Catégorie : automanagement

Lucifer : derrière les bonnes intentions …

Lucifer, c’est une série dans laquelle on suit le diable, le vrai, celui qui gérait l’enfer, qui a décidé de tout lâcher et de prendre sa retraite pour venir vivre parmi les humains. Rapidement, il se retrouve à collaborer avec la police pour résoudre des enquêtes. Et à chacune d’entre elles, il utilise son plus utile des pouvoirs sur tous les potentiels suspects d’une affaire : faire avouer à n’importe qui sa plus grande ambition. 

Ce qui est intéressant, c’est que, dès lors qu’un personnage a avoué son but le plus profond, il paraît alors évident pour le spectateur, avec son œil extérieur, pourquoi cette personne peut être le meurtrier, et la logique se déroule immédiatement. Parfois de manière évidente « je veux être le premier » amène à penser qu’un personnage a voulu se débarrasser d’un concurrent. Mais, et c’est là que c’est intéressant, ça fonctionne aussi et surtout lorsque l’intention est louable ! Ainsi un coach sportif qui « veut devenir un coach indispensable pour son poulain » embauche une équipe pour le faire chanter, afin de lui rester utile en l’aidant dans cette épreuve. 

En management, c’est aussi souvent derrière les intentions les plus louables que s’expliquent les pires travers : le manager qui veut à tout prix « être bienveillant » et qui n’ose pas faire des feedbacks, ne permet pas à ses équipes d’évoluer. Celui qui veux « sauver son équipe en lui évitant les erreurs » les empêche souvent de se responsabiliser en prenant des risques.  

Ainsi, sans tomber dans la psychologie de comptoir en cherchant les causes fondamentales et profondément personnelles qui peuvent nous amener à prendre telle ou telle décision, on peut bien s’autoriser parfois à jouer la transparence avec soi-même : osons mettre notre motivation sur la table, et surtout comparer les résultats que l’on espérait à ceux que l’on obtient ! Après tout, l’enfer est pavé de bonnes intentions.

Double expérience de subtilité

Allons en Inde ce mois-ci, et regardons 2 films. 1er interêt, on éloignera les clichés de la comédie musicale hyper longue et un peu kitch ; le cinéma indien produit de tout. Allons donc en Inde et regardons 2 merveilles de Ritesh Batra : The Lunchbox et Le Photographe.

2 histoires d’amour intimistes et originales, plongées dans la fourmilière de Mumbai. La première est une relation épistolaire à travers les boites de repars repas qui circulent chaque jour par centaine de milliers dans la ville. La seconde nous invite dans une rencontre entre 2 personnes de castes différentes. 

Au delà de l’incroyable beauté des 2 films, de leur douceur rare, et des comédiens fantastiques, ces films sont une leçon d’économie d’explication, de mots. Le réalisateur laisse le spectateur imaginer, inventer, réfléchir. Pour nous managers, il nous rappelle que considérer nos équipes, et les encadrer ce n’est pas expliquer tout, tout le temps. On en fait des tonnes avec le sens. C’est important, mais ce n’est pas toujours au manager de le donner.

Laissez le temps aux équipes pour réfléchir. Respecter l’intelligence ce n’est pas gaver. C’est proposer, laisser vivre.

Déshabillons le roi

Animer une communauté, fédérer autour d’une quête commune, embarquer dans une aventure… Autant de tâches qui incombent à un bon roi et donc à un bon manager ! Dans cet épisode, vous comprendrez pourquoi son rôle est plus limité – mais pas plus difficile – qu’il n’y parait, et surtout les pièges dans lesquels il est tentant de tomber.

* Pour aller plus loin *

// A lire //

Lettre ouverte aux managers papa ou maman

Pour réveiller les équipes il faut du rythme

Le meilleur job du monde manager

// A voir //
Le stratège – Bennett Miller
Toutes les interventions de Claude Onesta !

// Les extraits //
Braveheart – Mel Gibson
Les Douze Salopards – Robert Aldrich
Astérix et Cléopâtre – René Goscinny & Albert Uderzo

Louis de Funès en 100 répliques cultes
Kaamelott « La dispute » Livre III épisode 99
Le stratège – Bennett Miller

David Bowie – Heroes

 

La table ronde du management est un podcast produit par Albus Conseil

Au micro : Camille Riou et Patrick Bois. 

A la réalisation : Laetitia Peyre

Vérité, mensonge et crédibilité en management

Un épisode bien utile en ces temps de crise…

Dire la vérité semble une vérité en management. Et pourtant, c’est si difficile : entre la peur de réactions incontrôlées, la question de savoir où on s’arrête et tout ce qu’il faut faire pour être crédible quand on le dit ; Il est parfois très tentant de mentir. Pour un manager, déjouer les pièges de la vérité est un vrai enjeu et une exigence morale à l’heure où les fake news envahissent la planète.

 

* Pour aller plus loin *

// A lire //

Lettre ouverte aux managers papa ou maman

Pour être un leader, soyez irrationnel

 

// A voir //
« La folie des grandeurs » de Gérard Oury
« The Truman Show » dePeter Weir
La série « Le bureau des légendes »

// Les extraits //
La folie des grandeurs de Gérard Oury
Femmes puissantes, l’émission de Léa Salamé sur France Inter

Louis de Funès en 100 répliques cultes

François Rollin : en colère contre les Suisses

Les bronzés font du ski de Patrice Leconte

Le discours de Churchill
Géopolitique de Trump : l’imprévisible ? (Thomas Gomart)

Alain Bashung – La nuit je mens

 

La table ronde du management est un podcast produit par Albus Conseil

Au micro : Camille Riou et Patrick Bois. 

A la réalisation : Laetitia Peyre

Le super héros, le pire des managers

Bien sûr, le courage, la capacité à prendre des décisions, la proximité, sont des qualités très appréciées dans les entreprises. A trop les solliciter cependant, on se transforme en « super-héros » qui empêche les équipes de grandir et de développer leur propre héroïsme. Ce n’est pas que dommage, c’est parfois un danger. 

 

A trop confondre le manager et le leader…

On est souvent mécontent des managers que l’on a. Chaque génération critique un profil managérial typique de son époque et fustige ses erreurs : nous avions le manager paternaliste qui confondait ses employés et ses enfants (dans les années 80, même s’il en reste encore çà et là), le manager distant et déconnecté (celui qui ne disait pas bonjour le matin), le manager super technicien mais pas vraiment manager, le manager toujours en réunion et qui ne s’intéresse qu’aux chiffres, époque pas si lointaine où les indicateurs étaient le graal du management. 

Depuis peu, on a un profil qui prend de l’ampleur, le manager super-héros. Produit attirant, cet archétype est un super leader. C’est normal, puisque Linkedin nous dit à longueur de posts qu’un bon manager est un leader et non un boss, on se tourne naturellement vers ces profils. Donc il est courageux, il est assertif car un coach lui a appris à contrôler et assumer ses convictions, il a un comportement d’entrepreneur car les entreprises ne veulent plus d’exécutants dociles dans ce monde si changeant et complexe. 

Bref, une personne qui performe, un cador. Et elle grimpe vite dans l’organisation. Et c’est bien normal. Nous en croisons quelques-unes dans nos missions, quelle puissance et quel plaisir de travailler pour eux

Mais quel est leur bilan de manager ? 

L’équipe est prise de vitesse, étouffée

Vu les résultats de la dernière coupe du monde, on a bien envie de faire des analogies avec le football à tout bout de champ. On a beaucoup parlé de la Neymar-dépendance du Brésil, de la Messi-dépendance de l’Argentine, idem pour le Portugal. Leur bilan est mauvais, alors que les équipes plus équilibrées (France, Belgique, Angleterre, Croatie) ont mieux performé. Même si ce n’est pas aussi binaire, il est logique de penser qu’on se dépasse plus facilement quand il n’y a pas quelqu’un pour réussir à notre place. 

Un manager super-héros, malgré ses qualités, pèse souvent sur le collectif. D’abord il imprime un rythme très soutenu, car il est rapide mais aussi impatient (besoin de réalisation très fort). A ce rythme, l’équipe peut éventuellement suivre mais pas devancer. Et difficile de prendre des initiatives en position de suiveur…

 Ce n’est pas un manque de délégation ou de l’omniprésence, c’est plus fin de ça. C’est juste que son aura pèse sur toutes les actions et décisions. 

Les équipes qui sont dirigées par ces managers se ressemblent les unes les autres : très fidèles, presque militantes de leur chef, en surinvestissement, n’imaginant même pas qu’il ou elle puisse faire fausse route (et n’ayant de toutes façons pas le temps d’y penser). Elles ressemblent un peu aux forces de police dans les films de super-héros : un peu en retard, essoufflées mais de bonne volonté et admiratives du travail (déjà fini) du vrai héros.

Cela génère donc des comportements de suiveurs, une perte de confiance de l’équipe dans ses propres capacités. Bref, managérialement, le bilan n’est pas top.

On peut aussi parler du syndrome du chevalier blanc. Imaginons qu’il y ait un conflit dans l’équipe. Le manager super héros va intervenir dans la relation pour faire le médiateur, dépassionner le problème et ouvrir la porte à l’apaisement. A court terme c’est super, plus de conflit, mais les personnes concernées tireront très peu d’enseignements de cet épisode (qui pourra donc se répéter). Le chevalier blanc, par ses intentions louables, rend vivable une situation qui ne devrait pas l’être et annihile l’apprentissage. 

In fine, le manager super-héros installe souvent autour de lui un fonctionnement en étoile, donc il est le centre. Tout passe par lui. Ce n’est pas un manque de délégation ou de l’omniprésence, c’est plus fin de ça. C’est juste que son aura pèse sur toutes les actions et décisions. Cela génère donc des comportements de suiveurs, une perte de confiance de l’équipe dans ses propres capacités. Bref, managérialement, le bilan n’est pas top.

La solution : déséquilibre et déplacement

Parfois dans nos missions, nous obligeons un manager super-héros à faire des actions qui ne lui sont pas naturelles : laisser faire son équipe, ne rien dire, quitter la réunion au moment le plus stratégique. C’est difficile à accepter pour lui mais il apprend ainsi que son équipe se surpasse quand il n’est pas là, et que le résultat est qualitativement comparable. 

 C’est ainsi qu’un ancien DG de Décathlon a quitté son poste temporairement pour s’occuper du développement de l’Asie. Quand il est revenu, son équipe était terriblement montée en puissance. 

Plus globalement, le manager super-héros doit créer un déséquilibre pour laisser respirer son équipe. Plusieurs possibilités pour cela : accepter une mission complémentaire qui va lui prendre beaucoup de temps et donner plus de place à son équipe qui sera d’abord mal à l’aise mais qui finira par développer des qualités et des compétences nouvelles, accepter d’en faire moins aussi en terme d’horaires (finir une heure plus tôt, c’est parfois un bol d’air excellent pour l’équipe), etc.  

Cela peut aussi prendre la forme d’un déplacement. C’est ainsi qu’un ancien DG de Décathlon a quitté son poste temporairement pour s’occuper du développement de l’Asie. Quand il est revenu, son équipe était terriblement montée en puissance. 

Sans être aussi radical, nous conseillons parfois à ces managers de se fixer des objectifs annexes, c’est-à-dire loin de la stratégie, de l’organisation ou de la performance globale. Par exemple, aller coacher personnellement les 3 personnes les plus faibles de son équipe. Une action utile, prenante et qui déplacera suffisamment son moteur d’action pour laisser les autres prendre des initiatives, résoudre seuls certains conflits, explorer. 

Et comme les managers super-héros évoluent vite, c’est aussi une façon de préparer leurs départs avec des équipes qui sauront déjà faire sans eux. 

Manager-technicien ou non, telle est la question…

Faut-il savoir faire tout ce que ses équipes font, et prendre la main à tout instant ? Ou faut-il garder un œil extérieur et s’appuyer sur les compétences de son équipe sans les acquérir soi-même ?

Cette question revient fréquemment et on trouve des défenseurs très convaincus des 2 côtés… Etat des lieux.

 

Un débat éternel

On entend souvent dire dans les équipes qui critiquent leur manager « de toute façon mon chef ne sait pas faire mon job ». Et on voit que ça reste polémique, avec « un chef qui ne connaît pas le travail de ses équipes, ça ne sert à rien », ou alors « un chef qui fait le job de ses équipes, y’a rien de pire ! »

C’est un débat que l’on retrouve dans tous les secteurs, jusque dans le gouvernement pour lequel à chaque fois qu’un nouveau ministre est nommé, les journalistes commentent « Ah enfin un écrivain à la Culture » ou « Oh encore un débarqué qui ne connaît rien à l’Education ». Evidemment, c’est surtout dans les métiers techniques que le sujet se pose.

 

2 positions :

  • Les défenseurs du manager-technicien qui maintiennent que, pour savoir de quoi il parle, le chef doit connaître les métiers de son entreprise, en tous cas au minimum les activités cœur de métier. Il est certain que ça serait bizarre d’avoir le patron de Google qui n’a jamais touché un ordinateur…
  •  Mais les détracteurs argumentent que c’est absurde de vouloir à tout prix un manager-technicien car les entreprises sont parfois tellement grandes qu’il serait impossible d’attendre cela de la part de son responsable ; et qu’un manager ça sert d’abord à manager. Effectivement le patron d’EDF peut ne pas avoir fait dans sa vie tous les métiers associés aux activités de l’électrique, du nucléaire, de l’éolien et du solaire…


La technique a évidemment sa place

Avoir un héritage technique quand on accède à un poste de manager dans une équipe c’est évidemment utile, au moins pour 3 raisons :

  • D’abord parce que la technique peut aider à légitimer un manager à son poste. Déjà on connaît le jargon des équipes ; et puis on est de facto reconnu par ses pairs. C’est le fameux Ministre de la Justice qui a été avocat pendant 30 ans : cela ne va pas convaincre tout le monde mais cela va aider, au départ, pour éviter quelques à priori.
  • Ensuite parce que cela peut permettre au manager de faire progresser techniquement les personnes qu’il encadre. Par exemple sur un tournage, le réalisateur peut donner des conseils au jeune caméraman, ou au preneur de sons en début de carrière.
  • Mais surtout parce que les connaissances techniques permettent à un manager de maîtriser les enjeux de l’entreprise et donc de bien orienter ses décisions. Et cela est nécessaire sur des activités cœur de métier (par exemple si je suis chef de quart sur un site industriel, je comprends les risques de sécurité donc en cas de crise je suis capable d’évaluer la gravité de la situation et de prendre les décisions adéquates), mais aussi sur des activités support à la technique qui vont impacter les activités cœur de métier (par exemple si je suis RH pour une entreprise de logistique, je sais ce que cela entraîne en terme de business de réduire le nombre de personnes sur un centre logistique)

Il y a d’ailleurs des entreprises qui proposent aux personnes qui vont prendre un poste d’encadrement de faire d’abord plusieurs stages dans les métiers opérationnels ; c’est par exemple le cas chez Sodexo.

Mais la technique ne remplacera jamais le bon management

Mais ne nous y trompons pas : si la connaissance de la « technique » ou du métier de vos équipes est importante, il faut se dire que le management est un métier à part entière. Son objectif : rendre les autres meilleurs… Et pour ça, ce n’est pas la technique qui vous l’apportera, mais la capacité relationnelle, l’écoute, les encouragements, le challenge, etc.

Que vous soyez manager technicien ou non, vous devez vous concentrer sur votre métier : manager, manager, manager. En 3 essentiels :

  • S’intéresser aux enjeux et conditions de réussite de ses équipes. En réalité, connaître les détails techniques du métier est inutile, mais comprendre les risques et difficultés est vital pour aider les équipes à réussir.
  • Se plonger dans les sujets. Un bon technicien n’a que rarement besoin d’un autre technicien que lui (et si c’est le cas, pourquoi cela devrait-il être son manager ?), mais il a souvent besoin de prendre du recul. Pour l’aider à le faire, plongez vous dans les sujets ; pas pour les comprendre mais pour faire réfléchir votre collaborateur qui trouvera la solution grâce à vos questions.
  • Surtout, se préoccuper de vos équipes. Il n’arrive jamais qu’on reproche à un bon manager de ne pas connaître la technique ; et ce n’est pas parce que ce manager fait extrêmement bien semblant de connaître le métier, c’est parce qu’il a le souci d’aider et de rendre les choses possibles. 

Parfois, même la technique empêche de bien manager

Combien de fois avons-nous entendu cette histoire : « nous l’avons promu manager car il était vraiment le meilleur techniquement de l’équipe, mais il n’a jamais vraiment pris le rôle. Aujourd’hui, ça ne marche pas du tout. »

La maîtrise du métier peut empêcher l’émergeance de la posture managériale. C’est logique d’ailleurs : puisque l’on doit sa promotion, et donc sa légitimité, à la technique, elle devient une valeur refuge. Une zone de confort dans laquelle on se cantonne plutôt de se risquer dans l’inconnu si complexe et incertain du management. Inconsciemment même, cela peut emmener le manager-technicien à bloquer les montées en compétence de ceux qui pourraient un jour contester sa légitimité au poste. De l’anti-management donc.  

Evidemment, il n’y a pas de réponse dogmatique

L’ambition de cet article est surtout de combattre les dogmatismes. Aux ayatollahs du management moderne qui disent qu’un bon manager n’a pas à maîtriser la technique, nous disons que dans certains cas, la maîtrise du métier est une porte d’entrée indispensable à une prise de leadership. Par exemple, il serait difficile de réussir pour un Général qui ne serait pas issu de l’armée, ou pour un entraîneur qui n’aurait jamais fait de sport ?

Et aux eternels convainus que seuls peuvent réussir les managers experts du métier de leur équipe, nous voulons donner de la nuance : un manager qui ne connaît pas le métier ce n’est pas évident, mais un manager qui connaît la technique mais ne manage pas, c’est bien pire ! Donc soyons exigeant au bon niveau : d’abord sur le management, puis sur la technique.

Et puis finalement de ne pas connaître la technique cela oblige à s’appuyer davantage sur les équipes pour prendre les décisions et donc en valorisant leur savoir-faire.

Managers, travaillez moins pour gagner plus

 » Je suis à la bourre », « sous l’eau », « j’y vois pas l’jour », « c’est le rush », « je suis épuisé ». 

Ces phrases sont sans doute les plus fréquemment prononcées dans nos entreprises… C’est une fatalité semble-t-il dans un monde hyper concurrentiel, exigeant, bourré de contraintes, de menaces… Mais ne serait-on pas en plein dans un syndrome de l’Autruche ? Et si pour produire plus, il fallait travailler moins ?

La grande bouffe

Pour les managers, l’heure semble être à l’étirement sans fin du temps de travail et de l’intensité ressentie du travail. Et on finit par traverser les bureaux comme on regarde la Grande Bouffe : en assistant au spectacle de managers qui empilent les heures et le stress, jusqu’à l’explosion.

Il faut dire que 4 facteurs au moins se combinent pour remplir les agendas :

  • Il y a d’abord une accumulation objective de tâches : la tendance est à la réduction des effectifs mais aussi aux matrices complexes, dans lesquelles les demandes proviennent d’endroits très différents sans concertation entre elles.
  • Et puis l’effet de nos nouvelles technologies, qui ont considérablement réduit le temps d’exécution des tâches, mais pas leur charge mentale. Avec nos outils, plus d’assistant, moins de délais et donc bien plus de sujets à gérer en même temps : on fait tourner 10 assiettes au lieu de 2 ou 3… Techniquement ça passe, mais l’inquiétude, les risques d’échec, les interactions ont été multipliées par 10 ou plus et nos cerveaux peinent à suivre le rythme.
  • Mais il y a aussi le rapport aux autres : on ne veut pas être le paresseux, celui qui « prend des RTT » en partant à 18h… On ne veut pas laisser seuls ceux qui ont décidé d’y passer la nuit… On ne veut pas laisser un travail sans être sûr qu’il recueillera les lauriers dûs à toute production parfaite…
  • Enfin, on peut s’ajouter soi-même une pression considérable : c’est l’escalade de l’engagement. On s’engage librement dans une tâche et, en voulant l’accomplir bien, on s’y consacre de plus en plus, jusqu’à la déraison parfois, au mépris de sa santé et de sa relation aux autres.

Tout ceci constitue un film très noir de la spirale dans laquelle bon nombre de managers sont embarqués avec, au bout de la pellicule, un final aussi dramatique que pour Noiret et ses amis. Mais alors que les héros du film choisissent l’excès, les managers ont la certitude qu’ils subissent la situation. D’ailleurs, en évoquant le sujet avec nos consultants, eux-mêmes disent que travailler moins « n’est pas possible » et rêvent de solution miracle.

L’illusion parfaite

En realité la solution est à portée de main parce qu’on fait une erreur de jugement sur la surcharge de travail :

On sait bien que quand on travaille trop, on est de moins en moins productif, que la qualité baisse… mais au fond on croit que le travail fait après 20h est mieux que rien, même médiocre. Je crois que ce n’est pas vrai : ponctuellement, sur une soirée, on pourra argumenter le contraire évidemment, mais en vérité, la surcharge ne génère pas une production médiocre, mais une production négative :

  • Parce que les erreurs, les fausses pistes se multiplient et que ça gonfle l’agenda sans aucun apport, jusqu’à s’agacer soi (sans parler des autres).
  • Parce que la perte de lucidité liée à la fatigue fait produire du « à côté de la plaque » : l’action est peut être utile en soi, mais a été faite en lieu et place d’une bien plus importante… Effet négatif là encore.
  • Parce qu’enfin ce qui est fait en étant fatigué et en sur régime est souvent mal vécu par l’entourage qui vous juge dépassé. 

L’illusion est parfaite parce que même si la solution est ultra-simple (en travaillant moins, vous ferez plus), il est difficile de l’assumer (ce que je fais ne sert à rien).

Prenez le contrôle de vous-même

La conséquence, c’est qu’il n’y pas de magie d’organisation ou de priorisation. Il y a d’abord une prise de conscience qu’à partir d’un certain moment, plus vous travaillez, plus votre apport baisse, pouvant finir par être négatif. Et un jour, en supprimant votre poste tous vos collègues gagneront du temps.

Pour éviter cet extrême, sortez de la spirale en arrêtant de vous convaincre que ce que vous faites est pénible, mais nécessaire. Les managers les plus performants que j’ai croisés ne sont pas ceux qui travaillent le plus (sur la durée).

De plus en plus de managers quittent l’entreprise pour gérer des chambres d’hôte en Provence. C’est une solution mais si vous voulez rester encore un peu pour profiter de l’entreprise et de sa dynamique, il faut mettre un coup de frein, arrêter de vous enfermer dans la quantité stérile et regarder froidement votre activité.

Ensuite, embarquez vos collègues

Bien entendu, votre prise de conscience peut être utile, mais elle va se heurter à vos collègues les plus proches. Il est donc bon d’adopter cette stratégie à plusieurs. C’est un choix de Codir par exemple de se concentrer sur quelques priorités ou de travailler la fatigue (physique et psychologique) comme un enjeu en soi.

Prenez le temps de définir vos priorités (1 ou 2 par semestre) et admettez qu’en mettant l’énergie sur elles, les autres sujets avanceront moins… Mais avancent-ils tous aujourd’hui ? Non, assurément ou tellement mal.

Enfin, concrètement, cessez le saupoudrage

Évidemment, toutes ces jolies idées vues plus haut ne répondent pas à la question qui tue : Qu’est-ce que j’arrête ? Qu’est-ce que nous arrêtons ?

La stratégie serait de prendre les problèmes un par un… Comme disent les footballeurs, moins bêtement qu’il n’y parait : prendre les matchs les uns après les autres.

=> Je choisis mon problème principal et/ou le sujet à plus fort potentiel et je le TRAITE ! Pendant ce temps, je ne fais que le minimum sur le reste… Et quand c’est terminé, je passe au problème suivant.

La satisfaction des problèmes traités va rapidement dépasser la frustration des sujets que vous n’avez pas encore abordés. Votre image d’efficacité compensera vite le préjugé absurde sur votre charge de travail «de fainéant».

Le Bureau des Légendes, le combat entre – projet collectif et projet individuel

Comment concilier, dans tout corps social, les intérêts potentiellement antagonistes entre projet collectif et projet individuel ?

Pour l’illustrer, nous vous conseillons de visionner les deux saisons du Bureau des Légendes, série très bien ficelée sur le fonctionnement d’un service de la DGSE, créée en 2015 par Éric Rochant et diffusée sur Canal +.

A travers les deux personnages principaux, « Malotru » incarné par Matthieu Kassovitz et « Phénomène » interprété par Sara Giraudeau, nous avons deux archétypes. Le premier subit le conflit perpétuel entre son projet individuel (sauver la femme qu’il aime) et le projet du département, et la seconde arrive à gérer l’équilibre, malgré les revirements de situation nécessaires à l’intrigue.

Comment expliquer cette différence ?

La série met en lumière l’importance du management de proximité (la référente, Marie-Jeanne) qui s’occupe de « Phénomène » en étant à la fois très à l’écoute de ses enjeux personnels et faisant toujours le lien avec le projet collectif. Alors que « Malotru », qui n’est pas vraiment encadré, doit en permanence faire ses propres arbitrages et finit par s’enfermer dans ses erreurs.

La scène où Marie-Jeanne coache Phénomène pour lui expliquer que « sous couverture, elle peut se rapprocher de certaines personnes mais qu’elle ne doit jamais nouer de liens sincères car elle doit pouvoir couper net si nécessaire » est un bon exemple. Ce coaching lui permettra de sortir des pièges alors que Malotru va s’y engouffrer.

Une bonne série et de bonnes pratiques sur le management de proximité, voilà de quoi justifier notre addiction du soir !

Le meilleur job du monde : manager !

On tourne autour du pot depuis plus de 3 ans que nous écrivons des articles, et il faut bien que nous vous disions les choses très directement, nous adorons le management et nous adorons les managers. Bref pour nous, le meilleur job du monde n’est pas sur une île déserte en Australie, c’est le management.

Alors, en cette période de fête, nous avons eu envie de partager avec vous pourquoi nous aimons tant ce métier, et comment, quand on l’exerce, y prendre tout le plaisir qu’il peut apporter.

C’est vrai qu’il se cache bien

Notre titre pourrait passer pour de l’ironie tant la fonction de management est malmenée dans les entreprises, et dans la société en général. Cible pour les partenaires sociaux, vecteur de censure et d’oppression pour ceux qui la craignent, éreintante, infiniment ingrate et extrêmement difficile pour ceux qui l’exercent.

Dans l’imaginaire de ceux qui craignent le management, il y aura toujours la suspicion du petit chef, ou du planqué loin du terrain, qui travaille beaucoup peut être, mais principalement pour brasser du vent.

Le job de manager est une cible idéale parce qu’il est entre le marteau et l’enclume. Ce n’est pas le grand décideur (qui n’existe pas vraiment, ou en tout cas n’est pas unique), mais c’est lui qui fait exécuter les décisions. Il est donc considéré comme responsable puisqu’il porte les décisions, sans avoir l’aura de visionnaire ou au moins la force de celui qui les a prises.

C’est aussi une cible facile parce qu’en apparence, il est improductif : c’est vrai d’ailleurs que dans une usine, si le manager quitte son poste, la production ne s’arrête pas immédiatement ; si c’est l’opérateur, oui. Dans l’imaginaire de ceux qui craignent le management, il y aura toujours la suspicion du petit chef, ou du planqué loin du terrain, qui travaille beaucoup peut être, mais principalement pour brasser du vent.

C’est enfin une cible parce que le manager est une espèce en constante évolution, mais qui est l’héritier de la tradition autoritaire de l’encadrement militaire, respecté pour sa force au mieux, mais toujours supérieur, et donc nécessitant un minimum de critique pour vivre avec lui.


Et puis, il peut être très mal exercé

Au-delà de ces grandes raisons macro, il faut aussi reconnaître que tout le monde ne fait pas le meilleur usage du pouvoir.

Il y en a quelques-uns, peu heureusement, qui font de leur position une véritable arme de domination. Harcèlement, chantage, pressions. Ils sont peu nombreux mais font du mal à toute la communauté.

Il y a en plus qui se sentent acculés dans la fonction. Parce qu’ils n’ont pas les moyens, parce qu’ils ont été promus pour de mauvaises raisons, parce qu’ils sont eux même mal managés. La responsabilité des autres peut alors devenir un poids très lourd, qui se répercute sur les autres, en dessous, à côté et au-dessus.

Et puis, nous faisons tous des erreurs qui peuvent ternir notre image et dégrader le prestige de la fonction. 

Mais toutes ces raisons de ne pas prendre de plaisir, voire de faire souffrir à travers le management, ne sont pas le fait de la fonction elle-même mais la conséquence d’un monde qui change très vite, où l’autorité classique ne passe plus, et que l’on a pas encore trouvé les solutions, ni adapté suffisamment les organisations à la beauté de la tâche qui consiste à faire réussir les autres.

Manager, c’est le plus grand levier de progrès humain 

Parce qu’évidemment, en regardant ce qui ne va pas, les défauts, on ne peut que tirer des conclusions hâtives.

Le management, avant d’être difficile, est profondément noble.

C’est l’art de rendre les autres performants. C’est le métier dans lequel on ne se juge pas à travers ses réalisations mais à travers celle des autres. Que l’on soit coach sportif, responsable du service comptabilité, patron d’unité de production, chef d’une équipe commerciale, PDG d’une multinationale, manager c’est faire réussir les autres. 

C’est une erreur commune de penser qu’un manager sert à encadrer, contrôler, faire respecter un processus. C’est une erreur de penser que la qualité d’un manager se mesure à son leadership, ou à son écoute. Tout ceci ne sont que des moyens. Des moyens pour faire réussir les autres, pour qu’une équipe se surpasse et déjoue les pronostics.

C’est pour ça que le manager idéal n’existe pas. Il ne s’évalue pas en lui-même mais à travers ceux qui l’entourent. Du coup, à chacun son style et ses qualités. Le secret est de vouloir, plus que tout, faire réussir les autres. Cherchez à le faire avec charisme ou non, pédagogue ou pas, en énergie ou avec patience, mais cherchez-le. Jérome Tougne, psychologue du travail le dit : « je ne sais pas définir un bon manager ; je sais juste qu’il aime ça. »

Aussi, le manager a la charge du progrès humain, à son échelle. Il a la charge de développer une activité meilleure, plus rentable, plus efficace, plus belle, en s’appuyant sur les ressources qu’il a. Et comme les machines ont un rendement nominal et que les processus ne sont qu’un schéma, le levier véritable c’est l’Homme. Et pour actionner les autres, les ordres peuvent marcher un temps, mais ils génèrent au mieux du respect, mais souvent peu d’autonomie. Pour développer les gens, le mieux est de développer un climat de confiance, une passion pour ce qu’ils font, pour leurs qualités. Pour engager les gens, il faut leur donner l’occasion de faire des choses dont ils seront fiers. 

Comment retrouver la flamme si vous l’avez perdue

Bon, une fois qu’on a dit tout ça, comment passer du stress au bonheur, sans attendre que les entreprises du monde entier aient fait leur mutation ? Et même sans attendre que vos chefs ne vous permettent de changer tout ça vite ? Bref, comment m’épanouir dans mon rôle de manager, en agissant à mon niveau ?


1. Soyez modestes

Si le manager peut changer la vie des gens, il ne le fera pas à tous les coups. Le but est de créer les conditions pour que les gens changent et ensuite trouver son bonheur dans les progrès même si le chemin est encore long. 

 

2. Ne soyez pas Parents

Si vous avez la responsabilité de votre équipe, vous n’êtes pas pour autant maître des décisions des autres. Créer les conditions de l’engagement, essayez de traiter les cas individuels, mais ne perdez pas de vue que nous manageons des adultes, et qu’ils ont le droit de vous suivre ou pas. Bref, ne vous sentez pas responsables de ce que les gens font mais de la place que vous leur donnez. Ensuite, c’est leur choix.

3. Sachez profiter des avancées

N’attendez pas les retours dithyrambiques de votre équipe ou de vos supérieurs. Apprenez à observer votre équipe et à constater leurs progrès. S’ils sont fiers d’eux, ils oublieront peut être de vous remercier, mais votre but est atteint.

4. Fréquentez les optimistes

Enfin, dans un groupe humain, il y a toujours ceux qui pensent que tout va mal et ceux qui cherchent à positiver. Fréquentez les seconds dès que l’occasion se présente.

ALBUS CONSEIL