Auteur/autrice : charlie

Pour motiver, donner des « histoires à raconter »

A part « le loup de Wall Street » et quelques autres, les humains ne sont pas tant motivés par l’argent que ça. Si on les écoute attentivement, ils aiment surtout avoir des histoires à se raconter, à partager avec leurs proches et leurs collègues. Et s’ils racontent beaucoup de mésaventures, les grandes réussites sont quand même leurs meilleures histoires…Et si c’était ça le secret du management ? Donner des histoires à raconter.


Raconter des histoires, le plus vieux loisir de l’homme 

Au café du Train Bleu, l’autre jour, attendant un ami, je volais quelques bribes de conversations autour de moi. Sur plusieurs tables, les discussions (sérieuses à cette heure), tournaient souvent autour de victoires passées : « C’était en 94, et j’ai créé la première usine… » « Je crois que je l’ai bien aidé à se remettre en selle …».

Auparavant, en tournée d’entretiens avec 14 managers, chaque premier ¼ d’heure était consacré à une présentation libre de mon interlocuteur : dans 100% des cas, 10 à 20 ans de carrière se résumaient à 1 ou 2 faits d’armes, parfois anciens de 10 ans.

Ces exemples sont innombrables, si vous ôtez votre casque dans un wagon restaurant du TGV, ou dans un bar, vous en glanerez des dizaines. Elles sont centrées sur celui qui parle ; généralement à son avantage ; pas forcément récentes.

Je ne crois pas que ce soit là vantardise ou égocentrisme. Raconter des histoires, se créer des héros, être soi-même le héros, sont des réflexes très ancrés, et universels. Joseph Campbell a d’ailleurs montré, dans son livre Le héros aux 1001 visages (Oxus, 2010), que toutes les civilisations avaient depuis leurs origines créé des mythes et que tous ces mythes, ces histoires, sont extrêmement semblables : elles tournent autour de l’aventure d’un héros, qui se dépasse lui-même pour le bien de la communauté.

Même les dessins dans les grottes préhistoriques sont des récits d’exploits de chasse.

Bref, raconter des histoires est le propre de l’Homme ; il aime ça ! C’est un des grands plaisirs de l’Humain, via la littérature, le cinéma, le théâtre, les séries et les jeux vidéo.

Et un objectif de fond pour les managers

Nous qui nous occupons de mobilisation des collaborateurs dans les entreprises, à longueur de journée, nous nous disons qu’au fond, elle est là, la clé du management. Il faut donner aux gens la possibilité de raconter ce qu’ils ont réussi. C’est ça, la fierté.

Dans un précédent article, nous parlions du storytelling comme étant davantage qu’un bon outil de comm’. C’est exact, le meilleur storytelling est encore celui que chacun peut écrire et raconter autour de son propre rôle dans l’entreprise. C’est le meilleur parce qu’il est parfaitement authentique : les humains se racontent ce qui les rend vraiment fiers, même si c’est souvent un peu embelli avec les années, mais qu’importe…

Très souvent, on s’étonne que les gens passent leur temps à râler ; surtout les français… Mais qu’ont-ils à raconter de plus intéressant ? C’est sûr que l’erreur du chef, l’injustice de la direction, la petite ou grosse bêtise d’un collègue sont plus intéressantes que la routine… Mais si vous donnez aux gens plus que de la routine, des défis qu’ils ont envie de relever, alors, c’est ça qu’ils raconteront.

En bons consultants, nous avons un modèle, celui de l’aventure, pour expliquer que c’est ça qui fait avancer les humains. Mais si on oublie un peu les outils forcément théoriques et parfois prétentieux des consultants, que reste-t-il ? Il reste que si vos collaborateurs racontent à leurs enfants et à leurs conjoints leurs réalisations, des étoiles dans les yeux, ils seront motivés dans la journée, et par conséquent, performants.

Ce n’est pas si difficile de faire de vos collaborateurs des héros ; il faut relever avec eux des défis qui vous semblaient impossibles : être les premiers à changer d’organisation, ouvrir un nouveau magasin, lancer un nouveau produit.

Au quotidien même, c’est aider un collègue à résoudre un problème, battre un record ou se faire féliciter pour une petite innovation.

Et finalement, même Jordan Belfort, loup de Wall Street, s’est retiré du business et aujourd’hui… il écrit des histoires…

EA : Entretien annuel, Echec annoncé ?

  • « Après son entretien annuel, le collaborateur a été tellement marqué par les remarques du manager que le RH a dû refaire un point de 2h pour expliquer à nouveau les messages »
  • « Dans mon entretien annuel, je n’ai pas pu en placer une, c’est un comble ! »
  • « Tu as ton entretien annuel dans 10 minutes ? Et bien, bon courage… »

L’entretien annuel est souvent vu comme un mauvais moment à passer pour un collaborateur, mais aussi pour son manager qui doit, en une ou deux heures, résumer le travail d’une année entière, donner un avis et faire le lien avec les décisions de reconnaissance financière à venir. Autant dire, mission impossible !

Redouté avant mais aussi souvent décevant après, soit que les doutes aient été confirmés dans les faits, soit que la discussion n’ait abouti à rien. 

 

Une question simple se pose alors : pourquoi le faire ?

Cette interrogation n’est pas rhétorique, une bonne partie des mauvaises pratiques de l’EA vient de son systématisme. Parce que qu’il est fixe, on attend parfois l’entretien annuel pour traiter un sujet humain qui aurait pu, dû être discuté avant ; parce que c’est une figure imposée, la spontanéité des échanges est impossible (tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous), d’ailleurs c’est souvent le manager qui monopolise la parole.

Est-ce que cela veut dire que l’entretien annuel ne sert à rien ? Oui, dans 90% des cas il est inutile voire contre-productif car il déstabilise le collaborateur. Il est trop formel, trop ponctuel, trop partial pour être un bon outil managérial.

Si on le fait parfois par obligation, on le fait aussi « faute de mieux ». C’est un système visible et a priori implacable pour contrôler que le manager manage, que le collaborateur collabore et que les objectifs de l’année sont fixés, ouf ! Le problème, c’est que l’on ne contrôle pas que le manager écoute et passe les bons messages, ou que le collaborateur s’approprie les points de progrès. 

Est-ce que cela veut dire que l’entretien annuel ne sert à rien ? Oui, dans 90% des cas il est inutile voire contre-productif car il déstabilise le collaborateur. Il est trop formel, trop ponctuel, trop partial pour être un bon outil managérial.

Dans un système où faire progresser les autres est une priorité, ou au moins plus prioritaire que de se conformer aux règles du système en place, il est donc contre-productif de normer l’entretien annuel. Il doit être volontaire, avoir lieu quand c’est nécessaire, durer le temps qu’il faut, ne surtout pas être trop écrit en phase de préparation.

  

Quand on doit le faire, comment le faire bien ?

Mais, dans la plupart des entreprises pour lesquelles nous travaillons, l’entretien annuel et sa forme ne sont pas négociables. 

Systématiquement, un temps important est consacré à la préparation : recherche des éléments, écriture du dossier, préparation de l’entretien.

Malgré ce travail consciencieux, les erreurs rencontrées sont souvent les mêmes. La première dans la construction de l’entretien : le défaut d’une rigoureuse préparation, c’est souvent qu’elle rigidifie les éléments de fond et qu’elle incite le manager à trop parler. Alors disons-le, il n’existe aucun entretien annuel où le collaborateur se dise « il me laisse décidément trop parler », donc la préparation et la construction de l’entretien doivent l’inciter à s’exprimer, à formuler ses attentes, ses propres perceptions de l’année écoulée, ses réussites et ses échecs.

Ensuite, parce que l’entretien annuel est souvent plus une évaluation qu’un entretien, la discussion tourne beaucoup autour des objectifs chiffrés : ceux de l’année passée, ceux de l’année à venir. C’est là que le décalage se fait entre un manager qui veut analyser objectivement (donc froidement) les chiffres et le collaborateur qui voit derrière les indicateurs la réalité de son travail, les bons et mauvais moments de son année que son chef n’a pas forcément vu directement et qu’il ne peut deviner. Alors limitons s’il vous plaît la discussion sur les chiffres, parlons des actions, on peut même sortir du bureau et aller voir sur le terrain la réalisation concrète, le travail réalisé. Si, si, c’est permis !

Enfin, soyez humble sur les objectifs de l’entretien. Si 2h une ou deux fois par an pouvait suffire à motiver un collaborateur, convenir avec lui des enjeux de sa mission et des compétences à développer tout en lui permettant de se projeter avec lucidité et envie dans sa carrière, les journées du manager serait beaucoup plus courtes. Il faut choisir un objectif et s’y tenir.

 

Et si on inventait autre chose que ce que l’on a toujours fait ?

Mars Chocolat, c’est ceux qui en parlent le moins qui managent le mieux ?

Tout le monde connaît les produits de Mars, des barres chocolatées à l’alimentation animale (Royal Canin, etc).

Ce que l’on sait un peu moins c’est que l’entreprise est 100% familiale et se place au 4ème rang des groupes alimentaires mondiaux.

Ce que l’on ignorait c’est que c’est l’une des trois entreprises, en France, où les collaborateurs se sentent les plus heureux.

Et quand on creuse, on découvre un modèle managérial remarquable pour une entreprise de cette taille :

  • La transparence et l’équité y sont très présentes : pas de privilège pour les patrons, tout le monde dans l’open space, des interpellations directes et régulières des collaborateurs vers les top managers, etc.
  • La proximité et la responsabilité : sur les 70 000 personnes de l’entreprise, seules 50 se trouvent au siège social près de Washington. Les initiatives sont prises en local, valorisées et partagées en transversal.
  • L’engagement au-delà du business : dans la dernière enquête « Best Place to Work », 86% du personnel a répondu que leur travail chez Mars avait un sens particulier, au-delà de la simple notion d’emploi…

Ci-joint une interview passionnante de Thierry Gaillard, PDG de Mars Chocolat France :

http://www.dailymotion.com/video/xytsvk_thierry-gaillard-mars-etre-compatible-avec-nos-valeurs-familiales_news

Voici un nouvel exemple d’entreprise innovante sur le plan managérial, et pour chacun d’entre nous un réservoir de bonnes idées pour 2014 !

Le changement, oui mais quand ?

Changer trop tôt et vos équipes vous diront que vous changez tout le temps, elles ne vous suivront plus ; changer trop tard et vous équipes vous diront incapables, elles ne vous suivront pas. Nous en sommes convaincus, bien changer c’est changer au bon moment !

  

Le « Quand » plus stratégique que le « quoi »

Dans les entreprises que nous accompagnons, les managers sont souvent très focalisés sur la solution à mettre en œuvre : l’organigramme idéal, l’outil SI qui va bien, les bons processus, la répartition des fonctions… cela nourrit toutes les discussions.

Si le slogan « le changement, c’est maintenant » avait si bien marqué les esprits pendant la campagne, c’est qu’il répondait aux aspirations de la population de voir un changement au bon moment.

Cela nous fait parfois penser à deux personnes sur un quai de gare qui réfléchissent à la meilleure chose à faire une fois à destination et qui oublient de monter dans le train. Bien sûr le travail de fond est indispensable, mais l’enjeu du changement est de changer au bon moment, celui qui permet de tirer tous les bénéfices de la solution recherchée, celui aussi où les équipes sont les plus prêtes à vous suivre.

Steve Balmer, qui a quitte la tête de Microsoft il y a quelques années, l’a dit à sa manière : « Je regrette qu’il y ait eu une période au début des années 2000 où nous étions si concentrés sur ce que nous avions à faire avec Windows que nous n’avons pas été capables de redéployer des talents vers un nouvel appareil appelé le téléphone. C’est la chose que je regrette le plus. Cela aurait été meilleur pour Windows et pour notre succès dans d’autres formes ».

Comment ne pas penser aussi à la politique… Si le slogan « le changement, c’est maintenant » avait si bien marqué les esprits pendant la campagne de Hollande, c’est qu’il répondait aux aspirations de la population de voir un changement au bon moment. S’il est si impopulaire aujourd’hui, c’est que la volonté de « remise à plat fiscale » est arrivée après-coup, que le remaniement se fait attendre, que l’inversion des courbes est en retard… une question de timing là encore.

 

Est-ce aussi un problème de vouloir changer trop tôt ?

Oui, changer au bon moment c’est ne pas changer trop tôt non plus. Bien sûr, nous demandons toujours aux leaders d’avoir trois coups d’avance, d’anticiper et d’innover. Mais cela consiste à imaginer le changement à l’avance, pas à le faire vivre.

Changer trop tôt, c’est changer alors que ses clients ne sont pas prêts à vous suivre, mais c’est aussi changer alors que les équipes ne sont pas prêtes à l’entendre.

 Dans l’ouvrage de Laurent Lemire Ces savants qui ont eu raison trop tôt (Taillandier, 2013) sont présentés des exemples nombreux : « Copernic ? Personne ne s’intéressa de son vivant à ses travaux. Mendel ? Il cultiva des pois d’où sortirent les premières lois de la génétique trente-cinq ans plus tard. Comme Alfred Wegener et sa dérive des continents, Svante Arrhenius et sa théorie de l’effet de serre, Georges Lemaître et son Big Bang… ». Ces exemples existent aussi en entreprise, dans tous les milieux et notamment de façon spectaculaire dans la téléphonie, dans l’internet, dans l’automobile. Changer trop tôt, c’est changer alors que ses clients ne sont pas prêts à vous suivre, mais c’est aussi changer alors que les équipes ne sont pas prêtes à l’entendre.

Bien sûr il faut donner du sens au changement, mais sans gestion du timing vous pourrez expliquer ce que vous voulez, vous donnerez toujours l’impression d’être instable ou de tourner en rond. Bref de ne pas savoir ce que vous faîtes.

 

Oui mais alors, comment savoir quand changer ?

Et oui, cette question – Everest du management – devait être posée. Les consultants sont bons pour dire quand c’est trop tôt ou trop tard, mais peinent à nous dire les signes qui indiquent le bon moment.

Alors, puisqu’une laconique réponse du type « ça dépend » n’avancerait pas grand monde. Voici 3 indicateurs qui ne trompent pas et qui, réunis, doivent déclencher le changement :

  

Ensuite, il s’agira de faire vivre le changement : célébrer les victoires au bon moment, corriger les problèmes avant qu’ils n’aillent trop loin, renouveler les engagements de l’équipe pour que le soufflé ne retombe pas…

Puisqu’on vous dit que tout est une question de « quand » !

Les fonds de pension, diable ou alibi ?

Comme a priori une majorité d’entre vous, nous avions plutôt en tête que l’arrivée d’un fond de pension au capital d’une entreprise était une mauvaise nouvelle. Pourtant, certains clients nous confient qu’ils seraient preneurs d’une participation, majoritaire ou minoritaire, de ce type d’acteurs. Pas par appât du gain, nos clients sont managers et non actionnaires, mais pour qu’ils apportent un regard différent, plus objectif et froid, sur la stratégie de l’entreprise. Alors, le fond de pension, cauchemar ou opportunité ?

C’est de toute façon une donne du marché

Beaucoup d’entreprises sont détenues par des fonds ; américains, chinois, français également. C’est une réalité. Au lieu de prendre des positions de principes, regardons ce qui s’y passe. 

Leurs objectifs de rentabilité sont très élevés ; pas toujours atteints d’ailleurs. Ils s’installent en général pour 3 à 5 ans (ou plus, quand ils n’arrivent pas à revendre) et cherchent à générer du cash pendant cette période, pour améliorer la valorisation à la revente et se verser des dividendes d’ici là… Il faut bien que les retraités du Wisconsin touchent leurs pensions.

Notre propos n’est pas moral ; dans un monde parfait, nous préférerions comme beaucoup des actionnaires au long cours, qui demandent de la rentabilité, certes, mais raisonnablement (c’est combien, au fait ?), qui se soucient de la pérennité de l’entreprise avant tout et contribuent à sa compétitivité à long terme ; bref, le modèle de la famille Mulliez pour Auchan. Mais, notre système n’est pas ainsi et il faut faire avec les fonds de pension. Et si ce n’était pas si grave….

  

C’est grave, docteur ?

Et disons le franchement, les fonds de pension, ce n’est pas l’enfer ; pas tous, en tous les cas. 

D’abord parce qu’ils sont prévisibles : on sait parfaitement ce qu’ils veulent : « du cash ». On sait qu’ils veulent vendre dans 90% des cas et veulent donc valoriser l’entreprise. Bref, c’est sans surprise.

 Ensuite parce que ces objectifs ne sont pas mauvais en soi. Bien sûr, il y a des fonds qui assèchent des entreprises, mais dans la plupart des cas, ce n’est pas dans leur intérêt. Les objectifs qu’ils poursuivent sont aussi des indicateurs de bonne santé. Qu’une entreprise génère du profit est une bonne chose, fond de pension ou pas. D’ailleurs, encore largement détenu par la famille Peugeot, le groupe PSA a exactement les mêmes objectifs que Darty, détenu par un fond. Ce qui est plus contestable c’est l’utilisation des bénéfices ; mais là encore, ne soyons pas naïfs, les actionnaires familiaux ne sont pas toujours aussi vertueux qu’on l’imagine.

les fonds ont intérêt à ce que les entreprises qu’ils détiennent se développent

Enfin, parce qu’ils ne sont pas idiots. A partir du moment où la rentabilité est démontrée, les fonds savent investir. Et là aussi, à part dans l’aéronautique et la très lourde industrie, combien d’entreprises investissent à plus de 5 ans ? Croyez-vous qu’un actionnaire familial investit sans regarder la rentabilité ? Bien sûr que non.

Nous ne disons pas que les fonds sont un actionnaire de rêve ; mais ce n’est probablement pas un cauchemar non plus.

 

Donner de la vision (malgré) les fonds

Quand bien même l’actionnaire ne serait pas vertueux, il faut se demander qui peut être impacté par lui. En principe, c’est le président, et, pourquoi pas, son comité exécutif. Eux rendent compte de la stratégie et sont responsables des résultats ; ils doivent les défendre et subissent en effet les décisions de l’actionnaire.

Et pour les équipes ?

Elles ont naturellement besoin de sens et de perspectives, mais le fait d’appartenir à un fond n’empêche pas d’avoir un cap, sur le produit, la façon de traiter les clients, les services, l’utilité de l’entreprise plus globalement. Les fonds cherchent à vendre les entreprises, pas à les tuer ; elles auront une vie après.

C’est là que nous disons que les fonds sont souvent un alibi, conscient ou pas : « la société ne se développe pas parce qu’elle est détenue par un fond ». Non, les fonds ont intérêt à ce que les entreprises qu’ils détiennent se développent. Certes, il faut argumenter, montrer la rentabilité, tenir ses engagements, corriger les erreurs… mais c’est ce que l’on attend d’un manager, dans tous les cas.

Nous sommes personnellement inquiets de la financiarisation du monde mais notre esprit de consultant nous dit qu’il est possible de faire mieux, avec et même parfois de progresser grâce à la finance. Il y a des diables dans la finance, mais elle a parfois raison. Ne soyons pas dogmatiques, ne fuyons pas nos responsabilités.

Prouvons qu’il est possible de faire plus de cash en raisonnant long terme. Pourquoi pas ?

Kaamelott Saison 6 – Une certaine idée du leadership

« Des chefs de guerre, il y en a de toutes sortes. Des bons, des mauvais, des pleines cagettes il y en a. Mais une fois de temps en temps, il en sort un. Exceptionnel. Un héros. Une légende. Des chefs comme ça, il y en a presque jamais. Mais tu sais ce qu’ils ont tous en commun ? Tu sais ce que c’est, leur pouvoir secret ? Ils ne se battent que pour la dignité des faibles. »

César, joué par Pierre Mondy, Kaamelott, saison 6.

Alexandre Astier nous invite, tout au long de sa série, à rire de l’exercice du pouvoir… Mais à y réfléchir aussi ; parce que sa série est, sous son air purement humoristique, très documentée et érudite.

Il oppose 2 visions du pouvoir, caricaturées pour nous faire rire :

  • Celle d’Arthur, fidèle à la vision de César, qui veut réussir avec ceux qu’il a.
  • Celle de Lancelot qui veut réussir à tout prix.

Nous penchons comme Arthur et César pour un leadership qui cherche à rendre meilleur les équipes plutôt qu’à tenir l’objectif quoi qu’il en coûte.

Cela ne veut pas dire un manque d’exigence ou d’ambition, mais cela veut dire une absence de cloisonnement, une humilité face à la difficulté des métiers du bas de l’échelle.

C’est aussi donner beaucoup de responsabilité aux forts pour qu’ils aident les autres.

C’est enfin se rappeler que la valeur ajoutée se fait sur le terrain et que ce sont les équipes qui détiennent la clé de la qualité, de la productivité et des principaux indicateurs de l’entreprise.

Si la culture d’entreprise devient mortelle, changez-la !

Pourquoi la culture est-elle une intouchable ?

Cette sacralisation des racines, des grandes croyances, des principes de fonctionnement les plus ancrés, bref de la culture, est assez logique.

Il est communément admis que la culture d’une entreprise ne peut ni ne doit être changée, au risque de perdre son âme ; a contrario un projet d’entreprise qui ressemble à un retour aux sources est souvent très populaire et recueille une forte adhésion ; par ailleurs nos prospects nous demandent souvent comment nous intégrons la culture à nos méthodes.

Cette sacralisation des racines, des grandes croyances, des principes de fonctionnement les plus ancrés, bref de la culture, est assez logique.

La culture d’une entreprise se forme avec le temps et dans les années de succès. Les « anciens » savent expliquer ses origines ; elles se trouvent dans la personnalité des fondateurs, un concept ou un produit révolutionnaire, une victoire marquante. On peut citer Darty, fondé sur le service après-vente qui a irrigué toute sa culture ; le mythe Bill Gates pour Microsoft ; le succès de la traction ou de la DS pour Citroën ; ou même les succès des années 70 avec Platini pour les verts de Saint-Etienne. 

La culture d’une entreprise, c’est une mythologie avec un mythe fondateur, des croyances, des légendes, des héros ; c’est ce qui fait la personnalité d’une société au-delà de son organisation rationnelle. Comme le corps et l’esprit pour l’humain, l’entreprise est un corps rationnel et un esprit, culturel et irrationnel.

Quand les transformations sont fortes, il arrive que ce qui a fait le succès passé devienne une menace. Ce cas est même assez fréquent.

Mais quand les contextes évoluent, la culture peut devenir une menace

Les marchés évoluent tous et souvent de plus en plus vite. Les consommateurs deviennent de plus en plus matures, les produits se diversifient, mutent ; des concurrents disparaissent, d’autres arrivent. Les forces de Porter sont en marche et rares sont les entreprises qui ne sont pas soumises à des transformations de leur environnement.

Quand ces transformations sont fortes, il arrive que ce qui a fait le succès passé devienne une menace. Ce cas est même assez fréquent.

Par exemple l’enseigne Virgin a fait son succès sur une grande technicité produit, un large choix et le mythe de Branson. Mais le marché fut attaqué avec une violence inouïe par le téléchargement et la dématérialisation en général. Il aurait fallu, pour résister, développer un goût et une maîtrise de la vente qui auraient permis d’offrir au client une valeur ajoutée par rapport à Amazon. Mais ce changement se heurtait à la culture maison symbolisée dans cette phrase : « Un produit culturel, ça ne se vend pas, ça s’achète »… Ils s’achètent maintenant ailleurs… Ce n’est peut-être pas la culture qui a tué Virgin, mais pour l’avoir vue de l’intérieur, elle y a contribué.

 

2 réactions communes dans ces cas-là

Au cœur des transformations d’un marché, le dirigeant est donc face à un dilemme :

  • Je dois changer la culture mais je risque de casser mes points forts.
  • Je peux préserver ma culture mais je risque de perdre mes marchés.

Ces dernières années, 2 attitudes sont les plus fréquentes face à ce dilemme :

1. Les entreprises qui abandonnent la culture passée sans en faire un sujet en soi

C’est par exemple le cas de Sanofi qui a fait face à la fin de la période des blockbusters et qui a dû passer d’une culture de pharmacien pur à une culture pharmacien/financier pour gérer les marges (ce qui était inutile avant). Dans ce cas précis, pas de grand soir, mais juste une évolution progressive des attentes exprimées au management, et une transformation qui finit par devenir une réalité de fait, aidée par les fusions successives. Aujourd’hui le groupe est plus « froid » qu’avant mais a progressé sans trop de casse, et malgré une nostalgie qui existe toujours.

Parfois c’est plus grave, comme chez France Telecom ou La Poste (probablement les deux entreprises qui ont muté de la façon la plus spectaculaire ces dernières décennies en France). Là, l’ancienne culture a été balayée, pour le bien de l’entreprise (aujourd’hui 2 leaders européens) mais avec des conséquences dramatiques sur les employés.

 

 2. Celles qui la préservent

 Par peur ou par prudence, d’autres entreprises, pourtant acculées au changement, se sont enfermées dans un conservatisme forcené et se sont éteintes ou presque. Quand le monde change l’immobilisme est impossible. On a cité Virgin, mais c’est aussi le cas de Nokia ou même de Sony qui sont restés sur leur ancien cœur de marché, le matériel, alors que la valeur ajoutée dans ce secteur s’était déplacée vers le software.

C’est le syndrome « Empire Romain », qui refusa de changer à cause de sa gloire passée et finit par mourir de ce qui a fait son succès. 

Ces 2 attitudes sont également négatives.

 

Comment changer la culture sans casse ?

Il nous paraît évident que le changement de culture, dans les cas de grandes transformations de marché, est une nécessité vitale. Mais nous nous sommes demandé comment le réussir sans drame ni traumatisme, ou même sans affaiblissement du lien à l’entreprise.

Les évolutions de culture ne peuvent être approuvées et mises en œuvre que dans le cadre d’un projet transparent, qui propose aux collaborateurs de participer à l’aventure de la refondation des us et coutumes.

La réponse est dans la mise en œuvre de ce changement : tout le monde est capable de comprendre que face à un monde qui change, il faut aussi changer en interne. Mais l’erreur consisterait à faire comme si c’était tellement évident et qu’il était inutile de l’accompagner. Les équipes peuvent abandonner des pans entiers de leur culture d’entreprise, si c’est demandé clairement et si l’on propose un nouveau mythe fondateur ; car c’est à ça que sont attachés les collaborateurs. 

Dans tous les exemples que nous avons cités, aucune entreprise n’a fait le choix d’exposer clairement les limites de l’entreprise et de sa culture et de proposer un nouveau mythe. Ils ont avancé à marche forcée, avec une communication corporate, trop rationnelle.

Nous pensons que la clé de réussite d’un tel défi est l’honnêteté pour exposer le changement de culture nécessaire et le courage de proposer une nouvelle mythologie :

  • Ce que l’on peut garder de l’ancienne (« ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain »).
  • Le nouveau mythe fondateur.
  • Les nouvelles légendes internes.
  • Les nouveaux héros.

Concrètement cela veut dire que les évolutions de culture ne peuvent être approuvées et mises en œuvre que dans le cadre d’un projet transparent, qui propose aux collaborateurs de participer à l’aventure de la refondation des us et coutumes.

Ce défi est rapidement exaltant si le patron en parle ouvertement avec émotion et envie, et qu’il fait des difficultés rencontrées les occasions pour les collaborateurs de se distinguer et d’y trouver de la fierté.  

Peu d’entreprises ont réussi ce type de mutations. Probablement Volkswagen (et Audi en particulier) qui a vraiment pris le virage du XXIème siècle ; avec une mutation culturelle interne obligatoire, mais sans drame apparent.

Mais dans ce domaine, l’histoire reste à écrire. Et nous serons particulièrement mobilisés pour les entreprises qui voudront être pionnières dans le changement de culture interne pour une 2ème vie de succès.

Je déteste mon boss…

Des relations avec ses patrons, on pourrait en écrire des anthologies colorées et parfois dramatiques. Mais, même si certains frisent parfois avec l’indécence, admettons que c’est, a priori, un poste difficile, mal aimé et dangereusement exposé.

 

1 patron, 1 employé, un nombre infini de frictions possibles 

De tout temps, l’image du « patron salaud » existe dans les entreprises. Pourtant, force est de constater que le torchon semble brûler encore plus vite à notre époque. Plusieurs raisons à cela :

1/ Un contexte de crise : et oui voilà encore une conséquence de la crise ; dans les entreprises qui souffrent les patrons doivent souvent prendre des décisions impopulaires. De la fermeture d’un site à la suppression du temps de pause ou de la machine à café gratuite, ces irritants sociaux plus ou moins graves ternissent naturellement l’image du leader. Ceci explique par exemple pourquoi une immense majorité des chefs d’état présents en 2008 ait été battue aux élections, mais aussi pourquoi les patrons de certaines grandes entreprises sont limogés au bout de quelques mois seulement, remplacés par d’autres au « casier judiciaire vierge ».

2/ Des relations hiérarchiques moins autocratiques : pour des raisons à la fois économiques et culturelles le rapport d’autorité a changé dans les entreprises. Le leader ne peut plus se permettre de commander seul, il doit communiquer, expliquer, accompagner, valoriser. C’est une évolution nécessaire devant la complexité du monde économique, positive forcément sur le fond, exigeante aussi.

3/ Une forme de mode du « boss bashing » : moins absolue que les deux autres, cette évolution est néanmoins de plus en plus répandue, en politique et dans les entreprises. Non seulement on peut dire ouvertement du mal de son patron, ce qui était bien plus compliqué il y a quelques années, mais c’est même devenu un facteur de cohésion sociale dans l’entreprise. De cette tendance les patrons ne sont pas que des victimes : n’ayant pas été capables d’unir les collaborateurs derrière eux, ils les ont unis contre eux.

 

Les mauvais réflexes du leader

Face à cette conjoncture défavorable, il faut avouer que les tentatives des leaders pour retrouver leur autorité sont souvent inadaptées et maladroites.

Compenser, affronter ou apaiser sont des stratégies limitées et souvent clientélistes, qui se retournent contre les leaders. 

Certains tentent de compenser, c’est-à-dire de prendre des mesures consensuelles pour contrebalancer des décisions impopulaires, ou de rester inflexibles sur un sujet symbolique après de multiples reculades sur des sujets parfois bien plus essentiels. La politique récente nous fournit des exemples avec par exemple la taxe à 75%, essai bien pathétique du gouvernement français de prouver sa solidité.

Quelques leaders tentent encore le rapport de force. Pour les raisons de changement de contexte expliquées plus haut, ces stratégies archaïques – qui ne fonctionnent plus depuis Margaret Thatcher – renforcent le mal et ne se finissent qu’à la rupture (grève, départ du leader, cession, etc.)

D’autres enfin jouent l’apaisement, tentative louable si elle ne se résumait la plupart du temps à engager le dialogue avec les opposants les plus virulents, qu’ils soient syndicalistes ou non d’ailleurs. Le remède est alors pire que le mal : les opposants sortent renforcés et les propos déformés du leader n’apaisent ni ne réconcilient personne.

Ces solutions sont également mauvaises : compenser, affronter ou apaiser sont des stratégies limitées et souvent clientélistes. Rien de pire que d’agir pour être aimé ou respecté quand on ne l’est pas, c’est une façon de nager à contre-courant.

Soyons clairs, il n’existe pas la recette du bon leader. 

Un équilibre pas si compliqué à trouver

Et pourtant, dans une majorité d’entreprises vous pouvez trouver des managers qui réussissent l’exploit quotidien de conserver leur autorité sans autoritarisme, le respect de leurs équipes sans démagogie. Soyons clairs, il n’existe pas la recette du bon leader.

Rien de pire d’ailleurs que d’écouter les principes des patrons célèbres : oui bien sûr les succès de Louis Renault, de Bill Gates ou de Mark Zuckerberg sont inspirants, mais leurs préceptes sont à la fois contradictoires entre eux et inapplicables : ils dépendent trop de la personnalité de chacun.

Ce qu’il convient de rappeler tout d’abord, c’est que la première qualité d’un leader c’est d’être courageux, ce qui se traduit notamment par ne pas chercher à être aimé. Un leader cherche le bien de tous, ce qu’il obtient en formulant une vision performante, en la rendant compréhensible pour tous et en étant le garant que cette vision se réalise quelles que soient les difficultés.

Plus que pour être aimé donc, voici 3 comportements que nous trouvons chez les grands leaders et qui leur permettent d’être compris par leurs équipes.

1/ Rester simple : le premier impératif pour un leader est de rester simple, que ce soit dans l’idée ou dans l’action. A priori facile, le fait de rester simple est en fait un effort de tous les instants, pour que votre vision soit accessible et que vos actions soient limpides. C’est une qualité par exemple qu’Obama, en période électorale tout du moins, incarne parfaitement. Penser ou agir compliqué, c’est risquer que personne ne comprenne le sens du projet qu’il soit intellectuellement pertinent ou non, le leader aura au mieux raison tout seul, ce qui ne le mènera pas loin.

2/ Être prévisible : un leader est celui qui est suivi même quand il n’est pas là ou qu’il ne parle pas. Obtenir cela nécessite de rendre ses principes prévisibles, pour que chacun sache ce qu’il doit faire même seul. Michel Edouard Leclerc est un bon exemple, à grand renfort de prises de parole nombreuses, répétitives et à la limite du caricatural, il a réussi à rendre parfaitement lisible sa stratégie et sa marque.

3/ Ne jamais se couper du terrain : si tout le monde connaît ce principe de bon sens, nombreux sont ceux qui ne l’appliquent pas, le sacrifiant sans vergogne devant l’avalanche de réunions et de plans à 3 ans. Oui mais voilà, l’actualité est sur le terrain, la valeur ajoutée de l’entreprise est sur le terrain, les collaborateurs sont sur le terrain. Ils ont besoin de voir leur leader, et de s’assurer que leur leader voit ce qui se passe.

 

L’enjeu d’un leader n’est pas d’être aimé à tout prix. Mais pour mener un changement, pour franchir une crise, pour aller plus loin, le leader qui marche devant a besoin d’être sûr et sans avoir à se retourner sans cesse, que ses équipes le suivent.

Little Bouddha et la prise de conscience

Little Bouddha n’est pas le film du siècle avouons-le et ce n’est pas pour sa qualité artistique que nous vous le conseillons ce mois-ci… Sauf si vous êtes un nostalgique du kitch des années 90, tendance André Agassi.

Rappelons quand même que le film raconte l’histoire de Jesse, jeune américain de 9 ans approché par des moines tibétains qui voient en lui la possible réincarnation d’un illustre Lama.

La partie américaine de l’œuvre est assez mièvre, mais le film raconte en parallèle l’histoire de Siddhartha (celui qui deviendra le bouddha) et c’est dans ce récit que réside l’intérêt du film. Son épopée nous permet de faire un parallèle intéressant avec le changement en entreprise, notamment sur les mécanismes de la prise de conscience.

Ce fils de roi à qui tout est accordé va en effet avoir le courage de quitter son cocon pour découvrir le monde, ses merveilles et ses malheurs.

3 éléments le poussent à s’évader :

  • Une chanteuse qui lui révèle la beauté du monde.
  • 2 très vieilles personnes qui lui révèlent que la jeunesse n’est pas éternelle.
  • La visite de la ville réelle qui lui révèle la maladie, la pauvreté et la mort, choses qu’il ignorait.

Pour un manager qui veut que ses équipes sortent de leur confort pour affronter les défis du monde, on retient plusieurs enseignements :

  • Les humains aiment le confort mais aiment encore plus en sortir pour se révéler à eux mêmes.
  • La quête d’éléments positifs attire, mais la confrontation à la réalité et aux difficultés sont les meilleurs déclencheurs de la prise de conscience.
  • Les collaborateurs n’ont pas forcément la vision de ce qu’il faut faire, ils ont besoin de messagers pour que leurs envies d’aventure se révèlent.

La vie de Siddharta sur wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Siddhartha_Gautama

Pourquoi les ambitions inatteignables sont-elles les meilleures ?

Ce que l’on attend de son leader en entreprise, au-delà de ses compétences managériales personnelles, c’est qu’il nous donne une direction, un cap, une vision : nous l’appelons l’Ambition. Sans avoir de statistiques précises, nous pouvons considérer que dans une grande majorité des cas, ces attentes sont déçues, parce que cette ambition est inexistante ou bien parce qu’elle est mal choisie. Avant de tirer à boulets rouges sur nos chefs incapables, admettons que cet exercice, bien qu’a priori simple, est loin d’être facile.

  

Une Ambition, à quoi ça sert ?

L’Ambition peut se définir comme un idéal à atteindre, comme un azimut pour toutes les actions menées par les collaborateurs de l’entreprise. Elle doit pouvoir se décliner par la suite en enjeux économiques, techniques, organisationnels et humains.

Comment ne pas citer le célèbre « Think different » de Steve Jobs, slogan lancé en 1997 pour la publicité et qui est devenu le moteur de l’Ambition d’Apple

Définie comme telle, il semble presque superflu de se poser la question de son utilité. Listons malgré tout les trois principaux bénéfices d’une Ambition quand elle est justement choisie :

  • Mobiliser : l’Ambition est un moteur de l’action, elle génère de l’envie, de l’adhésion et doit être suffisamment difficile à atteindre pour amener les acteurs de l’entreprise à se dépasser. Comment ne pas citer le célèbre « Think different » de Steve Jobs, slogan lancé en 1997 pour la publicité et qui est devenu le moteur de l’Ambition d’Apple, appelant l’ensemble des équipes à trouver de nouvelles idées et concepts, avec le succès que l’on sait.
  • Connecter : l’Ambition est aussi l’aiguillon pour l’ensemble des axes de travail de l’entreprise. Elle doit être la cohérence des priorités choisies, le juge de paix pour l’arbitrage, le guide dans le choix des objectifs business. Chez Decathlon, l’ambition est de « Créer l’envie et rendre accessible au plus grand nombre les bienfaits du sport ». Ils privilégient donc le prix et la simplicité des produits à la technicité ou la mode. Les priorités en découlent. 
  •  Valoriser : L’ambition donne de la valeur aux actions du quotidien, en ajoutant de la profondeur aux tâches basiques. Si cette tâche n’est pas forcément enthousiasmante, les collaborateurs savent qu’ils participent à un projet plus vaste, plus noble. DHL a pour ambition de rapprocher les gens toujours davantage. Largement inspirée de l’épopée de l’Aéropostale, cette Ambition parait bien loin des tâches quotidiennes de tri, de conduite, de stockage. Pourtant, ils ont réussi à donner à ces tâches, et au courrier, une valeur sacrée.

Quand l’Ambition fait « Pschittt »

Au gré de nos actions dans l’industrie, la distribution, le transport, la cosméto-pharma, etc. nous avons vu d’autres exemples d’Ambitions réussies, propres à booster l’énergie des équipes. Malheureusement, les exemples sont plus nombreux encore d’entreprises incapables de trouver leur graal ou leur objet de valeur collectif.

Pour un comité de direction, un objectif de CA peut être suffisamment stimulant, mais pour l’opérateur cela signifie une charge et une pression supplémentaires, rien de motivant à cela.

Première raison, les ambitions choisies sont souvent trop « classiques ». Appuyées sur les mots-valises, tels « leader », « référence » ou promettant une croissance « durable et rentable », elles sont interchangeables et en deviennent presque invisibles. Placardées un peu partout à la cafétéria, dans les salles de réunion, elles deviennent des figurants, des éléments de décor. Un conseil : si votre Ambition pourrait être celle de n’importe quelle autre entreprise, alors séparez-vous en !

Autre erreur classique, la confusion entre Ambition et objectif. Trop de leaders puisent leurs ambitions dans leur tableau de bord. Qu’ils soient bruts façon « Doublons notre chiffre d’affaires en 5 ans » ou stylisés façon « Allons conquérir 1% de part de marché par an d’ici 2020 », un objectif est un objectif et n’a d’autre intérêt de que fixer l’exigence du résultat attendu. Bien sûr, pour un comité de direction, un objectif de CA peut être suffisamment stimulant, mais pour l’opérateur cela signifie une charge et une pression supplémentaires, rien de motivant à cela.

Ces deux erreurs, a priori grossières mais qui représentent tout de même plus de la moitié des Ambitions observées, font que les entreprises se coupent du moteur principal de motivation des équipes. Et pourtant, le travail de définition et de partage d’une Ambition peut être, en soi, une dynamique formidable.

Sortons des poncifs !

Les savants prodiguent souvent la même chose : une ambition doit être positive, simple, exigeante, réaliste, temporelle, entre autres vertus. Etant donné que ces sages conseils amènent souvent les Ambitions de type « devenir leader » et autres clichés, nous pensons que résumer l’Ambition à ces adjectifs trop lisses est trop réducteur.

Les salariés d’Apple n’en auront jamais assez de « penser différent », ceux de DHL de « rapprocher toujours plus les hommes », ni ceux de Nature&Découvertes de rendre « [leurs] clients toujours plus sensibles à l’environnement ».

Pour marquer les esprits, nous pensons aussi qu’une ambition doit être contestable et inatteignable.

  • Contestable, car une ambition où l’on ne peut être que « pour », qui est une évidence, n’amènera jamais d’énergie supplémentaire car elle enfonce une porte ouverte. Quelle est la valeur ajoutée de fixer comme ambition de « devenir une entreprise plus performante pour ses clients et plus sûre pour ses employés » ? Cela n’apprend rien à personne sur les priorités de l’entreprise. Une ambition doit affirmer un choix, tel Système U qui propose de « consommer mieux et moins » plutôt que « plus pour moins cher ». C’est de cette façon qu’elle donnera du sens et un cap clair aux équipes, et qu’elle fera réagir y compris ceux qui ne sont pas d’accord, avec des échanges constructifs à la clef.
  • Inatteignable, car à la différence d’un objectif, ce qui compte ici n’est pas d’atteindre son ambition dans une logique purement rationnelle, c’est le chemin qui importe. Ainsi, les salariés d’Apple n’auront jamais fini de « penser différent », ceux de DHL de « rapprocher toujours plus les hommes », ni ceux de Nature&Découvertes de rendre « [leurs] clients toujours plus sensibles à l’environnement ».

 

C’est comme cela que l’Ambition peut rester le cap de l’entreprise sur le long terme, dans la crise comme dans la croissance, dans une organisation X ou Y, pour le collectif et pour chacun, quel que soit son rôle, son ancienneté ou ses compétences.

ALBUS CONSEIL