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Leçons managériales avec Malcom

Si vous avez grandi dans les années 2000, vous connaissez forcément cette série. Pour les autres, prenez le temps d’y jeter un coup d’œil ! On n’est pas déformés par notre boulot au point de tout regarder sous le prisme du management (quoique) mais cette série vaut l’exercice : au-delà d’être sympa à regarder, chaque personnage représente de grandes caricatures du management, sans oublier toutefois de leur attribuer de la consistance et parfois même un peu de nuance. 

C’est l’histoire d’un petit gars surdoué en train de basculer dans l’adolescence, entouré d’une famille déjantée. La mère, Loïs, dirige par la peur une famille de 4 garçons ayant pour mission première de la rendre folle. Le père, Hal, survit tant bien que mal entre la furie de sa femme et les fourberies de ses fils. Et les 4 fils redoublent d’originalité pour faire vivre un enfer à leurs frères mais, par-dessus tout, à leurs parents. 

Mais attention, ça n’est pas une simple histoire familiale : cette série fait une critique corsée de la société américaine, sur un ton similaire à celui des Simpson ou de South Park, en représentant à l’écran des personnages touchés par la précarité et ostracisés par le reste de la population. Des personnages qui excellent toutefois dans l’art du « D comme débrouille » et qui ont la force de se sentir au-dessus des regards critiques. 

Pour vous, on s’est donc amusés à décrypter les parents de Malcom, Loïs et Hal, en tant que managers. Et qui sait ? Peut-être que vous vous retrouverez dans certains aspects de leur personnalité et que les conseils qu’on va donner à ces personnages pourront vous filer un petit coup de pouce à vous aussi ! 

 

Lois, une manageuse autoritaire mais humaine

 

Dans la série Malcom, on voudrait… la mère ! 

Loïs est caissière dans un supermarché où il est de commune mesure de virer sans vergogne ses salariés et de les payer au lance-pierre. Mais elle est toujours à l’heure, irréprochable et surtout impossible à soudoyer, même avec une promotion qui pourrait lui changer la vie. Bien qu’elle n’occupe pas un poste de manageuse, on s’intéresse à Loïs parce qu’on peut le dire : elle sait manager son patron, ses collègues, son mari et ses fils. 

 

Si elle était manageuse dans votre entreprise

Loïs serait une vraie boss : ne se laissant jamais marcher dessus, elle fixe des objectifs adaptés à chacun, elle assure le suivi de la mise en place des actions en conséquence et elle excelle dans l’art de recadrer et de sanctionner ! 

C’est aussi une manageuse hyper engagée, ce qui fait d’elle quelqu’un d’investi dans son travail et de passionné pour son équipe. Le problème c’est que, parfois, cet engagement peut lui coûter et l’empêcher de prendre du recul sur les personnes qui l’entourent. Elle est exigeante et s’attend à ce que tout le monde le soit, tout le temps, et elle se fatigue beaucoup à l’expliquer. 

Toutefois, cette partie de sa personnalité est contrebalancée par les prouesses dont elle peut faire preuve en tant que coach. Elle est animée par les progrès que peuvent faire ses fils et s’adapte à leur potentiel, elle n’exige jamais d’eux des choses impossibles à réaliser :

  • L’ainé a été gâté pourri et ne sait rien faire sans sa mère : elle veut qu’il s’en émancipe et le laisse parfois bien galérer pour y arriver.
  • Le second pourrait être qualifié de débile profond : elle l’aide davantage que les autres et le pousse dans ses passions.
  • Le troisième est un génie mais pas lorsqu’il s’agit des interactions sociales : elle l’incite à se sociabiliser et le conseille sur ses relations.
  • Le quatrième est d’une gentillesse qui peut lui jouer des tours : Loïs l’aide à s’endurcir et à sortir du syndrome du sauveur. 

 

Les conseils qu’on pourrait lui donner

A jeter : les excès de colère. On sait que ça n’est pas toujours facile de garder son calme face à un collaborateur exaspérant, désengagé de son boulot et qui ne fait pas preuve de bon sens… Le risque, pour vous comme pour lui, c’est de basculer dans l’acharnement et d’aller jusqu’à faire à sa place pour avancer. La meilleure solution ? Premièrement : respirer un grand coup ! Et puis autorisez-vous à ne pas répondre tout de suite, à prendre du recul et à réévaluer votre demande en vous assurant qu’elle est bien adaptée aux compétences de cette personne. Accompagné d’un peu de lâcher prise, la situation sera beaucoup plus simple à vivre pour vous (et peut-être pour votre collaborateur). 

Une autre parade que vous pouvez utiliser : parlez plus régulièrement de vos frustrations. Ça vous permettra de les aborder plus calmement et d’éviter le côté explosif d’une accumulation de tickets. 

A garder : l’émotion que vous mettez dans votre travail et votre capacité à mettre des défis à la hauteur des qualités de chacun. C’est ce qui fait que vous êtes capable d’animer les incompétents et de leur donner une seconde chance qui pousse l’admiration. Vous vous assurez que chacun d’entre eux détient les billes nécessaires à leur réussite et c’est une force ! 

Vous êtes aussi une boss qui sait recadrer (ça se voit sur votre photo) et vous ne cachez jamais les difficultés, c’est ce qui fait que vos conseils sont justes, sans mauvaises surprises. 

A muscler : votre empathie. Vous en avez, sans aucun doute, sinon vous ne seriez pas aussi douée pour manager les collaborateurs les plus faibles de votre équipe. Mais prendre le temps de leur faire des feedbacks positifs, de les féliciter pour leur réussite, de reconnaitre leurs efforts, rendra les temps de recadrage que vous leur faite d’autant plus significatifs. 

 

Hal, un manager effacé qui est en fait un coach né !

 

Dans la série Malcom, on voudrait… le père ! 

Hal, c’est ce père froussard et absent, bien content que sa femme prenne le mauvais rôle. Il est à peu près là pour les bons moments et, quand il s’agit de remonter les bretelles de ses enfants, il part en courant. Quant au travail ? Si on l’entend en parler c’est parce qu’il a fait une énorme boulette ou qu’il cherche un prétexte pour ne pas s’y rendre. 

Alors pourquoi on vous en parle ? Parce que dans l’épisode 2 de la saison 6, Hal se révèle être en fait un excellent manager et un super coach, capable de déceler chez chacun la petite pépite qui bénéficie au collectif. 

 

S’il était manager dans votre entreprise

Vous seriez sûrement fan de Hal : sensible et dévoué, il n’en est pas moins capable de proposer des ambitions fortes, de fixer un cap et de donner du sens à ce que fait son équipe en lui permettant de se projeter et d’avancer en tant que collectif. 

Grâce à son empathie, il sait déceler chez chacun des bodybuilders de son équipe, la petite qualité qui fait de lui quelqu’un d’unique et de complémentaire au sein du groupe. Il permet à chacun d’entre eux de trouver son rôle et d’être mis en valeur, sans empiéter sur les autres. 

C’est ce qui fait de lui un bon coach mais aussi un véritable leader : savoir se mettre en retrait pour valoriser ses collaborateurs, se mettre dans l’ombre pour admirer celui qu’on a poussé dans la lumière et en faire sa fierté, c’est aussi ça être leader. Pas besoin d’un gros charisme ou d’énormes muscles pour que ça marche ! 

 

Les conseils qu’on pourrait lui donner

A jeter : comme vous êtes coach et que vous avez du lead, cela peut parfois s’avérer difficile de ne pas faire à la place de vos collaborateurs. C’est normal et toujours tentant. Le problème c’est que si vous prenez régulièrement ce rôle, vous vous retrouverez avec des collaborateurs qui pensent qu’ils ont besoin de vous pour accomplir des tâches qu’ils peuvent parfaitement faire d’eux-mêmes. Et vous vous retrouverez submergé par le travail. 

A garder : votre curiosité pour l’autre et le crédit d’intention que vous lui accordez, c’est-à-dire votre capacité à vous dire que la personne que vous avez en face de vous est parée de bonnes intentions. Votre curiosité vous pousse à aller chercher chez l’autre ses qualités et à lui donner sa chance. En partant du principe que chacun a des qualités nécessaires au collectif, une bonté naturelle et une finesse d’esprit, vous donnez à vos collaborateurs toute la confiance dont ils ont besoin pour progresser et s’assumer. Chapeaux bas ! 

A muscler : vos feedbacks négatifs. Vous êtes doué pour dire les choses qui vont bien, et ça n’est pas rien car c’est un exercice plus difficile qu’il n’y paraît. Bien sûr, il ne s’agit pas ici de descendre la personne que vous avez en face de vous mais de parler ouvertement de ses difficultés et de ses axes d’amélioration. D’ailleurs, c’est le fait que vous soyez capable de faire des feedbacks positifs qui fait que ces points auront d’autant plus de sens pour votre collaborateur. En vous appuyant sur des faits concrets et en les accompagnant de conseils pour s’améliorer, il pourra même vous remercier ! 

Si vous êtes particulièrement mal à l’aise sur cet exercice, n’hésitez pas à métacommuniquer, c’est-à-dire à exprimer en toute transparence votre difficulté à faire ce feedback, votre collaborateur sera plus enclin à l’entendre.  

C’est toujours les chefs qui font échouer les séminaires

Quand on réunit ses équipes dans un séminaire, on se demande toujours si elles seront à la hauteur, si elles adhèreront, si elles seront engagées. Je comprends cette crainte, elle est naturelle. Mais rassurez-vous, la solution est en haut, tout en haut.

 

C’est un moment rare, je veux que ça marche !

Un patron qui organise un séminaire est souvent un peu tendu. Il a dépensé de l’argent pour un beau lieu, des nuits d’hôtel, des repas, souvent un animateur extérieur super cher, parfois une conférence, parfois des goodies. Il joue gros et il sait qu’il ne refera pas ça de sitôt. 

Alors, il faut y arriver. Il faut mobiliser. Il faut que les équipes soient contentes. « On fera une enquête à la sortie ? » demande-t-il à son prestataire. « Je veux que ce message s’imprime ». « Je veux qu’ils comprennent ça ». « Et il faut tenir compte de l’hétérogénéité » « Et il faudrait aussi en profiter pour parler de ça ».

Plus globalement, sans personnaliser le sujet, on invite souvent trop de monde, on veut mettre trop de sujets, résoudre dans ce moment extraordinaire plein de problèmes qui trainent.

 

Pendant ce temps les équipes, comme au spectacle, attendent de voir

Le participant invité à ce séminaire est un spectateur de théâtre ou de cinema dans la file d’attente. 

Parfois ses attentes sont énormes. C’est le film de l’année, il l’attend avec impatience, il a peur d’être déçu. Il sait qu’il en attend un peu trop mais il n’arrive pas à se raisonner. 

Parfois ses attentes sont faibles, parce qu’il vient trainé par son conjoint, ses amis, obligé. Parce qu’il connait ce genre de film et il n’aime pas ça. A part il y a 4 ans mais c’est presque l’exception qui confirme la règle.

Un participant c’est presque toujours un spectateur, un consommateur et du coup il va juger par rapport à ses attentes. Et il faut bien le dire, celui qui en attend des merveilles est souvent déçu. Celui qui n’en attend rien peut être agréablement surpris mais il est quand même souvent enclin à conforter son intuition initiale.

Bref, pendant que le patron se fait du mouron, les autres attendent d’être surpris. Dans une entreprise où tout le monde est supposé être partenaires du spectacle que l’on produit, on se retrouve avec une sorte d’opération séduction avec un seul qui drague 10, 20, 100, 1000 personnes… Spoiler alerte, il a de grande chance d’échouer….

 

Alors le chef fonce, il croit en son pouvoir

Notre chef, avec ses super attentes, est peu contredit dans la préparation. C’est le chef après tout. Ou c’est mon client. Et donc il va au séminaire avec ses attentes, ses peurs ses rêves.

Parfois il balance la sauce. Souvent avec de l’émotion. Comme il sent que ses équipes sont peu mobilisées, il appuie encore plus sur le sens, joue à fond sur les convictions ; il pense devoir être leader. Comme il est agacé, il lâche une petite phrase ; on lui a dit d’être sincère. Comme il joue gros, il veut traiter plein de sujets, enfin, et il blinde son séminaire de décisions à prendre ; il se souvient qu’une bonne réunion se termine par un plan d’action. Notre bon chef, surtout si c’est un bon orateur, s’il se sent bien en public, va déployer sa panoplie du parfait petit leader, son Steve Jobs illustré. Son exemple de rugby, avec les valeurs et tout et tout. Son anecdote édifiante sur la fois où à leur place il a été extraordinaire. Son coach de prise de parole lui a appris des bribes de storytelling, il a vu plein de TEDX, il va raconter une histoire. Ca va marcher le coup de son week end avec son fils.

Parfois le leader ou les leaders deviennent eux aussi des spectateurs. Des spectateurs de l’animation, de leurs équipes. Ils s’agacent du silence ou du fait qu’on ne va pas dans le bon sens mais n’interviennent pas de peur de casser la dynamique ou parce qu’ils se sont dit qu’ils devaient rester en retrait. Ils finissent lui même un peu déçus du moment, frustrés du déroulement.

 

Mais le spectacle sonne faux

Face à la débauche d’énergie, d’objectifs, d’attente, les équipes, perspicaces, voient où le chef veut en venir : il veut vendre son projet, sa vision. Sauf que pour avoir confiance dans un chemin, il faut cette avoir en tête la destination, l’ambition, mais aussi s’accorder sur le point de départ. Et les équipes voient bien que le chef ne veut pas entendre parler des moyens qui manquent, des fatigues, des défauts de coopération. Il n’a pas envie de voir ses équipes douter, freiner, refuser. Il ne veut pas voir la réalité.

Dès lors, un séminaire est souvent un moment un peu factice, où on ne se croise pas. Où on fait semblant de croire aux enseignements de la conférence, aux plans d’actions gonflés d’orgueil, aux déclarations d’intention vibrantes. Mais que va sortir vraiment de ce moment ? Que reste-t-il ? Ces 2 questions sont associés à beaucoup trop de séminaires. Et encore ce ne sont pas les pires résultats ; souvent le séminaire décourage et entérine pour longtemps la sensation de mondes parallèles qui ne peuvent se parler. C’est une peu le syndrome Macron. Manifestement brillant, il peine à montrer qu’il comprend le terrain. Le comprend-il ? Personne ne sait en réalité. Mais ce dont nous sommes sûr c’est que s’il comprend, il peine à le faire sentir.

Face au manager spectateur, qui semble observer sans agir, les équipes sont troublées. Eventuellement vigorée par la place qu’elles ont, elles seront peut être plus actives.. Mais on va souvent craindre ses réactions après coup, s’étonner de sa passivité soudaine. Se demander ce qui sera fait des échanges. Etc…

Le chef dans son séminaire sonne trop souvent faux, déconnecté, trop loin devant, ou trop effacé, trop cassant parfois. Le chef dans un séminaire peut devenir un poison. L’un des seuls vraiment prévisible et anticipable.

 

Il faut accorder les violons

Pour qu’on semaine sonne juste, tout se joue donc dans la préparation des chefs, évidemment.

Donc, quelques règles :

  1. Préparer toute intervention d’un supérieur hiérarchique, surtout s’il n’assiste pas à tout le séminaire : priorité à l’écoute, obligation du positif, finir par la prise de hauteur et donc l’exigence.
  2. Se préparer au scénario positif ET au scénario négatif pour réagir avec flegme, sans colère ou sur satisfaction.
  3. Exprimer ses émotions, doutes et questionnements pour générer de la proximité.
  4. Lâcher ses objectifs très rationnels pour s’offrir un moment moins sous la pression du résultat.
     

Si un Chef, un codir sonne juste, 50% du travail est fait parce c’est ce que les gens attendent sans même le savoir, et parce qu’ils n’y croient plus depuis un moment. L’effet de surprise sera grand et infiniment bénéfique.

Si au contraire vous faites tout pour que vos équipes comprennent vos idées et correspondent à vos rêves, c’est mal parti.

 

 

 

Préparons-nous à ne rien préparer !

Quelques semaines se sont écoulées depuis le début du confinement, et la plupart des entreprises s’emploient désormais à « préparer la sortie ». C’est une tâche cruciale, mais souvent abordée avec la mauvaise méthode. Résultat, on se fabrique plein de nouveaux problèmes pour les mois à venir…

Préparer la sortie… cette mission semble excitante, car elle est à la fois fondamentale et prospective. Et elle pose des questions a priori passionnantes. Certaines des questions sont de nature tactique : Quels clients vont redémarrer en premier ? Quels seront leurs besoins prioritaires ? Comment s’organiser en conséquence ? Et puis d’autres sont plus stratégiques : Comment repenser notre business modèle pour qu’il soit moins vulnérable aux crises à venir ? Devra-t-on élargir ou au contraire réduire la largeur de notre gamme ? Être plus polyvalents ou plus spécialisés dans nos capacités de production ? Etc…

 

Bref, on s’y prend tous de la même manière pour préparer la sortie : on cherche des réponses à des questions qui concernent le futur…

Et c’est probablement une grave erreur… On ne sait pas ce qui va se passer ! C’est même LA donnée fondamentale du problème. La prospective, la proactivité, l’anticipation, tout ça fonctionne quand il y a des précédents, des courbes à prolonger, des facteurs bien identifiés, qu’on peut faire tourner dans un modèle, lui-même déjà éprouvé dans des conditions comparables.

Mais ici et maintenant, rien de tout ça ! Dans le contexte d’Avril ou de Mai 2020, anticiper, c’est jouer à Nostradamus ou à Paco Rabanne… Les prédictions d’experts, de consultants ou de managers pullulent actuellement sur les réseaux et dans les entreprises. Certaines de ces prédictions s’avèreront, et seront mises au crédit de la clairvoyance de leur prophète.

Mais combien de mauvaises décisions seront prises sur la base de toutes ces prédictions hasardeuses ?

 

Aujourd’hui, être clairvoyant, c’est assumer de ne faire qu’improviser !

Que ce soit sur les sujets tactiques (choix de reprise) ou sur les sujets stratégiques (choix d’avenir), il va falloir se préparer à improviser. Bien sûr, cela ne veut pas dire faire n’importe quoi sans réfléchir. Mais à première vue, c’est quand même faire le contraire de l’image qu’on a d’un grand manager… Vous savez, le stratège, celui qui pense loin, qui prépare, qui planifie ?

Improviser, effectivement, c’est agir sans trop réfléchir, et sans planifier. Et cette attitude non proactive, non volontariste, peut être très difficile à assumer : vous, en tant que manager, préférez être dans l’action ou la réaction ??

L’improvisateur, lui, est dans la réaction… Et du coup, il n’est jamais à l’abris de toutes sortes de « procès en improvisation »… Comme si s’adapter, tenir compte de ses erreurs, changer de doctrine, prendre en compte de nouvelles données, était le signe distinctif du non-professionnalisme.

 

Mais alors pourquoi c’est bien ?

Parce qu’improviser est la meilleure manière d’innover en contexte incertain. C’est baser ses décisions sur le présent. C’est être disponible au présent plutôt qu’accaparé par une tentative d’anticipation qui, en ce moment, n’est qu’illusoire. C’est apprendre à vivre avec l’incertitude et s’en nourrir, plutôt que de s’acharner à la réduire.

C’est une vraie présence, une présence joueuse, qui accepte et accueille tout ce qui advient, et qui permet d’utiliser pleinement le potentiel de la situation. Ceux qui gagneront seront ceux qui sauront écouter, s’adapter, et ajouter de la valeur ajoutée à leur offre, en fonction des données du moment.

C’est aussi privilégier une issue en admettant que je n’ai pas pleinement la main : Je préférerais que mon activité reparte fortement dès le mois de Mai, et que mes équipes soient mobilisées à fond pour cela, mais ça ne dépend pas uniquement de ma volonté… Si je force trop dans cette direction, de manière trop proactive ou volontariste, que va-t-il se passer ? Et bien je risque à la fois de braquer, et de passer pour un manager déconnecté de la réalité.

Alors je vais plutôt être attentif aux opportunités, sans forcer, et surtout sans plan préalable. Je vais faire au mieux avec ce qui est, avec qui on est, et avec ce dont on dispose.

 

Le paradoxe, c’est qu’improviser ne s’improvise pas !

Et ce qu’il faut justement préparer, ce qu’il faut faire émerger, c’est l’état d’esprit très particulier de l’improvisateur : jouer avec les contraintes, explorer dans des directions inattendues, s’appuyer sur ce que l’autre propose, tester des trucs et être Ok pour revenir en arrière, accepter les propositions (le fameux mode « oui et… » plutôt que « oui mais… »), ne jamais chercher à avoir raison, perdre avec force et grâce, renoncer avec panache à quelque tentative audacieuse mais inféconde, s’en amuser, faire briller les initiatives de ses collègues…

Cet état d’esprit, il aujourd’hui comme un muscle atrophié dans les entreprises. Vous allez mettre un peu de temps à le redévelopper… par le plaisir, la curiosité, et par le jeu. C’est donc le moment de jouer et faire jouer ! Trouvez avec vos équipes des sujets anodins pour commencer, et utilisez-les comme prétexte au jeu.

Mais cet état d’esprit, il s’évanouit littéralement en présence de deux émotions : la méfiance et le ressentiment. La première chose à faire pour rendre l’improvisation possible, c’est donc sans doute de solder des historiques relationnels dans les équipes. Ces points de blocages potentiels doivent être abordés dès maintenant, avant la fin du confinement. Cela doit être fait à l’initiative des managers, s’ils ne veulent pas que tout ça leur pète à la figure au moment de la reprise sous forme d’un attentisme, c’est à dire d’un refus d’improvisation.

C’est donc le moment de changer de registre relationnel. C’est le moment des mea culpa,  et plus globalement c’est le moment de traiter les conflits et les bouderies dont on s’est accommodé depuis des mois ou des années.

 

Et se préparer à improviser, c’est aussi changer de boussole

Habituellement, c’est le « quoi » ou le « combien » qui servent de Nord à notre boussole : quoi produire, quel service offrir, avec quels avantages comparatifs, combien va-t-on en produire, que faire pour attirer l’attention de nos clients ou obtenir leur fidélité ? Le problème du quoi et du combien, c’est que ça nécessite de la prévision. Ce sont des points cardinaux qui s’accommodent mal de l’incertitude.

Alors que le Nord de l’improvisateur, c’est le « comment ». Je ne sais pas encore ce que je vais décider, ce que je vais recommencer à produire dans mon usine, les missions que je vais réaliser dans mon cabinet de conseil, les projets que je vais mener dans mon bureau d’étude. Je ne sais pas comment je vais réagir à des circonstances dont j’ignore encore tout.

Mais je peux décider comment, en fonction de quel idéal, de quelle envie, de quelle quête ou aspiration personnelle. Ça tombe bien, c’est justement le moment de faire le point sur ce qui est vraiment important pour moi…

C’est donc l’autre priorité managériale du moment : l’encouragement à la reconnexion à soi, c’est à dire à la flânerie, à la lecture, aux journaux intimes, aux conversations sans but particulier.  Quand, sinon maintenant, pouvons-nous réapprendre à faire tout ça ?

C’est bien dans ces activités-là, toutes celles qui ne sont pas utilitaristes, que nous trouverons les ressources et les inspirations à de grandes improvisations professionnelles.

Les crapauds fous ou comment votre projet réussit grâce à l’audace

En janvier, nous célébrions les atouts du management punk et marginal. Ce mois-ci, on en remet une couche. Laissez-vous entrainer au théâtre du Splendid pour la pièce « Les crapauds fous ». C’est l’histoire vraie et surprenante de deux jeunes médecins polonais, Eugène Lazowski et Stanislaw Matulewicz, qui ont inoculé le vaccin contre le typhus aux habitants juifs de leur village en 1940.

Leur but est de les rendre positifs aux tests de dépistage pour dissuader les nazis de s’approcher de trop près et ainsi les sauver de la déportation

Mais leur ruse ne tarde pas à éveiller les soupçons et les deux amis doivent rivaliser d’inventivité pour que la supercherie ne soit pas découverte. 

Embarqués dans leur projet fou, nos deux médecins osent tout pour contrer les obstacles mais dans tous les cas ils y vont à fond.

Le plus fou, dans cette histoire, ce n’est pas tant l’objectif poursuivi que le chemin pris pour y arriver. Stanislaw a fait un pari. Il n’avait aucune certitude que le vaccin du Typhus réponde positif au test de dépistage. Pourtant ca a marché ! Constatant le résultat, Eugène ose voir les choses en grand. Puis, embarqués dans leur projet fou, nos deux médecins osent tout pour contrer les obstacles mais dans tous les cas ils y vont à fond. Résultat : 8.000 Juifs sauvés! Une belle prime à l’audace !

Et l’audace chez nous, managers ? On la désire mais on l’accepte mal en vrai. La créativité est recherchée et valorisée à la condition qu’elle ne sorte pas trop des clous. Les idées originales, trop différentes, voire bizarres font peur à plus d’un titre. Les résultats étant incertains, il y a les risques de contre-performance et de ne pas être pris au sérieux par la direction, ses pairs et les équipes. 

Souvent, un manager, suffisamment courageux, se lance et développe une idée audacieuse, mais recule devant le risque.

Alors qu’il n’y a qu’une seule chose à retenir de nos médecins : croyez en vos idées et celles de vos collaborateurs, même celles les plus folles qui dérangent les esprits et, surtout, creusez-les au maximum pour leur donner une réelle chance de succès. Qui sait : elles peuvent vous emmener loin.

La pièce se joue jusqu’au 30 juin. Courez-y !

La noblesse du management transverse

Aujourd’hui le mode projet est roi dans les grandes entreprises. C’est logique, le temps s’accélère, et il faut s’adapter de plus en plus vite aux nouvelles données du contexte, en impliquant tous les services. Et pour piloter tous ces projets, il faut des chefs de projet, qui se trouvent donc en situation de manager en transversal.

Déjà que manager une équipe dans le cadre de relations hiérarchiques n’est pas forcément évident, là, le management transverse amène des contraintes supplémentaires, ce qui le rend d’autant plus délicat… mais aussi enthousiasmant !

 

Quand on gère un projet impliquant des collaborateurs de différents services, ça peut être coton !

C’est sûr que pour les personnes contributrices à votre projet, l’engagement qu’on leur demande en plus de leur opérationnel cœur de métier, c’est du temps en plus qu’ils n’ont déjà pas. En gros, ils peuvent se dire qu’ils ont autre chose à faire… Et ils ont droit de le penser en plus !

Sans compter que parfois, les résultats liés à ce projet ne font pas toujours partie de leurs objectifs annuels… donc quel serait leur intérêt de se mobiliser particulièrement pour votre projet ?

Un intérêt d’autant plus difficile à susciter en l’absence de lien hiérarchique entre le chef de projet et les contributeurs. Eh oui, inconsciemment, les demandes émanant de quelqu’un qui n’est pas directement dans la ligne hiérarchique ont moins de poids, et les actions sont parfois effectuées après « tout le reste », tardivement.

Cette absence de lien hiérarchique, ça veut aussi dire que chacun de vos contributeurs a lui aussi un manager… Complexe, car il faut aussi gérer les relations avec ces managers … et ils sont parfois nombreux ! Ce co-management informel est générateur de quiproquos et de tensions, et il paraît inconcevable de prévoir un temps avec chaque manager pour se caler. 

Là, on a simplement regardé les problématiques de relations individuelles, mais si on prend l’angle de vue du collectif, c’est manager une équipe dont les membres ont des objectifs et des besoins différents, voire contradictoires. Si par exemple vous demandez leurs avis à une personne du commercial et à une personne du SAV, il est évident que leurs enjeux sont presque opposés sur certains sujets, et il sera compliqué d’arriver à un consensus. Aïe! Ça semble bien mal parti !

Et face à tous ces pièges… en général on n’utilise qu’un nombre très limité de solutions

Au début, pour tenter de « séduire » les contributeurs, on essaie de minimiser le temps que ça va prendre, la difficulté que ça représente. En gros, on n’est pas très honnête et on essaie d’occulter le fait que participer à ce projet amène des contraintes.

Ça, ça ne peut durer qu’un temps, parce qu’au bout d’un moment, les gens se rendent bien compte que ça pèse dans leur agenda, et que c’est parfois compliqué… Et comme on leur a dit le contraire, ils se sentent un peu floués, et la confiance s’érode.

Du coup, une fois que les relations sont un peu tendues, il est difficile de mobiliser et de donner envie de contribuer aux projets. Donc souvent, dans ces cas-là, le manager du projet sollicite la hiérarchie pour faire agir les gens… Soit quelqu’un du top management soit le manager du contributeur pour obtenir ce dont il a besoin. On finit par imposer, et c’est dommage, parce qu’on tue d’un coup toute possibilité de créer de l’envie et de la motivation pour le projet ! 


Mais comment sortir du réflexe de faire appel à la hiérarchie ? Créer les conditions de la motivation plutôt que stimuler !

La première bonne pratique à mettre en place quand on sait qu’on va devoir demander quelque chose à quelqu’un, c’est d’inverser la logique ! Au lieu de se dire « ils devraient faire ça pour moi » c’est se poser plutôt la question « qu’est-ce que je peux faire pour eux ? ». Ça implique de se mettre à la place des contributeurs et d’imaginer ce qui pourrait leur être utile. Car si vous voulez faire d’une équipe votre alliée, vous devez commencer par devenir son allié. Et attention, être allié ça ne signifie pas être sympa, ça signifie poser des actes concrets en faveur du projet de la personne. 

Faites des difficultés du projet une source de motivation. En effet, on a tendance à croire que minimiser les difficultés est une bonne idée, alors que ce dont les gens ont besoin, c’est de vivre de vraies victoires et d’être fiers de ce qu’ils accomplissent. Alors valorisez ce qui est complexe et difficile dans ce projet, et surtout, pensez à célébrer ensemble les réussites au fur et à mesure de l’avancement du projet.

Soyez clairs sur les moyens mis à disposition pour débloquer les situations. Évidemment, valoriser les difficultés ne suffit pas… Pensez à mettre en place un dispositif clair pour aider les personnes qui peuvent se retrouver bloquées à une étape du projet. Communiquez régulièrement sur ce dispositif, car demander de l’aide n’est pas toujours un réflexe pour tout le monde, et peut même être coûteux pour certains.

Utilisez les avantages du mode projet. On l’a vu, le mode projet pose de nombreuses contraintes, mais il comporte aussi des aspects positifs qui donnent l’opportunité de donner envie. Oui, car un projet transverse, ça permet de décloisonner les services et d’échanger avec des collègues qu’on ne connaît pas. C’est aussi un espace où on peut bosser différemment. Pensez à proposer des façons novatrices et stimulantes de travailler ensemble au sein de votre équipe projet, comme le co-développement par exemple.

Votre rôle de manager transverse, comme celui de tout manager, c’est aussi de donner du feedback. On oublie trop souvent que les collaborateurs aiment savoir se situer et être rassurés d’être dans la bonne direction. C’est agréable de travailler avec quelqu’un qui s’intéresse à votre progression, non ?

De manière générale, dans votre façon de fonctionner avec votre équipe projet, il sera plus efficace de solliciter l’engagement des contributeurs que d’imposer une marche à suivre.

On constate que les solutions ne manquent pas pour simplifier et fluidifier le management transverse… on constate également que toutes ces solutions sont aussi celles qu’on recommande dans le cadre d’un management classique et hiérarchique. Ce type de management apparaît finalement comme le plus vertueux de tous, car en l’absence de lien hiérarchique, il incite à se demander « comment je peux faire pour donner envie et offrir un cadre de travail motivant au collaborateur ? ». Ce qui est finalement la question clé que tout manager devrait se poser en premier.

Le management transverse est le plus noble, c’est celui qui fait grandir, celui qui permet au manager d’être adulte et autonome dans ses relations avec son équipe, sans s’appuyer sur la soi-disant autorité de quelqu’un d’autre. Celui qui demande du courage.

Alors, que vous ayez un lien hiérarchique ou non avec vos collaborateurs, faites comme si vous n’en aviez pas, ça vous poussera à être un meilleur manager !

Perdez la mémoire pour mieux manager !

A l’époque où on parle de droit à l’oubli numérique, c’est-à-dire qu’on demande à des machines d’oublier ce qu’elles savent sur des personnes, il serait peut-être temps d’évoquer le droit à l’oubli pour les managers !

Et même bien plus que le droit, car c’est finalement une question d’hygiène managériale que d’oublier ce qui n’est pas utile à l’efficacité collective ou à l’accomplissement de sa vision.

Dans un contexte de surabondance d’informations et de psychose de la traçabilité, il paraît nécessaire sinon vital de prendre le temps d’oublier.


Mais prenons d’abord le temps d’examiner ce phénomène… 

Ce qu’il y a, c’est que deux facteurs viennent se combiner à cette surabondance d’informations, et ils complexifient la problématique. 

Déjà, on baigne au quotidien dans l’injonction à la performance : « Il y a plus d’infos à traiter ? Eh bien traitons-en plus ! »

Et puisque cette abondance d’informations est un changement dans notre environnement, il faut suivre le mouvement, vu qu’aujourd’hui, si on refuse de s’adapter au changement, on meurt ou on passe pour un vieux con !

Alors, pour être au top, que faire ?

Apprendre à tout retenir, tracer et traiter de peur de louper l’information qui fera la différence, qui permettra de prendre la meilleure décision possible ?

Ça paraît délirant, mais le danger c’est qu’aujourd’hui nous sommes dans une époque où ça paraît possible. 

Quelles données sont vraiment utiles, et quelles décisions je vais prendre selon quels critères après avoir consulté tout ça ? 

Avec le big data par exemple, on stocke un nombre de données incalculable. On a tous des tas d’applis qui nous permettent de tracer ce qu’on mange, ce qu’on dort, ce qu’on bouge, le nombre de calories prises, dépensées… Aussi ce qu’on a à faire, les idées qu’on a, les trouvailles de restos, de bon vin, ou paramétrer les sujets sur lesquels on veut recevoir des informations, des mises à jour… Bref, on pourrait enregistrer l’intégralité de notre vie aujourd’hui si on le voulait ! ou encore passer notre temps à nous informer avec toutes les données disponibles en open source. 

Ça paraît séduisant, comme ça, sauf que pendant qu’on fait ça, on ne vit pas, et une fois qu’on a fait ça, si on veut que ça serve à quelque chose, il faut prendre le temps de revenir sur ces données et en faire quelque chose ! C’est bien ça le problème. C’est que pour « manager » toutes ces données, ça prend du temps et de la réflexion en plus. Quelles données sont vraiment utiles, et quelles décisions je vais prendre selon quels critères après avoir consulté tout ça ? 

C’est d’autant plus problématique qu’aujourd’hui la frustration n’est plus à la mode, tant nous baignons depuis des années dans une culture de l’illimité, qui ne nous oblige plus tellement à nous mettre des limites.

J’assistais l’autre jour à une conférence débat sur le big data et j’étais stupéfaite des échanges entre les responsables IT pour la plupart de grands groupes… Pas stupéfaite d’entendre qu’ils étaient très rôdés sur la collecte de données, que tout était tracé, qu’ils ne perdaient aucune des infos auxquelles ils pouvaient accéder… Mais vraiment stupéfaite d’entendre toutes leurs questions sur le : que fait-on de ces données ? Comment on choisit les données à exploiter et comment les exploiter ? ça donnait l’impression que les entreprises avaient investi des sommes astronomiques sans idée claire de ce qu’elles allaient faire de toutes les données stockées ! Sans stratégie, comme si c’était juste la course de celui qui a le plus de données ! 

C’est comme avoir accès à la mine d’or et ne pas avoir de piolet pour en extraire les pépites… 

Cette volonté de conserver l’exhaustivité des données, ou d’utiliser cet accès illimité aux informations on le voit, mène très facilement à la noyade. 

En effet, on est tellement submergé par la quantité qu’on n’arrive plus à prendre le recul nécessaire pour faire de la qualité. C’est d’autant plus problématique qu’aujourd’hui la frustration n’est plus à la mode, tant nous baignons depuis des années dans une culture de l’illimité, qui ne nous oblige plus tellement à nous mettre des limites. Donc, savoir se frustrer et choisir les données ou informations qui nous ont vraiment importantes devient quasiment impossible. 

C’est comme avoir accès à la mine d’or et ne pas avoir de piolet pour en extraire les pépites… 

Dommage.

Si on élargit la réflexion au fait de vouloir garder en mémoire au maximum les éléments de notre quotidien, il est intéressant de regarder l’épisode 3 de la saison 1 de la série Black Mirror. Dans cet épisode, on suit l’histoire de Liam Foxwell, un jeune avocat à la recherche d’un emploi. Comme presque tout le monde, il a une puce implantée derrière l’oreille qui lui permet de stocker ses souvenirs et de les rediffuser quand bon lui semble. Et quand il se prend à douter de la fidélité de sa femme, il utilise donc les images en sa possession pour enquêter sur ce supposé adultère et confronter les deux amants.

Cette abondance d’informations et la facilité à les tracer, c’est tellement séduisant qu’on en devient addict. 

Cet accès à une mémoire artificielle et exhaustive, loin de faciliter les relations vient ici accentuer la méfiance et consolider la place des événements douloureux. Car, comme l’esprit humain est habitué de longue date à se concentrer sur ce qui est mauvais et dangereux (vestiges de l’instinct de survie !), il se concentre à revoir, revivre ces instants et entretenir le doute, la méfiance, la colère… Et vu qu’il y a un accès illimité, ça fait des dégâts !

Cette abondance d’informations et la facilité à les tracer, c’est tellement séduisant qu’on en devient addict. On le voit, qui réussit encore à résister aux notifications de son téléphone, ou à prendre mille photos à chaque instant et que l’on ne regardera sans doute jamais ? Il manque souvent derrière ces pratiques qui en soit n’ont rien de honteux, un objectif, une vision de ce qu’on va faire après avec ces éléments…

Et ce constat sociétal s’applique aussi au management. En tant que manager, on subit les mêmes causes et les mêmes conséquences pour soi et pour ses équipes.

Alors que faire ?

Et si la solution, c’était finalement de perdre la mémoire ? Oui, perdre la mémoire pour mieux manager !

Perdre la mémoire, c’est avant se donner l’opportunité de poser un regard neuf sur les situations et les personnes. Et en tant que manager, la façon dont on pose son regard sur les choses est déterminante. Oui, parce que pour prendre des décisions, arbitrer, c’est d’abord à partir de sa vision que l’on part.

Oubliez les moments de tensions !

Et pour ça, en préventif, il faut déjà dire assez vite à vos collaborateurs quand quelque chose ne vous plaît pas ! Sinon, gare au carnet de tickets ! ça permet de passer à autre chose et se concentrer sur ce qui est important maintenant. Et si vous choisissez de ne pas en parler, c’est à vous d’assumer, et de passer à autre chose. Oubliez ! De temps en temps, imaginer qu’on rencontre son équipe pour la première fois, prendre du recul ça fait du bien ! A soi et à son équipe !

 

Oubliez les positions ! 

Perdre la mémoire, c’est aussi avoir en tête que les positions des uns et des autres évoluent dans le temps. Parce qu’un allié ou un opposant, ça n’a de sens que sur un projet précis et à un instant T. Donc oublier la posture de ses collaborateurs sur le projet d’il y a 6 mois, c’est une question d’hygiène, pour permettre de démarrer sur de bonnes bases pour le nouveau projet. Et aussi avoir de bonnes surprises !

 

Oubliez les process !

Parce que ça fait du bien aussi la souplesse. Alors oui, il y a des éléments sur lesquels on ne peut pas déroger, comme la sécurité par exemple, mais ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas autour des espaces où la souplesse peut se distiller à juste dose. Regardez à nouveau les grands aspects métier dont vous êtes responsable, et demandez-vous « pourquoi on a toujours fait comme ça ? ». Oublier, c’est laisser la place à une saine interrogation de ce qui se fait, dans le but d’améliorer le système.

Au final, ne trouvez-vous pas que ça paraît paradoxal de vouloir retenir le passé et le présent alors que le futur est en construction ? Bien sûr, il ne faut pas tout jeter, ce serait totalement inconscient. On apprend aussi du passé, c’est évident. Mais il est important d’avoir en tête ceci : si on choisit de garder en mémoire, d’imprimer le passé ou le présent, il faut le relier avec le futur. Au final, les éléments du passé, les données, les informations sont des outils, et ils deviennent utiles quand on leur donne du sens et qu’on les utilise dans le cadre d’une stratégie cohérente. 

Avant de décider de garder une info, demandez-vous en quoi elle sert votre projet futur.

Mission : impossible – une utile leçon de piraterie

Ce mois-ci, nous regardons un blockbuster musclé, avec un Tom Cruise en pleine forme : le premier « Mission : Impossible ».

Pourquoi ? Pas pour la performance de Jean Réno bien sûr, mais parce que ce film est un authentique acte de piraterie d’un auteur, Brian de Palma, au coeur de la machine hollywoodienne ! Et nous pensons que dans les grands groupes, les managers devraient eux aussi se livrer à ce type de piraterie.

« Mission : Impossible » est donc une belle machine à dollars : acteurs bankables, courses poursuites, scènes spectaculaires, trahisons, explosions.

Mais c’est aussi un film de Brian de Palma accompli, contenant ses thèmes, ses obsessions, son style : la duplicité, la déshumanisation, les références hitchkockiennes, les écoutes, les complots. Je ne rentre pas dans le détail des motifs de Brian de Palma. Ce n’est pas le sujet mais sachez que ce film est considéré par les experts du cinéaste comme l’une de ses oeuvre les plus personnelles. Le tournage a, d’ailleurs, aussi, été  le théâtre d’une lutte avec Tom Cruise, producteur et superstar… 

  

Et donc, vous pouvez regarder le film à 17 ans, entre potes et avec pop corn… Ou le voir et le revoir, lire les livres qui lui sont consacrés (et oui, il y en a) et éprouver une réel plaisir cinéphile.

Nous pensons que cette prouesse doit nous inspirer, en particulier les managers qui travaillent dans les grands groupes : parce que vous sortirez des résultats exceptionnels en respectant les règles du groupe (comme de Palma celles des films d’action) mais en y introduisant votre personnalité, votre patte, vos ambitions de managers (comme lui ses obsessions d’auteur). Il est toujours possible de mettre de la personnalité dans un système, même le plus huilé, même le plus normé. Cela passe par une connaissance fine de ce qui vous habite et de vos croyances managériales pour qu’elles puissent trouver leur place dans les marges du système.

Faire du beau management dans un grand groupe, c’est faire un acte de piraterie mais en préservant l’équipage. 

Ne soyez pas dociles !

  

Managers, travaillez moins pour gagner plus

 » Je suis à la bourre », « sous l’eau », « j’y vois pas l’jour », « c’est le rush », « je suis épuisé ». 

Ces phrases sont sans doute les plus fréquemment prononcées dans nos entreprises… C’est une fatalité semble-t-il dans un monde hyper concurrentiel, exigeant, bourré de contraintes, de menaces… Mais ne serait-on pas en plein dans un syndrome de l’Autruche ? Et si pour produire plus, il fallait travailler moins ?

La grande bouffe

Pour les managers, l’heure semble être à l’étirement sans fin du temps de travail et de l’intensité ressentie du travail. Et on finit par traverser les bureaux comme on regarde la Grande Bouffe : en assistant au spectacle de managers qui empilent les heures et le stress, jusqu’à l’explosion.

Il faut dire que 4 facteurs au moins se combinent pour remplir les agendas :

  • Il y a d’abord une accumulation objective de tâches : la tendance est à la réduction des effectifs mais aussi aux matrices complexes, dans lesquelles les demandes proviennent d’endroits très différents sans concertation entre elles.
  • Et puis l’effet de nos nouvelles technologies, qui ont considérablement réduit le temps d’exécution des tâches, mais pas leur charge mentale. Avec nos outils, plus d’assistant, moins de délais et donc bien plus de sujets à gérer en même temps : on fait tourner 10 assiettes au lieu de 2 ou 3… Techniquement ça passe, mais l’inquiétude, les risques d’échec, les interactions ont été multipliées par 10 ou plus et nos cerveaux peinent à suivre le rythme.
  • Mais il y a aussi le rapport aux autres : on ne veut pas être le paresseux, celui qui « prend des RTT » en partant à 18h… On ne veut pas laisser seuls ceux qui ont décidé d’y passer la nuit… On ne veut pas laisser un travail sans être sûr qu’il recueillera les lauriers dûs à toute production parfaite…
  • Enfin, on peut s’ajouter soi-même une pression considérable : c’est l’escalade de l’engagement. On s’engage librement dans une tâche et, en voulant l’accomplir bien, on s’y consacre de plus en plus, jusqu’à la déraison parfois, au mépris de sa santé et de sa relation aux autres.

Tout ceci constitue un film très noir de la spirale dans laquelle bon nombre de managers sont embarqués avec, au bout de la pellicule, un final aussi dramatique que pour Noiret et ses amis. Mais alors que les héros du film choisissent l’excès, les managers ont la certitude qu’ils subissent la situation. D’ailleurs, en évoquant le sujet avec nos consultants, eux-mêmes disent que travailler moins « n’est pas possible » et rêvent de solution miracle.

L’illusion parfaite

En realité la solution est à portée de main parce qu’on fait une erreur de jugement sur la surcharge de travail :

On sait bien que quand on travaille trop, on est de moins en moins productif, que la qualité baisse… mais au fond on croit que le travail fait après 20h est mieux que rien, même médiocre. Je crois que ce n’est pas vrai : ponctuellement, sur une soirée, on pourra argumenter le contraire évidemment, mais en vérité, la surcharge ne génère pas une production médiocre, mais une production négative :

  • Parce que les erreurs, les fausses pistes se multiplient et que ça gonfle l’agenda sans aucun apport, jusqu’à s’agacer soi (sans parler des autres).
  • Parce que la perte de lucidité liée à la fatigue fait produire du « à côté de la plaque » : l’action est peut être utile en soi, mais a été faite en lieu et place d’une bien plus importante… Effet négatif là encore.
  • Parce qu’enfin ce qui est fait en étant fatigué et en sur régime est souvent mal vécu par l’entourage qui vous juge dépassé. 

L’illusion est parfaite parce que même si la solution est ultra-simple (en travaillant moins, vous ferez plus), il est difficile de l’assumer (ce que je fais ne sert à rien).

Prenez le contrôle de vous-même

La conséquence, c’est qu’il n’y pas de magie d’organisation ou de priorisation. Il y a d’abord une prise de conscience qu’à partir d’un certain moment, plus vous travaillez, plus votre apport baisse, pouvant finir par être négatif. Et un jour, en supprimant votre poste tous vos collègues gagneront du temps.

Pour éviter cet extrême, sortez de la spirale en arrêtant de vous convaincre que ce que vous faites est pénible, mais nécessaire. Les managers les plus performants que j’ai croisés ne sont pas ceux qui travaillent le plus (sur la durée).

De plus en plus de managers quittent l’entreprise pour gérer des chambres d’hôte en Provence. C’est une solution mais si vous voulez rester encore un peu pour profiter de l’entreprise et de sa dynamique, il faut mettre un coup de frein, arrêter de vous enfermer dans la quantité stérile et regarder froidement votre activité.

Ensuite, embarquez vos collègues

Bien entendu, votre prise de conscience peut être utile, mais elle va se heurter à vos collègues les plus proches. Il est donc bon d’adopter cette stratégie à plusieurs. C’est un choix de Codir par exemple de se concentrer sur quelques priorités ou de travailler la fatigue (physique et psychologique) comme un enjeu en soi.

Prenez le temps de définir vos priorités (1 ou 2 par semestre) et admettez qu’en mettant l’énergie sur elles, les autres sujets avanceront moins… Mais avancent-ils tous aujourd’hui ? Non, assurément ou tellement mal.

Enfin, concrètement, cessez le saupoudrage

Évidemment, toutes ces jolies idées vues plus haut ne répondent pas à la question qui tue : Qu’est-ce que j’arrête ? Qu’est-ce que nous arrêtons ?

La stratégie serait de prendre les problèmes un par un… Comme disent les footballeurs, moins bêtement qu’il n’y parait : prendre les matchs les uns après les autres.

=> Je choisis mon problème principal et/ou le sujet à plus fort potentiel et je le TRAITE ! Pendant ce temps, je ne fais que le minimum sur le reste… Et quand c’est terminé, je passe au problème suivant.

La satisfaction des problèmes traités va rapidement dépasser la frustration des sujets que vous n’avez pas encore abordés. Votre image d’efficacité compensera vite le préjugé absurde sur votre charge de travail «de fainéant».

Perfectionnisme, le faux ami de l’entreprise

Parmi les histoires que tout le monde connaît sur la vie des entreprises, il y a la légende de la réponse parfaite à la question d’un recruteur « quel est votre principal défaut ? » qui serait « Le perfectionnisme ! ».

Après avoir vu les dégâts du perfectionnisme dans de nombreuses entreprises, nous ne partageons pas du tout cette vision. C’est un poison tenace aux conséquences innombrable auquel nous déclarons la guerre !

Côté pile du perfectionnisme, l’image d’Epinal

Persévérance, opiniâtreté, souci du détail. Voilà ce que l’on pense être des synonymes de perfectionnisme. Alors forcément, on a tendance à être indulgent avec ce défaut qui n’en est pas vraiment un, on se dit même qu’avoir quelques perfectionnistes dans l’équipe, c’est l’assurance d’un travail bien fait, d’un certain niveau d’exigence.

Et cela ne vient pas de nulle part. Comme toutes les légendes, il y a une part de vérité. Il est vrai que les perfectionnistes sont de gros travailleurs, très investis dans leurs missions et en constant dépassement de leurs limites. Ils ont aussi un grand niveau d’exigence, inextinguible.

Mais côté face, c’est la catastrophe !

Le prix à payer de cette persévérance, de ce souci du détail, est lourd. Le perfectionnisme, c’est l’éternelle insatisfaction, car tout aurait pu être mieux, toujours. C’est donc l’incapacité à se réjouir totalement d’une victoire obtenue. C’est aussi l’anti-pragmatisme, par dogmatisme, on ne fait une action que quand on est sûr que ça va marcher, ce qui peut ne jamais arriver, et on ne l’arrête que quand on a obtenu 100% de ce que nous attendions, ce qui peut être une perte de temps. Le perfectionnisme, c’est aussi la critique et l’autocritique permanente, car rien n’est jamais au niveau. C’est donc un climat qui peut être dur, démotivant, dépressif même. Au final, le perfectionnisme c’est la perte de confiance, on voit que l’on n’est jamais parfait, et on en vient à penser que l’on ne fait jamais rien de bon, et que les autres non plus. Parfois jusqu’à l’échec auto-réalisateur. C’est aussi la perte de sens car on se concentre sur le « comment faire » et non sur le « pourquoi faire ».

 

Et ça remonte à tous les niveaux de l’organisation


Il y a pire qu’un perfectionniste, il y a les managers perfectionnistes. C’est même assez fréquent car pour toutes les qualités listées dans la première partie de l’article, l’idée de mettre un perfectionniste aux manettes semble excellente pour beaucoup de décideurs, top managers ou actionnaires. Ce serait la certitude d’avoir quelqu’un qui travaille beaucoup, qui ne laisse rien passer, qui ne lâche jamais prise. C’est un pari très risqué, souvent perdant, car le manager perfectionniste laisse peu de marges de manœuvre, contrôle trop, motive peu, donne peu ou mal le sens, impose son exigence personnelle hypertrophiée à son équipe.

C’est non seulement peu vertueux, mais contraire aux aspirations nouvelles où les équipes acceptent plus de responsabilités à condition d’avoir de la liberté, où les bonnes idées sont celles qui sont lancées vite quitte à être imparfaites (logique de Lean start-up).

Il y a pire que des managers perfectionnistes, il y a des organisations perfectionnistes. Celles où la culture du perfectionnisme est si ancrée qu’il ne se trouve plus personne pour la contester ou la compenser. Dans ces structures, on ne fête jamais les succès, on croule sous les projets car on ne les a jamais finis, on défait systématiquement le travail d’un collaborateur ou d’un collègue car « on n’aurait pas fait comme ça ». C’est là où on trouve un niveau d’insatisfaction et de déplaisir au travail parmi les plus élevés.

Comment s’en sortir ?

Quel que soit le niveau de contamination, il est très difficile de se sortir du piège du perfectionnisme. Car au niveau des organisations c’est culturel, et au niveau des individus c’est psychologique. Dans les deux cas, c’est donc difficilement accessible.

La première et la meilleure chose à faire, c’est déjà de prendre conscience que l’on en souffre et que c’est sérieux. Ne plus faire preuve d’indulgence, voire de complaisance avec son perfectionnisme, celui de son entreprise, celui d’un membre de son équipe. Là-dessus, certains outils peuvent aider comme l’analyse transactionnelle qui a identifié le « Sois parfait » comme un des mots d’ordre les plus problématiques des individus et propose des pistes pour l’assouplir.

Ensuite, il faut stopper la contagion. Par exemple en arrêtant de promouvoir ces profils sans qu’ils aient auparavant travaillé sur leur perfectionnisme. Mais aussi en arrêtant d’imposer son niveau d’exigence exagéré aux autres, valoriser la capacité à faire « vite et imparfaitement ».

Enfin, il faut lutter contre les symptômes : redonner une place au « pourquoi faire » en donnant de la vision et pas qu’une feuille de route, valoriser les petites victoires, essayer de donner le droit à l’erreur (tout en reconnaissant que c’est difficile). Là-dessus, quelques pratiques existent (faire la fête des échecs pour dédramatiser, supprimer purement et simplement un moment de contrôle).

Bien sûr, toutes ces pratiques sont imparfaites… alors raison de plus pour les essayer !

Mais qui donc manage vos prestataires ?

Les frontières de l’entreprise ne sont plus très claires. Il y a des salariés CDI au coeur du système mais on multiplie les CDD, les intérimaires ; on externalise des fonctions (ménage, sécurité, paie) ; on fait intervenir des experts de toutes sortes (avocats, auditeurs, consultants, formateurs). Cette population importante est sujette à discussion mais on parle rarement de la façon de les manager. Et si c’était une erreur ? Faisons le point. 


Difficiles à manager

Les prestataires dans l’entreprise sont extrêmement divers mais ils posent presque toujours une question de management.

Souvent parce qu’ils ne sont pas au coeur de notre métier, et donc au coeur des priorités. C’est le cas du ménage, de l’accueil, de la gestion des paies, de la restauration. Pourtant ils sont là au quotidien, leur travail est très visible et influe sur le bien-être (et donc sur l’efficacité) des équipes. Seulement, leurs métiers sont différents les uns des autres et surtout éloignés de celui des opérationnels. Du coup, on ne sait pas toujours comment s’y prendre pour les intégrer à la vie de l’entreprise et on s’en remet au management externe (du prestataire, souvent très lointain) en espérant que tout roule.

Combien de fois la femme de ménage entend-elle « merci » ? C’est très rare, notamment parce qu’elle travaille quand on s’arrête. Mais il arrive de la croiser. Et dans ces rares occasions, 1 minute peut suffire à obtenir un effet significatif.

Parfois parce qu’on les considère comme des experts ou des super-employés qui se managent eux-mêmes. C’est le cas des auditeurs, formateurs, consultants, avocats. Des fonctions spécifiques, très qualifiées, souvent bien payées et qui interviennent au plus haut des organisations. Leur impact est potentiellement fort pour la vie des entreprises et néanmoins on s’abstient bien souvent de les manager. Pourtant leur motivation à vous aider peut changer leur impact significativement (on en sait quelque chose…), faire que leurs solutions soient plus adaptées, leurs efforts plus sincères, éviter qu’ils pilotent votre dossier en « pilotage automatique ».

Enfin, dernière catégorie, ceux dont le métier est le nôtre mais qui sont de passage : CDD et intérimaires. Là on se doute que le management quotidien est utile, notamment sur la sécurité, mais on peine à les connecter à l’équipe, on hésite à les intégrer aux moments plus moyen/long terme. On a donc une population parfois motivée (s’ils ont l’espoir d’un renouvellement ou d’un CDI) mais peu connectée. 

Bref, avec les prestataires, on est tiraillé : entre la nécessité d’obtenir le meilleur de leur part et les difficultés objectives à les intégrer dans un management qui a souvent d’autres priorités.


Pourtant de forts enjeux

Qu’ils soient agents d’entretien, informaticiens ou avocats, les prestataires sont aujourd’hui indispensables aux organisations.

Pas tous à 100%, bien entendu. Et on se dit parfois que l’entreprise s’est rendue dépendante d’un service qui arrange bien tout le monde, malgré son coût. Mais quoi qu’il en soit, ils occupent une place importante et durable dans la vie des entreprises.

Du coup, quels sont les enjeux de leur management ?

  • Leur efficacité bien sûr. Ils ont des attentes et des craintes, un besoin de reconnaissance et une envie d’appartenir à un collectif. Si vous vous souciez de ces aspects, ils seront, comme le reste des équipes, plus performants. Et leur efficacité aura un impact sur vos équipes. Quand ils sont très chers, c’est aussi pour en tirer le maximum et rentabiliser ainsi votre investissement.
  • L’ambiance générale ensuite. Vu leur nombre, si les prestataires se sentent mal et exclus, ça ne passera pas inaperçu et cela peut faire tâche d’huile. Ca se passera à l’accueil ou au restaurant, ou le matin quand vos équipes râleront parce que le ménage est mal fait. Vous avez intérêt à ne pas couper le site en 2.
  • Le symbole enfin : si vous prônez un management humain et ouvert, il faut l’appliquer à tous les humains de l’entreprise 😉

Bref, il est utile et juste de manager vos prestataires. Mais comment faire, alors qu’on manque déjà de temps pour nos propres équipes et qu’on ne sait pas toujours comment les aider alors qu’on ne maîtrise pas leur métier ?


Soyons malin !

Evidemment, il faudra trouver des solutions différentes en fonction des populations. Mais la première astuce est de commencer par faire les gestes managériaux qui ne coutent rien ou presque.

Par exemple, on nous pose souvent la question suivante : « doit-on inviter les CDD et les intérimaires à notre séminaire ? ». La réponse est presque toujours oui. Ce sont des opérationnels comme le reste de votre équipe. L’effort managérial pendant le séminaire sera à peine plus grand ; le temps passé en plus est nul ; le coût des repas et hébergements supplémentaires est souvent marginal. Bref, invitez-les ! Les exclure coûte bien plus cher en ambiance d’équipe, alignement sur les objectifs et performance.

Evidemment, il faut dissocier : n’invitez pas a priori votre personnel de ménage, il pourrait être mal à l’aise et perdu dans des sujets qui ne le concernent pas. 

En revanche, si vous faîtes un pot pour noël au bureau, faites venir tous ces prestataires. Là encore, ça ne coute rien ou presque et ils seront contents d’être invités (même s’ils déclineront peut-être l’invitation). En tous cas, pensez-y. Quand vous faites un petit événement festif sur le terrain, pensez à ceux qui vivent aussi chez vous.

Ensuite, travaillez la reconnaissance parce qu’on le fait si peu qu’une micro-action sera souvent très appréciée.

Combien de fois la femme de ménage entend-elle « merci » ? C’est très rare, notamment parce qu’elle travaille quand on s’arrête. Mais il arrive de la croiser. Et dans ces rares occasions, 1 minute peut suffire à obtenir un effet significatif.

On aura aussi le réflexe d’inclure les prestataires dans le bilan des projets réussis s’ils y ont contribués. Et plus largement, saisissez toutes les occasions de mixer les équipes externes et internes. Par exemple dans l’industrie, une partie de la maintenance est souvent externalisée. Il est utile de faire le lancement ou le bilan des travaux ensemble.

Imaginer que l’entreprise extérieure manage bien les prestataires qui sont chez vous est un leurre ; compter sur leur capacité à s’auto-manager est une erreur. Manager nos prestataires ne nous coûtera pas beaucoup plus cher, mais ça peut vous rapporter beaucoup.

 

ALBUS CONSEIL