Auteur/autrice : charlie

Les groupes de travail : beaucoup, passionnément… mais surtout un peu !

Les groupes de travail… On les lance, la tête remplie de bonnes intentions… On veut faire du collaboratif, du transverse pour sortir du cadre hiérarchique habituel… On espère générer des idées différentes, créatives, avec des regards extérieurs… Donc on les commence plein d’enthousiasme et d’espoir mais on termine souvent déçu avec un arrière goût d’inachevé.

Alors pourquoi ça ne fonctionne que rarement ? Est-ce que ça veut dire qu’il ne faut pas en faire du tout ou qu’il faut les animer différemment ?


Pourquoi cela ne marche pas ?

Combien d’entre nous ont lancé des groupes de travail comme une solution miracle, comme s’ils se suffisaient à eux-mêmes ? « J’ai un problème alors je vais faire un groupe de travail, ils ont intérêt à être créatifs ! »

Combien d’entre nous ont voulu un groupe de travail pour prouver que l’idée que nous avions en tête était la bonne ? « Je veux qu’ils adoptent telle solution mais je préfèrerais que l’idée vienne d’eux. »

Des groupes de travail lancés pour de telles raisons ont toujours du mal à avancer, ils commencent par brainstormer… et ne s’arrêtent jamais.

Et, le pire c’est quand un groupe se coupe du reste des équipes et réfléchit en vase clos. Alors le jour où il a besoin d’aide ou veut que tout le monde adopte ses idées, c’est le grand flop.

Du coup, est-ce qu’on arrête tout ?

A force de voir des groupes de travail qui se cassent la figure, on se pose vraiment la question de leur utilité. Et parfois on se dit qu’il est plus simple de supprimer quelque chose qui ne marche pas.

Mais heureusement, on a vu chez nos clients des groupes de travail qui fonctionnent, avec des managers et des équipes heureuses ! Donc c’est possible d’en ressortir de bonnes idées qui se traduisent ensuite en actions.

Et puis, un groupe de travail ça a du bon quand même… Ça permet d’arrêter le temps pendant quelques heures pour se concentrer sur un sujet précis et essayer de trouver une solution. Ça casse le rythme habituel, ça sort de la relation hiérarchique traditionnelle, et c’est déjà beaucoup ! Les équipes se retrouvent dans un processus qui laisse du temps, qui sécurise et qui permet de changer sa façon de raisonner.

 Donc, bien sûr, continuez à en faire, mais pas comme d’habitude.

Un groupe de travail doit être libre, nécessaire et ouvert

Quand on lance un groupe de travail, on pense souvent au QUOI (sujet traité, objectifs à atteindre, livrables attendus). Nous pensons que le succès d’un groupe de travail se fait plutôt sur le comment : comment on constitue le groupe, comment on prépare la mise en œuvre dès la conception, comment on crée les conditions d’un bon échange.

Pour commencer, un premier NON ! Un groupe de travail n’est pas une usine à blanchir vos propres idées ou à s’approprier vos propres décisions. Il doit réellement apporter un plus à la réflexion. Dites-vous bien, de toutes façons, que les gens sont perspicaces et que si les marges de manœuvre n’existent pas, le groupe s’en rendra compte et vous le fera payer pendant le groupe de travail ou après, dans la phase de déploiement.

Et un second NON ! au recrutement exclusif sur la compétence. Laissez au maximum les choses se faire sur la base du volontariat, la motivation est le 1er talent utile à un groupe de travail. Si certaines compétences sont indispensables, affichez-le dès le départ et laissez les places restantes aux volontaires. Bref, laissez-les LIBRES autant que possible !

Dernier élément indispensable : l’ouverture à l’extérieur. Les décisions qui vont sortir du groupe vont devoir à un moment être prises, ou au moins comprises, par ceux qui ne font pas partie du groupe de travail. Ce dernier ne doit donc pas se fermer mais réfléchir dès le début à communiquer avec les autres. Par exemple, la fin des travaux du groupe doit-être marquée par un événement, celui où il montre ce qu’il a fait aux autres et où il y a un passage de flambeau.

Et avoir une animation exigeante et aérée

Vous avez le choix :  soit vous allez vers la facilité qui coûte cher, en engageant un animateur professionnel, soit vous avez quelques astuces à disposition. Bien animer un groupe c’est arriver à le faire avancer, sans brider sa créativité mais en gardant l’action comme finalité.

Sur le fond, ce qui est difficile dans l’animation d’un groupe de travail, c’est de sortir par le haut de la phase de brainstorming… Pour faire fuser les idées, il y a beaucoup de techniques qui ont été développées et beaucoup fonctionnent. Sauf qu’objectivement, ce n’est pas le plus dur. Ce qui est compliqué c’est de choisir, abandonner des idées, pour permettre de prendre des décisions. La première chose à faire est d’en avoir conscience, de le partager avec le groupe dès le début.

Ensuite plusieurs astuces peuvent aider : commencer par analyser et critiquer précisément la situation actuelle pour concentrer le brainstorming sur la recherche de solutions et non simplement d’idées ; créer avant même le brainstorming des règles de sélection qui nous permettront d’arbitrer plus facilement ensuite ; limiter la phase de brainstorming dans le temps (mais ne pas cadrer les idées pour préserver la créativité) ; etc.

Sur la forme, l’important est de mettre de l’air :

  • N’organisez pas les réunions dans la salle habituelle (par exemple, un de nos clients a animé une réunion à son domicile, dépaysement garanti à prix raisonnable).
  • Evitez les réunions-conclaves, interminables, qui usent le groupe et ne donnent pas envie de revenir.
  • Faites beaucoup de pauses, une par heure selon nous, car la fraîcheur d’esprit ne peut se maintenir sans cela.
  • Laissez un peu de temps entre 2 réunions pour mûrir les idées.
  • Pensez à l’animation visuelle : pour le groupe ça permet de se représenter l’état d’avancement, les étapes, le but, donc de prendre du recul. Ça rend aussi visible les avancées à l’extérieur du groupe. Vous pourriez avoir une salle dédiée aux groupes et ouverte afin que les autres collaborateurs puissent « visiter », et commenter.

En conclusion, on ne lance pas des groupes de travail à la légère, n’importe comment et tout le temps. On doit l’utiliser comme un outil précieux et exigeant. C’est alors qu’il peut devenir redoutablement efficace.

High Rise, l’oppression de l’organisation idéale

High Rise, film britannique de science-fiction actuellement en salle et réalisé par Ben Wheatley, crée chez ceux qui le visionnent un sentiment très fort d’inconfort. C’est aussi une réponse cinglante à ceux qui, en entreprise, veulent tout clarifier et régenter par des procédures et des fiches de poste.

Le film prend exclusivement place dans une Tour où tout est organisé jusqu’au moindre détail, pour donner un sentiment de bien-être lié à la sécurité et à l’ordre qui permet à chacun de savoir exactement où est sa place. Toutes les infrastructures nécessaires s’y trouvent, tels un supermarché ou une école ; le monde extérieur n’a plus lieu d’être. Les niveaux hiérarchiques également sont parfaitement définis ; de l’Architecte en haut, aux plus modestes en bas. De même, des règles sont édictées pour tout, comme par exemple comment sortir les poubelles ou faire le ménage chez soi.

Un jour, l’électricité ne fonctionne plus. Un seul élément de la chaîne et c’est toute l’organisation qui est alors chamboulée ; les règles sont balayées les unes après les autres et la décadence s’installe. Toutes les classes se confondent et finissent par se comporter en animaux dans une atmosphère de fin du monde.

Pour l’entreprise, le parallèle est assez clair ; réguler l’ensemble des paramètres et ne plus laisser aucune place à l’incertitude semble simple et parfait. Cependant, si le moindre rouage rouille, le système meurt ; trop habitués à être dirigés sans prendre de décisions, les employés, tout comme les habitants de la Tour, ne savent plus quoi faire.

S’il y a bien une leçon à retirer de ce film, c’est celle-là ; le problème de l’Architecte n’était pas qu’il manquait un paramètre à sa Tour mais qu’il y en avait trop.

Alors n’oubliez pas de laisser la liberté à vos équipes de combattre leurs propres peurs. Fiers, ils en ressortiront grandis et porteurs de leur propre système.  

Pourquoi les idées de votre équipe sont toujours meilleures que les vôtres ?

C’est amusant de constater la grande ambiguïté des acteurs de l’entreprise sur la participation d’une équipe aux sujets habituellement traités seulement par le manager : l’organisation, la stratégie, le recrutement des leaders, le budget, etc. On dit que c’est mieux de le faire ensemble et pourtant dans les actes, on a toujours de bonnes excuses pour ne pas décider en collectif. C’est une belle occasion manquée car nous pouvons prouver ici que les idées de votre équipe sont toujours meilleures que celles prises seul.

La décision en équipe, perte de temps ou angélisme pour certains

Pour éviter d’ouvrir la porte au choix collectif sur des sujets sensibles, certains sont très clairs : un patron est là pour « patronner », c’est-à-dire littéralement pour dire comment on doit exécuter une tâche. Et la démocratie participative, c’est de la flûte pour bobos parisiens idéalistes !

D’autres sont plus équivoques, « Oui bien-sûr ce serait beaucoup mieux de pouvoir discuter de la nouvelle organisation avec l’équipe entière de managers, mais ils sont déjà trop en réunion et puis de toutes façons, on y a déjà beaucoup réfléchi et la décision est presque prise, on va surtout les frustrer à les faire réfléchir pour rien ».

Et puis il y a les barrières psychologiques, qui font qu’il y a souvent un écart entre les intentions et les actes. Le lâcher-prise, surtout sur des sujets sensibles, fait peur. De plus, il est très difficile d’accepter qu’une chose soit faite par un autre alors qu’on se sait très bien capable de la faire soi-même (à tort ou à raison).

Dans tous les cas, la conclusion est la même : on décide seul, ou en petit groupe avec le DRH et le DAF la plupart du temps. Adieu beaux principes, appropriation, intelligence collective et délégation.

Pourtant, la décision en équipe est souvent plus éclairée

Nos organisations et nos usines ont depuis près de vingt ans du Lean Manufacturing en intraveineuse. Sa philosophie peut se résumer en une simple phrase : celui qui fait est celui qui sait.

Qui est en charge de faire tourner les services que vous réorganisez ? Qui pilote les éléments du budget ? Qui travaille avec les collaborateurs que vous embauchez ? Pas vous, en tout cas, pas en majorité. Alors, certainement, vous pouvez vous targuer d’avoir une expérience plus grande sur ce type de réflexion, un regard plus objectif, mais vous réalisez moins de choses que les personnes en dessous de vous. Votre apport est certes crucial, mais il ne peut suffire. Vous devez associer les personnes de votre équipe car ils sont et resteront les experts de leur propre métier.

Lors de ces moments de prise de décision en équipe sur des sujets stratégiques, les personnes d’une équipe vont souvent bien plus loin que leur manager.

D’ailleurs, il est intéressant de constater que lors de ces moments de prise de décision en équipe sur des sujets stratégiques, les personnes d’une équipe vont souvent bien plus loin que leur manager : ils sont plus durs dans la vision de la situation, plus audacieux et jusqu’au-boutistes dans les solutions envisagées. C’est normal, me direz-vous, ce n’est pas eux qui assument les choix et c’est un peu facile… Un peu facile peut-être, mais c’est précieux, parce que le fait qu’ils soient moins responsables les rend moins frileux, leur regard est plus frais, leurs idées sont plus pures. Il faudra peut-être retravailler le réalisme de la proposition, mais les idées de votre équipe vous amèneront plus loin.

Et puis, il y a quand même les vertus de l’intelligence collective. Ceux qui pratiquent ou observent des moments de co-développement  en sont les témoins, il y a toujours de la valeur ajoutée à réfléchir ensemble si deux conditions sont réunies : pas d’idées préconçues et pas de rapport de force. Regardez les fourmis ! On a longtemps cru que leur efficacité dépendait d’une organisation sans faille et très hiérarchisée, mais en fait il n’y a aucune hiérarchie, elles ont une intelligence très limitée et donc sont incapables d’emmagasiner toutes les informations nécessaires au bon fonctionnement de la colonie. Leur performance est issue à 100% de leur capacité à interagir pour décider ensemble et s’adapter au mieux pour l’intérêt commun. Alors si les fourmis en sont capables…

Même moins parfaite, une solution d’équipe est plus efficace

Si le coup des fourmis ne vous a pas convaincu, dites-vous que de toutes façons la meilleure solution n’est pas la plus parfaite mais la mieux mise en œuvre. Le meilleur exemple pour cela est la réorganisation : vous pouvez changer l’organigramme dans tous les sens que vous voulez, découper des services, les regrouper plus comme-ci ou comme-ça, faire du matriciel ou des îlots, régionaliser… si vos équipes ne vous suivent pas, c’est du vent. Comme si vous changiez les règles d’un jeu pour le rendre plus amusant, mais que personne ne voulait plus jouer avec vous (notamment parce que vous changez toujours les règles…). A contrario, si tout le monde a envie de jouer, rien ne sert de changer les règles toutes les 5 minutes, avancez.

Des exemples d’organisations parfaites qui ont capoté avant de faire leurs preuves car les équipes ne s’étaient pas approprié la solution, nous en avons des tonnes.

Or, une équipe sera bien plus alliée, impliquée et leader pour mettre en œuvre une décision si elle est partie prenante de sa conception. C’est la raison pour laquelle la question du temps (qui manquerait pour décider à plusieurs) n’est pas recevable. Si vous ne prenez pas ce temps-là dans la phase de conception, vous en perdrez dix fois plus dans la mise en œuvre. Des exemples d’organisations parfaites qui ont capoté avant de faire leurs preuves car les équipes ne s’étaient pas approprié la solution, nous en avons des tonnes. Certaines ont été bloquées par les organisations syndicales, mais la plupart ont connu une mort lente, pénible, orchestrée par les managers intermédiaires eux-mêmes, à coups de passivité volontaire et de mauvaise volonté.

Vous pouvez donc choisir entre avoir raison tout seul ou bien faire en sorte de décider et d’agir collectivement, à vous de voir.

Vive l’ego !

Intéressant de voir que quand on parle d’ego, on ne cherche pas la même chose chez les managers et dans les équipes. Si tout le monde s’accorde à dire qu’il faut un doux mélange d’humilité et d’ego chez un manager, quand il s’agit des équipes les egos semblent n’avoir que des inconvénients. Lutte de pouvoir, guerre d’influence, conflits entre intérêts individuels et collectifs… Les personnalités qui ont sans cesse besoin de se mettre en avant finissent par être un casse-tête chinois pour les managers en quête de cohésion d’équipe et de travail collaboratif.

Pourtant l’ego a de multiples bienfaits : important levier de motivation, créativité, capacité à se vendre et à vendre son travail…  Et avoir une équipe de gens « soumis » n’est pas non plus une sinécure pour un manager. Il est vrai qu’un ego mal exprimé peut être un frein réel à l’esprit d’équipe et à la collaboration, mais cela relève plus d’un problème d’espace d’expression que de personnalité.

Plutôt que des personnalités à « mater », ce sont des signaux que l’espace donné aux personnes ne convient pas à leurs besoins d’épanouissement.  

Alors comment gérer ce type de personnalité dans vos équipes ?

C’est avant tout un problème d’organisation agile et de management

Commençons par un parfait exemple d’agilité. Un manager qui récoltait à chaque réunion d’équipe des plaintes (« il n’arrête pas de monopoliser la parole », « il ne nous laisse pas la place », « il est exaspérant ») à l’encontre d’un de ses collaborateurs, décide, plutôt que de le recadrer, et contre toute attente, de le promouvoir.  Monsieur Ego est nommé responsable de la promotion du travail de l’équipe auprès des clients ! Voilà comment ce manager est arrivé à transformer celui qui, jusque-là, nuisait à la performance de l’équipe, en un atout reconnu par tous, y compris les auteurs des plaintes à répétition.

Si à l’inverse, on avait essayé de combattre l’ego de notre homme, il y a fort à parier que cela n’aurait pas mené bien loin.

Alors libérez l’énergie et la créativité des egos

Si vous ne savez pas comment adapter l’entreprise aux besoins des egos de vos équipes, ne vous triturez surtout pas les neurones : demandez à vos Messieurs Ego des idées, ils débordent de créativité…

Focus sur notre maître à tous en termes d’ego : Louis XIV. Son ego a suscité la créativité débordante que l’Histoire lui a reconnue. On peut questionner la morale de ses choix, il n’en demeure pas moins qu’il a construit Versailles et fait de la France une puissance considérable.

À l’heure où les entreprises cherchent à développer la créativité de leurs équipes, il faudrait essayer, parfois, de simplement, donner de la place aux egos pour se réaliser. Bref, redonnez un espace d’expression à ceux qui parlent trop, qui ont un MOI JE qui donne envie de les bâillonner, avant qu’ils ne l’accaparent au détriment des autres.


Mettons-les aux services du projet commun de l’entreprise

Enfin, il faut arriver à orienter les egos au service de l’intérêt général de l’équipe. Créez des aventures collectives reliées aux ambitions personnelles et dans lesquelles vous proposez à vos forts egos de s’illustrer. Il y a fort à parier qu’ils relèveront le challenge et chercheront à être reconnus comme les héros de votre projet.

Alors oui, les egos on les subit souvent à contrecœur mais, si vous voulez notre avis, vous avez tout intérêt à adapter vos organisations et propositions managériales en fonction d’eux. Ils seront moins nuisibles et surtout vous récolterez de nombreux fruits.

Quand l’organisation laisse de l’espace pour s’exprimer intelligemment, l’ego arrive à s’affirmer, non pas au détriment de l’équipe et du projet commun, mais au service de l’entreprise et du collectif.

Et aux éternel sceptiques, je vous propose d’essayer de jouer avec les egos de vos équipes et d’en tirer vos propres expériences. 

Ode à la liberté ! – Mustang

5 filles comme des chevaux sauvages, que soudain, et pour d’obscures raisons, on emprisonne. 5 sœurs et autant de réactions différentes face à la privation de liberté.

En plus d’être un film très juste et plein d’émotion, Mustang est une véritable ode à la liberté. Les 5 héroïnes incarnent les figures de la perte de liberté :  la soumise, la fugueuse, la rebelle et la créative.

Elles deviennent très inventives et laissent leur imagination prendre le relais pour transcender le cadre ; les 5 sœurs tentent alors d’échapper à leur quotidien en inventant sans cesse des jeux et en essayant ainsi de réenchanter le réel.

Ece se révolte en opposant un grand « non » au cadre, elle se rebelle contre le carcan des traditions. Elle clame sa révolte haut et fort, elle oppose un « je veux » au « tu dois » de la société et la confrontation la mène jusqu’au suicide.  

Les 2 plus âgées sont davantage dans la soumission. Face à l’impossibilité de changer les choses, on décide généralement de les accepter, voire de les reproduire. Dans leur cas, elles acceptent des mariages arrangés… mais en définitive l’aînée ruse pour détourner le cadre en épousant l’homme qu’elle aime. 

Enfin, fuir face aux diktats et à l’immobilisme est le choix des 2 plus jeunes.  Partir et tourner le dos aux choses que l’on ne peut pas changer, chercher un autre cadre… Elles décident de fuguer pour Istanbul. Mais il ne suffit pas de partir, il faut, surtout, arriver à se projeter dans un monde meilleur, et imaginer qu’un ailleurs plus ouvert est possible ! Lale, la plus jeune sœur, entrevoit le chemin de la liberté à travers l’éducation !

Dans la vie, un cadre étroit et qui se rigidifie peut pousser à l’extrême comme le montre Mustang. En entreprise, heureusement, c’est plus rare… cependant, un cadre trop rigide peut être source de souffrance pour les équipes…  A contrario, leur permettre de jouer avec et hors des frontières du cadre peut être une énorme source d’énergie : créativité, imagination, antagonisme…

Un cadre n’a d’intérêt que par sa capacité à bouger. Alors, pour un manager, poser un cadre c’est bien voire primordial, mais accepter que les équipes s’amusent avec, c’est mieux ! Ouvrez, fermez, réduisez… et tirez parti des réactions que vous suscitez. 

Ras-le-bol des « bonnes raisons de ne pas faire »

Nous sommes les premiers à défendre le « sur mesure » et à fustiger les processus répliqués, les benchmarks organisationnels, les outils qui prennent le pas sur la recherche de solution.

Mais la nécessité de l’écoute et de l’adaptation ne doit pas conduire à accepter les freins structurels ou culturels d’une organisation.

Si on doit écouter les gens, c’est pour mieux les faire changer, pas pour les conforter.

« Oui Mais » sport le plus pratiqué en Europe

Évidemment, si on en croit LinkedIn, tout le monde est absolument conscient qu’il faut penser positif, que les difficultés sont des opportunités de grandir et qu’il n’y a que les passifs qui ne se trompent jamais. Sauf que ce flux ininterrompu de grandes idées ressemble à de la méthode Coué, même si les gens ne s’en rendent pas complètement compte.

La réalité, c’est que chez tous, dirigeants ou acteurs de terrain, moteurs ou sceptiques, les bonnes raisons de ne pas faire viennent presque instantanément :

« Vous comprenez, notre entreprise est très politique. Il faut lui donner le temps de digérer »

« Nous avons une culture de plusieurs décennies, et évidemment nous bougeons moins vite ».

« Le groupe est très contrôlant et si nous avons des degrés de liberté, il faut quand même répondre aux attentes ».

« Attention, le dialogue social est délicat, il faut y aller avec des pincettes »

« Chez nous, il y a 40% de rentiers qui veulent surtout garder leur place. 40% ! »

Tous ces arguments, entendus ces dernières semaines dans la bouche de véritables alliés de la transformation, sont justifiés. Nos interlocuteurs connaissent leur boîte et ne se trompent pas…

Sauf qu’ils vont en crever…

On retrouve ça à l’échelle de l’Europe « On est trop cher et on va quand même pas renoncer à 2 siècles de progrès sociaux ! » ou de la France « Les réformes se heurtent aux organisations syndicales ».

On retrouve ça chez tous les dirigeants qui se félicitent d’avoir su ne pas déclencher telle acquisition ou tel projet qui aurait été un échec. 

On en a ras-le-bol ! Pas parce que c’est faux mais parce que ces raisonnements conduisent à une seule issue : le déclin voire la mort.

Dans une entreprise de distribution avec une culture séculaire, la dimension politique est très forte et pèse sur un management qui n’arrive pas à devenir simple, direct, concret… Oui, la culture pèse mais pendant ce temps-là, les concurrents plus jeunes vont plus vite et se réforment mieux… alors à la fin, parce que les consommateurs se fichent des excuses internes, la vieille enseigne rejoindra Virgin, Kodak, SNCM, Bata, Motorola et les autres au cimetière des grandes marques éteintes ou quasi éteintes.

Dans une entreprise de média très exposée, où les baronnies ont développé des citadelles, l’audace managériale fait envie mais ne convainc pas… Oui, c’est difficile, les obstacles sont grands mais à l’heure où la diffusion télévisuelle est devenue la chose la plus simple qui soit, ceux qui ne changeront pas, avec les meilleures excuses du monde, ne seront plus là pour inventer les médias dans 10 ou 20 ans.

Il nous semble que nous avons le devoir, que l’on soit consultant extérieur ou dans son entreprise, de lutter contre les arguments qui nous éloignent du changement… surtout si ces arguments sont justifiés !

Et donc il faut apprendre à détruire les vérités nocives

Bien sûr, l’attitude à la Mélenchon, consistant à exprimer les dangers sans rien proposer n’est pas souhaitable.

S’attaquer à la vérité demande de la subtilité et un peu de patience. Si vous avez décidé de lutter contre un des aspects de la culture de votre entreprise, il faut vous armer de quelques bons réflexes :

Agissez avant de convaincre

Évidemment, comme les preuves existent, dans le débat vous êtes perdus. Pourtant, ces grandes raisons qui bloquent le changement sont aussi vraies qu’elles ne sont pas robustes. Ce sont des croyances qui s’alimentent d’elles-mêmes et qu’en fait, tout le monde rêve de voir tomber. Alors, faites comme si elles n’existaient pas vraiment, agissez et si c’est fait sans arrogance, vous serez vite suivis de tous ceux qui seront soulagés de travailler plus efficacement.

Think « Why »

La discussion sur les modalités du changement est perdue d’avance puisque par hypothèse, les objections sont justifiées. Votre objectif doit être de diffuser un enthousiasme sur les buts à atteindre, sur le caractère excitant de la nouveauté. De temps en temps, faites valoir la menace « oui, vous avez raison, mais du coup, on est foutu ? » mais n’en abusez pas, c’est mauvais pour le moral.

Le réalisme est l’ennemi du progrès parce qu’il conduit à intégrer des risques en trop grande quantité. Elevez le débat en rappelant les enjeux de conquête pour l’avenir : le client, les usages de demain, les évolutions de la société, surtout les bonnes parce que vous ne mobiliserez pas seulement sur  un futur que tout le monde redoute.

Ne répondez pas aux risques point par point

Les grilles d’analyse des risques et leurs plans de prévention sont des machines à immobilisme. Dans votre cas, si vous voulez lutter contre les bonnes raisons qui empêchent de bouger, votre compte est bon. Parce que l’analyse des risques conduit à s’inquiéter de tout et à perdre le feu nécessaire à l’action.

Surtout, ne respectez pas les règles

En tous cas, pas toutes. Les organisations ont l’air de vouloir tout contrôler mais en réalité, elles ne sont intéressées que par 2 ou 3 résultats-clés. Sur le comment, faites à votre idée, fédérez les gens, et ne demandez pas l’autorisation tout le temps. Vous y perdriez l’envie. Évidemment, vous vous ferez engueuler de temps à autre, mais le plus souvent, vous aurez autour de vous ceux qui sont positifs et vous obtiendrez de bons résultats.

La lutte contre les vérités est engagée et elle nécessite des alliés. Alors, rien ne doit vous en détourner !

Pour réveiller les équipes, il faut du rythme

Depuis que nous suivons les méandres du management, nous avons observé des contextes d’équipe variés. Dernièrement, une difficulté se répand comme une épidémie : la perte de contrôle du rythme. Guérir nécessite de reprendre la main sur ce que l’on fait. Oui mais comment ?

Les équipes sont de plus en plus aliénées

A quoi reconnaît-on qu’une équipe a perdu la maîtrise du rythme ? Elles sont aliénées à quelque chose qui a pris le contrôle sur leur travail.

La plus fréquente aliénation est celle du court terme. Presque tout le monde en souffre, nous sommes aspirés par les sollicitations du quotidien qui nous empêchent de faire avancer les sujets de fond et qui forment un flot continu de petites urgences et d’incessantes mini-crises. C’est toujours pénible, mais c’est parfois plus que cela. Souvent, ce quotidien nous asphyxie, il n’y a plus de place pour les sujets de fond ou même pour la prise d’initiatives. Progressivement, les managers deviennent comme ces gouvernements qui gèrent les affaires courantes, ils n’exercent plus le mandat de leader. Consciemment ou non, ils subissent le rythme du quotidien, d’autant plus pervers qu’il est insatisfaisant mais confortable car son traitement est immédiat et semble justifier sa propre utilité : « J’ai résolu 10 sujets aujourd’hui, c’était chaud ! »

Les équipes subissent et ont le sentiment de tourner dans la roue du hamster, donc de brûler beaucoup d’énergie sans peser véritablement sur les choses.

Si le quotidien est l’aliénation par en bas, l’aliénation par en haut n’est pas mal non plus. C’est celle du poids hiérarchique, qui s’exprime directement (des réunions de revue hiérarchique suffisamment régulières pour ne rien laisser passer) ou indirectement (des reporting qui cadenassent l’action). Si le contrôle est une mission de la hiérarchie, le surcontrôle est un système qui, voulant éviter les erreurs qui coûtent cher, dirige l’action de vos équipes et supprime le sentiment de responsabilité et de maîtrise. On ne fait plus les choses pour réussir sa mission mais pour bien figurer lors de la prochaine réunion avec le chef, c’est elle qui dicte le tempo.

Aliénation au flux, à la peur phobique des syndicats, à la stratégie de communication, etc. Il en existe beaucoup mais elles ont toutes la même conséquence. Les équipes subissent et ont le sentiment de tourner dans la roue du hamster, donc de brûler beaucoup d’énergie sans peser véritablement sur les choses.

C’est grave, car des équipes aliénées ne mettent pas leur intelligence et leur coopération en action. Comme dans l’image du mammouth, leur valeur ajoutée – en tant qu’équipe – est réduite à son minimum.

Pour rebondir, est-ce réaliste de se rebeller ?

D’abord, il faut prendre conscience de son aliénation. Pour cela, il faut être attentif aux crises sourdes que l’équipe peut traverser ou aux situations contradictoires.

Pour l’un de nos clients par exemple, cela s’est passé lors d’un événement très réussi sur le fond pour l’équipe qui a franchi une étape importante de sa stratégie mais pour lequel les collaborateurs n’ont pris aucun plaisir à la victoire. Pas seulement par manque de célébration, mais aussi parce que l’équipe ne se sentait plus actrice du projet collectif mais exécutrice.

Évidemment, la réponse la plus totale serait ensuite de se rebeller face à un système oppresseur, de se soulever contre l’aliénation et de proposer un contre-modèle, à sa main. Si nous sommes convaincus que cette rébellion est possible, nous savons aussi que beaucoup d’entreprises ne le permettent pas, que le processus est long, difficile…

Remettre en question la vision, le modèle, de mode de management, la culture d’entreprise dans un grand groupe, c’est jouer à 1 contre 100, c’est un beau combat inutile.

Selon la logique de coexistence si chère au jeu de Go, ce qu’il faut c’est occuper les terrains laissés vides. Et cela tombe bien car il y a une dimension souvent oubliée dont les managers peuvent se saisir : nous l’appelons la cadence.

 

Prendre la cadence à son compte en choisissant ses épisodes

Ce qui va vous permettre de définitivement reprendre et maintenir le rythme, c’est de tenir la cadence.

Nous ne parlons pas du plan à 3 ans (qui sert souvent de vision, ou de stratégie) ni du budget annuel (qui est plus financier qu’autre chose) mais bien de la cadence, c’est-à-dire ce qui guide notre action au quotidien, en n’étant pas trop proche (pour aider à prendre du recul) mais pas trop loin non plus (pour avoir toujours un point de mire qui joue le rôle d’attracteur).

La cadence est une maille, entre 3 et 4 mois, que nous appelons des épisodes. Une période courte, structurée autour d’un enjeu simple et excitant.  

Autrement dit, cela permet de  guider la vie de l’équipe comme une série télé plutôt que comme un film japonais de 4h30, alors même que l’intérêt du premier n’est pas forcément plus captivant que celui du second.

Regardez Downton Abbey, ils arrivent à ne pas nous endormir en nous parlant d’une famille aristocratique anglaise et de ses domestiques, ils parviennent même à nous enthousiasmer sur un enjeu de bonne température du thé. Comment ? On y retrouve les bons ingrédients : Chaque saison de la série est constituée autour d’un enjeu vaste (ex : marier les 3 filles) et la cadence des épisodes permet de tenir l’attention des spectateurs et le fil de l’action (épisode 1 : rencontre ; épisode 2 : séduction ; épisode 3 : révélation du secret, etc.).

Et vous, savez-vous quel épisode vous êtes en train de vivre avec votre équipe ?

Demain, le film qui nous montre comment susciter – des initiatives qui changent les choses !

L’avenir de la planète est mal engagé, OK. Et si pour une fois on en parlait de façon constructive ? C’est le parti pris du film « Demain », qui dresse un portrait brut mais optimiste des problèmes écologiques d’aujourd’hui et de leurs conséquences transversales de demain. Pour cela, le film présente des initiatives modestes (pas question de changer le monde d’un coup) mais qui récoltent des succès inespérés. Comment ? Explications.

Prenons l’exemple d’Elango, en Inde. Le maire de cette ville en faillite, et en proie à une délinquance accrue, décide de mettre en place un conseil participatif et démocratique pour ouvrir le dialogue et réfléchir à des solutions simples. Le conseil regroupe des castes qui ne se côtoient jamais et les caisses sont quasi-vides. Pourtant, l’impossible devient réalité : avec beaucoup de système D et d’huile de coude, les habitants fraternisent et rénovent la ville qui retrouve paix et prospérité pour rayonner dans le pays.

A Elango, les difficultés ont été vues comme des challenges à relever et ont, en quelque sorte, nourri la motivation.

Cette initiative pourrait se résumer à une belle histoire avec happy end, pourtant, elle est vecteur d’approches aussi basiques que fondamentales en termes de management.

Pour commencer, un projet qui fonctionne est un projet qui permet à chacun de se sentir concerné et libre de s’investir à sa mesure. C’est aussi un projet qui est construit en collectif et qui permet de travailler en transverse. Ayez cela en tête lorsque vous concevez vos projets. Dans le film, les habitants se sentent tous concernés et libres de leur implication et c’est bien la condition sine qua none de leur engagement.

Surtout : plutôt que de voir le verre à moitié vide et de focaliser sur les obstacles sur lesquels vous n’avez pas d’influence (coupe budgétaire, environnement globalement défavorable, opposition etc.), intégrez-les comme des paramètres de jeu. A Elango, les difficultés ont été vues comme des challenges à relever et ont, en quelque sorte, nourri la motivation. Ainsi, faites de la contrainte un moteur de créativité, votre action n’en sera que plus pertinente parce qu’adaptée.

Ces approches permettent de prendre une réelle hauteur de vue quand un projet se déploie, comme bien souvent, contre vents et marées. 

La créativité, un gâchis séculaire !

Y a-t-il un manager qui ne cherche pas à développer l’audace, l’innovation, l’initiative, la remise en question, dans son équipe ? Derrière toutes ses vertus se cache un même moteur : la créativité !

« Ah, si mon équipe était plus créative ! »… Nous avons une conviction : elles le sont toutes ! C’est, comme souvent, un sujet de management.

 

Sois créatif… mais pas trop !

Une majorité de personnes pense qu’elle n’est pas créative ou que peu de gens le sont vraiment. D’autres  disent que la créativité, ça s’acquiert.

Une fois n’est pas coutume, nous ne sommes d’accord ni avec les uns ni avec les autres. Tout le monde est créatif, car l’enfant est créatif : il crée des jeux en permanence, il invente des spectacles et des danses, il dessine des formes qui ne ressemblent à rien de connu.

Malheureusement, l’enfant finit par enfermer sa créativité sous la pression de son environnement. Ses parents qui lui demandent « il est joli ton dessin, ça représente quoi ? » impliquent qu’un dessin doit ressembler à quelque chose de connu. L’école, les autres, le passé, tous ces éléments créent un cadre qui parfois annihile l’invention de l’enfant.

La prison des outils et des systèmes a passé le message que la créativité était réservée aux génies, ceux du haut de la pyramide.

Pour un adulte en entreprise, c’est encore plus dur d’être créatif, car cela ne rentre pas souvent dans les normes. Voyez Gaston, incarnation de l’enfant en entreprise, il est constamment recadré par sa hiérarchie pour ses bourdes et ses retards, mais aussi pour sa créativité. Pourtant, il crée plus de choses que tous ses collègues réunis.

Certaines normes sont utiles bien sûr, on a besoin de règles et de lois pour vivre ensemble sinon ce serait l’anarchie. Mais voilà, le prix à payer c’est notre créativité.

Inconsciemment, voire consciemment parfois, l’entreprise a fini le travail. La prison des outils et des systèmes a passé le message que la créativité était réservée aux génies, ceux du haut de la pyramide.

Résultat, tous les managers s’en lamentent : « Ah, si mon équipe était plus créative ! »

Pour booster la créativité, on tourne autour du pot

Méconnaissant cette idée que tout le monde est créatif, ou en tous les cas que l’enfant qui est en chacun de nous est créatif, les managers utilisent des techniques qui traitent les symptômes sans traiter le problème.

On se forme à la créativité, comme si elle était une compétence, alors qu’elle est un comportement. On apprend des outils et des techniques pour être créatif, ce qui est utile mais seulement dans un second temps, une fois que la créativité est libérée de nos carcans. On met en place des boîtes à idées, comme s’il ne manquait qu’une boîte pour que les idées s’expriment. Et puis on a recours à l’injonction : « soyez créatifs ! » sans se rendre compte qu’elle est contradictoire : fais ce que je te demande en faisant quelque chose que je ne t’ai pas demandé…

Nous déconstruire pour nous redécouvrir

Il faut donc changer le postulat de départ : vous dire que tous les membres de votre équipe sont créatifs, qu’ils n’utilisent plus cette faculté par construction et qu’il faut donc les aider à déverrouiller leurs cerveaux.

Pour cela, nous voyons deux options possibles :

Option 1 : en créant un sentiment d’urgence comme Robin Williams avec Ethan Hawke dans Le cercle des poètes disparus qui le met dans une situation de stress pour qu’il crée un poème sur le moment. En entreprise cela consisterait à proposer un enjeu qui sorte de l’ordinaire et rende nécessaire la créativité et l’audace. Une menace ou une opportunité suffisamment forte.

Option 2 à la manière du pied dans la porte : cela consisterait à leur montrer qu’ils savent le faire sur des sujets peu engageants avant de les mobiliser sur des enjeux plus costauds. A la manière de l’improvisation théâtrale, il faut créer un terrain où l’enjeu est faible, donc la peur de se planter est limitée, et où on peut tester plus facilement sa créativité.

En improvisation, il semble ne pas y avoir de règles. En fait, elles existent pour permettre à la créativité de s’exprimer : acceptation, écoute et lâcher prise. Tout cela est facilité par la possibilité de jouer sans enjeu (même pas la nécessité de faire rire)

Les deux options sont possibles, le choix dépend du contexte. Dans la mise en œuvre de l’une ou l’autre, quelques astuces peuvent aider à la réussite :

  • Séparer recherche de solution et prise de décision : pour que le couperet de la décision n’inhibe pas la créativité. Si vous faites un séminaire au vert par exemple, ne prenez pas de décision sur le vif mais quelques jours plus tard, de retour au bureau.
  • Cadrer (quand même un peu) : donner quelques règles du jeu permet de lancer la machine et diminuer la peur du vide. Par exemple, en invitant vos collaborateurs à proposer quelque chose qui sera extraordinaire pour au moins une partie de leur équipe.
  • Faire du “OUI ET” : vous devez en tant que manager vous mettre en situation de coach (voire matrice boss leader coach), très synergique, axé sur le « OUI » (rassurer, donner confiance, donner envie de faire) et le « ET » (pousser vers un peu plus d’audace, amener le collaborateur à aller au bout de la logique).

Vos équipes ont un enjeu d’autorisation, vous avez un enjeu d’acceptation en tant que manager. Acceptez les actes de créatifs de vos équipes, même s’ils proviennent des « Gaston Lagaffe » du groupe.

Tour de terrain : indispensable et inutile

Dans l’industrie, dans la distribution et dans toutes les entreprises en réseau, la tournée terrain est un passage obligé. Mais souvent, cet acte de bon sens tourne à l’exercice politique, au pas de charge et sans valeur ajoutée ni pour le leader ni pour les équipes.

Comment mieux l’utiliser ?

Un exercice ritualisé, souvent inutile et parfois nuisible

Durant nos missions, les équipes nous parlent souvent avec nostalgie des anciens chefs, et particulièrement de leurs façon de faire les tournées terrain : « Il connaissait tout le monde par leur prénom et se rappelait des petites histoires de famille » « Elle connaissait tout de nos métiers, mieux que nous-mêmes ».

A l’inverse, ils critiquent les chefs actuels : « On sent qu’il n’aime pas ça ; il s’ennuie et ça se voit ». C’est normal, ils les voient comme des parachutés!

La tournée terrain est un marqueur fort parce que c’est un exercice visible. Comme la tournée des candidats au salon de l’agriculture, c’est un passage obligé, décortiqué, et qui peut transformer une image en profondeur. Regardez Chirac, reconnu homme de terroir alors qu’il n’a passé que 3 ans en Corrèze pendant son enfance, de 8 à 11 ans. Mais il sait serrer des mains et s’intéresser au peuple.

Tel qu’il est fait aujourd’hui en entreprise, l’exercice est souvent neutre. Beaucoup de managers s’ennuient, se contentent de dire bonjour et font mine de s’intéresser à des problèmes criants, comme le rangement ou la propreté. Ils se retrouvent à faire du management de représentation ou du micro management qui donnent l’illusion de l’utilité.

C’est le vrai problème de la tournée terrain : elle peine à avoir une véritable valeur ajoutée :

  • Elle n’apprend pas grand chose aux équipes de terrain, sauf peut être au n-1 du patron qui court derrière.
  • Elle ne permet pas de faire passer un message clair, faute de temps et parce qu’on ne voit jamais tout le monde.
  • Elle ne permet pas de résoudre les problèmes importants, car on ne peut s’attarder sur rien étant donné que l’on veut tout voir.

Évidemment, la tournée terrain peut aussi créer un fossé encore plus grand avec les équipes, à cause d’une série de couacs et de bourdes de communication, et aboutir à l’inverse de son but premier.

A l’heure où le temps est compté, où la productivité est un objectif partout et pour tous :

  • Peut-on continuer à avoir un moment aussi fréquent, aussi peu utile ? Non.
  • Peut-on s’en passer ? Encore moins.

La question est donc : comment bien la faire ?

D’abord, éviter les 3 erreurs classiques

Erreur #1 : La tournée « quand j’étais à votre place »

Un classique, notamment dans la distrib où la promotion interne est généralisée. Comme on a tenu avec succès le poste des gens de terrain, le manager donne des conseils basés sur ses anciennes méthodes. Seulement, même si les idées ne sont pas automatiquement inadaptées (elles sont même souvent pertinentes), elles ont 3 défauts :

  • Elles sont professorales et passent pour la manifestation d’un ego déplacé.
  • Elles ignorent le fait que vos interlocuteurs ne sont pas du même niveau que vous et qu’ils ont besoin de solution pour les aider eux, plutôt que celles qui ont marché pour vous.
  • Elles vous éloignent de votre objectif de prendre de la hauteur, en vous renvoyant aux problèmes du quotidien.

Erreur #2 : La tournée « c’est super »

La plupart des managers ont compris que l’exercice était sensible. Certains décident donc de ne pas prendre de risques et adoptent l’attitude cool et positive du ministre en campagne. Cette attitude prudente finit par lasser, voire irriter car elle peut être vue comme la preuve d’un désintérêt. Parfois, elle est même vue comme une manipulation: quand l’écart est trop visible entre les paroles prononcées sur le terrain et les décisions relayées par la ligne hiérarchique.

Erreur #3 : La tournée « je suis déçu »

A l’inverse, on a vu des tournées terrain qui veulent justement éviter la distribution de bons points et la démagogie. On se dit alors que la bonne posture est l’exigence, le challenge, à l’image des entraineurs de haut niveau qu’on voit à la télé et qui exigent, exigent, exigent.

Là, vous prenez le risque d’encourager plusieurs comportements contreproductifs :

  • Des équipes qui font du propre la veille, vous poussant à organiser en conséquence des visites surprises… La dégringolade de la confiance !
  • Des équipes qui se liguent contre vous. A court terme c’est bon pour l’esprit d’équipe, mais ça ne va pas bien loin.
  • C’est enfin très dépositionnant pour les managers intermédiaires, qui n’ont pas su protéger le terrain en anticipant les questions.

Il faut donc adopter des postures plus subtiles pour trouver de l’efficacité dans ces moments-là.

3 stratégies gagnantes

Évidemment, il existe sans doute des dizaines d’astuces et de techniques qui marchent. En voilà 3, que vous pouvez combiner pour trouver votre style.

Apprendre aux autres

La première idée gagnante est d’éviter le saupoudrage et d’assumer de passer davantage de temps mais avec moins de gens. Quoi qu’il arrive, vous ne verrez pas tout le monde de façon qualitative! Tachez d’avoir un échange de qualité avec un petit nombre.

Comment faire, notamment si vous êtes n+3, n+5, fonction support siège ?

Faites parler les gens de leurs réalisations, mais aussi de leurs difficultés. Tirez le fil, en suggérant une façon d’aller plus loin ou une méthode pour résoudre le problème. Un manager de PSA faisait des coachings PDCA improvisés, juste avec un ou deux opérateurs (ses n-6) pour leur apprendre l’utilisation de l’outil alors qu’il visitait un site de 5 000 personnes. Il a laissé une trace indélébile en moins d’un an dans cette usine.

Ce type d’actions est évidemment une goutte d’eau dans l’océan mais a plusieurs effets très bénéfiques :

  • Il met en avant la posture de coach:  toujours essayer de générer des moments utiles pour les autres.
  • Il laisse un souvenir fort, notamment quand l’écart hiérarchique est vraiment grand, qui nourrit l’estime de soi et la mobilisation.
  • Il permet au leader d’avoir une vision moins superficielle des problèmes du terrain.

C’est aussi une façon d’agir sans court-circuiter les managers intermédiaires.

Apprendre soi-même

Quand on manage de grandes équipes, on a des besoins de terrain pour garder les pieds sur terre. Alors allons au bout de la logique en assumant qu’une visite, c’est aussi un moment pour le leader lui-même.

Par exemple, il peut interroger les collaborateurs sur ses questions du moment :

  • « Que pensez vous de cet argument ? »
  • « Je m’apprête à lancer une nouvelle campagne sécurité, que me suggérez-vous ? »

D’abord, la réponse sera intéressante mais en plus, elle change le rapport de force et installe l’idée que tout le monde est utile. Bien sûr, il faut le faire 500 fois pour que la culture change, mais ça y contribuera.

Étiqueter les initiatives

Enfin, un leader est généralement le porteur d’un projet, et même idéalement d’une vision. Souvent les gens la connaissent mais ont du mal à voir sa mise en oeuvre concrète.

La tournée terrain peut être une occasion formidable d’étiqueter les initiatives de chacun en disant : « Ce que vous avez fait va dans le bon sens, c’est ce que j’entends par …….. ». Il faut sans cesse expliciter le lien parfois simple, mais souvent noyé dans les milliers d’infos du quotidien, entre la stratégie et l’action.

La tournée terrain peut ainsi devenir une arme de management redoutable, surfant sur le passage de l’info hors des circuits formels.

ALBUS CONSEIL