Catégorie : Business management

Captain Fantastic – ou arrêtons avec le cache-cache en foret

Le pitch : 6 enfants vivent en totale autarcie dans la forêt, éduqués et guidés par leur père. Cette tribu vit en décalé du monde moderne, et s’est façonné un univers singulier avec leurs propres façons de penser, codes, organisation etc.

Tout comme le père, en tant que manager, vous êtes face à cette tentation : surprotéger vos équipes pour éviter que le changement soit vécu comme frontal.

Dans Captain Fantastic, les enfants apparaissent très heureux de vivre dans cette bulle. Mais dès qu’ils sont confrontés au monde extérieur, ils se rendent compte de leur isolement en 3 points :

  1. Choc entre monde réel et celui de la forêt
  2. Incompréhension de la société actuelle et donc difficultés à interagir avec les autres
  3. Rébellion contre le père, qui les a volontairement isolés

Minimiser la réalité et les risques, cacher une démission, dissimuler une difficulté, taire un conflit… Cela déstabilise tant votre équipe que votre management. Pourquoi ?

  1. La confrontation avec la réalité sera vécue comme un tsunami émotionnel : vos équipes auront l’impression d’avoir été trompées
  2. Vos collaborateurs ne seront pas préparés au changement, ils ne comprendront pas les enjeux et donc auront des difficultés à s’adapter
  3. Vous perdez du temps. Le temps passé à minimiser la réalité n’est pas du temps utilisé pour les accompagner.

Isoler ses équipes dans une réalité de coton c’est comme allumer une bombe à retardement. Dans tous les cas, ça explose, sauf qu’à la fin vos équipes ne seront pas prêtes à accepter le défi parce que chamboulées.

Ne laissez pas vos collaborateurs à l’écart dans la forêt.

Et, si le sujet vous intéresse, lisez cet article sur comment manager dans l’incertitude.

Oui, on peut toujours changer, surtout quand tout va bien…

« On ne change pas une équipe qui gagne » : voilà une affirmation digne de Lapalice. Pourtant cette stratégie conservatrice est très consommatrice en énergie… Découvrez pourquoi il faut changer même une équipe qui gagne.

Changer est un exercice compliqué dans lequel on a, rarement, envie de se jeter… Parce que ça nous fait sortir de notre zone de confort, parce que l’incertitude du résultat est forte et que la peur de se noyer dans les méandres d’un process de changement est grande. 


Dans quel contexte changeons-nous ?

Quand la menace est là et que le changement devient une question de survie, on sait le faire. Les résultats ne sont pas toujours parfaits et il arrive que l’on provoque quelques dégâts, mais on y arrive dans l’ensemble. D’ailleurs, beaucoup de théories du changement partent de l’idée que pour changer il faut se sentir menacé par un problème qui génère un malaise ou une souffrance. L’urgence permet de dépasser notre inertie habituelle.

Généralement, s’il y a un enjeu de survie, la solution est celle d’un changement qui bouleverse tout. On change de stratégie ou d’ambition parce qu’on cherche à s’adapter à un nouveau marché par exemple. Ce type de changement est surtout porté par la direction et est supposé porter ses premiers fruits rapidement, notamment sur un plan financier. 


Quand tout va bien, notre premier réflexe est de ne surtout rien changer

Quel est l’intérêt, alors que les résultats business sont bons et que le collectif fonctionne bien, de changer ? 

Si l’on regarde de plus près les entreprises qui marchent et qui perdurent aujourd’hui (Toyota, Google…), on se rend compte qu’elles ont mis en place une vraie culture du changement. Ce qui signifie qu’elles sont tout le temps dans une dynamique : quand ça va mal et surtout quand ça va bien !

Stabiliser une équipe ou une organisation est un vœu pieux, inatteignable et surtout sans intérêt…

A une plus petite échelle, nous avons aussi rencontré des managers avec l’envie de changer alors que tout allait bien dans leurs équipes. Ici, le mot magique est « l’envie » : on change parce qu’on le veut, parce qu’on aime ça et que c’est un challenge au quotidien de sortir de sa zone de confort !

Pourquoi ? Parce qu’entretenir la dynamique de changement dans les équipes a de vraies vertus : cela permet d’éviter de s’ankyloser et d’être suffisamment réactif lorsque la vraie menace est là. Stabiliser une équipe ou une organisation est un vœu pieux, inatteignable et surtout sans intérêt…

Cependant, le travers évident d’une telle dynamique serait de créer un circuit interminable de grands changements à des échelles collectives. C’est épuisant ! Ça délégitime le changement et ça transforme les équipes en un énorme frein.

Heureusement pour nous, il est possible de donner envie à ses équipes de changer, il est aussi possible de vivre heureux dans une organisation instable !

Comment s’y prendre pour trouver l’équilibre dans le changement ?


Jouer sur l’envie

Contrairement au « tout va mal » où le moteur est fondé sur la nécessité de changer (on s’adapte ou on meurt, dans d’atroces souffrances…), ici on a envie de changer pour aller plus loin, pour progresser, pour s’améliorer…

Quoi alors de plus fertile comme terreau que celui d’une équipe qui a confiance et qui est portée par ses succès ? 

Ça c’est être ambitieux, c’est être dans le mouvement et non le statu quo. Parce que le risque de la zone de confort, c’est l’ennui… Donc on se fixe de nouveaux défis pour ne pas s’endormir.

Dormir c’est bien, mais ce qu’on préfère, c’est que l’on sait qu’on va se réveiller le lendemain, en forme pour attaquer une nouvelle journée.


Alterner les rythmes

Etre dans une dynamique de changement permanent ne veut pas dire qu’il faut être dans un rythme effréné.

Acceptez les temps faibles ! Laissez à vos équipes le temps de savourer leurs victoires et ainsi reprendre des forces pour mieux avancer. Ça ne veut surtout pas dire s’arrêter donc il faut tout le temps être dans la projection et la prochaine étape.   

Alternez les différents rythmes : accélérez quand c’est nécessaire pour affronter la tempête, reposez-vous quand l’orage est passé et créez une spirale d’amélioration progressive quand le contexte est plus favorable.

Faire varier l’ampleur des projets

Proposez des changements à des mailles plus individuelles, sans grands processus qui doivent être appliqués à tous, partout. Comme des améliorations sur des outils ou des façons de mener un projet, proposez des changements qui concernent uniquement une partie de l’équipe… Vous n’avez pas besoin de réinventer la roue en permanence. 

Allez surtout chercher ces changements dans le participatif afin qu’ils répondent aux besoins des équipes et pas seulement aux besoins clients ou marché.  A la limite, ici, ce n’est pas tant l’objet du changement qui est important que le fait d’être toujours prêt, et d’être dans le mouvement. 

Un savant mélange de ces 3 éléments va vous aider à créer dans vos équipes l’envie de changer et non le besoin…

Et un dernier conseil pour la route, surtout oubliez le mythe de la stabilisation, cela peut être un enjeu mais certainement pas un projet !

NB : Pour mieux comprendre le timing de ces grands changements, vous pouvez lire un article de la newsletter paru en décembre 2013 « Le changement, oui, mais quand ? »

 

L’obligation de moyens est la nouvelle exigence !

Tout le monde l’admet, le monde actuel est incertain et complexe. Pourtant, on continue à le gérer comme s’il était prévisible et linéaire, en fixant des objectifs à 1 an, à 3 ans avec des perspectives de résultats très clairs.

Pour nous, la seule certitude est que, quel que soit le contexte, votre meilleure chance de réussir est d’avoir des collaborateurs qui donnent tout. Et donc que l’obligation de moyens est plus efficace que l’obligation de résultats ! 


Définissons d’abord la notion de moyens et de résultats

Ce sont des notions empruntées du droit, que l’on peut résumer (et simplifier) de cette façon :


L’obligation de moyens : C’est une obligation dite de « prudence et de diligence ».

Plus simplement, c’est s’obliger à mettre tout en œuvre pour… Par exemple, c’est le cas d’un médecin qui doit mettre tout son savoir, son énergie, ses outils pour vous soigner, mais qui ne peut dans ce cas être tenu responsable du résultat final.

L’obligation de résultats :  C’est une obligation dite « déterminée ».

C’est s’obliger à un résultat déterminé. Par exemple, une compagnie aérienne a l’obligation de vous emmener de Paris à Lisbonne, et ce, en s’assurant que vous arriviez sain et sauf ! 

Dans la société actuelle, on voit que la tendance est de souhaiter des obligations de résultats partout. Mais, comme en médecine en particulier, on voit bien que cette tendance est un grand danger puisqu’elle rend le médecin hyper craintif, et qu’elle l’oblige à mettre plus d’énergie à se protéger qu’à soigner son patient. L’obligation de moyens est bien plus responsabilisante pour tous.

 

Les entreprises ont fait le choix du résultat depuis longtemps

Parmi les choses aujourd’hui dogmatiques en entreprise figure en bonne place la structure d’anticipation des résultats : le budget pour piloter les grands équilibres économiques, les objectifs pour naviguer dans tout ça et la mesure des résultats pour contrôler. Pour certains, c’est même ça LA définition d’une entreprise.

Admettons-le, c’est souvent une mascarade. Le budget est calculé en misant hasardeusement sur une hausse de CA qui, à l’instar d’un prix psychologique à la vente, n’est ni trop faible (pour se montrer volontariste), ni trop fort (pour se montrer réaliste). Les objectifs, ce sont des idéaux dont l’atteinte est rare et dont l’annonce est souvent désespérante pour les équipes. Quant aux résultats, ils ont des équations si complexes que l’identification des artisans du succès ou des coupables de l’échec sont bien difficiles à identifier.

Bienvenue dans le « VUCA » World

Volatility, Uncertainty, Complexity and Ambiguity, voilà ce qui définit les affaires d’aujourd’hui. Pour les moins bilingues d’entre vous, retenez que nous ne comprenons plus rien au monde qui nous entoure. Entre ce qui change tout le temps, ce qui évolue en permanence ou ce qui reste flou, c’est bien simple : la réalité change tous les trimestres.

En conséquence, bien malin (ou bien fou) celui qui peut vous annoncer ce qui se passera dans les douze prochains mois. Les projections pluriannuelles deviennent des horoscopes et les leaders assurés sont aussi crédibles que Madame Soleil. 

En s’entêtant, les managers ne récoltent d’ailleurs que la démotivation de leurs équipes (à quoi bon tout donner si on sait que l’on atteindra pas la cible), et l’image de managers ou de Direction hors sol, aveuglés, qui se désolidarisent du terrain et de sa réalité.

Prenons l’exemple d’une entité qui, lors de la définition du budget, a dû revoir trois fois sa copie pour aboutir à un budget à peine réaliste, misant sur les perspectives marché très favorables et qui commence l’année avec une crise du secteur. Etant donné qu’il serait inacceptable de réviser le budget le 15 janvier, on démarre l’année en sachant déjà que l’on sera en dessous des objectifs. Adieu investissements, bonus… et motivation !

Il faut assumer que l’on ne sait pas où on va, et que la seule chose que le manager peut et doit organiser, c’est un fonctionnement pour s’en sortir quoi qu’il arrive. Un manager qui assumerait cela ne serait pas forcément quelqu’un de rassurant mais un manager courageux et responsable, sans aucun doute.

 

Loin d’être laxiste, l’obligation de moyens est une exigence très forte

L’obligation de moyens a mauvaise presse, elle est souvent synonyme de manque d’exigence. Ses détracteurs y voient la situation où on viendrait à féliciter une équipe alors qu’elle n’aurait pas atteint ses objectifs. Ils oublient que l’obligation de résultats suppose parfois de féliciter une équipe qui a atteint ses objectifs même sans effort dans un contexte plus favorable que prévu, ou de sanctionner une équipe très mobilisée. Cherchez la plus grande erreur…

Reprenons nos exemples du début : entre l’obligation de moyens du médecin de tout faire pour vous guérir et l’obligation de résultat d’une compagnie aérienne de vous transporter à une destination, quelle obligation est la plus exigeante ?

Se concentrer sur l’obligation de moyens, c’est par exemple :

– Demander à une équipe de surperformer le marché plutôt que d’atteindre un objectif de croissance de CA (accepter de valoriser une équipe qui fait -2% sur un marché à -5%).

  • Évaluer une équipe sur la compétence des nouveaux embauchés ou les savoirs acquis plutôt que sur le temps passé en formation.
  • Évaluer sur l’image perçue par les clients plutôt que sur le taux de service.

Ainsi, l’obligation de moyens demande aux acteurs de se surpasser, redonne de la responsabilité aux individus (on est responsable des moyens mis en œuvre alors que l’on influe en partie seulement sur les résultats obtenus).

  • Plutôt que de piloter en fonction d’un budget, piloter par une ambition
  • Plutôt que de mesurer des objectifs, mesurer des engagements
  • Plutôt que de regarder les résultats, regarder les réalisations

Et vous verrez que vos évaluations annuelles seront beaucoup plus constructives, plus authentiques, et mieux comprises par vos équipes !

C’est ainsi qu’on décide de donner une obligation de moyens à un médecin et pas de résultats : parce qu’on ne maîtrise pas tout (le cancer n’est pas le fait du médecin, et il est mortel y compris parfaitement pris en charge), et surtout parce qu’on s’attend à ce que le médecin mobilise toute sa science et celle des autres pour vous sauver. S’il avait une obligation de résultat, nul doute qu’il n’y aurait plus de médecin et que ceux qui resteraient auraient fait plus d’études de droit que de médecine.

Comment instaurer un îlot de moyens dans un océan de résultats ?

Le problème comme souvent c’est que vous n’avez pas la main sur le système de reconnaissance et que vous subissez le dispositif résultat que vous impose l’entité supérieure.

Si ce n’est pas le cas, descendez au plus bas le niveau de reconnaissance aux résultats, et surtout mettez le en collectif. C’est logique (le résultat dans une entreprise est la somme de toutes les actions), et juste. Le système d’intéressement est donc pertinent à notre avis.

Ensuite, fixez des objectifs de moyens, et faites confiance au fait que si on met tout en œuvre pour réussir, les résultats obtenus seront proches des meilleurs possibles.

Si c’est le cas, concentrez vous sur ce sur quoi vous avez de l’influence :

  1. Traduisez les résultats demandés en actions clés et mettez toute la reconnaissance qui dépend de vous sur les efforts pour réaliser ces actions.
  2. Développer un véritable écosystème qui permet la reconnaissance y compris si les résultats globaux bloquent les primes : félicitations minutes bien sûr, mise en avant des réalisations collectives et individuelles, célébration des succès intermédiaires, valorisation des apprentissages réalisés au cours de l’année, du projet, etc…
  3. Dans le cas extrême où le système devient fou (résultats inatteignables, moyens en baisse drastique, considération faible pour les efforts) la transgression devient la seule solution : définissez une quête qui peut avoir des bénéfices qualitatifs pour ceux qui y prendront part ; acceptez les défections ; et aidez ceux qui restent à devenir meilleurs. Ca paiera pour eux à long terme.

La menace, l’ingrédient inévitable du changement…

Tous ceux qui s’intéressent au management le savent, il faut DONNER DU SENS, expliquer pourquoi on veut changer. 100% d’accord, mais alors il faut se dire les choses : on change souvent pour une ambition très enthousiasmante mais aussi pour faire face à une menace potentiellement dangereuse. Parler de la première en éludant la seconde, c’est de l’angélisme, et ça se paye. 


La menace, le déclencheur du changement

Imaginez l’histoire des 3 petits cochons sans la présence du loup. Pourquoi se décider tout à coup de fabriquer une maison en brique si on ne risque rien ? La paille ou le bois sont bien suffisants et le troisième cochon avec ses briques passerait alors pour celui qui se complique la vie et se pose en redresseur de torts. 

Cela semble caricatural ? Pourtant, bon nombre de managers présentant leurs projets sans expliquer la menace à ne pas faire passent pour des personnes qui s’amusent à lancer des projets compliqués et inutiles. Des « usines à gaz » disent les équipes. De leur côté, les managers s’étonnent du manque de mobilisation de leurs équipes sur des projets de changement pourtant indispensables. Qu’il s’agisse d’un projet SI, d’une réorganisation ou autres.

Souvent, nous leur posons la question « Est-ce que votre équipe est bien claire sur le risque à ne pas faire ce changement ? », et souvent, la réponse est non. C’est souvent intentionnel : ils ne veulent pas faire peur et préfèrent parler des opportunités à saisir, des bénéfices du changement.

Oui sauf que, si on regarde honnêtement les choses, c’est rarement l’opportunité qui est le déclencheur du changement, mais plutôt une menace à éviter. Ce n’est pas le plus noble et ce n’est pas toujours vrai (Quand JFK propose aux américains d’aller sur la Lune, c’est l’ambition qui déclenche l’envie de changer), mais si l’opportunité ou le bénéfice sont les éléments qui expliquent la solution choisie, la menace est ce qui provoque souvent la prise de conscience qu’il faut changer.

Qu’elle soit interne (une dérive, technique ou comportementale) ou externe (un retournement de marché, une nouvelle exigence client, un concurrent qui nous attaque), elle montre aux acteurs que le changement est nécessaire car l’absence de réponse mettrait l’entreprise en danger.

Ne pas la communiquer du tout, c’est infantilisant

La décision de ne pas partager la menace est donc souvent issue de la volonté de préserver les équipes. Soit parce que le leader redoute une panique des équipes, soit parce qu’il se dit que les équipes n’ont pas besoin de savoir cela pour agir.

Quant à éviter la panique, il faut d’abord faire un peu plus confiance à la capacité de vos équipes à entendre une menace formulée intelligemment et de façon adaptée.

Le problème, c’est que si vous avez besoin que vos équipes s’engagent dans le changement, ils ont besoin de savoir pourquoi il faut agir. Toutes les histoires réelles ou fictives le montrent : pas de résistance sans invasion, pas de Batman sans Joker, pas de Harry Potter sans Voldemort, etc. La conscience d’un malaise est un des trois ingrédients indispensables au changement (voir wikimanagement).

Bien sûr, chaque équipe est différente des autres et leurs réactions sont singulières, mais parler du projet sans parler du risque à ne pas faire (donc de la menace), c’est comme donner une réponse sans donner la question, les risques d’incompréhension sont forts.

Quant à éviter la panique, il faut d’abord faire un peu plus confiance à la capacité de vos équipes à entendre une menace formulée intelligemment et de façon adaptée.

Une menace exprimée avec pessimisme et abattement (ex : « notre concurrent est trop fort et nous aurions dû agir avant pour avoir une chance ») est inutilement anxiogène. De la même manière, exprimer une menace en appuyant sur les éléments sur lesquels l’équipe n’a aucune prise (ex : « la réglementation française nous empêche de réagir ») est inutilement préoccupant.

Une fois ces éléments pris en compte et la formulation adaptée au contexte de l’équipe, la menace est un moteur et chaque équipe est capable de l’entendre.

Faire de la menace un moteur de l’engagement

Si vous voulez un exemple parfait de la possibilité de faire de la menace un moteur d’engagement, pensez aux mouvements de résistance, depuis Churchill jusqu’à Nuit Debout en passant par le Printemps arabe.

En 1917, Sir Ernest Shackelton, explorateur britannique de renom, connu pour ses qualités de leader incomparable, recrute avec cette annonce pour la première traversée du continent Antarctique : « Cherche hommes pour voyage incertain, petits gages, froid rigoureux, longs mois de nuit complète, danger permanent, retour incertain. Honneur et reconnaissance en cas de succès ». C’est un immense succès, illustration parfaite ce n’est pas le danger qui est un problème mais plutôt le sentiment qu’on nous cache quelque chose.

  

Evidemment, la menace seule ne suffit pas. Là encore, le phénomène Nuit Debout est intéressant, la menace a permis de faire réagir, mais faute de solution pour agir le mouvement s’est vite essoufflé.

La menace doit être le début d’une proposition d’aventure. Comment passer d’une menace à une aventure ? Que l’exposition de la menace amène à proposer une solution (ex : un grand projet, une nouvelle organisation), que cette solution soit une façon de réaliser une vision (ex : « Aller chercher ensemble la croissance qui assurera notre avenir ») et que la récompense (valorisation de l’effort, financière ou non) soit claire et explicite pour ceux qui prendront les risques avec vous.

La menace pour réagir, la solution pour agir et la vision pour donner envie, voilà le bon triptyque du changement.

SAPIENS ou la puissance des histoires

Pourquoi l’Homme sage (Homo Sapiens), qui a vécu pendant des dizaines de milliers d’années comme un acteur lambda sur Terre, s’est mis tout à coup à dominer le monde. C’est la question que s’est posée Yuval Noah Harari dans son livre Sapiens, une brève histoire de l’humanité (Albin Michel, 2015). Un livre érudit, original et irrévérencieux.

Sapiens n’était pas le seul humain (au moins 5 autres espèces existaient avec lui, il y a 100 000 ans), ni le seul à avoir un langage complexe. Il est moins fort que les ours ou les gorilles, moins organisé que les fourmis ou les abeilles, son cerveau est très proche de celui de certains singes. Alors comment a-t-il fait ?

La seule chose que l’HOMO SAPIENS fait et qu’aucune autre espèce vivante ne sait faire, c’est de s’inventer des histoires, des croyances reposant sur des choses qui ne se voient pas ou n’existent pas : Dieu, les nations, l’argent. Nous seuls savons formuler et utiliser ces « mythes » pour se fédérer et coopérer à très large échelle. C’est ce qui nous a permis d’inventer l’agriculture, de bâtir des cités ou d’aller sur la Lune, tout simplement du story-telling.

Ces mythes communs peuvent amener de grandes dérives sociales, écologiques, etc. mais ils écrivent aussi les plus grandes pages de notre histoire (droits de l’Homme, explorations, innovations, etc.).

Pensons-y quand nos collaborateurs sont individualistes, qu’ils ont l’impression de travailler comme des « bêtes de somme » ou d’être considérés comme des machines. Ce qui fait de nous des hommes et des femmes et ce qui permet de vivre ensemble, c’est de partager une histoire commune, et il ne tient qu’à nous, managers, d’en faire un mythe positif.

ALBUS CONSEIL