop risqué. La cause donne du sens à chaque enquête.
Le manager, pareil ! S’il ne veut que faire progresser un individu ou résoudre un problème, il aura bien moins de force que s’il a une idée de ce qu’est le management ; de comment il veut réaliser sa mission. 
 

Pourquoi est-ce si proche ?

Et bien parce que l’enquêteur et le manager travaillent avec la matière humaine, ses forces et ses faiblesses. Le manager est un enquêteur permanent dont la mission n’est pas d’arrêter les meurtriers mais de révéler les héros !

La dernière fois que vous avez surpris votre équipe, c’était quand ?

A l’instar de la célèbre « routine du couple » qui dévitalise la relation amoureuse, l’engagement et la mobilisation des équipes sont en danger quand s’installe la « routine managériale ». De la première on fait des milliers de livres et d’articles dans les magazines, de l’autre on ne dit rien. Attention, sinon vos équipes iront voir ailleurs… 

 

La routine vient d’abord de la volonté de bien faire 

C’est toujours pareil, au début on a plein de petites attentions, on se dit qu’on sera différent, meilleur, on prend des bonnes résolutions. C’est la période que, y compris dans le cadre professionnel, on appelle souvent la « lune de miel ». Mais nous sommes dans des sociétés qui, à coups de surcharge et de reporting, nous ramènent vite dans le rang.

Souvent après une crise ou un rush, la peur de faire des erreurs reprend le dessus, efface nos ambitions premières et les remplace par un comportement plus « classique » destiné surtout à ne pas faire de faute.

C’est souvent comme cela que la routine s’installe… 

Certains ont alors tendance à reproduire ce qui a marché ailleurs, comme une bonne recette… aucune raison que ça ne fonctionne pas cette fois-ci ! D’autres se contentent de faire ce que tout le monde fait : un directeur d’usine va travailler son schéma directeur, son plan à 3 ans, ses processus façon Lean ; un DG va lancer un projet de relance « CAP 20XX » ou « XXX 2.0 » qui sera déployé strate par strate et lancé à l’occasion d’une messe très solennelle.

Deux façons de faire qui ont le même défaut, celui de ne pas construire une dynamique par et pour les équipes, qui elles commencent à avoir l’impression que « l’on a déjà vu cela ailleurs ». 

Bien sûr, nous ne jetons pas l’opprobre sur les managers qui jonglent entre leur volonté de marquer leur empreinte et la rigidité d’un système qui, comme nous l’avons dit le mois dernier, réduit leurs marges de manœuvre.

Avant (Il y a 20 ans et plus), nous avions des organisations qui changeaient peu et, en revanche, des managers assez différents. Aujourd’hui, c’est l’inverse : les organisations changent sans cesse et les managers sont de plus en plus uniformes, pas interchangeables encore mais c’est un risque pour l’avenir.

Les managers s’enchaînent, se ressemblent, se font prévisibles et presque invisibles.

La routine est là.

 

La routine, le manque d’écoute, la lassitude

Le premier effet de la routine, c’est le manque d’écoute. Celui du haut de l’organisation d’abord qui, lancé dans une démarche lourde et parfois sourde, ne s’attache plus à prendre en compte les remontées du terrain ou même à s’assurer que les équipes suivent encore. 

Manque d’écoute du bas vers le haut aussi, car les équipes lassées ne s’impliquent plus dans l’énième projet ou l’énième plan d’action qui leur est proposé. On cesse de se remettre en question et on continue à faire un peu plus de la même chose, la force des habitudes. 

Et comme dans un couple, on risque de finir par aller voir ailleurs : soit le manager, qui change de terrain de jeu pour commencer un nouveau cycle, soit des membres des équipes qui, sans forcément changer d’entreprise, ne sont plus vraiment là.

Vous devez avoir UNE idée en tête : surprendre. Surprendre en n’organisant jamais deux événements collectifs de la même manière (hors rituels), en rajoutant toujours un élément qui étonnera et marquera les esprits. 

La solution : des rituels mais pas de routine

Pourtant, l’amour est encore là. Nous voyons tant de collaborateurs qui ont un fort sentiment d’appartenance à leur entreprise, qui aiment leur métier et en sont fiers. Nous voyons tant de managers engagés, passionnés, donnant sans compter de leur temps et de leur intelligence pour faire progresser leurs équipes. L’envie est rarement partie, elle est endormie plutôt.

L’enjeu n’est donc pas de tout jeter ou de tout faire différemment. Au contraire la première chose à faire est de poser des bases saines : un projet d’entreprise stable, des rituels solides et pérennes. Prendre des décisions prévisibles, parce qu’elles sont connectées à une vision qui est claire pour tout le monde, ce n’est pas un défaut, c’est un socle. Mais il ne faut pas s’arrêter là.

Ce qu’il faut faire, c’est changer votre manière de faire. Là-dessus, vous devez avoir UNE idée en tête : surprendre. Surprendre en n’organisant jamais deux événements collectifs de la même manière (hors rituels), en rajoutant toujours un élément qui étonnera et marquera les esprits.

Surprendre, ce n’est pas de faire quelque chose d’incroyable mais quelque chose de différent. De donner l’impression à votre équipe que vous vous remettez en cause personnellement, vous ou votre Codir, que vous savez prendre des risques, que vous vous exposez. Si vous faites cela, vos équipes auront envie de venir, de vous écouter et, pour certains, de prendre des risques eux aussi.

Après, une grande partie des conseils applicables aux couples sont parfaitement adaptés à la relation managériale :

  • Improviser : être spontané, ne pas tout ficeler à l’avance, éviter de tout planifier et laisser de la liberté à votre équipe.
  • Tenter de nouvelles choses : ne pas croire que « ça ne marchera jamais » et que « ça ne vaut même pas le coup d’essayer ». Accepter le droit à l’erreur.
  • Communiquer, communiquer, communiquer.
  • Multiplier les petites attentions : pour valoriser et soutenir quand vos équipes en ont besoin. 

Bien sûr, surprendre n’est pas une fin en soi. Ce qui soude à long terme, dans le couple, dans l’amitié ou en entreprise, c’est ce que nous vivons ensemble, ce que nous construisons ensemble.

 

Et cette construction n’est pas qu’un fait : ce n’est pas le fait d’avoir un enfant qui construit, c’est de l’élever ; ce n’est pas le fait d’emménager dans un nouvel appartement, c’est de vivre dedans. Bref, l’animation de l’équipe doit se rythmer par les réalisations communes et pas uniquement par l’animation astucieuse et originale du quotidien.

ALBUS CONSEIL