Catégorie : leader

LARGO WINCH : le pouvoir de la transgression

Largo Winch, héros de BD, passé à la télé et au cinema est un businessman qui a tout pour lui : immensément riche, intelligent, athlétique et beau en plus. Bien sûr c’est une caricature, une icône comme la BD sait en créer.
Pourtant plusieurs choses sont intéressantes dans cette série très business :
 
– Il montre comment le sérail, les anciens rejettent ce qui est différent. Largo est un enfant adopté libre et bagarreur dans le monde feutré du grand capitalisme… A un plus petit niveau, il n’est pas rare de voir un groupe craindre voir rejeter le nouveau. Largo nous enseigne l’écoute et la curiosité mais aussi la fidélité à ce qu’on est. C’est assez bateau certes, mais on est obligé de constater que bien des cadres appliquent les consignes sans plus vraiment réfléchir à leur utilité et sans vraiment mettre leur personnalité dans leur travail.
 
– Il montre aussi comment la transgression, le non respect des règles est non seulement légitime dans bien des cas et en plus souvent efficace. Nous ne prônons pas d’être dans le rejet sur tout, tout le temps, mais une dose de mauvais caractère et de rébellion semble être une des conditions de création de valeur dans des groupes toujours plus rigides. 
 
Enfin Largo n’est pas infaillible (même s’il gagne à la fin). Il est impulsif, tue sans trembler, manigance, courre les jupons… Autant de défauts que nous ne validons pas bien sûr mais qui ne l’empêche pas d’être un grand leader.

Oui, oui, oui au management émotionnel !

Dans la plupart des projets de changement en entreprise, nous constatons l’énorme décalage entre les réactions affectives des collaborateurs de terrain et la posture froide, inflexible et rationnelle de la direction.

Cela pose le sujet de la place faite aux émotions dans le management : on leur oppose souvent la nécessité de mettre de la rigueur, des procédures, des méthodes. On en accepte quelques unes : la fierté, l’envie (mesurée).On en refuse d’autres : la peur, la colère, la jalousie, la surprise,… la liste est longue ! 

Comme si les émotions pouvaient se gérer comme des fournitures de bureau. Alors que faire : les cacher ? elles finiront par ressortir. Les éviter ? Elles sont inévitables. Puisque l’idée de faire de chaque employé un être 100% rationnel n’est ni réaliste, ni souhaitable d’ailleurs, l’enjeu est donc de transformer le management en actes émotionnels. 

Attention à ne pas tout confondre : on peut avoir un management émotionnel sans devenir un manager émotif

Manager émotif non, management émotionnel oui

D’un côté, les managers ont souvent l’impression que le comportement rationnel est le plus vertueux : il permettrait d’être équitable, d’éviter le « copinage », de rester droit dans ses bottes. D’un autre côté on porte aux nues les patrons qui utilisent largement la palette de leurs émotions : Richard Branson, Xavier Niel, etc. Derrière cette apparente schizophrénie se cache une confusion : on peut avoir un management émotionnel sans devenir un manager émotif.  

Etre un manager émotif, c’est se laisser aller à ses émotions. Ces émotions-là, quelles qu’elles soient, sont contre-productives car elle ne sont pas l’expression d’une détermination mais de l’état d’esprit du moment. Elles génèrent de l’incompréhension, du favoritisme, du stress. Elles doivent être canalisées à la manière de l’acteur de théâtre : ils doivent laisser leurs propres émotions au vestiaire pour ne laisser transparaître que celles du personnage qu’ils incarnent. 

Exprimer des émotions, c’est d’abord entrer en lien avec l’autre, l’aider à s’intéresser, à comprendre, à décider ou à adhérer. Tout ce que l’on a du mal à obtenir sur des projets de changement. 

Avoir un management émotionnel, c’est indispensable : l’enthousiasme, la conviction, la confiance, le courage. Mais aussi des émotions moins nobles : la peur, la colère, l’indignation, la préoccupation, l’appréhension, le doute, la tristesse. Toutes les émotions sont utiles, à partir du moment où elles sont choisies, domptées, utilisées pour donner du sens et pour mobiliser les équipes. 

 

Pourquoi utiliser l’émotion ?

L’émotion est la différence entre nous et le légume. Ce n’est pas nous qui le disons, mais les chercheurs en neurosciences. Sans émotion, nous ne savons pas prendre de décisions et nous sommes incapables de créer des liens sociaux.  

Exprimer des émotions, les siennes et celles des autres, c’est donc d’abord entrer en lien avec l’autre, l’aider à s’intéresser, à comprendre, à décider ou à adhérer. Tout ce que l’on a du mal à obtenir sur des projets de changement. 

L’émotion, c’est aussi donner envie d’agir. Donner du sens c’est très bien, mais on ne mobilise pas sur un projet seulement parce qu’il est compris, cela ne suffit pas. Nous voyons tous les jours des managers qui portent des projets de changement à leurs équipes : ceux qui réussissent ne sont pas les plus intelligents ou les plus rigoureux, ni même les plus inventifs, mais ceux qui mettent leurs tripes en jeu, qui montent « sur le tonneau » et donnent envie par leurs émotions.

L’émotion, elle est là de toutes façons. Ne pas les exprimer est un leurre, car tout trahit vos émotions et vous ne pouvez pas tout maîtriser : une posture, un geste avec votre stylo, un regard, pour un public vous êtes un livre ouvert. Ne pas vouloir exprimer vos émotions, c’est donc laisser le champ libre à l’émotif, à tous ces « signaux faibles ». La meilleure façon de ne pas être émotif, c’est d’exprimer des émotions de façon choisie, simplement mais fortement.

 

Un seul conseil : soyez authentiques !

Il n’y a pas de méthodologie pour exprimer les bonnes émotions au bon moment : les émotions les plus efficaces sont d’abord authentiques. Mieux vaut être sincèrement dans le doute (et donc montrer son humanité) que sans émotion ou artificiellement confiant. De toutes façons, l’artifice se verrait d’une manière ou d’une autre ; l’émotion sans authenticité est pure manipulation, et souvent démasquée. 

Après, vous devez travailler sur vos émotions, voir comment elles coïncident avec votre projet et les utiliser pour donner de la force à votre message. 

Certains diront, non sans raison, que cela aussi relève de la manipulation. Mais quand la manipulation consiste à assumer la réalité, voire sa propre vulnérabilité, nous la considérons honnête et utile à l’action managériale.

Les bons leaders sont les managers qui restent !

Nous sommes de plus en plus marqués par le rythme effréné du turn-over interne des managers. Dans certains Groupes, rester plus de 3 ans à un poste de management est même mal vu, comme si cela signifiait la fin de la progression, une vraie course à l’échalote… Et si, pour plus d’efficacité, nous ralentissions un peu le ballet des managers ?


Le manager change, l’équipe reste…

C’est un mal fréquent dans les entreprises où nous intervenons de voir certaines catégories de managers où le taux de rotation est frénétique : autour de 2 ans.

A peine arrivés à leur poste, certains regardent déjà l’échelon suivant et ils savent à l’avance qu’au bout d’un an et demi ils déjeuneront avec leur n+1 pour leur dire, les yeux dans les yeux, qu’ils ont fait « le tour du job ».

Pas chez les managers de terrain, car à ce niveau-là et même si certains changent vite (les jeunes Bac+5 dont c’est la première expérience managériale), d’autres restent beaucoup plus longtemps, tels les « sortis du rang ».

Mais au-dessus, chez les top-managers ou pire encore dans les échelons intermédiaires, c’est la folie. A peine arrivés à leur poste, certains regardent déjà l’échelon suivant et ils savent à l’avance qu’au bout d’un an et demi ils déjeuneront avec leur n+1 pour leur dire, les yeux dans les yeux, qu’ils ont fait « le tour du job ».

Et ce comportement nuit à la valeur ajoutée du management. En 2 ans, moins même si on compte le temps de la prise de poste, le manager ne peut guère influer durablement sur la dynamique de l’équipe. Il arrive, il propose un grand projet moyen terme, il le déploie, il obtient les premiers résultats et il s’en va. Pour aller vite, il a fortement porté le projet personnellement et quand il part, la phase « dépressionnaire » est souvent fatale au projet. Pas de pérennité des actions menées.

Celui qui le remplace va faire exactement la même chose, etc. 

Sauf que les équipes, elles, restent. Et après 3 changements de chefs, la lassitude prend le pas. On regarde le nouveau boss avec méfiance et si ça ne marche pas dans les premières semaines, on se dit que l’on « attendra le prochain ». Le train des managers épuise…

La constance dans le management a du bon, et pas seulement au plus haut niveau. 

Un manager durable, un progrès durable

Il suffit, pour se convaincre de l’intérêt d’un management durable, de regarder les managers qui ont le plus marqué leur époque : Bill Gates, Lindsay Owen Jones, Jack Welch (GE), Claude Bébéar (Axa) ou Yves Carcelle (Vuitton). Leur unique point commun, ils sont restés plus de 20 ans dans la même entreprise, et souvent au même poste.

Alors bien sûr on ne fait pas d’exemples une règle, mais admettons que la constance dans le management a du bon, et pas seulement au plus haut niveau. 

En passant progressivement d’une moyenne de 2 à 5 ans au même poste, nous aurions des managers plus responsabilisés. Il ne suffira plus de faire « un coup » mais de mettre en place une croissance durable. Nous aurons aussi des équipes plus engagées, grâce à des managers qui les connaissent vraiment, qui les engagent et les développent dans la durée.

Cela nécessitera aussi de gérer plus astucieusement la carrière des managers eux-mêmes, là où le changement de poste systématique fait souvent figure de miroir aux alouettes. Il est d’ailleurs amusant de voir que, quand on change de poste, on est toujours « promu »… et que, de plus en plus, on devient « directeur » très vite. En restant plus longtemps au même poste, ces artefacts ne marcheront plus. Il faudra aider le manager à combler ses lacunes, à tenter des choses nouvelles, à affronter les difficultés non-traitées et qu’il pourra moins facilement mettre sous le tapis.

En bref, arrêtons nos fonctionnements frénétiques et laissons le temps aux managers de faire réussir leurs équipes et leurs projets.

Je déteste mon boss…

Des relations avec ses patrons, on pourrait en écrire des anthologies colorées et parfois dramatiques. Mais, même si certains frisent parfois avec l’indécence, admettons que c’est, a priori, un poste difficile, mal aimé et dangereusement exposé.

 

1 patron, 1 employé, un nombre infini de frictions possibles 

De tout temps, l’image du « patron salaud » existe dans les entreprises. Pourtant, force est de constater que le torchon semble brûler encore plus vite à notre époque. Plusieurs raisons à cela :

1/ Un contexte de crise : et oui voilà encore une conséquence de la crise ; dans les entreprises qui souffrent les patrons doivent souvent prendre des décisions impopulaires. De la fermeture d’un site à la suppression du temps de pause ou de la machine à café gratuite, ces irritants sociaux plus ou moins graves ternissent naturellement l’image du leader. Ceci explique par exemple pourquoi une immense majorité des chefs d’état présents en 2008 ait été battue aux élections, mais aussi pourquoi les patrons de certaines grandes entreprises sont limogés au bout de quelques mois seulement, remplacés par d’autres au « casier judiciaire vierge ».

2/ Des relations hiérarchiques moins autocratiques : pour des raisons à la fois économiques et culturelles le rapport d’autorité a changé dans les entreprises. Le leader ne peut plus se permettre de commander seul, il doit communiquer, expliquer, accompagner, valoriser. C’est une évolution nécessaire devant la complexité du monde économique, positive forcément sur le fond, exigeante aussi.

3/ Une forme de mode du « boss bashing » : moins absolue que les deux autres, cette évolution est néanmoins de plus en plus répandue, en politique et dans les entreprises. Non seulement on peut dire ouvertement du mal de son patron, ce qui était bien plus compliqué il y a quelques années, mais c’est même devenu un facteur de cohésion sociale dans l’entreprise. De cette tendance les patrons ne sont pas que des victimes : n’ayant pas été capables d’unir les collaborateurs derrière eux, ils les ont unis contre eux.

 

Les mauvais réflexes du leader

Face à cette conjoncture défavorable, il faut avouer que les tentatives des leaders pour retrouver leur autorité sont souvent inadaptées et maladroites.

Compenser, affronter ou apaiser sont des stratégies limitées et souvent clientélistes, qui se retournent contre les leaders. 

Certains tentent de compenser, c’est-à-dire de prendre des mesures consensuelles pour contrebalancer des décisions impopulaires, ou de rester inflexibles sur un sujet symbolique après de multiples reculades sur des sujets parfois bien plus essentiels. La politique récente nous fournit des exemples avec par exemple la taxe à 75%, essai bien pathétique du gouvernement français de prouver sa solidité.

Quelques leaders tentent encore le rapport de force. Pour les raisons de changement de contexte expliquées plus haut, ces stratégies archaïques – qui ne fonctionnent plus depuis Margaret Thatcher – renforcent le mal et ne se finissent qu’à la rupture (grève, départ du leader, cession, etc.)

D’autres enfin jouent l’apaisement, tentative louable si elle ne se résumait la plupart du temps à engager le dialogue avec les opposants les plus virulents, qu’ils soient syndicalistes ou non d’ailleurs. Le remède est alors pire que le mal : les opposants sortent renforcés et les propos déformés du leader n’apaisent ni ne réconcilient personne.

Ces solutions sont également mauvaises : compenser, affronter ou apaiser sont des stratégies limitées et souvent clientélistes. Rien de pire que d’agir pour être aimé ou respecté quand on ne l’est pas, c’est une façon de nager à contre-courant.

Soyons clairs, il n’existe pas la recette du bon leader. 

Un équilibre pas si compliqué à trouver

Et pourtant, dans une majorité d’entreprises vous pouvez trouver des managers qui réussissent l’exploit quotidien de conserver leur autorité sans autoritarisme, le respect de leurs équipes sans démagogie. Soyons clairs, il n’existe pas la recette du bon leader.

Rien de pire d’ailleurs que d’écouter les principes des patrons célèbres : oui bien sûr les succès de Louis Renault, de Bill Gates ou de Mark Zuckerberg sont inspirants, mais leurs préceptes sont à la fois contradictoires entre eux et inapplicables : ils dépendent trop de la personnalité de chacun.

Ce qu’il convient de rappeler tout d’abord, c’est que la première qualité d’un leader c’est d’être courageux, ce qui se traduit notamment par ne pas chercher à être aimé. Un leader cherche le bien de tous, ce qu’il obtient en formulant une vision performante, en la rendant compréhensible pour tous et en étant le garant que cette vision se réalise quelles que soient les difficultés.

Plus que pour être aimé donc, voici 3 comportements que nous trouvons chez les grands leaders et qui leur permettent d’être compris par leurs équipes.

1/ Rester simple : le premier impératif pour un leader est de rester simple, que ce soit dans l’idée ou dans l’action. A priori facile, le fait de rester simple est en fait un effort de tous les instants, pour que votre vision soit accessible et que vos actions soient limpides. C’est une qualité par exemple qu’Obama, en période électorale tout du moins, incarne parfaitement. Penser ou agir compliqué, c’est risquer que personne ne comprenne le sens du projet qu’il soit intellectuellement pertinent ou non, le leader aura au mieux raison tout seul, ce qui ne le mènera pas loin.

2/ Être prévisible : un leader est celui qui est suivi même quand il n’est pas là ou qu’il ne parle pas. Obtenir cela nécessite de rendre ses principes prévisibles, pour que chacun sache ce qu’il doit faire même seul. Michel Edouard Leclerc est un bon exemple, à grand renfort de prises de parole nombreuses, répétitives et à la limite du caricatural, il a réussi à rendre parfaitement lisible sa stratégie et sa marque.

3/ Ne jamais se couper du terrain : si tout le monde connaît ce principe de bon sens, nombreux sont ceux qui ne l’appliquent pas, le sacrifiant sans vergogne devant l’avalanche de réunions et de plans à 3 ans. Oui mais voilà, l’actualité est sur le terrain, la valeur ajoutée de l’entreprise est sur le terrain, les collaborateurs sont sur le terrain. Ils ont besoin de voir leur leader, et de s’assurer que leur leader voit ce qui se passe.

 

L’enjeu d’un leader n’est pas d’être aimé à tout prix. Mais pour mener un changement, pour franchir une crise, pour aller plus loin, le leader qui marche devant a besoin d’être sûr et sans avoir à se retourner sans cesse, que ses équipes le suivent.

Ne copiez pas Steve Jobs

Que l’on aime Steve Jobs ou pas, que l’on aime Apple et Pixar ou pas, force est de constater que les 2 entreprises qu’il a dirigées sont parmi les plus grands succès industriels de ces 50 dernières années, au point qu’on le compare volontiers à Ford. Il a d’ailleurs fait l’objet d’un film, ce qui n’est pas si fréquent pour un patron d’entreprise.


Des résultats qui font rêver

Avec un tel succès, beaucoup de dirigeants dans le monde se demandent quel est son secret pour avoir eux aussi une réussite de cet ordre.

Un de nos clients, patron et propriétaire d’une grande entreprise le cite régulièrement et en fait un modèle. Alexandre de Juniac aussi, PDG d’Air France le convoque explicitement pour justifier sa méthode de management. La biographie de Jobs, écrite par Walter Isaacson, est le livre de chevet de nombreux managers grisés par le succès d’Apple, qui rêvent de devenir un peu meilleurs en lisant ces pages.

  

Oui mais voilà… Steve Jobs était fou !

Indubitablement, Steve Jobs n’est pas un bon manager, comme en rêvent les employés. Il était colérique, manipulateur, insultant parfois, volontiers cruel comme son biographe (pourtant officiel) le montre.

Il faut pourtant bien expliquer le succès de ses entreprises, malgré sa folie.

Il était aussi totalement hermétique à ses actionnaires, ses financiers et ses partenaires, au point d’ailleurs de se faire sortir d’Apple en 1985, avant d’y revenir en 1997.

Steve Jobs avait d’énormes défauts, insupportables aux dires de ses proches eux-mêmes, qu’il compensait par quelques qualités hors du commun. Steve Jobs était un génie ; pas un modèle. Comme d’autres génies tels Churchill, Dali ou Eugène Schueller (fondateur de L’Oréal), Steve Jobs n’est pas duplicable. 

Il faut pourtant bien expliquer le succès de ses entreprises, malgré sa folie.

Il a ainsi construit un dispositif complet, de la philosophie à la mise en œuvre en passant par le management comme l’ont fait Ford et Toyota avant lui.

De sa maniaquerie est née la cohérence

Jobs ne faisant confiance à personne, il a très tôt voulu tout contrôler (cela se retrouve dans la philosophie de ses produits : fermés) et a bâti, seul, un système cohérent de A à Z. Il a ainsi construit un dispositif complet, de la philosophie à la mise en œuvre en passant par le management comme l’ont fait Ford et Toyota avant lui.

Dans l’histoire, les entreprises qui ont eu le plus de succès ont adopté des principes simples, souvent en rupture, et les ont poussés le plus loin possible, le plus longtemps possible. C’est le cas d’Apple dont le système entier repose sur la simplicité, la confrontation des idées, et la préoccupation du client ; mais c’est aussi celui de son alter ego, Microsoft, qui a n’a jamais bougé ses stratégies d’un iota jusqu’au départ de Bill Gates ; c’est le cas de Zara, qui a fait de son patron l’homme le plus riche du monde en construisant un système global pour changer le rapport à la mode ; c’est le cas d’Hermès qui contrôle plus que tout autre sa production et ses canaux de vente, de Porsche ou de Lego qui développent de véritables mythes en s’appuyant sur un système complet de production et de commercialisation très cohérent.

Il est d’ailleurs intéressant de voir que lorsque ces systèmes sont partiellement copiés, les résultats sont très inférieurs au modèle : c’est le cas de Renault qui copiait le système de production de Ford mais sans développer son pendant social (et donc sa future clientèle).

Jobs a toujours œuvré pour son graal, quitte à se séparer violemment de tous ceux qui ne partageaient pas sa vision ou ne lui paraissaient pas à la hauteur.

De sa vanité est née l’ambition

Jobs n’a jamais eu la moindre gêne à affirmer qu’il ne travaillait que pour CHANGER LE MONDE, pas moins. Les produits Apple sont faits pour les gens différents, qui pensent différemment : « Think different ». Il n’a pas toujours réussi, mais n’a jamais fait de compromis avec cette ambition.

On retrouve un graal fort, permanent et absolu dans toutes les entreprises gagnantes sur le long terme : DHL qui veut rapprocher les Hommes, Michelin avec son management et sa philosophie si particulière faite d’humilité extrême et de culture technique. Les principes de la famille Mulliez, ont permis de créer un leader mondial de la distribution et au moins 3 enseignes majeures en Europe (Auchan, Décathlon, Leroy Merlin).

Jobs a toujours œuvré pour son graal, quitte à se séparer violemment de tous ceux qui ne partageaient pas sa vision ou ne lui paraissaient pas à la hauteur.

Au contraire, les groupes préoccupés d’abord par leur rentabilité mais sans raison d’être ont souvent échoué : Vivendi, GM depuis les 80’s, etc.

  

De son aveuglement maladif est né l’indépendance 

Puisqu’il voulait changer le monde, en changeant les habitudes des gens, il ne voulait entendre qu’une seule chose : l’expérience client avec le produit. Il n’a jamais accepté que quiconque négocie avec cette obsession du client. Il insultait ouvertement les gens qui le contredisaient sur ce point.

Steve Jobs ne faisait pas d’étude clients, n’écoutait pas ses contrôleurs de gestion qui s’inquiétaient du coût des produits, refusait de copier ceux qui avaient du succès. Cette particularité (aux frontières de l’aveuglement) a préservé l’intégrité de son projet, et de sa promesse client. Et il a résisté grâce à cet entêtement.

Il est frappant de voir que les entreprises qui ont de grands succès sur la durée ne sacrifient pas tout à la rentabilité immédiate mais à leur stratégie : Toyota est devenu le n°1 mondial en travaillant les produits, la qualité, plutôt qu’en recherchant la rentabilité à tout prix. Décathlon écrase le marché du sport en cherchant la technicité et le meilleur prix (mais pas le plus bas), et rapatrie sa production de vélos en France pour mieux la contrôler.

Mais aujourd’hui, combien sont les patrons qui sont prêts à sacrifier leur rentabilité immédiate ou à refuser les modes pour garantir l’intégrité de leur projet ? Toutes les entreprises veulent « remettre le client au centre » … Mais sont-elles vraiment prêtes à en assumer les conséquences ? C’est pourtant la clef des succès d’Apple et Pixar.

Il n’y a donc pas à copier Jobs lui-même, génie excessif et inimitable, qui a réussi à mettre ses pathologies au service d’un extraordinaire projet d’entreprise. C’est le projet qu’il faut copier, pas l’instigateur : il est indispensable d’avoir de l’ambition, de la cohérence et de l’indépendance pour réussir… l’idéal serait d’y arriver sans être vaniteux, égocentrique et maniaque dans son management.

12 Hommes en colère – Pépite du leadership sous contrainte

Puisque l’été est souvent propice à la révision de nos classiques, nous vous proposons de (re)découvrir le film mémorable de Sidney Lumet sorti en 1957 : 12 hommes en colère.

D’un côté, ce film est un huis clos étouffant où un jury, composé par des stéréotypes vivants des Etats-Unis de l’époque. Il doit décider de la culpabilité d’un jeune homme que tout accuse et dont la sentence va progressivement se renverser par l’action d’un homme (Henri Fonda) qui va battre en brèche tous les préjugés et les dogmatismes.

De l’autre côté, c’est l’action éclatante d’un leader, porteur d’un projet minoritaire (l’acquittement) et qui va employer une stratégie à deux niveaux, parfaite pour remporter l’adhésion du groupe :

  • Au niveau collectif : une posture d’écoute et d’humilité, il cherche moins à convaincre qu’à écouter, afin de se différencier de l’extrémisme de ses adversaires par une attitude ouverte qui facilite les ralliements successifs.
  • Au niveau individuel : casser le phénomène de mimétisme (en proposant le vote par bulletin secret) et adapter son discours à chaque personne : se faire allié des sceptiques, convaincre les hésitants de bonne foi, être exigeant avec les plus passifs, et marginaliser les plus virulents.

Un très bon exemple du management en temps de crise (ici, la crise est d’être à 1 contre 11) et ceux qui sont déjà adeptes de la socio-dynamique seront servis !

ALBUS CONSEIL