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Hunger Games – Quelle attitude face aux projets difficiles à annoncer ?

Lorsqu’on a une annonce compliquée à faire, on a tendance à mettre les difficultés du projet sous le tapis, alors qu’il vaut mieux les mettre en évidence. Ça demande du courage mais c’est tellement plus efficace !

Katniss, la protagoniste du film Hunger Games voit sa vie chambouler lorsqu’elle est tirée au sort pour participer à un jeu mortel où s’affrontent 24 candidats dans une arène vicieuse. Un seul vainqueur, un seul survivant. En quelques secondes, elle quitte sa famille, son district et tout ce qu’elle connait pour se préparer à jouer dans un jeu où elle devra très probablement y laisser sa vie.  Effie et Haymitch sont les deux mentors de Katniss, ce sont eux qui l’accompagnent du tirage au sort jusqu’à l’arène. Ils ont tous les deux le même objectif, que Katniss sorte vivante des jeux, mais ils s’y prennent de façons très différentes.

Pour vous, on a analysé leur duo managérial. 

 

Effie cherche à protéger Katniss de l’horreur…

 

effie

 

Effie voit systématiquement le bon côté des choses, partout et en tout. Elle s’attache à mettre en avant les délices de la nouvelle vie de Katniss : les costumes de star qu’elle porte, les banquets auxquels elle assiste, l’engouement qu’elle suscite dans les foules, la beauté du Capitole. Effie refuse de voir Katniss pleurer, elle ignore ses colères et évite tous les moments où Katniss  évoque la mécanique vicieuse des Jeux et la possibilité très probable de mourir…

Effie c’est le manager qui vous annonce un grand changement en ne parlant que de ce qu’il y a d’enthousiasmant dans le projet, de tout ce que ça va engendrer de chouette et en embrayant sur la suite sans vous laisser le temps de digérer tout ce qui va disparaître. Elle veut bien faire mais au fond c’est maladroit, ça nous agace et ce n’est pas très efficace.

Quand on manage au moment d’une annonce, on fait souvent comme Effie, on pense rassurer en minimisant les difficultés qu’engendrent le changement et on pense encourager en insistant sur les bienfaits du projet futur. Mais ça ne marche pas. Toute annonce apporte son lot d’émotions, son lot de deuil à encaisser. Face à ce deuil, les phrases d’encouragement sonnent creuses, l’excitation est désynchronisée avec la peur que vivent les autres et surtout vous perdez la confiance de votre équipe qui finira par ne plus vous écouter car vous êtes « vendus au projet.»

 

Haymitch parle franc : c’est violent mais ça marche.

 

haymitch

 

Pas étonnant alors que Katniss se tourne plutôt vers Haymitch, un ancien vainqueur désabusé qui noie son désenchantement dans l’alcool. On serait tenté de dire que Haymitch ne fait pas grand-chose pour Katniss. En effet, pendant longtemps, il ne lui propose rien. Haymitch parle franc : c’est violent mais ça marche. On se dit que Katniss n’a pas besoin de ça, qu’elle en a bien assez sur les épaules. Mais c’est auprès de lui que Katniss peut pester, pleurer et s’entendre dire que les Jeux sont terrifiants, qu’elle va surement y laisser sa peau, que c’est une énorme manigance pour assujettir le peuple.

Alors Haymitch choque à livrer une vérité si déprimante, mais il a compris quatre choses fondamentales :

  • D’abord, il parle vrai. Tout ce qu’il sait sur le Jeux il le dit et tout ce qu’il ne sait pas il l’avoue. C’est risqué car cela rend parfois Katniss furieuse mais il y gagne sa confiance.
  • Ensuite, il admet que c’est une période très difficile pour Katniss sans survendre les beautés de sa vie future – ni la fulgurance des jeux ni la gloire quand on les gagne.
  • Puis, il écoute sans chercher à la convaincre et sans se lasser de répéter. Les émotions déforment ce que l’on entend alors il répète patiemment et parfois plus frontalement.
  • Enfin, il attend que Katniss soit prête, qu’elle ait digéré son sort pour lui proposer un plan d’attaque, une stratégie de survie.

Haymitch a raison d’accepter les émotions – même négatives – de déni, de colère, de tristesse, d’anxiété de Katniss. Parce-que s’il ne le fait pas maintenant, elles ressortiront plus tard, plus fort ou sur d’autres sujets. C’est un mécanisme : on ne peut pas remonter si on n’est pas descendu alors Haymitch laisse Katniss descendre bien bas pour qu’elle puisse remonter par la suite.

C’est d’ailleurs ce qu’on fait de grands leaders de l’histoire comme Churchill qui en 1940 devant son pays encerclé par la guerre ne promet « que du sang, du labeur, des larmes et de la sueur.» 

 

Concrètement, comme manager, voici quelques idées pour accompagner la descente et gérer la remontée :

Franchement on est tous un peu Effie. Parce-que c’est tentant d’être Effie. On a envie de rassurer, de motiver, de donner envie. Et être Haymitch c’est contre-intuitif, c’est difficile même mais c’est de ce côté-là qu’il faut aller chercher pour annoncer des projets difficiles.

  • Assumer un management individuel où chacun vit ses émotions à des rythmes différents par rapport à l’annonce. Certaines personnes n’oseront pas parler en collectif et certaines auront besoin de plus de proximité́ avec vous.
  • Cela vous demandera peut-être des points plus fréquents pour écouter, faire parler et comprendre sans chercher à répondre. En individuel c’est aussi plus facile d’inciter un collaborateur en colère à s’exprimer sans le museler.
  • C’est l’occasion de reconnaître qu’il y avait de belles choses à perdre dans le monde d’avant, que tout le travail fourni auparavant avait sa place et sa nécessité.
  • À la suite d’une grande annonce, mettez en place des rituels différents, propre à une crise, où l’on se parle de l’annonce régulièrement et fréquemment même si on n’a pas de nouvelles informations à partager. Ces moments-là, même rapides, permettent de maintenir une dynamique d’équipe et de désamorcer les rumeurs.
  • Ne vous lassez pas de répéter, patiemment, les émotions déforment ce que l’on entend sur le coup. Une bonne manière de rassurer c’est aussi de rappeler tout ce qui ne change pas et donc ce qui reste stable.
  • Enfin, restez attentifs à toute initiative qui va dans le sens d’un rebond et valorisez un collaborateur prêt à redécoller !

 

Pour conclure, quand vous aurez à gérer une annonce qui provoquera un changement – on n’espère pas aussi drastique que celle des Hunger Games – attention aux pièges tentants de vouloir mettre sous le tapis les aspects difficiles et de survendre le projet à venir. Mettez plutôt votre énergie à reconnaître et à accompagner la montagne russe que vivent vos collaborateurs sans prétendre que c’est un fleuve tranquille. Ils en sortiront rassurés et armés pour la suite.  

Les objectifs : de bonnes longues vues mais de mauvaises lunettes

Ou comment les objectifs nous rendent souvent plus aveugles que clairvoyants

C’est un grand classique de nos débuts d’années : à peine les coupes de champagne se sont-elles entrechoquées que la sempiternelle question affleure sur les lèvres : et toi, quelles sont tes bonnes résolutions pour cette nouvelle année ? Quels objectifs te fixes-tu ? Et si cette question concerne souvent plus les projets d’ordre personnel, elle colore également fortement les débuts d’année des managers (« cette année, on double nos ventes ! » « on se forme tous à tel nouvel outil ! » « on recrute davantage ! » etc.). 

Quand on manage, il est bien compréhensible de vouloir orchestrer l’année de son équipe autour d’objectifs précis. Mais finalement, le recours systématique aux objectifs pour organiser et quadriller son année ne serait-elle pas une fausse bonne idée ? Et si finalement ne pas tenir coûte que coûte ses objectifs était plutôt une bonne chose ?

Tout part pourtant d’une bonne intention : fixer des objectifs permet d’avancer et de progresser

Cela peut sembler enfoncer une porte ouverte : au travail on vit, on mange (on dort presque !) objectifs. Notamment parce que ceux-ci se déclinent sous de multiples coutures :  il y a les objectifs issus de la nouvelle roadmap de l’entreprise, ceux imposés par son N+1, ceux liés aux attentes des clients, et puis enfin ceux que l’on se fixe à soi-même pour la journée, la semaine, le mois voire, pour les plus audacieux ou stakhanovistes d’entre nous, pour l’année. Et à moins de directement statuer sur un masochisme largement répandu, force est d’en déduire que les objectifs sont de précieuses béquilles pour mettre de la clarté et de la réassurance dans son quotidien. 

Pour le manager, on comprend l’intérêt de fixer des objectifs à ses collaborateurs : montrer où l’on va, sans se disperser et se perdre tout à la fois. En offrant une vision organisée et simplifiée du réel, les objectifs dessinent une feuille de route bien bornée dans laquelle il est plus simple de se projeter et d’organiser son activité. Pour une équipe, c’est a priori l’idéal : l’année se divise en 3 ou 4 grands objectifs, c’est clair et net. Et pour le manager c’est pratique : la non atteinte d’objectifs par un des collaborateurs permet d’être alerté sur une éventuelle difficulté, un état de surcharge, des besoins en formation, en accompagnement … autant de questions qui, sans le prisme des objectifs, ne se seraient sans doute pas posées. 

Pour les collaborateurs, les objectifs jouent également un rôle d’ « attracteur » efficace car, il faut bien l’avouer, un objectif donne envie d’être atteint. Remplir ses objectifs rassure (« j’y suis arrivé », « je sais faire ») mais distille aussi une aura de réussite (« j’ai montré que j’en étais capable »). D’ailleurs il n’y a qu’à voir l’engouement pour les sports extrêmes qui essaiment aujourd’hui (marathons, trails, iron man et j’en passe) où tout l’enjeu est de déjouer les diagnostics, de repousser les limites : nous avons besoin de nous voir réussir, atteindre une ligne d’arrivée, quelle qu’elle soit, pour se sentir exister et valorisé. 

Bref, dans notre quotidien, les objectifs sont de précieuses longues-vues qui permettent de cerner un point d’arrivée avec une certaine acuité et de s’organiser en fonction de ce dernier – pourquoi alors s’en priver ? 

Mais en réalité en se concentrant sur les objectifs on loupe l’essentiel 

En réalité, l’enjeu n’est pas tant d’arrêter de fixer des objectifs, mais plus de comprendre en quoi manager uniquement par les objectifs nous fait passer à côté de l’essentiel. 

L’essentiel c’est la progression de son équipe 

L’essentiel, lorsque l’on manage, c’est notamment le progrès, le chemin qui se déploie entre le point de départ et le point d’arrivée, qui devrait être autant valorisé que l’atteinte des objectifs. Or les objectifs sont formulés d’une telle manière qu’ils ne laissent aucune place au progrès, à l’ »entre deux » : il y a ceux qui réussissent et ceux qui échouent, point. Cette vision des choses fait oublier que non seulement commencer quelque chose est toujours mieux que de ne rien faire du tout mais aussi que les objectifs sont souvent fixés arbitrairement et sont donc parfaitement contestables en eux-mêmes. Par exemple, vous êtes-vous jamais posé la question de pourquoi la compétition iron man avait une course de natation de 3,8 km de long et non 4km, 42 km de course à pied et non 40, 180km de vélo et non 200 ? Les objectifs sont certes utiles, mais à la manière de longues vues : focaliser son regard en des points précis de l’horizon pour choisir la bonne direction ou les menaces à éviter. Mais ils ne permettent pas de justement valoriser et manager une équipe, dont la réussite en réalité s’apparente bien plus à un continuum, à une série de petites actions, qu’à une ligne à franchir. 

Mais également les opportunités non imaginées au départ 

Concentrer son action et son intérêt sur des objectifs précis nous aveugle aussi sur toutes les opportunités non imaginées au départ qui se dessinent souvent en cours de route. La grande perversité des objectifs réside dans leur immuabilité. Une à deux fois l’an (souvent lors de grandes messes de début d’année ou lors des entretiens annuels de fin d’année) des objectifs sont fixés, et puis on n’en parle plus, on ne les conteste plus. Le problème, c’est que si ces objectifs nous aident à gagner en efficacité et rassurent, ils ne nous aident pas à muscler notre capacité à explorer d’autres possibilités. Et cela est problématique dans un monde en constante mutation, où il faut souvent réajuster les choses et où l’on ne cesse d’enjoindre les salariés à davantage de créativité et d’innovation. Il y a donc une vraie contradiction à souhaiter plus de flexibilité et d‘ouverture dans des systèmes au sein desquels l’unique mode d’animation de la vie d’équipes est le suivi méthodique d’objectifs. Manager uniquement via des objectifs pré-établis relègue les tentatives d’exploration et de recherche de solutions différentes à des actions parfaitement accessoires. 

Alors pour une fois, troquez plus souvent vos longues vues pour des lunettes ! 

Bien évidemment, l’idée n’est pas d’arrêter de recourir aux objectifs (qui sont un mal nécessaire) mais plus de cultiver d’autres manières de valoriser le travail de ses collaborateurs et d’animer la vie de son équipe. L’enjeu est d’éviter de se retrouver aveuglés dans une poursuite frénétique d’objectifs que l’on oublie de requestionner et de recalibrer. 

Concrètement, qu’est-ce que cela pourrait signifier de troquer la longue vue pour les lunettes : 

o   Fixez des objectifs qui font progresser vos collaborateurs plutôt que des objectifs qui imposent des niveaux stricts à atteindre : par exemple, au sein d’une usine, ce peut être préférer l’objectif « améliorer notre qualité » à l’objectif « assurer X% des produits finis de qualité », car le pourcentage préfixé ne prend pas en compte la possibilité d’aléas. Cela permet bien mieux de valoriser le progrès, l’avancement par rapport au point de départ 

o   En réunion d’équipe, parlez autant des progrès en cours que des réalisations visibles. Cela peut paraître simpliste mais souvent l’usage est plus d’attendre que le résultat soit atteint pour avoir un prétexte de valoriser son collaborateur. Cela implique aussi de cesser de faire des objectifs le cœur des discussions et la conclusion de vos réunions d’équipe, donc de juger qu’une réunion réussie doit forcément se solder par la définition d’un plan d’action et d’objectifs subséquents. Parfois il y a besoin de temps pour digérer les choses et fixer des objectifs plus adaptés, de manière moins frénétique. 

o   Réduisez – drastiquement – le nombre d’objectifs que vous fixez à vos collaborateurs : ce n’est un secret pour personne, courir plusieurs lièvres à la fois est le meilleur moyen de n’en avoir aucun – il vaut mieux prioriser un objectif pour une période de temps, qui prime sur le reste afin 

o   Tempérez les objectifs avec des gardes fous pour vous assurer que vos objectifs restent pertinents et n’engendrent pas des effets indésirables (comme le fait de vouloir coute que coute atteindre tel objectif – au détriment du bon sens ou de la santé de vos collaborateurs). Concrètement ces gardes fous peuvent être formulés de la manière suivante « je souhaite atteindre cet objectif à moins que je n’atteigne pas le point P au moment t ». Le fait de poser des critères d’élimination vous permettra de vous assurer qu’il n’y a pas d’autres options plus judicieuses en cours de route et le moment opportun pour lâcher des objectifs qui ne sont plus pertinents, car le contexte a changé. 

Comment donner vraiment envie de manager ?

Aujourd’hui les entreprises sont confrontées au fait que beaucoup n’ont pas ou plus envie de manager : parce que le management c’est surtout du bullshit, parce que c’est la technique qui prime, parce que c’est ingrat…Et c’est un problème, parce qu’un bon management reste quand même la clé de voûte d’une organisation performante durablement.

Dans ce podcast nous vous donnerons des clés pour donner vraiment envie de se mettre à manager. On verra que convaincre fonctionne peu et que c’est surtout par l’expérimentation, la déconceptualisation, les 1ères victoires que naissent le plaisir et l’addiction à l’un des plus beaux métiers qui soit : manager.

Managers, écoutez-vous !

D’un côté les enquêtes du personnel, les groupes d’expression, les consultations diverses… De l’autre les études marketing, le client qu’il faut mettre au centre…. Au milieu vous, managers, qui devez répondre à 1000 injonctions, souvent contradictoires… C’est anxiogène non ? Et bien, vous verrez que c’est souvent inefficace en plus…. Alors, on écoute moins ?

 

La tyrannie de l’écoute

 

Le feed back est un cadeau. L’écoute est la plus grande qualité du manager. Ecoutez les besoins de vos clients avant vos contraintes. Vos équipes ont des idées, ne vous en privez pas. Chacun a sa personnalité, il faut s’y adapter.

Combien de fois ai-je dit ces phrases, avec conviction ? Combien de fois ai-je lu ces poncifs sur l’écoute, l’humilité dans les posts Linkedin ? 

Mais je me rends compte, avec le temps, que nous avons érigé un totem, une sorte de valeur intouchable et indiscutable. Ecouter c’est bien. Ne pas écouter c’est mal. 

Et ce totem, tout pavé de bonnes intentions qu’il soit, est un enfer qui nous fait brûler de solitude. Parce que j’écoute tout le monde et qu’ils n’ont pas tous le même avis les coquins… Je fais comment moi ? Parce que je consulte mes clients et qu’ils ne m’apportent que des problèmes que je connaissais déjà et des problèmes contre lesquels je lutte sans succès depuis des années.

Confronté à toutes les stimulations, utiles ou inutiles, je suis fouetté par une série d’injonctions contradictoires, foutraques, submergés par des quantités d’informations invraisemblables avec des messages culpabilisateurs : c’est la voix du client, c’est la voix des équipes, vous ne pouvez l’ignorer ! Vous ne pouvez-vous y soustraire !

Et bien une force qui vous submerge sans que vous puissiez vous y soustraire, on appelle ça une tyrannie.

 

Entrez en résistance !

 

Je connais l’incroyable pouvoir de l’écoute. 10 ans d’improvisation théâtrale pour apprendre à capter les signaux faibles. 15 ans de conseil pour apprendre à répondre au problème de celui qui me parle sans le comparer. L’écoute c’est une varie magie. Ok.

Mais jamais elle ne doit prendre le pas sur vos intuitions, votre expertise, vos sensations. Il doit rester cette petite place pour vous, pour de la subjectivité. Sans cette petite part, sans vous laisser le droit de ne pas écouter, d’en faire qu’à votre tête, de suivre votre intuition, vous n’êtes finalement qu’une marionnette, un esclave des données.

Donc oui, l’avis des équipes comptent. Mais le vôtre aussi. 

Oui le client peut s’exprimer. Mais il n’a pas toujours raison.

Il en va de votre équilibre et de votre santé….

D’autant que la majorité n’a pas toujours raison.

Si à l’époque Steve Jobs et ses équipes avaient écouté les clients de téléphone portable et leurs besoins, jamais ils n’auraient inventé l’iPhone.

La tarte à crème du client au centre des entreprises, et la dictature du « ça fait 1h qu’on n’a pas parlé du client » sont des fausses pistes.

Le client doit évidemment être écouté pour sa satisfaction quotidienne. Mais pour savoir s’il est heureux, pour savoir ce dont il aura envie ou besoin demain, c’est souvent inutile. Parce qu’il ne le sait pas lui-même !

Il ne demande souvent que des améliorations de l’existant, pas de réelles nouveautés. Manque d’imagination ? Oui ! Mais pas parce qu’il est idiot contrairement à vous. Mais parce que VOUS êtes des professionnels. Vous connaissez vos contraintes, vos technologies. Vous avez accès à la littérature de votre métier. Et quand on vous dit qu’il faut raisonner client et pas produit (et/ou service), on vous assène encore un dogme qu’il faut nuancer. Oui, il faut s’occuper des clients. Mais pensez votre produit, votre méthode, vos services. C’est aussi l’expertise et la recherche qui font les innovations. Pas forcément l’écoute du client.

Pareil pour vos équipes : récemment nous préparions un séminaire pour 160 managers et leurs attentes étaient de le décaler parce qu’il tombait au mauvais moment. Si nous avions écouté, il n’aurait pas eu lieu. Mais après l’avoir fait les mêmes personnes sont venues remercier leur chef de l’avoir maintenu. 

Les collaborateurs doivent pouvoir s’exprimer et donner leurs envies. Mais elles doivent être analysées, souvent traduites, et bien plus fréquemment qu’on ne le croit, il faut faire l’inverse de ce qui est demandé. Les gens qui ne demandent pas d’aide en ont souvent grand besoin. Quand on refuse un moment au vert à cause de la charge de travail, c’est qu’on a justement besoin de lever la tête du guidon. 

Les relations dans l’entreprise sont complexes et chargées d’émotion. L’expression des peurs et des doutes y est indispensable mais les mots choisis par vos collaborateurs sont rarement en phase avec leurs émotions. Parce que l’entreprise est presque toujours un lieu hyper pudique. On ne dit pas qu’on a peur d’échouer ; on préfère dire qu’on n’a pas les moyens de réussir.

La juste utilisation de l’écoute

 

Dans notre époque anxiogène, où les débats sont binaires, où les lieux d’expressions sont si simples et sans nuance, où le stress est probablement le mal endémique… Dans cette époque où les coachs de vie fleurissent partout, les formateurs, les experts de tout, vous avez la sensation de devoir être parfaits, et vous n’y arrivez pas ? De devoir être leader, en écoute, emphatique, compréhensif, fédérateur ? De devoir trouver des compromis, de satisfaire les besoins des clients, des salariés, des actionnaires ?

Et bien je vous propose ça :

  1. Si on écoute, on s’écoute ! Et même, plus on écoute les autres, plus on s’écoute soi-même.
  2. Techniquement, votre écoute ne sera jamais aussi utile et riche que si vous avez exposer une opinion et des avis initialement. Cela vous permettra de moins subir. 
  3. Apprenez à écouter les conseils et à ne pas les suivre. Votre intuition doit pouvoir prendre le dessus.
  4. Enfin n’oubliez pas, les idées révolutionnaires commencent généralement par être minoritaires. Alors intéressez-vous aux messages alternatifs, singuliers, différents. Et parfois, ce message vient de vous.

Réenchanter le court terme

Saturation ! En ce moment, c’est un mot qu’on entend beaucoup dans les entreprises, signe que la coupe est pleine sur beaucoup d’aspects. On pourrait y voir une fatalité liée à l’accélération, et aux conditions imposées par la période. En fait, c’est surtout le signe qu’on s’y prend mal avec ce sujet, parce qu’on manque d’imagination pour y remédier. 

Saturation du quotidien ET saturation des parenthèses

La première source de saturation, la plus évidente, c’est la saturation du quotidien. Souvent à distance, faites de réunions en visio qui s’enchainent, une bonne partie du temps loin de ses collègues… ces journées-là épuisent. Et la deuxième, c’est la saturation des parenthèses ! Car pour remédier à ce quotidien pénible, de forçat de Teams, on propose des ateliers, des groupes de travail, bref des tentatives de lever le nez du guidon, de se décoller du court terme. Mais ça bouffe du temps ! Et puis, le plus souvent, c’est juste une réunion en plus… à nouveau à distance.

Et donc c’est la double peine : on fatigue du quotidien, et on redoute ces moments « transverses », ces démarches d’amélioration, qu’on nous fait l’honneur de nous proposer. C’est pénible dans un cas, pénible dans l’autre… et en ligne dans presque tous les cas. 

Alors on se prend à avoir envie de séminaire au vert, l’équipe réunie, autour d’un barbeuc. Mais ça ne résout pas le problème de la charge du quotidien. Alors comment faire en sorte que les moments collectifs ne soient pas au détriment du lendemain ? Que les moments au vert ne soient pas conçus comme des parenthèses, mais comme des moments au service du quotidien, et donc du court terme ? 

 

Le challenge Bear Grylls

Vous vous souvenez de « Man versus Wild » ? Il y a quelques années, Bear Grylls, ancien des forces spéciales britanniques, était lâché (le plus souvent, il sautait d’un hélico) en plein milieu d’une nature hostile et devait retrouver la civilisation. Ça lui prenait quelques jours, sans assistance. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il était au vert… Mais ce n’est pas pour ça qu’il brainstormait sur le moyen terme ! Il ne prenait pas du recul, pas plus qu’il ne préparait l’avenir. Manger, dormir, se protéger des animaux dangereux et des caprices du climat, s’orienter : dire que ses enjeux étaient de court terme serait un euphémisme. 

Transposons, et imaginons le Man(agement) vs Wild : se débrouiller pour passer deux jours avec son équipe sans ordinateur et sans internet, toute l’équipe réunie. Pas des journées d’accrobranche… Et surtout pas des jours de séminaire au vert ou de team building, ce serait trop facile. Non, deux jours de travail productif. Deux jours où on dépote, au cœur de la mission, du projet, ou du sujet opérationnel du moment. 

Loin d’être une parenthèse, on fait le même travail, en lien avec les mêmes objectifs, mais dans des conditions aux antipodes des conditions devenues habituelles. Pas disséminés, mais ensemble ; pas derrière un ordi, mais ordi fermé, même pas là, même pas chargé, sans Wifi. Un Man versus Wild du travail quotidien. Et vous des Bear Grylls de l’animation d’équipe.

 

La productivité sans « outil de productivité » 

Comment utiliser 16 heures de travail analogique (parole, papier, écriture manuscrite, dessin), sans perturbation certes, mais sans nos outils habituels ? Comment faire en sorte que ces 16 heures nous fassent faire un bond en avant sur notre objectif du mois, sur notre échéance de la semaine prochaine ? 

C’est un challenge, au sens propre. Ces questions sont difficiles, inhabituelles. Tant mieux : prenez-les très au sérieux, elles stimuleront votre créativité managériale, et vous tiendrez un bout de la solution. 

La meilleure période pour ça ? Forte charge, équipes fatiguées… Si par chance ces conditions sont réunies, faites-le, tentez le coup. Et une fois que vous l’aurez fait, soyez généreux : mettez 3 de vos collègues au défi de faire pareil. Moi-même, je me lance ! 
 
Mais d’abord, je pars en vacances 😉 Allez ciao !

Et si on repensait l’évaluation du collaborateur ?

Dans la grande majorité des entreprises, on évalue les collaborateurs, pour faire le point sur l’année écoulée, pour fixer de nouveaux objectifs, pour discuter de la trajectoire des prochaines années…Bref un moment très important pour le collaborateur !
Or on remarque que ce geste, loin d’être anodin (puisque l’on parle tout de même de donner un avis sur quelqu’un voire parfois de le noter!) est fait de manière de plus en plus automatique. La faute au manque de temps, aux outils qui parfois déshumanisent le processus, au déficit de formation et d’accompagnement permettant de se roder sur ce geste managérial…On s’est posé la question de ce qu’il signifie vraiment, de sa philosophie, de ses modalités pour essayer de vous aider à (encore) mieux le réussir !

S’opposer n’est pas gueuler

L’opposition ne dois pas être un truc d’ego c’est l’expression de votre sensibilité, de vos intuitions, de vos analyses. Pour y réfléchir ce mois-ci je choisi un opposant surprenant, un opposant à tout mais à personne, un libre penseur. Edouard Baer.

Il m’inspire ce que peut être l’opposition. Ce n’est pas gueuler plus fort, montrer les muscles, faire de l’ombre, juger ou râler. C’est s’exprimer, sans tabou, avec élégance si on peut. Dans cette courte video, il nous incite à cette libre pensée, à ne pas réfléchir et y aller, à être comme l’éléphant dans le magasin de porcelaine, et à ne pas systématiquement l’éviter.

Je choisi cette référence pour vous faire réfléchir à la nature même de l’opposition… Est-ce forcement un combat violent et dur ? Ou l’opposition est-elle finalement l’expression de mon avis, sans agressivité et sans theatralisation ?

Qu’en pensez vous ? 

Vidéo « On se lance, on y va, on s’élance, on tente sa chance / Plus prêt de toi »

 

 

Managers, tirez sur vos bons soldats !

Assez fréquemment, on voit dans les entreprises se former des équipes de bons soldats. Alors, sur le papier, soyons honnêtes, c’est alléchant. Efficaces, fiables, ils délivrent et ça nous rassure. Mais cette situation est-elle vraiment profitable pour vous et pour votre entreprise sur le long terme ? Et quelles en sont les implications pour vos bons soldats ? Je vous propose d’y réfléchir ensemble.

 

On a tendance à s’entourer de bons soldats et à les promouvoir

Dans nos équipes, on a tendance à recruter ou s’entourer de profils similaires au nôtre. Parfois, ce n’est pas conscient, mais souvent, c’est avec eux qu’on a le feeling en entretien, et puis c’est quand même bien plus simple de communiquer et de travailler avec des personnes qui fonctionnent comme nous. Les ressemblances sont parfois telles, que le collaborateur prend son manager comme modèle vers lequel tendre. Il fait tout ce qui est en son pouvoir et met toute son énergie pour être à la hauteur : il va vite, rend un travail toujours impeccable, respecte les délais en ayant toujours cette petite voix dans un coin de sa tête « mais comment mon manager aurait fait à ma place ? ». Au final, quand on est manager et qu’on a un bon soldat dans notre équipe, on est rassuré. 

D’ailleurs, c’est souvent les bons soldats qu’on veut promouvoir. On les identifie comme talents, ressources précieuses et on les met dans tous les projets à haute visibilité ou qui peuvent contribuer au développement futur de l’entreprise. 

En fait, on se voit en eux, du coup on est fiers de promouvoir nos poulains. On leur donne le coup de pouce qu’on n’a pas eu à notre époque et on en jubile. Ils sont notre prolongement, et nous, leur modèle.

En retour, ces collaborateurs se sentent redevables qu’on leur fasse confiance, qu’on mise sur eux et une sorte de loyauté implicite s’instaure envers le manager. Cette loyauté est entretenue voire exacerbée par une injonction à tout réussir par des petites phrases telles que « je compte sur toi », « ne me déçois pas » qui sous-entendent que les collaborateurs partent au combat et seule la victoire est à la hauteur des attentes de leur manager.

 

Le problème, c’est qu’en plébiscitant les bons soldats, les managers se tirent une balle dans le pied

Le problème de s’entourer de mini-nous loyaux est double. 

Pour les collaborateurs, l’injonction voire même la pression à réussir se traduit par « je dois être comme toi », « je dois faire comme si c’était toi ». Cela gomme donc toute prise d’initiatives et tout leur antagonisme, c’est-à-dire leur capacité à faire preuve d’un esprit créatif et critique, dans le but de donner de la robustesse aux projets de leur manager. Dans les deux cas, cela est perçu par le manager comme hors du cadre de ses attentes et donc impropre à l’expression. Mais cela revient à nier la singularité de leur collaborateur, à oublier qui ils sont, à laisser de côté leur âme d’enfant curieux et capable de remettre les choses en question dans le seul but de tendre vers leur modèle : vous, leur manager. C’est ce qu’exprime bien Kurt Cobain lorsqu’il affirme que « vouloir être quelqu’un d’autre, c’est gâcher la personne que vous êtes ». Et si on tire le fil, et qu’au fur et à mesure, tous les bons soldats deviennent presque une armée de clones, comment ferez-vous la différence entre eux ? A qui confierez-vous telle ou telle tâche ? Qui choisirez-vous pour être promu à tel poste ?

Quant au manager, s’entourer de bons soldats produit une forte synergie autour de lui : dans tous ses moments de partage avec ses collaborateurs, ils sont tous d’accord avec lui et vont dans son sens, sans remettre ses idées en question ni exprimer un point de vue différent. Les managers ne sont donc pas challengés, et se retrouvent souvent en posture de « sachants », incapables d’envisager une autre solution, une autre idée que la leur, puisqu’ils ont pris l’habitude qu’elles fassent l’unanimité. En situation extrême, on en arrive à Trump et ses « trumpistes », qui lui vouent un culte, peu importe l’absurdité qu’il sort. Au final, plus personne n’est capable de lui dire si ce qu’il propose fait sens, ce qui aboutit aux dérives que l’on connait : un ayatollah du savoir qui ordonne à ses exécutants. Un management « top down » finalement …

 

Alors reprenez la balle au bond, et renvoyez-la-leur !

Avoir des bons soldats dans son équipe, ça peut aller un temps car ça nous rassure en tant que manager, et ça permet aux collaborateurs de se former, mais ce n’est pas une situation pérenne. Vous ne pouvez pas vous en satisfaire, vous ne pouvez pas les laisser tranquilles pour toutes les raisons évoquées plus haut. Il est temps de changer votre fusil d’épaule car vous avez besoin d’eux pour vous développer, autant qu’ils ont besoin de vous pour s’affirmer.  

Alors c’est sûr, ça ne va pas être facile. Et je me demande également comment faire car qu’est-ce que ça veut dire ? Il faut arrêter d’être gentil ? Passer du « rapide efficace » au « lent moins performant » ? Ne plus solutionner les problèmes et donc générer du chaos ? Au final, c’est à vous d’y réfléchir et de trouver votre propre méthode. Vous pouvez commencer par tester quelques « quick wins » pour vous aiguiller. 

Tout d’abord, allez réveiller l’antagonisme de vos collaborateurs : interdisez-leur systématiquement pendant un temps d’être d’accord avec vous, même si vous êtes persuadés d’être sur le bon chemin. Cela les forcera à réfléchir à un autre angle, presque comme un jeu. Vous verrez, ils y prendront goût, surtout si ce sont leurs idées qui sont finalement retenues. D’autre part, essayez de déconstruire tactiquement le « modèle » que vous avez donné jusqu’alors pour en façonner un autre : challengez devant eux votre manager à vous, mettez-vous en posture de rebelle dans des réunions d’équipe. En bref, surprenez-les pour qu’ils s’accordent le droit de le faire également. 

Ensuite, sortez-les de leur posture d’exécutants. Donnez-leur plus de marge de manœuvre sur leurs sujets, notamment en les autonomisant et en les laissant prendre des décisions par eux-mêmes. S’ils vous sollicitent constamment pour valider ou solutionner des problèmes, refusez de leur donner une réponse ou une solution trop rapide, et cherchez à ce qu’ils la trouvent par eux-mêmes. 

Enfin et surtout, préparez-vous. Entrainez-vous à accueillir le challenge de la part de vos collaborateurs, et à aimer ça. Plus votre posture sera ouverte, et plus vos équipes auront envie de tenter certaines actions.

Soyons fiers d’être mal à l’aise

De toutes les émotions qui traversent les individus en entreprise, il en est une qui est peu visible, tenace et qui provoque des conséquences particulièrement néfastes quand elle n’est pas traitée, c’est le malaise.

Or levons le doute tout de suite : ce n’est pas le malaise qui pose un problème en soi, car c’est un révélateur sain de nos désaccords, mais bien son traitement. On est mal à l’aise d’exprimer son malaise ! Et les conséquences en management sont dramatiques : messes basses et formation de clans, résignation et désengagement, réveil tardif alors que le projet est déjà engagé.

 

C’est l’émotion des lents

Et oui c’est une émotion noble. C’est une intuition de recul, une rebuffade qui me souffle que je ne suis pas totalement d’accord avec ce que j’entends. Quelque chose en nous veut faire une pause, mais ne sait pas vraiment pourquoi. D’aussi grandes et belles décisions peuvent venir d’un malaise bien décortiqué que d’une colère fortement exprimée. Le malaise a juste un tempo plus lent.

Et c’est une émotion normale en entreprise, haut lieu de changement de directions d’origines peu claires, de présentations bien ficelées sur lesquelles on nous demande de nous faire un avis en 5 minutes, de personnalités convaincues qui parlent vite et fort. Et alors comme une dernière défense, notre malaise se dresse : on ne sait pas encore quoi dire contre, mais on a besoin de vérifier un truc, de se poser tout seul pour voir la big picture.

On peut reprocher très justement au malaise la facilité avec laquelle il nous laisse dans l’inaction. Facile à cacher, pas toujours insupportable, on sait que dans quelques heures on n’y pensera plus.

C’est un piège. Les malaises reviennent toujours.

 

Assumons d’être des emmerdeurs

On ne dit rien d’habitude pour l’excellente raison que ce n’est « que » un malaise. Et face à un argumentaire serré, une présentation bien préparée, on a l’impression de ne pas être à la hauteur du débat en parlant d’une sensation aussi vague. On se sent quand même moyennement armé dans nos arguments, avec la peur de passer pour un emmerdeur ou de rester les bras ballants quand on nous demandera notre proposition.

Mais on n’a pas encore de proposition et c’est ok ! Non je ne réfléchis pas à la vitesse de la lumière, non je n’ai pas tous les éléments en tête, j’ai besoin de temps pour m’approprier les choses et je veux pouvoir réfléchir à tête reposée.

 

Mais en ravalant son malaise, on fabrique des projets bancals et des équipes résignées

La première chose qu’il se passe quand on ne dit rien de son malaise c’est que la réunion va conclure sur une proposition plutôt logique et qui a l’air de convenir à tout le monde.

Dans le meilleur des cas la proposition validée fonctionne, mais on se sera forcément un peu désengagé. Dommage.

Dans le pire des cas le malaise s’enkyste, soit qu’on rumine seul dans son coin, soit qu’on rassemble un groupe silencieux de gens d’accord avec nous. A la longue les comportements se tordent, créant des non-dits, du passif, des clans, des décalages de perception…

C’est l’enfer pour tout le monde.

 

Alors allez chercher le malaise !

En entreprise il y a 1000 occasions de malaise : quand on débute sur un poste, quand on n’a pas tout compris de ce qu’on attend de nous, quand on s’entend mal avec un collègue, quand on doit faire un feed-back difficile, quand on nous annonce un plan stratégique…

Si vous gérez des équipes, ne vous contentez pas de réunions silencieuses. Posez simplement une question : « est-ce qu’il y en a qui sont mal à l’aise avec ça, même sans savoir pourquoi ou sans avoir une contre-proposition aboutie ? ».

Et parce qu’on ne voit pas toujours tout, discutez régulièrement en off avec chacun de vos collaborateurs, à la machine à café, autour d’un déjeuner…

Mener le combat pour la normalisation de l’expression du malaise vous permettra de réduire durablement les tensions et d’engager vraiment vos collaborateurs sur vos projets. Vous aurez peut-être de fausses alertes mais y gagnerez infiniment en relationnel.

C’est le moment des projets positifs !

Comment maintenir le bel état d’esprit des équipes, qu’on a parfois vu lors du confinement, alors que le contexte qui l’a fait émerger n’est plus là ? Sûrement pas en prenant de bonnes résolutions…

 

Toutes les réflexions apparues depuis 3 mois autour du fameux « monde d’après » traduisent le même espoir :

Cet espoir, c’est celui d’enclencher enfin les changements sociétaux qu’on attend depuis des années…

Cet espoir est nourri par 3 phénomènes : 

  1. Le temps du confinement a fait monter le niveau de certaines grandes aspirations. En tant que citoyens : écologie et solidarité. En tant que managers : responsabilisation, coopération, retour à l’essentiel.
  2. Cette période nous a donné l’illusion que c’était facile, puisque ces aspirations n’entraient en contradiction avec aucun comportement quotidien… Il est quand même plus facile d’être écolo quand on est confiné, ou de faire confiance à son équipe quand on ne peut pas la contrôler.
  3. Et puis on se dit que 2 mois d’arrêt sur image, ça provoque peut-être des prises de conscience collectives ?
    Alors on espère, cette fois on y croit un peu !

 

Et du coup, on fait ce qu’il y a de pire en matière de changement comportemental : on prend des bonnes résolutions. 

C’est même le festival des bonnes résolutions, le 1er janvier puissance 10 ! Pour nous-mêmes, on veut conserver certaines nouvelles habitudes. Et en tant que manager, on se dit qu’il est crucial de faire durer tel ou tel super mode de fonctionnement, telle ou telle attitude admirable de l’équipe, apparus depuis 3 mois. Mais en oubliant que l’incroyable contexte qui a fait émergé ces magnifiques attitudes… n’est plus là. 

Alors comment maintenir ces belles attitudes, ces vertueuses habitudes, sans le contexte qui les a fait émerger ? Sûrement pas par la volonté, par une vigilance de tous les instants qui nous éviterait soi-disant de revenir en arrière.

Faire ça, ce serait se préparer à la déception, au jugement des autres et de soi-même, au découragement et à l’amertume… Le joli cocktail…

Alors comment faire pour éviter l’effet « bonnes résolutions » ?

 

Il y a deux moyens d’ancrer rapidement et collectivement des comportements nouveaux : l’adversité extraordinaire (ça, c’est fait) et un projet extraordinairement positif.

Il s’agit donc de passer de l’un à l’autre ! C’est sans doute le moment de lancer, dans votre entreprise, un nouveau projet extraordinairement positif. Un projet métier, qui parle au coeur de vos équipes. Un projet qui soit suffisamment précis dans ses intentions pour qu’on en voit la noblesse, et suffisamment peu ficelé dans ses modalités, pour embarquer tout le monde. Pour que tout le monde se demande : « en quoi je peux y contribuer ? ».

C’est aussi une manière de ne pas devenir conservateur d’une certaine période : pour conserver, il faut chercher à aller plus loin, sinon le soufflé ne peut pas tenir. Il s’agit donc d’enthousiasmer et surprendre, ce que nos peurs de l’inconnu nous déconseillent souvent. 

Pour autant, le lien entre ce projet et les exploits de la période qui s’achève doit être évident. Imaginez une communication du genre : « Vous avez été tellement malins, solidaires, engagés, que nous avons décidé de faire un projet qu’on n’aurait jamais fait sans Covid, qui est de réussir en 12 mois … , pour aller d’ici à là… ».

 

Il s’agit, en somme, de passer de l’inattendu négatif à l’inattendu positif… 

Cette histoire à écrire, elle doit proposer un rôle positif et valorisant à tous ceux qui le souhaitent. Elle permet de trouver un autre moyen de faire des gens de vos équipes les héros de l’histoire, d’une nouvelle histoire qui commence. 

Sur quel projet ? Vous n’en avez peut-être aucune idée, mais en vous y attelant vous en sortirez rapidement les prémisses : des bases qui parlent au coeur au moins autant qu’à la raison.

Tel Asterix, il faudra être malin et courageux, car ce chemin sera difficile. Parce que dans les entreprises, les crises ne génèrent pas toujours de la générosité. Et parce qu’il est possible que « l’adversité qui soude » laisse la place à « l’adversité qui divise » : les projets de cost killing ont toutes les chances d’apparaitre, avec leurs lots d’incertitudes, d’indicateurs, de contraintes supplémentaires en tous genres, de plans d’action… Bref tout ce qui fait traditionnellement fuir l’audace et l’enthousiasme. 

Ce chemin difficile, ce sera celui de la construction du projet, mais aussi celui de la mobilisation malgré la méfiance. Mais comme dans toute bonne histoire, ces difficultés seront le moteur de l’action et de la fierté des héros. 

Vos héros du Covid ont goutté à la possibilité quasi quotidienne de prouver leur valeur et leur attachement à leur entreprise. La question est maintenant de savoir comment vous allez leur proposer de continuer à le faire à l’avenir.

 

En juin 2020, vous êtes à un carrefour…

Vous pouvez choisir la voie de la volonté (de l’auto-contrôle, des résolutions culpabilisantes, des précautions), ou bien celle de l’envie, de l’enthousiasme, du projet positif qui créera un contexte favorable à l’apparition ou au renforcement de nouvelles habitudes.

Ayons la sagesse de croire que la puissance de l’envie dépassera toujours celle de la volonté. Il est temps de refaire des choses positives et ambitieuses !

ALBUS CONSEIL