Auteur/autrice : charlie

RH, Devenez Conquérants

Frustrés et agacés de voir la fonction RH souvent plus exécutante que leader, nous avons envie de donner à ceux qui l’incarnent des clés pour gagner enfin leur place : devenir des catalyseurs d’engagement, des sentinelles de la culture d’entreprise, des challengers de haute volée…Bref leur permettre de jouer le rôle majeur qui est le leur pour que nos organisations soient plus innovantes, plus prospères, plus sereines, plus humanistes. Cette crise mondiale qui a tant exposée les équipes RH n’est-elle d’ailleurs pas une très belle opportunité pour elles de prendre enfin le pouvoir ? Dans ce podcast, nous allons notamment parler de comment s’ouvrir à son écosystème et créer une vraie intimité avec les enjeux business et stratégiques pour devenir de solides business partners, d’aller sur le terrain et au contact des collaborateurs pour gagner en pertinence dans ses actions, de ne pas céder aux sirènes des modes actuelles, et de bien d’autres choses encore !

Comment changer les choses à votre niveau

Dans cette période de transition (on l’espère!) vers le post COVID, nous sommes assez tristes de constater que ce monde d’après, tant présagé et tant espéré, est finalement assez similaire au monde d’avant, et surtout dans les entreprises. En effet, si. on regarde les choses de près, outre de nouveaux accords sur le télétravail, quels grands changements, quels grands virages ont pris les entreprises ? Finalement assez peu.
Et si une pandémie mondiale ne suffit pas à créer de vertueuses ruptures pour les organisations, alors invoquons la capacité des individu – des managers aux actionnaires – à impulser des changements radicaux, pour des entreprises plus engagées, plus efficaces, plus humanistes ! Vous avez plus de pouvoir que vous ne le croyez !

L’opposition ce n’est pas la guerre

Dans les entreprises, l’opposition fait peur. On la combat… Dans la société, l’opposition est devenu un sport clanique, une confrontation de haine et de préjugés réciproque. A-t-on perdu l’art de s’opposer sans se faire la guerre ? 
Et si demain on s’opposait à nouveau sans se détester ?

 

On déteste la pluralité

Dans une entreprise de quelques milliers ou même de quelques dizaines de milliers d’employés, ou dans un pays de 60 millions voire de 300 millions d’habitants, le consensus est impossible, pas souhaitable, suspect. Parce que nous avons des éducations, des sensibilités, des expériences, des sentiments, des objectifs différents, nous avons des opinions différentes et des façons différentes de les défendre.

Pourtant, tout se passe comme si on détestait cette pluralité ; comme si on détestait tous ceux qui ne pensent pas comme nous.

L’opposition à Sarkozy a coulé le Grenelle de l’environnement avant même son démarrage. Celle d’Obama n’a pas voté son plan suite à la crise des subprimes pour ne pas lui donner cette victoire. Aujourd’hui les opposants à Macron comme hier ceux de Hollande ne sont pas capables de sauver ne serait-ce qu’une idée, qu’une action. 
Tous ces opposants se discréditent en refusant la nuance. Ils se rendent repoussant pour ceux dont ils voudraient conquérir les coeurs et se retrouvent à travailler presque exclusivement cet électorat conquis qui vote pour eux sans même les écouter.

Aujourd’hui on ne peut plus critiquer un élu vert sans être un affreux productiviste irresponsable, on ne peut pas accorder le bénéfice du doute à l’action d’une multi-nationale sans être un agent pervers du capitalisme sauvage. Dans l’entreprise, les opposants, les élus des syndicats veulent la mort de l’entreprise dès qu’ils émettent une objection… Et inversement, les patrons serait systématiquement en train de nous la faire à l’envers à chaque prise de parole….. Des dogmes s’opposent, des intérêts contraires, et de moins en moins des idées, des arguments.

Pourquoi déteste-ton autant la pluralité ?

 

Le problème c’est que tout le monde y perd

Cette société s’organisent en factions rivales. Les cadres font face aux non-cadres ! Les « gens de gauche » sûrs qu’ils sont les seuls à avoir une morale, prêtent aux autres la seule volonté de s’en mettre plein les fouilles. Les écologistes détestent ceux qui défendent l’industrie (forcément des affreux), les « manif pour tous » accusent les autres de vouloir tuer la famille… On cherche à opposer les choses : la culture et l’économie, la qualité et la productivité, l’industrie et l’écologie… C’est plus simple, plus vendeur… Ça ressemble aux mauvais films américains de Marvel.

Et donc coup, on n’avance pas, on attend que l’autre se plante, on le désire même. On le rejette en bloc, de la première à la dernière phrase, on ne sauve rien… En réduisant l’autre à des intentions maléfiques, on envoie le message qu’on ne sera jamais convaincu, jamais embarqué… C’est en jugeant sans nuance et sans analyse que l’on fait le lit des Trump qui ne cherchent même plus à parler au peuple et se contentent de draguer son électorat pour l’électriser… Trump est ce que je crains le plus au monde mais il n’est selon moi que le symptôme d’une vie politique où l’opposition est si caricaturale, dans un sens ou dans l’autre, que la meilleure tactique est finalement de ne parler qu’à ses partisans.

On n’avance pas, on se chamaille. On n’avance pas, on fait et on défait. On freine et on dénonce. On n’avance pas. Mais s’agissant du Grenelles de l’environnement, n’aurait-il pas fallu tout faire pour réussir en 2007, et gagner 15 ans ?

Dans l’entreprise on continue d’avancer malgré tout parce qu’on est un peu plus à l’abri du n’importe quoi médiatique dans lequel on déchaine les passions plutôt que de chercher à faire réfléchir. Dans l’entreprise, on avance toujours parce qu’avec le vrai immobilisme on est vite tous perdants : point de salut si les produits ne se vendent plus. Mais le danger rôde, et l’aversion au risque se développe, probablement chez nous plus qu’ailleurs… On peine de plus en plus à avancer vite parce qu’on se craint, parce qu’on ne sait plus s’engueuler franchement.

Mais n’ayez pas peur de ne pas être d’accord ! C’est impossible d’être tous d’accord !  Impossible.  C’est même l’intérêt de l’humanité d’avoir ses différences. Moi je suis content qu’il y ait des militants de toutes les couleurs politiques, même d’extrême droite. Cela fait partie de la vie. Mais je suis navré qu’ils ne sachent plus se parler.

 

Alors revenons à un monde qui s’oppose GAIEMENT !!

La vie c’est le débat et la confrontation, la palabre comme dirait Edouard Baer. Ne rêvez pas de consensus, c’est impossible et chiant. 
Désirez l’opposition et la confrontation, mais n’oubliez pas les 3 règles d’or de l’opposition :

Votre opposant n’est pas le diable

Il est évidemment facile de dire que le patron veut du fric à tout prix, et exploite les ouvriers sans vergogne. Il est confortable de taxer le leader de la CGT de dogmatisme et de vouloir faire mourir l’entreprise pour prouver qu’il a raison. Il est évidemment tentant de prêter à la droite une absence totale de morale et à la gauche une absence de réalisme et de se taxer mutuellement de tentation autoritaire. Il est galvanisant de dire qu’un ministre de l’éducation veut la mort de l’école ou qu’un maire de Poitiers veut régir les rêves des enfants et les uniformiser.

Mais tout ceci est aussi faux que bête. Votre opposant a 99 fois sur 100 l’ambition d’améliorer les choses, mais son passé, son expériences et sa sensibilité l’amène à voir des solutions différentes des autres.

Nier qu’il puisse avoir une éthique, une intention louable c’est non seulement envenimer le débat mais en plus s’aliéner ses partisans en plus. 

Accepter l’idée que l’immense majorité des gens veulent le bien du plus grand nombre, c’est la première pierre du dialogue. Chercher à se comprendre plutôt que chercher à avoir raison. Si je devais débattre avec Marine Le Pen, je partirais du principe qu’elle veut le bien du pays… Parce qu’en lui prêtant des intentions diaboliques, non seulement le dialogue est impossible, mais en plus j’insulte ceux qui sont tentés par elle, et je les pousse vers elle.

 

Il y a bien plus de complexité que de complots

Dans la même veine et sans faire de ce court article un pamphlet anti-complotitiste, il est généralement absurde de lier une cause et sa conséquence directement : celui qui augmente les allocations chômage ne désire pas la mort du travail. Celui qui les baisse ne désire pas la mort des travailleurs. Ils expriment tous les deux les conclusions de modèles sociologiques anciens, qui visent l’un et l’autre au bien collectif. Adam Smith et Karl Marx sont des humanistes, ne l’oublions pas.
Mais surtout les décisions sont complexes et doivent prendre en compte de multiples facteurs. La décision de fermer les cinéma pendant le covid (que je regrette) doit néanmoins être comprise dans un système complet. De même on ne devrait pas privilégier les voitures électriques sans débat sur la production d’énergie ; on ne devrait pas passer au tout télétravail sans se soucier des retombées psychologiques et même relationnelles.

Quand vous vous opposez, quand vous ne comprenez pas la position de votre interlocuteur, c’est souvent qu’il prend en compte un autre facteur, une autre conséquence. Par exemple oser parler du coût de la santé publique est vécu comme une attaque du service public par certaines personnes d’extrême gauche… Mais ne pas en parler est vécu comme une attaque contre le service public par les électeurs de droite. Chez nous, ce débat n’est pas sur le but (en France, personne ne remet en cause la nécessité d’un hôpital public) mais sur les moyens d’y arriver. Et ce débat est passionnant. Mais il ne peut aboutir à une solution intelligente que dans la pluralité, pas dans le dogmatisme.

Donc cherchez à comprendre les conséquences que voit votre contradicteur, même si parfois il les exprime mal à vos yeux.
Le monde est trop complexe pour qu’un seul Homme le comprenne seul.

 

L’analyse et l’écoute sont les transgressions du monde moderne, adoptez les

Pour finir, soyons clairs : l’analyse et la réflexion ont perdu beaucoup de terrain ces dernières années. La colère et l’émotion en ont beaucoup gagné. On caricature les autres à l’extrême et on se replie dans le confort d’un cercle de gens qui pensent comme nous contre tous les autres.

La faute aux médias, fan des idées basiques ? Aux partis politiques qui draguent plus qu’ils ne réfléchissent ? A ceux qui ont eu le pouvoir qui n’ont pas eu le courage d’expliquer ? Aux réseaux sociaux qui donnent la prime aux pensées les plus extrêmes ? A nous tous qui préférons l’analyse séduisante qui cochent les cases de notre éducation ? Au monde plus complexe, si difficile à comprendre ? Probablement un peu de tout ça, et bien d’autres choses encore.

Mais du coup, la transgression suprême en entreprise comme dans la société, c’est de tenir compte des voix discordantes, d’envisager le débat avec les opposants, de reconnaitre à l’autre dont les idées sont si éloignées des miennes des intentions aussi nobles que les miennes.

J’ai eu la chance en 15 ans de conseil, de rencontrer des centaines de managers, des dizaines de dirigeants, de travailler indirectement pour des milliers de salariés, et je peux tenir le compte des situations auxquelles j’ai assistée dans lesquelles la seule explication possible est la malhonnêteté : 10 personnes, 20 max. Sur des milliers.
Le reste du temps, il y a de la paresse, des erreurs, de la peur, de la résignation, des préjugés, des généralisations, et puis parfois du génie, de la générosité, de l’écoute, du courage.

La transgression du monde moderne, c’est d’écouter les opposants, pour sortir de la paresse intellectuelle et réhabiliter l’écoute.
La transgression du monde moderne, c’est de recommencer à palabrer.

L’opposition en entreprise : une vertu diabolisée !

« J’accepte le sens critique bien sûr, mais à la fin de la réunion il faut que tout le monde aille dans le même sens ! » : voilà le niveau d’acceptation le plus fort de l’opposition par les managers. Une opposition brève, suivie d’un ralliement rapide. Et si on re-questionnait la place de l’opposition et ses vertus ?

 

On met dans le même sac l’opposition du but et l’opposition sur les moyens

Petit préambule pour préciser que nous ne parlons pas ici des syndicats, qui ont un rôle de contre-pouvoir par mandat et dont nous avons déjà parlé dans d’autres articles.

Derrière le thème d’opposant, on assimile deux choses qui n’ont rien à voir. L’opposition sur le but de votre projet (une vision d’entreprise, un projet de cession, un changement d’activité ? etc.) et l’opposition sur les moyens (le temps, la répartition des rôles, la priorisation).

Et là, vous nous voyez venir, on va vous dire que l’opposition est acceptable quand elle se situe sur les moyens et pas sur la finalité. Et bien non ! Disons plutôt que les deux sont très différentes mais aussi utile l’une que l’autre.

  • L’opposition sur les moyens, c’est la vigilance. Elle questionne sur les éléments du projet pour s’assurer que le chemin imaginé est robuste. Elle permet l’appropriation et le ralliement des indécis si le leader est prêt à quelques concessions sur les modalités. Bref ça solidifie le projet et ça fédère les équipes. C’est l’opposition qui peut devenir stérile quand elle se prolonge (« ok, tu n’étais pas d’accord sur les priorités mais maintenant qu’on est parti, ce n’est plus constructif »)
  • L’opposition sur le but, c’est l’adversité. Et l’adversaire, c’est ce qui permet le dépassement et le questionnement fondamental. Vous n’avez qu’à regarder : Jobs et Gates, Nadal et Federer, Astérix et César, Français et Anglais, etc. Bien sûr que ce n’est pas agréable de devoir gérer un opposant, notamment dans son équipe. Mais son apport est fondamental pour créer un déséquilibre qui permet le renouvellement et l’avancée. L’opposition n’est pas la traîtrise si l’intérêt vital de l’entreprise ou du projet reste un bien commun (« je ne suis pas d’accord avec ton projet mais je ne coulerai pas la boîte pour te prouver que j’ai raison »). Cette stimulation apportée par l’opposition est une façon de canaliser sa tension vers une confrontation connue et énergisante. C’est parfois pénible mais indubitablement précieux

 

Sans opposant, votre management ressemble à un despotisme aveugle

En tant que leader, nous sommes sûrs que nos opposants (sur le but du projet) sont contre-productifs puisque l’on pense logiquement avoir choisi le bon objectif. Mais en tant que consultant, nous voyons un problème bien plus régulier et problématique que la présence d’opposants. C’est l’absence d’opposition exprimée.

C’est d’abord compliqué pour le leader lui-même, car l’absence d’opposition se traduit souvent par un grand sentiment de solitude. Personne pour renvoyer un effet miroir par son opposition, pas de confrontation stimulante, pas de test de robustesse sur le projet. On a parfois l’impression que, si le projet allait dans le mur, personne ne le dirait. Et ça ce n’est pas du tout rassurant.

C’est compliqué pour le projet aussi. Une opposition marquée permet de voir l’autre côté de la pièce et permet d’évaluer plus complètement la situation (« mon projet n’est peut-être pas parfait, mais le projet concurrent a moins de chance de résoudre mon problème »). Difficile de distinguer la différence entre un ralliement de conviction et un ralliement de confort. L’opposition au moins, c’est clair !

 

Tout est question d’équilibre… et d’animation ! 

Nous avons tendance, en bons enfants de la socio-dynamique, de dire qu’un projet ne meure pas de la présence d’opposants mais de l’absence d’alliés. Nous y croyons toujours autant sauf que nous pourrions ajouter qu’un projet de meure pas de la présence d’opposants, mais qu’il peut mourir de n’en avoir aucun.

C’est donc une question d’équilibre. Si le sujet à traiter est sensible, vital, un projet sans opposant est un projet qui n’est pas suffisamment ambitieux, pas suffisamment clair ou adressé à un public qui n’est pas suffisamment compétent ou en confiance pour exprimer son avis. Trop d’opposants, évidemment, c’est un problème car le projet est soit mal pensé, soit il sera mal mis en œuvre. Donc, on doit obtenir un point d’équilibre, ça paraît évident.
 
Mais ça ne suffit pas. 

Souvent, le leader anime très mal l’opposition.

Au début, il ne la laisse pas s’exprimer suffisamment. C’est le moment où il présente le projet : il est dans ses petits souliers, il voudrait obtenir une adhésion rapide et il montre, verbalement ou non, que l’opposition serait malvenue. C’est dommage parce que l’opposition a souvent besoin d’être exprimée pour que l’adhésion se développe (l’énergie d’opposition est plus spontanée, celle de l’adhésion se construit plus lentement). De plus, une opposition non exprimée ne disparaît pas, au contraire, moins elle est exposée plus elle gonfle.

Ensuite, en revanche, on lui donne souvent trop d’importance. Le leader a une fâcheuse tendance à se sur-adapter à l’opposition car il s’en méfie. Les arguments deviennent des plaidoyers, les moments de construction sont de plus en plus cadrés, etc. Il suffit parfois de regarder les yeux d’un leader pour savoir qui sont les opposants à son projet. Ça ne donne pas forcément envie de se rallier et ça peut même questionner sur la solidité du projet.

Rien n’empêche, au contraire, de bien exposer l’opposition, de la rendre connue de tous et de lui garder une juste place : à certains moments c’est ok de l’exprimer, à d’autres non. C’est évidemment plus simple à dire qu’à faire mais profiter de l’intérêt de l’opposition est à ce prix.

S’opposer n’est pas gueuler

L’opposition ne dois pas être un truc d’ego c’est l’expression de votre sensibilité, de vos intuitions, de vos analyses. Pour y réfléchir ce mois-ci je choisi un opposant surprenant, un opposant à tout mais à personne, un libre penseur. Edouard Baer.

Il m’inspire ce que peut être l’opposition. Ce n’est pas gueuler plus fort, montrer les muscles, faire de l’ombre, juger ou râler. C’est s’exprimer, sans tabou, avec élégance si on peut. Dans cette courte video, il nous incite à cette libre pensée, à ne pas réfléchir et y aller, à être comme l’éléphant dans le magasin de porcelaine, et à ne pas systématiquement l’éviter.

Je choisi cette référence pour vous faire réfléchir à la nature même de l’opposition… Est-ce forcement un combat violent et dur ? Ou l’opposition est-elle finalement l’expression de mon avis, sans agressivité et sans theatralisation ?

Qu’en pensez vous ? 

Vidéo « On se lance, on y va, on s’élance, on tente sa chance / Plus prêt de toi »

 

 

Managers, tirez sur vos bons soldats !

Assez fréquemment, on voit dans les entreprises se former des équipes de bons soldats. Alors, sur le papier, soyons honnêtes, c’est alléchant. Efficaces, fiables, ils délivrent et ça nous rassure. Mais cette situation est-elle vraiment profitable pour vous et pour votre entreprise sur le long terme ? Et quelles en sont les implications pour vos bons soldats ? Je vous propose d’y réfléchir ensemble.

 

On a tendance à s’entourer de bons soldats et à les promouvoir

Dans nos équipes, on a tendance à recruter ou s’entourer de profils similaires au nôtre. Parfois, ce n’est pas conscient, mais souvent, c’est avec eux qu’on a le feeling en entretien, et puis c’est quand même bien plus simple de communiquer et de travailler avec des personnes qui fonctionnent comme nous. Les ressemblances sont parfois telles, que le collaborateur prend son manager comme modèle vers lequel tendre. Il fait tout ce qui est en son pouvoir et met toute son énergie pour être à la hauteur : il va vite, rend un travail toujours impeccable, respecte les délais en ayant toujours cette petite voix dans un coin de sa tête « mais comment mon manager aurait fait à ma place ? ». Au final, quand on est manager et qu’on a un bon soldat dans notre équipe, on est rassuré. 

D’ailleurs, c’est souvent les bons soldats qu’on veut promouvoir. On les identifie comme talents, ressources précieuses et on les met dans tous les projets à haute visibilité ou qui peuvent contribuer au développement futur de l’entreprise. 

En fait, on se voit en eux, du coup on est fiers de promouvoir nos poulains. On leur donne le coup de pouce qu’on n’a pas eu à notre époque et on en jubile. Ils sont notre prolongement, et nous, leur modèle.

En retour, ces collaborateurs se sentent redevables qu’on leur fasse confiance, qu’on mise sur eux et une sorte de loyauté implicite s’instaure envers le manager. Cette loyauté est entretenue voire exacerbée par une injonction à tout réussir par des petites phrases telles que « je compte sur toi », « ne me déçois pas » qui sous-entendent que les collaborateurs partent au combat et seule la victoire est à la hauteur des attentes de leur manager.

 

Le problème, c’est qu’en plébiscitant les bons soldats, les managers se tirent une balle dans le pied

Le problème de s’entourer de mini-nous loyaux est double. 

Pour les collaborateurs, l’injonction voire même la pression à réussir se traduit par « je dois être comme toi », « je dois faire comme si c’était toi ». Cela gomme donc toute prise d’initiatives et tout leur antagonisme, c’est-à-dire leur capacité à faire preuve d’un esprit créatif et critique, dans le but de donner de la robustesse aux projets de leur manager. Dans les deux cas, cela est perçu par le manager comme hors du cadre de ses attentes et donc impropre à l’expression. Mais cela revient à nier la singularité de leur collaborateur, à oublier qui ils sont, à laisser de côté leur âme d’enfant curieux et capable de remettre les choses en question dans le seul but de tendre vers leur modèle : vous, leur manager. C’est ce qu’exprime bien Kurt Cobain lorsqu’il affirme que « vouloir être quelqu’un d’autre, c’est gâcher la personne que vous êtes ». Et si on tire le fil, et qu’au fur et à mesure, tous les bons soldats deviennent presque une armée de clones, comment ferez-vous la différence entre eux ? A qui confierez-vous telle ou telle tâche ? Qui choisirez-vous pour être promu à tel poste ?

Quant au manager, s’entourer de bons soldats produit une forte synergie autour de lui : dans tous ses moments de partage avec ses collaborateurs, ils sont tous d’accord avec lui et vont dans son sens, sans remettre ses idées en question ni exprimer un point de vue différent. Les managers ne sont donc pas challengés, et se retrouvent souvent en posture de « sachants », incapables d’envisager une autre solution, une autre idée que la leur, puisqu’ils ont pris l’habitude qu’elles fassent l’unanimité. En situation extrême, on en arrive à Trump et ses « trumpistes », qui lui vouent un culte, peu importe l’absurdité qu’il sort. Au final, plus personne n’est capable de lui dire si ce qu’il propose fait sens, ce qui aboutit aux dérives que l’on connait : un ayatollah du savoir qui ordonne à ses exécutants. Un management « top down » finalement …

 

Alors reprenez la balle au bond, et renvoyez-la-leur !

Avoir des bons soldats dans son équipe, ça peut aller un temps car ça nous rassure en tant que manager, et ça permet aux collaborateurs de se former, mais ce n’est pas une situation pérenne. Vous ne pouvez pas vous en satisfaire, vous ne pouvez pas les laisser tranquilles pour toutes les raisons évoquées plus haut. Il est temps de changer votre fusil d’épaule car vous avez besoin d’eux pour vous développer, autant qu’ils ont besoin de vous pour s’affirmer.  

Alors c’est sûr, ça ne va pas être facile. Et je me demande également comment faire car qu’est-ce que ça veut dire ? Il faut arrêter d’être gentil ? Passer du « rapide efficace » au « lent moins performant » ? Ne plus solutionner les problèmes et donc générer du chaos ? Au final, c’est à vous d’y réfléchir et de trouver votre propre méthode. Vous pouvez commencer par tester quelques « quick wins » pour vous aiguiller. 

Tout d’abord, allez réveiller l’antagonisme de vos collaborateurs : interdisez-leur systématiquement pendant un temps d’être d’accord avec vous, même si vous êtes persuadés d’être sur le bon chemin. Cela les forcera à réfléchir à un autre angle, presque comme un jeu. Vous verrez, ils y prendront goût, surtout si ce sont leurs idées qui sont finalement retenues. D’autre part, essayez de déconstruire tactiquement le « modèle » que vous avez donné jusqu’alors pour en façonner un autre : challengez devant eux votre manager à vous, mettez-vous en posture de rebelle dans des réunions d’équipe. En bref, surprenez-les pour qu’ils s’accordent le droit de le faire également. 

Ensuite, sortez-les de leur posture d’exécutants. Donnez-leur plus de marge de manœuvre sur leurs sujets, notamment en les autonomisant et en les laissant prendre des décisions par eux-mêmes. S’ils vous sollicitent constamment pour valider ou solutionner des problèmes, refusez de leur donner une réponse ou une solution trop rapide, et cherchez à ce qu’ils la trouvent par eux-mêmes. 

Enfin et surtout, préparez-vous. Entrainez-vous à accueillir le challenge de la part de vos collaborateurs, et à aimer ça. Plus votre posture sera ouverte, et plus vos équipes auront envie de tenter certaines actions.

Petite leçon de management Viking

Qui dit soirées confinées, dit : Série Netflix ! 

J’ai attaqué Viking il y a quelques semaines. Viking c’est quand même 6 saisons de 20 épisodes chacune … C’est dire si on n’est pas confiné depuis trop longtemps !

Viking c’est l’histoire de Ragnar Lodbrok, un fermier viking devenu Roi du Danemark grâce à des raids réussis vers l’Ouest. 

Bon, de premiers abords, les vikings et le management on se dit que c’est plutôt à l’opposé : décapitations, humiliations, trahisons, guerres sans relâche … c’est pas vraiment ce qu’on vit en entreprise. 

Et pourtant, Ragnar nous donne une bonne leçon de management, à la viking. 

 

Un chef qui se mouille

Cette série, Viking, n’échappe pas aux règles de bases des séries vikings : il y a de la castagne ! Sur le champ de bataille, les chefs de clans qui se disputent les terres sont de deux sortes : ceux qui regardent de loin leurs guerriers se faire défoncer par les Vikings… et Ragnar, qui part au front, toujours en première ligne, à pied, hache à la main. 

Ragnar est un guerrier, il est courageux et dans les moments difficiles il s’implique autant que son peuple pour le rendre victorieux. Il met les mains dans le cambouis et ne laisse pas ses guerriers affronter les épreuves seuls. 

Mais là où il est fort, c’est qu’il arrive à être à la fois sur le terrain et à prendre le recul nécessaire pendant la bataille pour adapter sa tactique d’attaque : donner d’autres ordres, repositionner des gars, attaquer par l’arrière …

Un chef à la fois proche, solidaire et égal de ses équipes, qui sait trouver les sujets sur lesquels on l’attend en tant que chef : la stratégie de guerre et la tactique de victoire. 

Un manager terrain qui aide et s’implique dans les moments difficiles, sans distinction hiérarchique, mais qui arrive à les piloter et prendre de la hauteur quand c’est nécessaire, pour endosser dans son rôle de chef d’équipe. 

 

Un chef qui laisse s’exprimer les singularités de ses sujets

Lors de son premier raid à l’Ouest, il fait la rencontre d’un prêtre qui le fascine : Atelstan. Il décide ne pas le tuer et de le ramener avec lui en Scandinavie. 

Ragnar décide de le laisser vivre libre dans son royaume : libre de croire en son Dieu, de pratiquer sa religion chrétienne. Il ne cherche ni à le contrôler, ni à le convaincre, il intègre sa différence. 

Déjà, c’est un beau crédit d’intention : Ragnar ne suppose pas qu’Atelstan aura un pouvoir de nuisance auprès des autres. 

Et puis ça a plusieurs effets positifs sur son collectif : 

  • ça évite à Atelstan de pratiquer dans le secret, ce qui inhibe la volonté de révolte;
  • ça amène de la richesse au groupe et ça nourrit la soif de connaissance de Ragnar, qui finit par apprendre quelques prières chrétiennes dans des temps compliqués;
  • au final, Atelstan se sent tellement bien à Kategat, qu’il devient Viking, aussi impliqué qu’un viking de sang, dans la vie quotidienne et dans les combats d’expansion.

En entreprise, on sait que c’est difficile de laisser exprimer la singularité de son équipe. Souvent il vaut mieux que tout le monde rentre dans le moule, on se dit que ça évitera les complications. 

Mais Ragnar nous montre que quand on laisse une grande liberté à quelqu’un de différent qui ne partage pas la même vision du monde que nous, c’est extrêmement riche pour le collectif. 

Il est un chef courageux, ouvert sur le monde qui l’entoure et il donne la possibilité à chacun d’exprimer son libre arbitre …

Un viking moderne, un manager inspirant …

S’inspirer des improvisateurs pour travailler son écoute !

L’écoute est l’une des choses les plus difficiles à faire, dans la vie mais bien sûr aussi en management. Or pas de grands managers, pas de grands leaders, qui ne sachent écouter, écouter vraiment et donc dialoguer, débattre, comprendre, accueillir…
Pour en parler de la meilleure manière, nous avons choisi d’en discuter avec des spécialistes de l’écoute : des improvisateurs professionnels ! Dans cette discussion, on parlera de comment se préparer à écouter, comment écouter vraiment quand on est dans le moment, puis comment débriefer (ou s’auto-débriefer) des moments d’écoute afin d’être encore meilleurs la fois suivante ! Un podcast riche en réflexions et conseils dans lequel on a en plus beaucoup ri !

Ne demandez pas aux managers intermédiaires de porter vos décisions

Pas une boite où les managers intermédiaires ne soient « coincés entre le marteau et l’enclume ». Difficultés à tenir la position, trop souvent « du côté du terrain », tiraillés entre leur loyauté à la hiérarchie et celle à leurs équipes, les managers de terrain sont presque toujours le maillon faible des organisations. Mais pourquoi est-ce si systématique ? Depuis si longtemps ? A-t-on les bonnes attentes vis à vis d’eux ?

Vous voulez débattre de cet article ? Critiquer ou abonder ? Rejoignez-nous le vendredi 19 mars de 13h à 14h sur Zoom.

 

L’héritage du contremaître…

Il parait si loin le contremaître des fabriques d’autrefois. Cet homme avec un petit h, au choix autoritaire ou paternaliste est sans ambiguïté aucune la courroie de transmission entre un patron, le juge, le bienfaiteur et le tortionnaire, et les ouvriers exécutants. 
Les frontières se sont brouillées et des subtilités sont apparues dans cette pyramide. Les ouvriers sont moins nombreux et plus qualifiés (en Europe occidental) ; le tertiaire a pris une place considérable, les patrons sont en moyenne plus éclairés. Les organisations sont moins pyramidales, plus ou moins matricielles, et les discours sont plus ouverts. Le chef est de plus en plus souvent une cheffe.

Mais le manager intermédiaire, malgré tous ces changements, me semble garder beaucoup de points communs avec notre contremaître :

  • il est supposé avoir voix au chapitre mais en réalité, on sait peu l’écouter et tenir compte de ses avis;
  • il est supposé faire preuve de leadership mais en réalité, il a peu de marge de manœuvre, et s’il en a en théorie, la pression sur les résultats et la logique de « best practice » tend à uniformiser leurs actions.

 

… Mais les attentes d’un entrepreneur

Sauf que nous lui demandons de porter les projets, de tenir la posture du manager, de ne pas tomber dans le copinage, de savoir sanctionner, d’être un véritable manager d’équipe et pas un simple leader technique….

Et on s’étonne, presque partout que le manager intermédiaire tienne mal son rôle. D’autant plus qu’il est souvent issu du rang, promu pour ses résultats d’opérationnel et pas ses qualités managériales.

À bien y réfléchir, je ne suis pas surpris que ces managers soient si rarement les leaders dont nous rêvons : il y a une contradiction fondamentale entre le rôle qu’ils doivent tenir dans des organisations qui cherchent à sécuriser les processus, à normaliser les résultats, à prévoir, à piloter, et le rôle que l’on espère désespérément d’eux autour de la créativité, de l’initiative et de la contradiction (constructive) permanente. Comme si vous demandiez à votre enfant de 4 ans d’inventer sa propre façon de traverser la route à condition qu’il reste dans les clous, passe au bonhomme vert et tienne la main.

Le paroxysme de ce rêve éveillé, c’est l’injonction à l’entrepreneuriat, à raisonner comme si c’était votre entreprise. Mais non. Ce n’est pas leur entreprise. Même avec quelques actions. Ils ne sont pas chez eux, ne soyons pas hypocrites.

 

Les solutions en noir et blanc

Alors évidemment, on peut échapper au paradoxe en assumant un modèle, ou l’autre.

Le modèle où on est vraiment leader se trouve parfois dans les entreprises libérées, dans les coopératives d’indépendants. Mais surtout, ce qui est très flagrant c’est que la seule vraie façon d’être entrepreuner est d’entreprendre. Avec le temps je me rend compte qu’il n’y a aucun moyen de proposer à un entrepreneur véritable une place durable dans une organisation. Un entrepreneur entreprend. Il n’est pas salarié, il n’est pas dans vos équipes, ou ne va pas y rester.

Le modèle franchement hiérarchique existe aussi, mais il est de moins en moins affirmé. Disons qu’il se trouve dans des orchestres, des cuisines de chefs, sur des navires, dans l’armée ou chez les pompiers. Il n’est pas nécessairement synonyme d’autoritarisme et de maltraitance et doit probablement marcher au moins un temps s’il est profondément choisi par tous et qu’il est générateur d’excellence.

Sauf que la plupart des entreprises n’ont les moyens ni de l’un ni de l’autre :

  • le modèle tous leaders est objectivement impossible quand la production nécessite la coordination de centaines voire de milliers de personnes, et que les équipes sont constituées d’individus aux attentes extrêmement diverses, issues de personnalités et d’histoires quasi infinies;
  • le modèle hiérarchique est passé de mode dans la plupart des secteurs, et il ne correspond plus aux besoins d’agilité et de réactivité dont la centralisation est l’ennemi.

Alors que faire ? Qu’attendre de nos managers intermédiaires ?

 

La solution en couleurs 

Avec tout ça, je pense que c’est un tort de vouloir leur faire porter les décisions qu’ils n’ont pas décidées. Par porter je veux dire défendre, répondre aux objections. C’est une chose qu’ils peuvent faire bien entendu. Mais imaginer qu’ils doivent TOUS le faire n’est pas pertinent. Vous serez déçus : ça serait moins bien fait que par vous même, ils se sentiront mal à l’aise, et vos équipes recevront un message sans enthousiasme quand il ne sera pas transformé ou même tout simplement oublié.

Non. Assumons.

C’est votre décision ? C’est à vous de la défendre.
Vous l’avez vraiment co-construite avec votre codir ? Tout le codir peut la défendre.
Vous voulez qu’un ou plusieurs managers défendent une décision ? Alors ça sera la leur et il faut laisser de grandes libertés !
Un de vos managers est si convaincu qu’il veut bien porter la décision ? Ok mais n’étendez pas aux autres.

Et si vous voulez changer ce rôle de courroie de transmission ?

Eh bien, raisonnez temps long et abordez le sujet autrement :

=> D’abord, ne vous attaquez pas au sujet à un moment où vous avez besoin de vos managers. Si vous voulez les repositionner, faites-en le coeur de la transformation et pas une modalité d’un projet plus grand. Ça évitera (un peu) le procès en manipulation.

=> Ensuite, avant de leur faire faire des tas de nouvelles choses, commencez à votre niveau : ne leur faites pas porter vos décisions, faites le vous-mêmes. Ne vendez pas la co-construction quand l’essentiel est déjà décidé, etc.

=> Enfin, offrez une liberté claire, concrète, dont l’usage sera fréquent, éventuellement demandée par eux depuis longtemps, et qui rend leur action « dangeureuse »… Oui, dangereuse. Tant que vous ne confiez que des décisions sans grands enjeux, vous passez de la pommade. Et autour de cette nouvelle liberté, bâtissez votre mobilisation ! Une quête spéciale et enthousiasmante, périlleuse mais patiente, inédite mais outillée.

La mobilisation d’un groupe ne peut être un processus aussi réglé qu’une chaine industrielle : il faut respecter l’humain et ses temps d’appropriation. Pour vous rapprocher de vos managers intermédiaires, cessez de leur demander d’être vous.

Vous voulez débattre de cet article ? Critiquer ou abonder ? Rejoignez-nous le vendredi 19 mars de 13h à 14h sur Zoom.

Manager les jeunes

Tout comme les seniors, les jeunes souffrent de nombreux préjugés : issus des générations Y et Z, ils seraient plein d’énergie, créatifs à souhait, zappeurs, indépendants, capricieux…
L’idée n’est pas de prétendre que tout cela est faux, mais plutôt de se dire que partir de ces caractéristiques pour les manager serait une grave erreur. Surtout parce que manager l’âge uniquement est rarement une bonne idée et que comme nous tous ils ont surtout besoin d’un management à la personne.
Dans ce podcast on essayera de comprendre comment ne pas tomber dans le piège de vouloir plaquer ces préjugés sur son management et on discutera des façons de manager au mieux une génération qui nous paraît parfois loin de nous.

ALBUS CONSEIL