Auteur/autrice : charlie

La place, très surestimée, de l’argent dans les motivations

Bien sûr, les jolies citations de LinkedIn rappellent que le sens et l’accomplissement dépassent l’argent dans les motivations humaines… Sauf que, de retour dans l’entreprise, les managers continuent à la considérer comme le vecteur n°1 de la reconnaissance… Pourquoi cette erreur, et surtout, comment en sortir ?

 

 

Plus que le pouvoir d’achat, l’argent c’est la mesure de l’estime

 

Bien sûr, nous sommes tous intéressés par l’argent et ce qu’il permet. Une prime ou une augmentation signifie un extra, une amélioration du quotidien, un changement de logement ou une épargne pour les études des enfants… Evidemment, il n’est donc pas neutre et ne doit pas être ignoré dans la gestion de votre équipe ou de votre entreprise. Une fois cette évidence dite, allons plus loin.

 

En réalité, on voit très souvent que les primes et salaires sont souvent bien plus vécus à travers leur dimension symbolique que pour le pouvoir d’achat qu’ils procurent. D’ailleurs, les effusions d’émotions (dans un sens ou dans l’autre) peuvent survenir y compris pour des sommes qui ne changent absolument pas le niveau de vie. En fait, par son caractère universel et facilement comparable, l’argent est une bonne mesure de l’estime réelle qu’a votre entreprise pour vous. Et au diner avec les amis, les félicitations à la fin de l’année ne sont que « de la brosse à reluire » s’il n’y a pas eu d’augmentation.

Bref, tôt ou tard, il vous faudra faire un geste financier, moins parce que votre collaborateur en a besoin financièrement (ce qui est néanmoins le cas pour les plus bas salaires), mais parce qu’il en a besoin socialement.

 

 

C’est surtout la reconnaissance qu’on ramène chez soi quand il n’y en a pas d’autre

 

Parce qu’en effet, l’argent c’est le transfert le plus évident des bénéfices de votre travail sur la famille. La prime, ça peut devenir un voyage pour toute la famille ou une nouvelle TV.

 

Mais ce transfert est en réalité sur-estimé. Il est réel bien entendu, mais il est secondaire par rapport aux autres bénéfices, plus profonds, que le travail peut engendrer sur la famille : la fierté en particulier.

 

Le père de famille qui subit son boulot, ne s’y plait pas, souffre de son chef, et n’a rien à raconter à sa fille en rentrant le soir est autrement plus pauvre que celui épanoui et fier de son utilité, même sans prime. C’est d’ailleurs ce sentiment d’utilité sociale que vont souvent chercher ceux qui s’engagent dans le syndicalisme.  

 

Si vous ne donnez pas l’occasion à vos salariés de réaliser des « exploits » personnels, dignes d’être racontés à la famille ou aux amis, alors il ne faut pas s’étonner qu’ils ne vous parlent que de l’autre transfert vers la famille : l’argent.

 

C’est vrai même pour les commerciaux, population qui, soi-disant, ne fonctionne qu’à l’argent… Les commerciaux, s’ils ne sont pas fiers de la façon dont ils vendent ne vont s’intéresser qu’à l’argent que ça leur rapporte, mais seront alors des mercenaires à l’affut de la moindre surenchère. Un commercial qui est fier de son travail, de l’utilité qu’il apporte à ses clients racontera ses exploits en famille et sera bien plus fidèle, même si peut-être il pourrait avoir un peu plus ailleurs.

 

 

Parce qu’au fond, la reconnaissance par l’argent est secondaire et fragile

 

Une petite expérience vous prouvera qu’elle est secondaire : la prochaine fois que vous croisez quelqu’un qui vous dit de son équipe qu’elle ne fonctionne qu’à l’argent, voire qui vous dit qu’en matière de reconnaissance, rien ne vaut l’argent, demandez lui si c’est aussi le cas pour lui… 90 fois sur 100, il vous répondra sans sourciller que non, ce n’est pas son cas. Reproduisez l’expérience pour vous en convaincre ! On suppose que l’argent motive les autres parce qu’on n’arrive pas à éveiller leur motivation autrement. Mais en fait, vous n’êtes pas l’exception qui confirme la règle. 

 

Presque tout le monde est plus sensible à l’émulation d’une équipe, aux défis d’un projet, au bien-être procuré par le travail accompli, que par sa prime ou sa petit augmentation.

 

Pour se prouver que cet outil de motivation est fragile, faites une deuxième expérience : Donnez une prime très importante cette année (disons 3000 € pour tous vos bas salaires) et l’année prochaine, ramenez cette prime à 1500 €. C’est toujours une grosse prime, mais elle risque de décevoir… C’est dommage, vu ce que ça vous coûte. La prime est un élément fragile parce qu’en réalité, chacun la considère comme absolument justifié quand il la reçoit. « je la méritais bien ». C’est en général validé par l’entourage « avec tout le travail que tu abats ». Une prime n’est donc pas vraiment un outil de motivation pour l’avenir mais un outil de reconnaissance du passé. Ne vous étonnez plus, dès lors, qu’un salarié puisse quand même faire grise mine le lendemain de l’annonce d’une prime. Il râle pour le présent ou le futur, et considère la prime comme un dû passé. 

 

 

Piloter cet aspect est donc délicat

 

Réussir à bien manager l’aspect financier est donc un exercice délicat. C’est un moyen de reconnaissance incontournable socialement, mais largement inefficace sur la motivation, voire contre productif.

 

Si vous êtes chef d’entreprise, nous vous recommandons d’abord une politique de répartition transparente des bénéfices (entre les salariés, le capital, et les réinvestissement dans l’entreprise). Cela permettra à chacun de voir les choix que vous faites et permettra de limiter les demandes de primes que l’entreprise ne peut pas se permettre de payer. Ensuite, tâchez d’avoir une politique de rémunération vécue comme généreuse, dans le cadre de votre secteur et de sa rentabilité bien entendu.

 

Si vous avez la main sur une partie de la politique de rémunération, c’est le moment de la requestionner. Equilibre prime / augmentation, rapport entre part collective et part individuelle. Les grandes tendances vont au renforcement du variable et de l’individuel, pour aider à parler performance. Nous pensons qu’il faut surtout augmenter la part de prime liée à l’effort (l’action) plus qu’au résultat. Parce que le résultat est souvent largement influencé par les facteurs externes, il se retrouve à finalement être assez injuste si l’on regarde les efforts des uns par rapport aux autres. Ensuite, ne supprimez pas le collectif parce qu’il correspond à la façon dont sont réellement faites les performances dans l’entreprise : collectivement. Enfin, si c’est possible, essayer de décorreler les augmentations de vos collaborateurs entre eux, pour pouvoir prendre des décisions uniquement liées à vos échanges, le projet de carrière, les performances.

 

Enfin, si vous êtes manager, notamment dans un grand groupe, le problème est plus aigu. Parce que vos degrés de liberté sont faibles et que les logiques d’enveloppe et de répartition des primes ne vous appartiennent pas. Ici, plusieurs partis pris à avoir :

 

  • Ne justifiez pas l’injustifiable

C’est le cas d’école Sanofi ou Total. Comment justifier une augmentation collective faible quand le groupe annonce des milliards de bénéfices ? Les hiérarchies vous demandent d’expliquer que le résultat existe mais qu’il ne se fait pas chez vous, mais vous voyez que ça ne prend pas. Evitez donc ces explications inefficaces, auxquelles on croit soi-même difficilement.

 

  • Expliquez le modèle

En revanche, vous pouvez expliquer le modèle, sans le diaboliser ni l’embellir. Vous travaillez dans un groupe capitaliste qui veut rémunérer ses actionnaires, et qui cherche à maximiser son profit. C’est un modèle que l’on aime ou pas mais qui montre son efficacité, et qui assure sa pérennité (mais pas les emplois). Cette logique peut diminuer l’amour envers son employeur (en même temps, est-ce le cas dans l’autre sens), mais il peut aussi renforcer l’engagement sur les missions, les défis court terme, qui peuvent rendre fiers tout en développant l’employabilité.

 

  • Concentrez-vous sur le reste

Enfin, si vous n’avez pas la main du tout sur les augmentations et primes, ou si peu, il faut aussi se dire que cette décision doit être expliquée mais que le jour où vous les annoncez n’est pas votre jour de management. Vous aurez tous les autres jours pour travailler la fierté, l’utilité, le plaisir de travailler ensemble.

 

 

Dépasser cet aspect, c’est possible

 

L’essentiel est de résister aux sirènes du court terme. Le moment des primes (ou des non primes) est un guet potentiellement difficile à passer ; mais à relativiser, vous aurez vos moments plus favorables aussi. Dans les phases de doutes sur la motivation, dans les grands plans de transformation, n’oubliez pas de défendre et de vendre le long terme. C’est contre intuitif alors qu’on vous parle du lendemain, et peut vous paraitre désynchro… Mais trop souvent en entreprise, le dialogue s’installe sur un quiproquo : on parle tous du lendemain parce qu’on est sûr que c’est ce qui intéresse l’autre ; alors que généralement les 2 parties ont des aspirations à l’accomplissement de soi, et donc aux projets et réalisations à long terme.

 

Repréciser le « qui fait quoi », un leurre parfait !

Dès qu’un fonctionnement d’équipe ne satisfait pas, les acteurs brandissent le besoin de « repréciser les rôles et responsabilités ». Ça paraît sain, inattaquable sauf que ça demande souvent du temps et que c’est presque toujours inutile. Comme cela nous détourne souvent de la solution, nous l’appelons le leurre parfait.

Repréciser le « qui fait quoi », c’est un réflexe évident et consensuel

Que ce soit lors d’une transformation majeure de l’entreprise, dans les suites d’une fusion ou au cœur d’un conflit dans une équipe, cela revient toujours, mécaniquement, comme un réflexe, de la part de collaborateurs de tous niveaux : « Déjà, il faudrait savoir qui fait quoi dans cette boîte ! » « On veut tout changer, alors que personne ne sait ce que fait l’autre aujourd’hui » « Commençons par repréciser les rôles et responsabilités, on y verra plus clair ».

Si nous étions aux Jeux Olympiques, cette notion serait première, ex-aequo avec le manque de moyens qui lui aussi revient presque systématiquement.  

C’est un peu comme critiquer l’arbitre au foot ou le vent au ping-pong, c’est bien pratique.

Ces deux « conditions d’adhésion » des équipes sont parfaitement logiques, et légitimes, car ce sont deux éléments fondamentaux de l’entreprise, qui ne seront jamais parfaits aux yeux des acteurs et qui sont comme des arbres qui cachent la forêt de tous les autres sujets (qui n’apparaissent qu’une fois que ces deux sujets ont été abordés).

D’ailleurs, la question des moyens se pose aussi bien dans les entreprises florissantes que déclinantes, et la question du « qui fait quoi » autant dans une multinationale que dans une PME de 100 personnes.

Soyons honnêtes, ces deux facteurs sont aussi des boucs émissaires rêvés : d’abord donc car ça pourrait toujours être mieux (donc c’est légitime), ça ne remet personne de l’équipe en cause directement (donc c’est consensuel) et ça explique tout (donc c’est fédérateur). C’est un peu comme critiquer l’arbitre au foot ou le vent au ping-pong, c’est bien pratique.

 

Mais c’est rarement la cause, et jamais la solution

Laissons la question des moyens et concentrons-nous sur le qui fait quoi.

Notre conviction est que ce sujet n’est pas une cause mais un symptôme, et que le « qui fait quoi » devient bloquant aux yeux des acteurs quand la cible n’est pas claire, que la communication n’est pas fluide ou que le management n’est pas suffisamment proche du terrain. Et encore, ce sont là des raisons qui font que les acteurs manifestent de bonne foi le besoin de repréciser le qui fait quoi. Parfois c’est plus pernicieux et cette question peut servir de cheval de Troie, prétexte pour ne pas changer (une façon de jouer la montre) voire pour critiquer un autre collaborateur ou un autre service (« reprécisons le qui fait quoi et nous montrerons ainsi que tel service ne fait pas bien son job »).

Bien-sûr, vous ne pouvez pas facilement balayer la question quand elle se pose mais si vous acceptez de traiter le sujet, vous vous lancez dans une action très chronophage et qui fera à l’équipe l’effet de boire de l’eau après avoir mangé un piment : ça peut soulager un tout petit peu et sur un temps très court, mais le problème reviendra plus fort encore quelques instants plus tard.

Par ailleurs, repréciser le qui fait quoi, c’est figer des choses, rigidifier un cadre alors que dans l’environnement actuel, on a justement besoin d’agilité, de flexibilité, pour élargir le cadre, donner de la place à l’initiative et aux alliés du système.

La solution : résister et remonter d’un cran

Nous conseillons donc aux managers de résister au maximum à ce besoin souvent exprimé mais jamais productif.

Si vous sentez que la question est exprimée de bonne foi, soyez pédagogue. Proposez par exemple à l’équipe de commencer par redéfinir, plus en amont, le « pourquoi on fait les choses » ? Puis le « comment le faire de la façon la plus efficace et sereine possible » ? Et seulement ensuite, si c’est encore nécessaire, vous vous attaquerez au « qui fait quoi ». Il sera soit évident soit inutile de le faire alors.

Eventuellement, si cette demande est formulée de mauvaise foi, dans ce que nous avons appelé une démarche pernicieuse, vous pouvez utiliser la technique du judo : « puisque c’est un sujet, prenez la main et faites-nous des recommandations, pendant ce temps nous nous attaquerons à d’autres sujets. Vous allez ainsi occuper l’initiateur du Cheval de Troie et continuer à avancer avec les autres sans confrontation ouverte.

Et si vous n’avez vraiment pas moyen de faire autrement, ayez à l’esprit de faire cela le plus vite possible. Notamment en essayant de remonter d’un niveau (parler des équipes et non des individus) pour ne pas se noyer dans les détails et garder de la flexibilité au niveau de l’équipe. 

Chirac, le dialogue des cultures et la force du Graal

Manager parisien ou de passage à Paris, courez voir au musée du quai Branly l’exposition « Chirac ou le dialogue des cultures » jusqu’au 9 octobre 2016.

L’exposition est hagiographique peut-être mais vous le supporterez même si votre coeur penche à gauche. Car au-delà des oeuvres, on y voit la conviction se former petit à petit pendant le long parcours de l’ex-président, autour de la nécessité de faire dialoguer les cultures pour défendre la paix dans le monde.

La guerre en Irak évidemment, mais nombre d’autres initiatives montrent comment on peut tisser une vie politique autour d’une idée pour finalement lui donner de la force. C’est ce que nous appelons graal dans notre vie de consultant : cette étoile que l’on suit et qui nous aide à faire des choix difficiles, à donner un sens aux milliers de décisions que nous devons prendre jour après jour. Ici, s’agissant d’un président de la République, les décisions sauvent ou coûtent des vies, mais à notre niveau de managers, elles orientent des vies professionnelles, assurent ou non la pérennité d’une usine ou d’un site tertiaire.

Chirac ne restera probablement pas dans l’histoire pour sa politique intérieure, mais il sera peut-être pris en exemple dans 100 ans pour sa vision du monde ; parce qu’il avait un graal.

Et vous, manager de terrain ou dirigeant, avez-vous un graal ?

La frénésie, syndrome principal du décrochage des managers

« Je suis débordé » « Pas le temps de m’occuper de ça » « Aucune dispo »… Les managers qui renvoient les signes d’un débordement permanent de leurs agendas sont nombreux, peut-être de plus en plus nombreux…. Face à ça, les techniques pour optimiser le temps et gérer les priorités fleurissent mais ne semblent pas prendre sur les managers les plus atteints . Pourquoi ? Comment les aider ?

La frénésie, symptôme très mal analysé

Nous appelons frénésie la fuite en avant de certains managers qui s’enferment dans leur hyper activité. Elle se caractérise non pas par un abattement mais par un besoin, sans cesse croissant, de faire, agir, réussir. Ce symptôme est proche de celui du pompier, parce que le manager frénétique mesure les effets de son action, la compare aux autres (ce qu’il en voit), et en déduit qu’il traite les sujets. Comme le pompier, le frénétique nourrit son ego de la sensation d’agir sur le monde, quitte à considérer les autres comme passifs, trop lents, pas assez réactifs.

Ce syndrome pose un problème très spécifique :

  • Il peut avoir des conséquences lourdes : fatigue, voire burn out, déconnexion de la réalité, usure de ceux qui les entourent.
  • Il est grave parce qu’il s’accompagne par définition d’une conscience très altérée de la réalité. Les frénétiques pensent qu’ils sont efficaces. Ils repoussent les actions qui leur semblent trop lentes et donc diminuent à la portion congrue les temps de prise de recul (forcément plus lents). Ils voient l’origine des problèmes majoritairement hors de leurs responsabilités.

D’ailleurs, si vous discutez avec un de ces frénétiques, il objective sa charge et son action par des priorités tout à fait réelles. Sans se rendre compte que d’autres managers, qui vivent grosso modo la même situation, peuvent la vivre de façon plus sereine.

Il est toujours frappant pour nous qui regardons les organisations de l’extérieur de voir que la surcharge est presque toujours réservée aux mêmes. C’est toujours avec les mêmes qu’il est difficile de caler un rendez vous ou un séminaire. Evidemment eux l’objectivent, mais vu de l’extérieur, il est évident qu’ils construisent leur propre surcharge. Ces managers nous accusent alors de « ne pas voir la réalité » et de « ne pas connaître le terrain ». C’est vrai, seulement, à la fin, c’est eux qui en payent le prix.

Dont la conséquence la plus grave est le manque d’écoute

Parce qu’en effet, persuadés d’être sur la bonne voie, les frénétiques voient souvent les regards extérieurs avec agacement tant ils leur semblent qu’ils ne se mettent pas à leur place. 

Pour les managers frénétiques, on répète de nombreuses fois les mêmes choses, on retarde les démarches, on lutte contre la tendance à tout faire vite, y compris comprendre des choses complexes et nouvelles.

Souvent, les coachings marchent mal sur eux alors qu’ils en ont un grand besoin. Leurs managers sont souvent désemparés face à eux. 

La frénésie est un syndrome qui isole et se renforce de lui même. C’est une des plaies de notre temps.

Ceux qui savent la dompter sont en revanche ceux qui réussissent le mieux. En tous cas dans nos clients, nous observons une corrélation claire entre la performance et le calme, entre les progrès et l’existence de temps « où on ne fait rien ou pas grand chose ».

Comment casser la spirale ?

C’est sûr que le problème est aigu du fait de ce manque d’écoute. Comment aider un frénétique à sortir de sa spirale destructrice alors même qu’il résiste à presque tous les assauts ?

D’abord, il y a une clé comportementale : ne pas être susceptible. Sans être nécessairement méchant, les frénétiques peuvent être très durs parce qu’ils vous accusent sans cesse d’être à côté de la plaque. Et évidemment, on peine à leur reconnaître ce point tant leur comportement est évident vu de l’extérieur. Bref, si vous voulez les aider, commencez par vous dire que vous allez avoir des échanges difficiles parfois. Pour un manager, faire progresser un frénétique, c’est d’abord accepter une certaine difficulté.

Ensuite, focalisez vous sur ceux qui les entourent. D’abord parce qu’ils souffrent de la frénésie de leur collègue ou chef et donc sont plus à l’écoute d’éventuelles solutions. Ensuite parce qu’ils peuvent vous donner des arguments pour rendre inutiles certaines actions de votre manager frénétique. Ainsi, cherchez à promouvoir des initiatives des niveaux de dessous et à côté. L’idée est de mettre le frénétique en situation de devoir trancher ; mais aussi de lui montrer que la stratégie d’action directe n’est peut être pas la plus efficace. 

La stratégie indirecte est la seule qui nous parait apporter des bénéfices dans ce cas. Changer l’environnement des frénétiques pour les amener à revoir leur stratégie personnelle.

La limite de ce raisonnement, enfin, c’est quand la frénésie passe dans le domaine de la maladie. Auquel cas les solutions seront à chercher en dehors du monde de l’entreprise.

Mais, même si dans ce cas nous ne pouvons pas faire grand chose, dans le doute, nous ne perdons rien à modifier l’environnement en espérant faire descendre la tension. 

Et si vous n’étiez pas si mauvais au fond?

Peut-être est-ce l’indolence due aux vacances qui approchent, peut-être est-ce parce que nous voyons partout des managers inquiets et sous tension, nous avons envie de positivisme. Ce n’est pas seulement de l’optimisme ou de la méthode Coué, c’est aussi un état d’esprit nécessaire à la réussite des projets et des dynamiques d’équipe.

Le négativisme, une épidémie qui se propage

Dans les entreprises où nous travaillons, qui sont dans tous les secteurs et de presque toutes les tailles, la tendance est la même. Les managers sont durs avec eux-mêmes et avec leurs équipes. Ou, pour être plus précis, ils sont souvent satisfaits des actions qu’ils mènent mais insatisfaits des résultats qu’ils en obtiennent. Cela est vrai quels que soient les résultats : Un super projet a été décroché ? Oui mais le CA global n’est pas bon ; CA en progression à deux chiffres ? Oui mais on n’est pas assez rentable ; rentabilité de 30% ? oui mais on aurait pu faire 35% ; Année surperformée ? Oui mais on va se planter l’année prochaine… C’est sans fin.

Nous voyons deux raisons principales à ce rabaissement permanent. D’abord, ce n’est pas bien vu d’être content de soi ou de son équipe. On a peur de paraître louche. Et puis, on ne veut pas donner le bâton pour se faire battre, notamment vis-à-vis du haut de la hiérarchie. Du coup, on veut être ni trop content, ni trop défaitiste, alors on nuance en permanence et tant pis si personne n’y comprend rien :

  • « Vous avez très bien réussi cette année ! »
  • « Oh, je ne dirai pas cela, notre qualité et notre sécurité sont à la dérive… »
  • « Ah oui, alors la qualité et la sécurité ont été des échecs cette année ? »
  • « Oh, je ne dirai pas cela, nous avons agi tous ensemble et les résultats ont bien remonté en fin d’année ! »

La deuxième raison, c’est que l’on veut garder les équipes sous tension. Et que dans l’esprit de beaucoup, on ne motive jamais autant que quand il faut « redresser », « reprendre la main », « sortir de la crise ». Ça maintient la pression et ça peut permettre de faciliter l’adoption de mesures socialement compliquées. D’ailleurs, dire qu’une année est réussie risque d’ouvrir la boîte de Pandore des revendications syndicales, non merci !

C’est ainsi que, un peu comme les agriculteurs souvent brocardés pour leurs insatisfactions permanentes sur les conditions météorologiques, les managers rivalisent d’ingéniosité pour montrer que l’année est difficile. Leurs chefs iront souvent, plus tard, dire l’inverse à leurs actionnaires, mais rares sont ceux qui assistent aux deux exercices de style.

Sauf que le levier du challenge permanent est usé, cassé

Bien sûr, le pessimisme est une posture qui peut être salutaire, pour anticiper les problèmes, mais au bout d’un moment ça devient du négativisme omniprésent.

Nous croyons plus, en tant que Gaulois assumés, au rythme d’Astérix et Obélix qui ont besoin d’un banquet à chaque fin d’épisode et d’une sérénité retrouvée avant de pouvoir replonger dans une autre aventure.

Pour les équipes, ce ressort est cassé. Que toutes les fins de projet ou d’année aboutissent au même constat (« pas nul, mais doit mieux faire »), cela engendre une double mésentente. On n’entend plus dans le sens où on n’écoute plus, car c’est toujours un peu la même chose, et on n’entend plus dans le sens où on ne comprend plus, car c’est difficile de savoir comment aboutir à une année réussie étant donné que les résultats obtenus ne suffisent jamais.

L’image qui nous vient est évidemment celle de l’enfant qui criait au loup. En abusant du levier de l’insatisfaction sur l’année passée ou du danger de l’avenir, on inhibe totalement la capacité de réaction de l’équipe. Si le danger c’est tous les ans, alors soit il n’existe pas, soit nous sommes tellement forts que nous survivons à chaque fois. Dans les deux cas, l’équipe  développe un sentiment d’immortalité possiblement fatale le jour où la mobilisation générale est vraiment nécessaire.

Nous avons souvent l’impression que les managers se croient dans 24h Chrono, la série avec Kiefer Sutherland, avec la nécessité de trouver, après un danger écarté, un danger encore plus fort alors même que le héros n’a pas eu le temps de se reposer. Nous croyons plus, en tant que Gaulois assumés, au rythme d’Astérix et Obélix qui ont besoin d’un banquet à chaque fin d’épisode et d’une sérénité retrouvée avant de pouvoir replonger dans une autre aventure. Ce moment de sérénité est indispensable, pour apprendre, prendre du recul, analyser, ou tout simplement reprendre des forces. Ainsi, la force de réaction sera plus forte pour le prochain danger.

La prophétie autoréalisatrice

La conséquence la plus destructrice du « négativisme », c’est évidemment sa capacité à influer négativement sur les résultats réels. Dans le cadre d’un projet de changement notamment, si la transformation est difficile, il y a toujours un moment délicat où les efforts ont été fournis depuis plusieurs semaines et où les résultats sont encore embryonnaires. A ce moment précis, celui que nous appelons le creux de la courbe du changement, la croyance du manager est indispensable. Soit il est positif, valorise les petites avancées et pousse les collaborateurs à y croire encore, et le projet s’emballe, soit il doute, critique l’efficacité de son équipe et martèle son exigence sans regarder les efforts et il éteint les quelques braises qui commençaient à apparaître.

Il faut combattre cette certitude de plus en plus ancrée qui consiste à croire qu’un manager courageux et exigeant est un manager insatisfait, challengeant en permanence. Un manager courageux sait dire à son équipe qu’une année a été une grande année, simplement et sans nuance. Un manager exigeant sait challenger son équipe quand c’est nécessaire, et mobilise aussi son équipe par son optimisme et sa satisfaction dans les moments de doute. 

Du Monopoly aux tactiques managériales

Et si jouer avec vos enfants pouvait vous faire un rappel sur le management

« Papa, Maman on joue à un jeu ? »

« Non les enfants, on n’a pas le temps de jouer, on doit travailler… »

Vous êtes sûr ?! Cela pourrait faire piqûre de rappel sur le management de vos équipes…

Faites un Monopoly par exemple.

C’est l’un des jeux les plus connus au monde. Et bizarrement c’est un jeu très inégalitaire: si vous avez peu de chance sur les 2 premiers tours, que vous ne pouvez acheter que peu de terrains, vous risquez clairement de perdre, et les inégalités vont se renforcer, jusqu’à la charité des plus riches envers les plus pauvres.

Dans un tel système contraint la question des stratégies se pose après 1 ou 2 tours… Alors, quels sont les angles d’attaque possibles au Monopoly ? Vous avez le choix entre 4 stratégies… Et celles-ci peuvent se retrouver en management :

  • Tout acheter, et diminuer le cash en espérant bloquer les autres joueurs et être dans une position de négociation forte. C’est de l’hyper contrôle, cela fonctionne mais il faut qu’il y ait peu de joueurs. En management, ça consiste à vouloir tout surveiller, tout valider. Mais ça marche que dans des systèmes hyper spécifiques (restaurants de luxe par exemple). Sinon, le contrôle sur tout est une illusion, comme au Monopoly.
  • Acheter moins, mais acheter ce qui intéressera les joueurs qui ont acquis les cartes de la couleur qui vous manque. Il s’agit d’être orienté sur les objectifs des autres, c’est une approche très tactique, souvent gagnante y compris en management, surtout dans les systèmes matriciels, mais dans laquelle il ne faut pas perdre de vue son propre objectif.
  • Acquérir le plus vite possible n’importe quelle couleur, même le bleu clair, pour capter le cash et empêcher les autres de construire. En management, ça revient à lancer une dynamique avant tout autre chose, à miser sur l’effet d’entrainement des premiers succès. C’est 100% gagnant en management à condition de ne pas oublier de consolider votre stratégie en vous attaquant aussi aux problèmes cruciaux.
  • Acquérir les couleurs orange et rouge, et surtout empêcher quiconque de les acquérir parce qu’elles sont à la fois celles sur lesquelles on tombe le plus fréquemment et celles qui peuvent être construites pas trop cher tout en rapportant beaucoup. Ça revient à prioriser ses actions sur les sujets majeurs. Mais attention, soyez conscient que vous devrez délaisser d’autres choses.

Alors maintenant, la prochaine fois que vous ferez un Monopoly, essayez de voir quelles stratégies vous choisissez de suivre, si elles sont plus ou moins faciles à mettre en œuvre, et s’il y en a d’autres que vous pouvez identifier… A vous de jouer !

Entre valeurs bullshit et indicateurs terroristes, comment fait-on ?

Tous les halls d’entrée d’entreprise, physiques ou virtuels, arborent fièrement de grandes valeurs et de belles intentions. Et pourtant, dans la vie quotidienne de ces mêmes entreprises, nous les voyons si peu. Ce qu’il y a de plus étonnant c’est que si on faisait un sondage auprès de ces managers, 90% d’entre eux diraient tenir fermement à ces valeurs. Alors que se passe-t-il pour que les valeurs soient à la fois si portées et si difficiles à appliquer ?


En fait les bonnes intentions, elles glissent entre les mains

Il y a ceux qui en parlent énormément et qui saoulent tout le monde.

Il y a ceux qui arrivent bien à en parler, galvanisent, mais peinent à être à la hauteur des promesses.

Il y a ceux qui aimeraient bien mais qui n’y arrivent pas.

Il y a ceux qui n’y croient plus et pensent que c’est tarte à la crème.

Pourquoi c’est si difficile de trouver le juste milieu entre too much et rien du tout ?

D’abord parce que c’est difficile d’être concret. Si les sujets comme le Talent Management ou l’équilibre vie professionnelle / vie personnelle sont brûlants, à chaque fois qu’on en parle cela ne mène pas à grand chose ; on reste sur des généralités qui ont du mal à devenir de réelles actions.

Ensuite, c’est la gestion des urgences et la pression des résultats. Tout semble toujours plus important ; le temps file pour répondre aux demandes.


On a laissé dévier les choses et les managers sont pris au piège de l’hyper rationalisation

Les managers sont pris en étau entre 2 grandes forces : les valeurs et les résultats. Et comme la seconde est obligatoire et mesurable, elle l’emporte dans de nombreux cas.

Je vois d’ici ceux qui voudraient répliquer « non mais le respect des valeurs, chez nous, c’est vraiment obligatoire ; on a une étude annuelle pour mesurer comment sont mises en oeuvre les choses et on sanctionne les mauvais élèves ». 

Vraiment ? Avouez qu’à la fin, c’est quand même les résultats qui font les bons et les mauvais. Et que, pour que le non-respect des valeurs soit vraiment éliminatoire, il faut aller très loin.

Alors dans un souci d’efficacité on met des indicateurs sur tout, des process et des systèmes de contrôle de ces process… Et on génère des hyper prudents qui n’osent plus rien tenter. On finit par se méfier des sujets glissants et on les reporte sine die.


Notre avis c’est qu’on prend tout à l’envers

Si les résultats l’emportent toujours c’est parce qu’ils sont court terme, et les valeurs, long terme.

Sans s’en rendre compte on en fait 2 sujets quasi concurrents. Sans s’en rendre compte on laisse les résultats court terme dominer alors que, par définition, les résultats résultent des valeurs. Ils résultent de comment on met réellement les choses en œuvre.

La grande erreur du management du XXIème siècle, c’est de penser qu’il faut piloter les résultats au quotidien et vérifier 3 fois par an (au mieux) que le comment ne dérive pas.

En fait, il faut piloter les résultats 3 fois par an (au mieux) et suivre le comment au quotidien.

Le problème des valeurs c’est qu’on les envisage souvent comme on le ferait de la philosophie : à très long terme et assez déconnectées de la réalité. 

Du coup tout le monde est d’accord mais elles n’ont pas assez d’impact. Si on était plus précis quand on parlait valeurs, si on se confrontait aux choix difficiles, elles nous serviraient enfin à traiter les vraies problématiques.

Par exemple, on parle de pragmatisme. C’est au quotidien que ça se joue, 10 fois par jour, en faisant RÉELLEMENT le 20/80.

Idem pour l‘esprit d’équipe. C’est quand on se demande concrètement comment on fait pour donner des victoires aux autres que ça devient intéressant (et puissant ! ). Qui choisit-on d’aider ? Qu’est-ce qu’on peut raisonnablement donner comme temps, ressources ou énergie ? Et c’est en aidant 100 fois sur des petites choses que ça fait RÉELLEMENT changer les choses.

Il y a quelques outils simples que vous pouvez utiliser pour rendre cela très concret. Par exemple, pour la collaboration, le CO-DEVELOPPEMENT est puissant ! Pour se parler plus ouvertement, les rituels TOP / FLOP en début de réunion sont très efficaces. Pour la créativité, le PIED DANS LA PORTE ou le OUI ET sont des trucs qu’on utilise trop peu.

Choisissez celui que vous voulez, mais faites le SOUVENT !


Et regardez les objectifs à long terme

Quant aux objectifs, on a tout à gagner à ne pas se laisser diriger par eux mais à les piloter avec recul. La recherche de rentabilité à court terme est une stratégie mais il n’est pas écrit qu’elle est gage de performance. Un exemple : Toyota (oui encore Toyota, mais on n’y peut rien s’ils sont bons…) a implanté une usine en Europe qui ne sera pas rentable pendant les 10 premières années. Pourtant, à terme ils tablent sur une rentabilité bien supérieure à celles de leurs concurrents. C’est ce qu’enseigne le jeu de Go pour ceux qui le connaissent : il est souvent plus stratège de perdre quelques batailles en vue de gagner la guerre. 

Et ça peut aussi se décliner au niveau d’un pôle ou service d’un grand groupe: Si vous avez une vision, si vous vous fixez des objectifs à plus long terme pour obtenir de meilleurs résultats, et si du coup vous vous focalisez surtout sur comment y arriver, 1: c’est possible, 2 : ça risque de fonctionner. Alors oui, ça demande d’expliquer vos choix à vos supérieurs, oui ça vous demande de prendre des risques mais au final c’est vous qui risquez d’être gagnant. 

Pilotez vos objectifs sur le temps long… Et le comment sur le court terme !

 

Comment faire que votre couple avec les RH soit une affaire qui marche ?

Business Partner : appellation en vogue pour désigner les RH du XXIème siècle. Le transactionnel a diminué, est de plus en plus délocalisé, et nos équipes RH peuvent concentrer leur énergie à soutenir les opérationnels pour optimiser la réalisation des actions à valeur ajoutée.

On ne peut pas dire que ça ne marche jamais ; mais ce n’est pas si simple que ça à faire fonctionner concrètement sur le terrain.


Souvent couple maudit

Vous le savez, la lune de miel n’est pas systématique entre manager opérationnel et responsable RH, à tous niveaux. On reproche au premier de faire prendre des risques à l’entreprise en négligeant les règles de prudence, ou de ne pas être à la hauteur de la promesse employeur. On reproche au second de ne pas se rendre compte des réalités du terrain ou d’être obsédé par les outils, process et autres merveilles d’outils RH.

Si on creuse sous les noms d’oiseaux et critiques à l’emporte pièce, on peut trouver 3 situations où « Business Partner » sonne creux :

  • Couple exclusif. Le RH et le manager sont hyper complices mais finissent par décider seuls et informer ensuite. C’est fréquent. On se dit que dans ce cadre la confiance est garantie, les fuites impossibles. Sauf que Business partner c’est forcément ouvert sur le business. Le couple doit fonctionner en ouverture sur les autres. La complicité est un plus mais ne doit pas être exclusive.
  • Chambre séparée. C’est l’inverse. Le manager s’occupe du business, la RH de la rh. On a réparti les tâches et tout le monde est content… Sauf que du coup c’est là que les outils RH finissent par ne plus correspondre à la réalité et que les managers font de grosses erreurs, coûteuses socialement.
  • Garde alternée. C’est peut être un cas plus rare mais on voit parfois cette situation lorsque le RH et le manager se partagent les postures, « moi je serai dur, et ils iront te voir pour être consolés ». C’est un jeu qui peut fonctionner sur des temps courts, mais dans la durée la supercherie sera éventée ou le jeu deviendra insupportable pour tous.

Le bon équilibre du tandem est affaire de dosage et de précision ; mais réussi, c’est redoutable.


Objectif : gagner en double

 L’image qui vient en tête, Roland Garros oblige, c’est l’équipe du double du tennis. Même si Federer-Wawrinka ça a de la gueule, les meilleures équipes de double ne nécessitent pas les meilleurs joueurs de tennis ; nos brillants Herbert-Mahut, irrésistibles à deux et anonymes seuls en sont la preuve. Le double est un exercice de confiance et de coordination. Il faut laisser passer les balles pour l’autre et couvrir les zones laissées libres par l’autre.

RH et managers c’est pareil. Avec les 2 meilleurs ça a de la gueule, mais les meilleurs tandem sont surtout ceux qui cumulent confiance et coordination. Le RH rattrape les coups, le manager prépare les dossiers pour le CE ; les messages difficiles sont passés en 2 temps, les très positifs sont doublés.

La valeur ajoutée du couple manager-RH tient aussi à une certaine interchangeabilité. Pas totale, c’est sûr, mais vraiment fréquente. Parce que dans l’exercice difficile et long du pouvoir, le RH est potentiellement le sparring partner idéal et votre coach à domicile.


La clé, partager vos tactiques

Facile à dire, comme toujours, et pas si facile à faire. Quelques astuces nous paraissent néanmoins de bonnes bases.

  • Partagez les intentions avant les décisions : le problème fréquent du manager c’est qu’il prend des décisions pour de bonnes raisons et qu’elles sont comprises de travers. Avec votre RH, exprimez en amont ce que vous voulez obtenir pour qu’il vous aide à mettre vos actes en cohérence.
  • Partagez les doutes plutôt que les certitudes : là encore, on voit beaucoup plus de managers se planter parce qu’ils sont sûrs d’eux sans avoir vraiment challengé le point. C’est souvent parce qu’il est difficile de vous contredire…. Le plus simple est donc de vous ouvrir sur vos doutes. Si vous n’en avez pas, ça vous obligera à les trouver et à les formuler. Le RH évidemment est le meilleur pour ça (avec le financier dans certains cas) parce qu’il n’est pas celui qui va mettre en oeuvre et il pourra vous conseiller avec moins d’émotion.
  • Prenez du temps off : à force d’avoir du temps pour rien, on finit par ne plus prendre de temps pour l’essentiel : réfléchir. Le déjeuner hebdo avec votre RH est un moment idéal pour cela, pour lui comme pour vous. Et puis pour créer la relation.

Faites donc de votre couple manager-RH une réussite en vous considérant comme des partenaires sur le terrain !

Élémentaire mon cher Watson

Sherlock est une adaptation moderne et rythmée du célèbre ouvrage de Sir Arthur Conan Doyle.

Sherlock et Watson, tout comme Dr House et ses collègues, forment l’exemple parfait d’un phénomène que l’on voit hélas peu en entreprise : le co-développement.

Le scénario de chaque épisode de la série suit la même trame : il s’agit pour Sherlock et son acolyte, Watson, de résoudre un meurtre mystérieux dont personne ne trouve la solution. A chaque début d’enquête, Sherlock expose pendant quelques minutes tous les éléments afin d’y voir plus clair. Watson l’écoute sans rien dire énumérer les indices, les témoignages et autres, alors que Sherlock est dans ce qu’il appelle son « palais mental ».

Une fois tous les éléments exprimés, Watson commence à poser des questions sur le contexte, les témoins de l’histoire, à demander à Sherlock comment il en est arrivé à identifier ces indices en particulier. Et on pourrait penser que l’acolyte et ami de Sherlock a peu d’utilité, il questionne presque dans le vide et le détective a toujours réponse à tout « Elémentaire, mon cher Watson ! »

En réalité, Watson est essentiel à Sherlock : les questions qu’il lui pose challengent le détective et l’aident à affiner sa réflexion et à voir les choses sous un autre angle. Watson, la voix de la raison, provoque chez Sherlock un « ding » qui lui permet alors de résoudre les affaires…

Et bien c’est ça le co-developpement, ou codev pour les intimes !

La phase initiale d’écoute est essentielle lorsque l’on cherche à résoudre un problème ; c’est vrai dans la vie de tous les jours, mais dans le cadre de cette méthode collaborative c’est LA règle de base. Écouter l’autre exposer son problème.

Ensuite, comme Watson, il est indispensable de poser des questions pour challenger la personne qui vient exposer son problème. C’est ainsi qu’elles vont apporter un regard neuf sur la situation et proposer des solutions !

Toute l’idée du co-développement se situe là : un collègue joue le rôle du « consultant » tandis que le « client » énonce son problème. Il est challengé de manière précise et concrète grâce à  l’écoute attentive initiale…

Dans Sherlock, c’est ainsi qu’on résout les affaires ! En entreprise, on ferait bien d’en faire autant. Si vous ne nous croyez pas, essayez, vous verrez !

Ignorer la courbe de deuil : une attitude kamikaze !

Mais pourquoi ? Pourquoi alors qu’on connaît tous la courbe de deuil, on l’évite en tant que manager ? Par peur ? Peut-être… Parce qu’elle est compliquée ? Sûrement pas ! Par pression du résultat ? C’est possible… En tous cas, ce qui est sûr c’est que l’évincer nuit fortement à la santé de vos équipes.

Alors comment faire pour prendre en compte et animer efficacement la courbe deuil ?

Pour voir une explication de la courbe de deuil appliquée au management, cliquez ici.


Pourquoi est-ce difficile de respecter la courbe de deuil de ses collaborateurs ?

D’abord, en tant que manager, on est souvent pressé par le temps et par l’urgence du résultat. Il faut aller vite et on aimerait aller droit au but, prendre des raccourcis.

Par ailleurs, il y a souvent un décalage de maturité par rapport au projet : si le manager a pu donner son avis sur le projet en amont, cela aide. Et même si on n’a pas du tout eu la main sur le projet, on en a été informé plus tôt que ses collaborateurs donc on a eu davantage de temps pour faire son propre deuil. Du coup quand le projet est annoncé officiellement aux équipes, on leur demande de s’engager tout de suite en oubliant parfois le temps de deuil qui nous a été nécessaire.

De plus, le sujet de l’acceptation du changement étant fortement émotionnel, on a peur de s’y aventurer. Ce n’est pas une solution mathématique à appliquer, il n’y a pas de recette miracle car chaque cas est différent, bref on navigue à vue.

Enfin il y a le côté : « Non mais moi je n’ai pas envie de me faire reprocher par mes équipes que je me prends pour leur psy ».

Mais au fait, la courbe de deuil késako ?

En une phrase, c’est une représentation des différentes phases émotionnelles d’un individu face à un changement.

C’est un outil souvent utilisé par les consultants mais aussi les DRH, les managers, et même les salariés dans l’entreprise. N’avez-vous jamais entendu quelqu’un dire : « Jean est assez ronchon en ce moment mais c’est à cause de la mise en place du nouvel ERP, il n’a pas encore fait son deuil » ou « Ah oui par contre Flavie, elle, a rapidement fait son deuil : elle s’est inscrite directement aux formations ! »

À l’origine, c’est un modèle issu de la psychologie. Il indique les différents stades par lesquels une personne passe lorsqu’on lui annonce sa mort prochaine ou quand quelqu’un perd un être cher. Il a été ensuite repris dans le monde de l’entreprise car il correspond aussi parfaitement aux réactions humaines observées lors de l’annonce d’un changement.

Et du coup pourquoi est-ce dangereux d’occulter ce phénomène ?

On trouve deux grandes situations :

  • Quand on essaye de faire « passer la pilule » à ses collaborateurs

C’est, par exemple, annoncer des primes en même temps que le lancement d’un projet pour amadouer ses équipes, et se permettre d’annoncer le changement sous forme de grand-messe, sans laisser de place à l’expression des réactions individuelles.

Malheureusement cela entraîne généralement des conséquences contre-productives pour le projet. Les équipes peuvent donner l’impression qu’elles acceptent le raccourci alors qu’en réalité, elles sont encore dans le déni. Du coup, le manager est persuadé de l’acceptation de ses troupes et se fait surprendre par l’apparition des phases de peur ou de colère de son équipe. Et il a l’impression très déroutante de revenir en arrière, comme si ses collaborateurs n’avaient rien compris.

Cette tentative de raccourci, à l’inverse de l’effet recherché, augmente les résistances : « le fait qu’on veuille nous faire accepter tout de suite le projet, on trouve ça louche ! »

  • Quand on préfère minimiser les choses 

Un grand classique ! Le manager essaye de se convaincre que ce changement n’est pas « une révolution », que s’ouvrir à l’international en intégrant telle équipe et en créant tel bureau à l’étranger, c’est le sens de l’histoire et que de toutes façons très peu de personnes sont directement impactées. Ainsi, on se contente d’une annonce factuelle et on renvoie tout le monde à ses dossiers.

Malheureusement cette « solution » peut avoir de graves conséquences. Certains collaborateurs peuvent se sentir exclus par l’entreprise, ou nourrir des fantasmes sur les suites du projet : délocalisation, suppression de postes en doublon… Et là encore, on a obtenu la réaction inverse : le projet minimisé résonne chez eux comme « le début de la fin » !

Donc ces « tactiques », au mieux ralentissent le projet, au pire le torpillent.

Alors, comment respecter la courbe de deuil de ses équipes ?

 Bien sûr former les équipes à la courbe de deuil ne sera pas suffisant. Vous avez déjà vu quelqu’un à qui on annonce un projet avec de gros impacts sur son poste en lui disant « Ne t’inquiètes pas Léon, ton attitude est normale car tu es dans la phase de colère de ton deuil, mais bientôt cela ira mieux car tu passeras à la phase d’acceptation » et qui vous répond « Ah d’accord merci, ça va déjà beaucoup mieux ! » ?

Donc comment l’utiliser efficacement ? Deux axes possibles et complémentaires.

  • Accompagner les personnes en fonction de leur état

En identifiant le stade où en est chaque membre de votre équipe, vous pouvez adapter votre manière de les manager.

– Par exemple si une personne est dans le déni cela ne sert à rien de lui rabâcher « je t’assure c’est un projet génial ! Et franchement ça ne change pas grand chose pour toi » ; en revanche faites-la parler, écoutez-la pour comprendre sans forcément chercher à répondre. Et puis si nécessaire, recentrez le sujet pour éviter qu’elle associe ce projet à d’autres changements en cours qui n’auraient rien à voir.

– Au contraire, si par exemple quelqu’un a peur, le mot d’ordre c’est « explication » : lui dire ce qui va changer précisément, pourquoi cela change, lui expliquer le dispositif d’accompagnement qui est mis en place pour les collaborateurs.

– Et puis, si le collaborateur est déjà dans l’acceptation, inutile de survendre le projet ; il faut plutôt encourager ses initiatives et ses actions et parler ouvertement des défis à relever.

  • Créer les conditions d’un système de mobilisation qui laisse libre

Le but n’est pas de faire un système égalitariste où tout le monde doit avancer en même temps mais plutôt que chacun puisse s’engager en fonction de là où il en est.

La clé pour ça, c’est la liberté et l’envie. Ça paraît simple mais c’est un travail d’équilibriste pour un manager qui doit accepter que certains ne s’engagent pas tout de suite tout en stimulant ceux qui veulent avancer.

Mais si vous arrivez à ne pas imposer le même niveau d’engagement à tout le monde, vous serez gagnants : ceux qui ont déjà commencé à faire leur deuil s’engageront rapidement et fortement. Derrière, ils raconteront leurs actions, cela se propagera et accélérera l’envie des autres d’aller de l’avant.

En conclusion, ne prenez pas le risque d’ignorer ou de minimiser la courbe de deuil, servez-vous d’elle pour y voir plus clair et pour accompagner plus efficacement vos équipes !

ALBUS CONSEIL