Albus Conseil
 LE MAGAZINE

Pour être un leader, soyez irrationnel !

Pour être un leader, soyez irrationnel !
Pour être un leader, soyez irrationnel !

/Penser le long terme

Au fil des siècles, et surtout des dernières décennies, les outils et les systèmes de performances (stratégique, industrielle, managériale, sociale) se sont accumulés. Cela nous a conduit à construire un fantasme : celui du management parfait, bâti sur l’application des meilleures pratiques du monde, absolument rationnelles. Mais peut-on être un leader, et donc un bon manager, en n’étant que raison ?

La grande complexité du monde des entreprises fait peur. Les paramètres, les changements de contextes brutaux, la hargne concurrentielle font craindre aux managers d’être mis en défaut à tous moments.

Pour contrer ce phénomène, des outils rationnels ont progressivement séduit les managers. Des méthodologies complètes, complexes aussi, pour parer à toutes éventualités, pour se rassurer. 

C’est aussi le syndrome « Sudoku », une approche intellectuelle gratifiante même si elle n’est pas forcément utile.

 

La standardisation des managers

Nous sommes très favorables, très admiratifs parfois, des méthodologies élaborées pour soutenir la performance, la maintenance, la valeur ajoutée dans les entreprises. Le Lean Manufacturing est une mine d’or, le TPM est truffé de trouvailles, etc.

Tous ces outils sont des segments de rationalité pure dont l’efficacité est presque mathématique. Jusque-là, pas de problème si ce n’est que leur adaptation n’est pas toujours réussie et que, de ce fait, l’efficacité n’est pas toujours au rendez-vous.

Les actions sont prévisibles, les messages uniformisés. A l’instar des processus qu’ils entendent régenter, les managers sont standardisés.

Leur accumulation surtout pose problème. Les segments de rationalité recouvrent peu à peu toute la réalité du management. Pour faire les EFA, c’est pensé pour vous. Pour construire vos priorités, c’est pensé pour vous. Pour répondre aux IRP, pour construire son budget, pour communiquer, pour recadrer un collaborateur… ne vous inquiétez pas, c’est pensé pour vous.

Le grand bénéfice, c’est que même un manager faible ou fragilisé réussit. C’est caricatural ? Peut-être un peu, mais admettez que les agendas types, les chantiers Lean et les formations managériales laissent peu de place au hasard ou à l’erreur.

Dans ce système, rien ne rien ne ressemble plus à un manager qu’un autre manager. Les actions sont prévisibles, les messages uniformisés. A l’instar des processus qu’ils entendent régenter, les managers sont standardisés.

 
De manager à leader, le rationnel est un obstacle 

Un bon manager est une personne réfléchie, compréhensible de tous, faisant des choix clairs et éclairés par un raisonnement pertinent. C’est d’ailleurs dans cette optique que ces méthodologies sont construites.

Mais un bon manager, ce n’est pas que ça quand même :

  • C’est le porteur d’une vision fédératrice. Une vision, c’est un choix sur l’avenir qui ne soit pas seulement une déduction des éléments rationnels à disposition mais aussi une prise de position discutable.
  • C’est quelqu’un qui surprend, qui propose des expériences hors du cadre et qui donne à son équipe l’impression de vivre des moments singuliers, que l’on ne vit pas ailleurs.
  • C’est quelqu’un qui sait exprimer et transmettre des émotions, qui se laisse parfois guider par elles plutôt que par la sacrosainte raison. 

Surtout dans nos cultures latines, nous aimons les moments de folie, les actions inattendues et les projets un peu fous. Le prévisible c’est bien, mais rien d’autre que le prévisible c’est ennuyeux. Le rationnel, c’est légitime mais rien d’autre que le rationnel, c’est fade. 

 

Ne pas suivre les moutons sur sa stratégie

Être rationnel dans sa stratégie, c’est ouvrir une chaîne de cigarettes électroniques au moment de son essor, cela fonctionne parfois mais ce n’est pas être leader, mais opportuniste.

Être irrationnel dans sa stratégie, c’est suivre une autre raison que la raison commune. Comme Nick Hayek, président cofondateur de Swatch, qui au plus fort de la crise économique de 2008 a refusé les licenciements économiques à contre-courant de toutes les entreprises cotées. Perdre un peu tout de suite, gagner beaucoup après, marquer de son empreinte une vision et une culture d’entreprise. 5 ans après sa mort, l’esprit « Hayek » est intact dans le Groupe.

  

Incarner ses valeurs par ses choix 

Être rationnel dans ses choix, c’est pour un manager à succès de prendre progressivement de plus en plus de responsabilités, puis de rester à la tête de l’entreprise le plus longtemps possible quand on y est installé.

Être irrationnel dans ses choix, c’est de ne pas faire forcément ce que l’on attend de vous mais ce que vous dictent vos valeurs. Le patron d’Oxylane (Décathlon) a cédé sa place il y a quelques semaines. Pas pour prendre la tête d'un plus gros groupe, ni parce que ça se passait mal, mais pour partir en Chine toujours pour Oxylane. Il n’est pas devenu fou, il a juste suivi ses valeurs. Il a lancé un grand mouvement pour développer le Groupe à l’international, et c’est en faisant cela qu’il sert le mieux son projet. Imaginez le sens, les valeurs, le message pour les collaborateurs du Groupe. Admettons que cette décision est peut-être logique, mais sûrement pas rationnelle à 100%.


Sortir du « que rationnel », c’est envoyer un message à votre équipe, c’est incarner les valeurs, le projet que vous voulez mettre en place. Et vous, avez-vous fait un acte délibérément irrationnel ? Et le prochain, c’est quand ?

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